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 [RP] Des Profondeurs, nous crions

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Amaélis Eleicúran
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MessageSujet: [RP] Des Profondeurs, nous crions   [RP] Des Profondeurs, nous crions Icon_minitimeLun 25 Fév 2019 - 15:36


Zakerielku 918.

Une fois de plus, ses pieds foulaient le sol profane de la Lande d’Eru – mais, cette fois, aucune ombre n’était dissimulée parmi les fumées, aucune silhouette menaçante ne guettait dans les interstices des vieux murs, aucune voix ne venait caresser sa joue en même temps que les vapeurs vénéneuses. Flocon de cendre au milieu de ses frères éparpillés aux quatre vents, Amaélis Yodera était venue ici avec l’intention de raviver les braises d’un passé étouffé par le silence et le temps. Ses cheveux voletaient devant son visage, et, d’une main, elle tenait fermement l’attache de sa cape. Dans ses yeux couleur d’acier et de poussière, étranges reflets du ciel voilé de la Lande, l’ombre s’étalait et ternissait l’éclat de la peur. Le silence était d’une épaisseur inquiétante – chacun de ses pas, alors qu’elle avançait entre les ruines, la rapprochait de l’horreur, de sa source.

Était-ce ironique que son futur repose au fin fond de ce lieu banni du Destin ? Était-ce cohérent de venir chercher sa renaissance là où ne sévissaient que la Mort et l’Oubli ? Il y avait bien longtemps que la Neishaane ne s’embarrassait plus de telles questions. Elle n’était pas assez stupide, de toute manière, pour croire qu’aucun sacrifice ne lui serait demandé ; avait intimement conscience qu’elle se damnerait, sans possibilité de retour en arrière. Amaélis s’en fichait. Il y avait bien longtemps, également, qu’elle avait renoncé à l’Espoir. La masse de l’Airain Ithildin filait au-dessus d’elle, veillant à ce qu’aucune créature n’ait senti la chaleur des vivants dans ce désert tout de froid et d’os. Sa colère était comme un blizzard incessant, qui fouettait et écorchait la chair même des rêves – comme les racines d’un arbre aussi vieux que le monde, allant puiser au plus profond de la terre. Malheureusement pour la Dragonne, sa Liée n’avait que trop peu de rêves, et son cœur desséché n’offrait rien d’autre qu’une poudre stérile en guise de terreau.

Les formes déchiquetées des vestiges, griffues et biscornues, étendaient leurs doigts vers une chape terne. La lumière semblait anormalement obscure, revêtant une palette infinie de gris – ardoise, verdâtre, brun. Une pellicule opaque avait tout recouvert, et le paysage se révélait en nuances surannées, prisonnier d’une dégénérescence et d’une décomposition à jamais inachevées. Quelque chose dans ce spectacle forçait le cœur à se tordre et les sentiments à osciller entre pitié et terreur. Amaélis était familière de l’agonie, croisait le reflet de son propre regard parmi les débris. Les moisissures, le pourrissement, la rouille, l’érosion, l’acide – toutes ces choses qui étaient devenues les symptômes de sa chute. Elle sentit ses jambes trembler, soudain submergée par l’évidence de sa misère. Depuis combien de temps… ? Depuis combien de temps s’était-elle abandonnée ? Comment avait-elle pu occulter l’ampleur de sa déchéance ? Et quelle malédiction, à l’image de ce Màr, retenait encore son existence, effacée, dans ce vaste monde où elle n’était rien de plus qu’une étrangère ? Comme prise de panique, elle se laissa tomber à genoux pour fouiller sa besace, et ne relâcha le souffle contenu dans ses poumons que quand ses doigts se refermèrent autour d’une petite bourse en cuir.

° Es-tu sûre, Amaélis ? Même les Dieux ignorent quels monstres se recueillent dans le silence de ces tombes. °

La Neishaane ne répondit pas, persuadée qu’elle avait sans doute imaginé la voix d’Ithildin – elle le faisait souvent, ces derniers temps. Elle ne supportait plus son mutisme. La présence autrefois rassurante de son Âme Sœur avait rejoint l’assemblée des chimères, toujours en bordure de son esprit. Les émanations toxiques se montreraient certainement néfastes, une fois sa raison évanouie, mais Amaélis avait besoin de ne plus penser – alors, elle ferma les paupières.

~°~

[RP] Des Profondeurs, nous crions Ithild11

Un trou béant se trouvait à l’emplacement de ce qui avait dû être autrefois une large porte, malgré tout trop étroite pour permettre l’entrée d’un Dragon. Sans se soucier de l’haleine glaciale et lourde qui en sortait ni des ténèbres à l’intérieur, Amaélis pénétra dans la galerie, prenant appui sur la roche qui s’effritait sous ses doigts. Ithildin, sous forme humaine, s’engagea à sa suite, le visage résolument fermé. Il lui tardait de pouvoir étendre ses ailes, de préférence partout ailleurs qu’au sein de ce Màr Maudit. La Neishaane se déplaçait avec une lenteur effarante, luttant pour garder les yeux ouverts et trébuchant contre les pierres qui jonchaient le chemin. Le couloir était à moitié effondré, laissant filtrer par endroits quelques maigres rayons de lumière où dansaient des myriades de particules en suspension. Grimhilde avait montré à sa descendante, en rêve, la demeure de leur famille et les vastes laboratoires enfouis sous la terre – mais n’avait indiqué aucune direction.

« Le Màr dont le nom est maudit te reconnaîtra comme sa fille, aussi affronte ses monstres sans crainte. » lui avait simplement assuré l’Ancêtre. Du plat de la main, Amaélis suivait les gravures vieillies qui couraient le long du mur, en appréciait la rugosité et les significations abstraites. Ainsi, elle remontait le temps, et le remonterait encore, jusqu’à l’origine. Elle ressentait une certaine exaltation à cette pensée, ce même désir de répondre à un appel ancestral qui avait animé son cœur avant l’Empreinte.

Derrière elle, à distance respectable, l’Airain avançait silencieusement, ses pupilles luisant de l’éclat du sang sous les mèches d’ardoise. Elle percevait évidemment les pensées désordonnées de sa Liée, de plus en plus délirantes à mesure que les jours s’écoulaient – et ce depuis le début de l’été. L’esprit d’Amaélis n’avait fait que décroître et se flétrir, l’obscurité densifiée par les brumes dont elle s’enveloppait avec un acharnement maladif, affligeant. La Dragonne avait longtemps cru que son devoir était accompli : Amaélis n’était plus que l’ombre d’elle-même, et quand les cauchemars devenaient trop horribles, c’était son nom qu’elle appelait – son absence qu’elle abhorrait. Pourtant, un cœur étranger semblait s’être mis à battre, quelque part dans les tréfonds de sa coquille vide, et des voix méconnues résonnaient comme entre des falaises lointaines, portées par un vent séculaire.

La Dragonne avait vu le visage de l’Ancêtre, avait reconnu l’aura de désolation qui voilait sa silhouette diaphane – mais, aussi, il y avait eu les effluves d’une puissance indicible et obscure, bien trop attirantes, qui avaient excité son âme corrompue. Futile était la quête de la Neishaane, et siennes seraient les connaissances interdites qui sommeillaient sous la terre – car seule une Enfant du Chaos pourrait les exhumer sans sombrer dans la folie la plus noire.


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MessageSujet: Re: [RP] Des Profondeurs, nous crions   [RP] Des Profondeurs, nous crions Icon_minitimeLun 25 Fév 2019 - 15:37

[RP] Des Profondeurs, nous crions Mora_del_Caelan_Chignon_Tol_Orea   [RP] Des Profondeurs, nous crions Nymelith_moradelcaelan_tolorea
Mora del Caelan & La Bleue Nymelith
Shaman du Màr Tàralöm

Theme Song :
Dargaard – The Infinite

Dans le silence profond qui seul peut régner dans les profondeurs de la terre, la Shaman, le visage concentré et les yeux clos, méditait. Ses mains aux ongles soignés effleuraient lentement la paroi de pierre ouvragée, tentant d'en comprendre la magie, d'en absorber la signification profonde. Cela faisait des années qu'elle connaissait l'existence de cette chambre secrète, scellée par un puissant sortilège, et qu'elle tentait, inlassablement, d'en percer les mystères. Elle avait consulté une multitude de registres, et de traités magiques. Pourquoi ne parvenait-elle pas à l'ouvrir ? Comment avait-elle pu résister à l'épreuve du temps ? Quel était le trésor qu'elle gardait jalousement ? Tout juste pouvait-elle dire que le sceau avait été mis en place à une époque proche de la Malédiction. Et pourtant elle n'en avait trouvé nulle mention dans le journal de son ancêtre ...

La magie du Kaerl était encore étrangement vivace dans cette partie du Màr Dìnen. Les bandes de jizdine, ponctuant la longue fresque sur le mur du couloir, éclairaient d'une lueur froide, tout juste suffisante, les runes gravées qui formaient le sceau, disposées en cercles concentriques s'imbriquant les uns dans les autres. Bien que proche du Valheru, le langage dans lequel elles étaient écrites lui était inconnu. Après une étude approfondie, elle et Nymelith avaient fini par conclure qu'il devait s'agir de Draconique, une langue sacrée très peu usitée, et aujourd'hui connue seulement de quelques dragons.

En tant que noble descendante d'une très ancienne famille du Kaerl Maudit, l'Ondine sentait sa curiosité et pire encore, sa fierté, piquées au vif par ce problème qui persistait à lui résister. D'autant plus qu'Aubiade était invariablement restée silencieuse à chaque fois qu'elle avait tenté de l'interroger sur le sujet. La Gardienne détournait le regard, les yeux hantés et les lèvres pincées, et lui refusait toute réponse. Mora savait, que dans ces moments là, il était inutile d'insister. Et pourtant … N'avait-elle pas prouvé sa valeur, sa loyauté envers le Màr à de multiples reprises ? Ne s'était-elle pas montrée digne de confiance ?

***  
Sur sa poitrine, niché entre ses seins, son médaillon s'échauffa soudain, et la turquoise qui le constituait s'illumina d'une lueur bleutée, palpitant lentement, tel un cœur vivant.

Ses yeux pâles s'ouvrirent lentement. Sortie de ses réflexions, sourcils froncés, Mora recouvrit la pierre d'une main, plongeant dans son esprit à la recherche de la source de l'alarme. Un intrus venait de franchir la frontière magique qu'elle avait délimité autour du Kaerl. Son irritation, déjà bien alimentée par la frustration qu'elle ressentait, grimpa encore d'un cran.
Ces derniers temps, la Lande d'Eru et les ruines qu'il abritait étaient devenus une destination bien trop en vogue à son goût. Heureusement le Màr Sanglant portait bien son surnom, et savait la plupart du temps se prémunir contre les curieux, et ceux qui parvenaient à traverser la Lande devaient encore faire face aux Spectres, devenus particulièrement méfiants et instables depuis l'obéissance forcée que Drazahir leur avait imposé.

A ce souvenir, les poings de l'Ondine se serrèrent imperceptiblement, ses ongles rentrant dans ses paumes. Cet Ardent déchu avait littéralement souillé le Kaerl par son immonde magie, pillant sa bibliothèque à la recherche de savoirs interdits, semant le chaos sur la Terre de l'Aube, allant même enchaîner la Gardienne dans une tentative de lui arracher ses secrets. Au moins le nécromancien n'avait-il pas réussi non plus à ouvrir la chambre secrète. Aubiade lui avait d'ailleurs confirmé, c'était à peine s'il s'y était intéressé, préférant des pouvoirs accessibles plus directement.

Dès que la disparition de l'Ombremage avait été confirmée, la Shaman avait donc commencé à mettre au point des Gardes magiques pour éviter, sinon être au moins prévenue, de telles intrusions dans l'avenir. Hors de question de laisser quelqu'un d'autre se mettre en travers de son chemin. Le temps de mettre ses affaires en ordre, et de donner ses instructions à Saëren, son assistante – une elfe possédant une sensibilité exceptionnelle à la magie, tout en étant bien fort commodément muette – et elle s'envolait pour la Lande d'Eru et le Màr Dìnen. Saëren lui étant totalement vouée corps et âme, elle pouvait quitter le Màr Tàralöm sans crainte.
Et depuis lors, les Lunes passant, elle avait fait de nombreux allers et retours entre le Kaerl Ardent et la Lande, compulsant les données, testant de nouveaux artefacts, sans en être aucunement inquiétée. Tout se déroulait à merveille, si on exceptait ce mystère qui lui résistait encore et toujours.

Elle ne pensait cependant pas pouvoir vérifier l'efficacité de son sortilège de garde si rapidement. Une pointe d'impatience vint lézarder implacablement son mur de calme, et son esprit alla caresser celui de sa Liée. Nymelith se tenait perchée, telle une gargouille sentinelle, sur une des plus hautes tours du Kaerl en ruine. Bien que soutenant son âme sœur dans tout ce qu'impliquait cette double vie de descendante du Màr Dìnen, la Bleue se sentait toujours déplacée et malvenue dans les profondeurs obscures du Kaerl Silencieux. Un jour peut-être, lorsque sa grandeur serait restaurée, et ses étoiles d'argent rallumées, alors pourrait-elle admirer le palais souterrain dans sa juste beauté, comme le faisait Mora.

Toujours étroitement en contact avec son Ondine, la dragonne aux écailles de nuit, elle aussi, avait senti la perturbation du champ magique provoquée par l'intrus.

*Nym', que vois-tu ?*

S'étirant avec langueur, les griffes solidement arrimées dans la pierre, la dragonne allongea le cou, ses iris rougeoyant en écho à la froide colère de sa Liée. Son esprit enlaça possessivement celui de Mora, et elle partagea avec elle ce que ses sens percevaient.
Là-bas, juste avant l'arche d'entrée au Kaerl, parmi les ruines de l'ancien portail d'entrée du Màr, une petite silhouette couronnée d'une crinière blanche venait de s'arrêter, semblant hésitante. Ce n'était guère plus qu'une adolescente qui prétendait venir braver les dangers de cette terre maudite. Pourtant, la manière dont la brume venait s'enrouler autour de ses jambes frêles l'intriguait. La magie sauvage propre à ces lieux réagissait de bien étrange manière à son contact, comme si elle la reconnaissait comme sienne, presque comme si ... Elle l'accueillait. Ses sourcils se froncèrent.

**C'est une Douée, mais je ne parviens pas à déterminer de quel Kaerl elle provient ; elle porte la marque de la magie du Màr Luimë, mais son cœur et son âme semblent hésitants quant à leur appartenance ...**

D'allégeance indéterminée, alors. Une déchue, rejetée par son Ordre ? Que venait-elle faire ici ? Etrange endroit pour venir y chercher refuge. De surcroît, point important, non loin derrière elle, se tenait ce qui était certainement une dragonne sous sa forme humanoïde. Tout ce qu'elle percevait d'elle était puissance et férocité. Une Reine, peut-être ? Non, il était peu probable que le Kaerl Englouti décide d'envoyer en exil une de ses Argentées ... Alors quoi ?

**Elle pourrait être plus qu'elle ne paraît. Il ne serait pas sage de la laisser vagabonder à son gré ici ...**

Mora resta silencieuse quelques instants, acceptant sans mot dire le conseil de sa Liée. Ses recherches attendraient et cette chambre ne risquait pas de s'ouvrir seule en son absence. De plus, elle ne tolérait pas que d'autres marchent sans sa permission sur ce qu'elle considérait comme son territoire réservé.

*Ne la quitte pas des yeux avant que je ne l'ai rejointe.*

Sa main fine s'éleva pour aller effleurer la bande de jizdine, qui s'éveilla à son contact et répandit sa lueur froide dans le couloir. Elle connaissait un passage secret qui l'amènerait en quelques minutes seulement à l'endroit qu'elle souhaitait atteindre ; elle attendrait l'intruse un peu en amont du point où Nymelith l'avait repérée. Son jugement serait sans appel.

***  

Et, peu après, sortant sans hâte de l'ombre du pilier où elle se tenait, Mora s'avança effectivement à la rencontre de la Neishaane, sa robe sombre bruissant dans le silence soudain épais qui régnait à travers le Kaerl, et sa longue chevelure de nuit cascadant librement dans son dos. Ses prunelles pâles détaillèrent la silhouette débraillée de l'intruse, passant au crible tous les détails qui lui sautaient aux yeux, et ceux plus imperceptibles, qui résonnaient en écho avec sa magie. Un examen des plus ... déplaisants.

Avec toute la froideur qui la caractérisait, toujours sans mot dire, sa main alla s'emparer du menton de la jeune fille, redressant sa tête avec fermeté pour mieux l'observer. Nymelith, qui s'était discrètement rapprochée dans les hauteurs en ruine, siffla doucement un avertissement à travers son esprit, inquiète que sa Liée puisse se mettre en danger. Au moindre signe d'agressivité de l'autre dragonne, elle passerait aussitôt à l'attaque.

Sans relâcher sa prise, l'Ondine fixa alors ses iris d'améthyste dans celles, couleur d'un ciel d'orage, de la frêle Neishaane. A travers le Lien, elle sentit la Bleue se tendre comme un arc, là-haut sur sa tour, prête à intervenir à tout moment. L'esprit de l'intruse lui apparaissait très instable, et se présentait surtout hermétiquement barricadé contre tout contact mental, étroitement protégé par celui de cette étrange dragonne qui l'accompagnait. Mora ne pourrait pas la manipuler, son pouvoir ne lui servirait à rien. Dommage. Laissant lentement sa main retomber à ses côtés, elle lui lança :

« Qui es-tu et pourquoi viens-tu troubler le repos du Màr Maudit ? Ne sais-tu pas que certaines choses ne se réveillent pas impunément ? »

Impassible, le visage de l'Ondine ne reflétait que la froideur du marbre, offrant un contraste saisissant avec sa voix aux inflexions hautaines et autoritaires.


L'on rencontre souvent sa Destinée
Par les chemins que l'on prend
Pour l'éviter
***

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MessageSujet: Re: [RP] Des Profondeurs, nous crions   [RP] Des Profondeurs, nous crions Icon_minitimeLun 25 Fév 2019 - 15:41

Comment prétendre trouver son chemin dans les ruines ? Amaélis ne prêtait peu ou pas attention aux couloirs, aux escaliers qui l’amenaient toujours plus profondément vers la source des mystères, là où pulsait une magie honnie et ancienne, se répandant aussi bien dans la pierre que dans les âmes vagabondes qui erraient inconsciemment le long des corridors détruits. Ithildin suivait toujours, avec un mélange de curiosité et de colère, l’écho martial de ses bottes résonnant à l’infini contre les murs. À travers les souvenirs épars de la Neishaane, quelques images luisaient de l’éclat particulier des rêves, et leur lumière, frémissante, semblait battre au rythme d’un cœur fatigué. Elles devenaient plus nettes quand Amaélis s’arrêtait pour mieux les contempler, la tête légèrement inclinée vers l’arrière et les paupières à demi closes, évoquant un félin des neiges sur les traces de sa prochaine proie. La Dragonne n’irait pas jusqu’à se fier aux intuitions de sa Liée, mais elle n’était pas stupide au point d’ignorer son affinité avec la Lande – dont elle se révélait bien plus proche que l’Airain le serait jamais. Et, en dépit de toute sa fierté, elle ne refuserait pas une occasion d’accroître sa puissance sous prétexte qu’elle n’acceptait pas ce qui venait d’Amaélis. Il y avait trop à gagner ; rien à perdre, puisque la raison de la Neishaane s’était évanouie depuis longtemps.

Les routes se succédaient, identiques. Les deux Âmes Sœurs avaient retrouvé le ciel opaque et menaçant, les brumes comme d’interminables silhouettes damnées qui se faufilaient entre les arches et les colonnes, mains tendues vers la chaleur des vivants et bouche ouverte sur un cri qui demeurait inaudible pour les mortels. Amaélis les laissait glisser entre ses doigts maigres, incapable de les retenir, et elle appréciait de pouvoir les déchirer en lambeaux grisâtres. Tout cela n’était qu’une illusion de plus. Quel pouvoir avaient les Spectres sur sa chair ? Ils ne faisaient que l’enlacer, devaient se délecter de la caresse d’une peau tiède sous leurs effluves glacées. Elle songea un instant à se noyer dans le brouillard – comme lorsqu’elle s’immergeait entièrement dans l’eau, comme quand elle chutait et que son dos heurtait le sol, une éternité plus tard. Comme elle aurait aimé tomber depuis le haut de la Pointe d’Ombrelune, également, pour aller embrasser l’écume. La Neishaane eut un vain éclat de rire, sentant l’esprit d’Ithildin s’enflammer à de telles pensées, et elle tourbillonna allègrement parmi les fumées.

° J’ai trouvé pire châtiment que la Mort grâce à toi, Dragonne. Aie confiance, je réprouve assez mon existence pour pouvoir accepter la tienne. C’est là ma punition. °
° Je suis ton seul crime, comment pourrais-je aussi être ta peine ? °
° Je ne sais pas, mais nous nous vengerons des Dieux qui nous ont enchaînées l’une à l’autre, je t’en fais la promesse ! °[/i] répliqua la Maîtresse déchue, virevoltant toujours, un sourire étrange accroché à ses lèvres autrefois d'un rose soutenu, désormais pâles et gercées.

Ithildin rattrapa sa Liée en quelques pas rapides et l’empoigna par l’épaule, suffisamment fort pour la forcer à se tourner. Confrontée aux prunelles sanglantes, la Neishaane opposa à la Dragonne un air de défi, ses yeux de cendre parcourus d’éclairs froids et féroces.

° Je t’interdis de parler en mon nom, tu m’entends ? J’ignore à quoi tu joues, Neishaane, mais n’espère pas une seule seconde que je te laisserai gagner. °
° Sinon quoi ? Tu feras la gueule ? Lâche-moi ! °

Amaélis tenta de se soustraire à l’étreinte de l’Airain, piteusement et sans succès. De sa main libre, Ithildin emprisonna les poignets fins de son Âme Sœur, les maintenant en place avec fermeté.

° Depuis quand cherches-tu à t’enfuir ? Depuis quand cherches-tu à te rebeller ? Dis-moi ! Depuis quand ourdis-tu tes plans contre moi ? Que t’ai-je jamais fait pour que tu me haïsses ainsi, Amaélis ? °

Si la Lande et son Kaerl Maudit avaient la réputation d’un véritable enfer, si certains craignaient ce qui les attendait dans le Royaume d’Isashani, alors ils n’avaient jamais croisé le regard de l’Airain. À bout de souffle et le cœur battant à tout rompre, la Neishaane parvint finalement à se dégager d’un mouvement brusque et se reçut, les jambes tremblantes, contre l’un des murs encore debout. Elle passa une main sur son visage couvert de sueur avant de reprendre son chemin, ignorant la fureur de la Dragonne dans son dos.

La vision brouillée par des larmes malvenues, Amaélis avançait tout en se mordant les lèvres, prenant appui sur tout ce qui se trouvait à sa portée. Elle ne comprenait pas le goût de culpabilité, persistant, qui conférait à sa propre salive la texture de la poussière – ni la douleur sourde dans ses poumons quand elle inspirait l’air épais du Màr. Les paroles d’Ithildin s’agitaient sous son crâne, lourdes de sens et porteuses d’une remise en question qu’elle n’était pas prête à accueillir. Le vernis de ses mensonges craquait doucement, et alors seraient révélées la corruption de l’âme, les ténèbres grouillantes qu’elle se cachait depuis toujours, et... Non, non. Elle était ainsi parce que le monde avait été cruel envers elle. Elle était ainsi parce qu’elle avait été trahie, abandonnée, rejetée. Elle était ainsi parce qu’Ithildin avait joué avec son esprit, parce qu’elle avait détruit sa liberté, parce qu’elle l’avait poussée dans ses retranchements. Il n’y avait rien dont elle fût coupable. Quiconque pensait le contraire ne cherchait sûrement qu’à la briser un peu plus. Était-il trop tôt pour une nouvelle prise ? L’agitation, la peur menaçaient de lui faire perdre pied. Son estomac, malmené par le poison ingéré plus tôt, la brûlait férocement et elle se recroquevilla, pliée en deux, pour cracher une bile âcre.

Tu es minable.

La Neishaane se fit violence pour respirer convenablement, le front plaqué contre la pierre froide d’un pilier, en appréciant le contact presque apaisant. Tout allait bien ; elle n’avait rien à craindre. Ce n’était qu’une crise passagère. Elle serra les poings, martelant faiblement la colonne afin d’affirmer sa détermination. Amaélis se redressa enfin, chassant les mèches d’albâtre collées à son visage par la transpiration et essuyant sa bouche poisseuse, puis croisa les iris rubescents d’Ithildin.

Va te faire voir.

La Dragonne eut un éclat de rire sec, levant les bras comme en signe de reddition, minaudant d'un air faussement effrayé. Par Kaziel, n’agissait-elle que dans le dessein de l’humilier ? Il leur fallait encore chercher, pourtant, et retomber dans ce silence et cette indifférence mille fois préférables aux disputes interminables. Amaélis avait tout son temps pour régler ses comptes.

~°~

Elles ne trouvaient plus d’entrée menant aux souterrains. Il y avait bien eu ces couloirs aux statues démembrées, et ces escaliers qui semblaient s’enfoncer dans les profondeurs – mais le chemin était bloqué par un éboulis de rocher, et les deux Âmes Sœurs avaient dû faire demi-tour. Les doigts crispés autour de l’attache de sa cape, Amaélis promenait autour d’elle un regard de moins en moins amène. Sans doute aurait-elle maudit son ancêtre, si celle-ci n’avait pas déjà fait partie d’un Ordre puni par les Dieux. Et ne reconnaissait-elle pas cette place ? cette allée ? Elle commençait à en avoir le vertige, et des murmures coulaient entre les pavés, des silhouettes se dessinaient dans le lointain, parmi les brumes. Les Spectres avaient sans doute remarqué la présence des intrus. L’une de ces formes éthérées se découpa contre la grisaille environnante, drapée de nuit et étrangement pâle. La Neishaane battit des cils. Est-ce que l’apparition venait à sa rencontre ?

Tétanisée, elle l’observa se rapprocher, son visage faisant reculer les ombres par sa blancheur. Derrière elle, Ithildin avait écarquillé les yeux, tous ses muscles tendus, prêts à frapper. Amaélis sentit son souffle lui échapper quand une main tout à fait tangible vint relever son menton. Par quel… ? Elle fronça les sourcils et fit un pas en arrière dès qu’elle en eut la possibilité, sans quitter des yeux la Dame. Celle-ci lui inspirait un sentiment mitigé, mélange d’attirance indicible et de dégoût viscéral. La Neishaane ne pouvait pas se tromper : il flottait autour d’elle l’odeur distincte de la Magie, de cette même Magie qui liait l’âme de la Maîtresse Neutre au Màr Maudit. Sa voix, aussi, avait quelque chose d’antique, une autorité née d’une sagesse allant au-delà des valeurs des Ordres.

C’est le Kaerl qui m’a réveillée. Moi, je ne trouble rien ni personne, je ne fais que répondre à son appel.

° Ça suffit ! Ne lui en dis pas plus, ce n’est pas un Spectre. Sa Liée n’est pas loin, je la sens. Elles viennent du Kaerl Ardent. °

Devait-elle s’en inquiéter ? Amaélis se mordit la lèvre pour ravaler son arrogance, décuplée dès lors qu’elle se trouvait dans la Lande.

Amaélis Yodera, Liée à l’Airain Ithildin. Inutile de vous inquiéter pour moi, les Spectres commencent à me connaître, on a passé de charmants moments ensemble.

Et sans plus d’explications, elle s’apprêta à continuer sa route. Qu’une Ardente hante les lieux la laissait indifférente et, malgré son apparente affinité avec le Kaerl sans nom, Amaélis avait des choses plus importantes en tête.

° Tu comptes t’en aller comme ça ? Et si elles nous suivent ? Et si elles tentent de voler ton héritage ? °
° Ne sois pas stupide, Dragonne. Personne n’attendrait ici qu’on vienne lui indiquer le chemin vers les secrets des Maudits. Elle poursuit vraisemblablement sa propre quête. °
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Chrysolite – City of the Fallen

Une main languide posée sur sa hanche, dominant de sa haute taille la jeune Neishaane effarouchée, Mora étudiait ses réactions, une moue hautaine plaquée sur ses lèvres charnues. Tout en elle, dans cette froide neutralité méprisante reflétait le sentiment de supériorité, voire de dégoût qu'elle ressentait face à l'allure débraillée de sa vis à vis. Elle se gardait bien pour autant d'oublier la présence de l'étrange dragonne, qui restait silencieuse, en arrière plan, mais elle savait que Nymelith était là pour veiller à ce qu'elle n'intervienne pas dans sa ''conversation'' avec sa Liée. Elle pouvait donc, en toute confiance, mobiliser l'ensemble de ses sens, physiques et magiques, sur l'intruse.

Et les prunelles d'améthyste de l'Ondine ne manquèrent pas de s'étrécir face à la réponse par trop nonchalante que la Neishaane lui apporta. Appelée par la Lande, hein ? Elle voulait bien admettre que cette révélation piquait sa curiosité. Le mot était par ailleurs trop faible pour décrire l'enfièvrement qui la parcourut lorsque le mot « airain » s'imprima dans son esprit. Une Airain ! Combien aurait-elle donné pour pouvoir en étudier un spécimen, en décrypter tous les mystères, en compulser les moindres détails ? Obtenir de telles connaissances aurait été d'une valeur inestimable ...

Un rire à la fois incrédule et ravi lui échappa, chantant dans l'air poisseux de la Lande, avant que Mora, comme dans un miroir déformé, ne se morde légèrement la lèvre inférieure pour se contenir, seul signe extérieur des émotions qui s'agitaient en elle. Les deux dragons bâtards, engendrés par les Deux Lunes, qui étaient parvenus au Màr Tàralöm, n'étaient pas restés assez longtemps en vie pour qu'elle puisse s'insinuer dans la confiance de leurs Liées respectives … Une demi folle et l'ex Dame du Kaerl. L'une portée disparue et l'autre sacrifiée dans l'accomplissement vain d'une prophétie de gloire. Un gâchis des plus écœurant ... Et voilà que le capricieux destin lui servait un nouvel Airain sur un plateau d'argent !

Plus pragmatique que son âme-soeur, aussi silencieuse et délicate qu'une chauve-souris dans l'obscurité, Nymelith amorça soudain un atterrissage en douceur derrière l'Ondine, soulevant un léger tourbillon de poussière. Contrairement à Mora, c'était une vive méfiance qui l'avait saisie, associée à une certaine angoisse, lorsque l'identité de l'Airain avait été révélée. Elle comprenait à présent les informations contradictoires qu'elle avait perçu en sondant l'aura des deux Englouties. Née au cœur de la Sylve de Nòrui, l'Airain était une enfant du Chaos, unique, libre de toute imprégnation due à la magie des Kaerls, et par conséquent, imprévisible. Ainsi placée, la Bleue annonçait, fermement et sans un mot, que le duo d'intruses ne continuerait pas librement sa route tant que sa Liée ne l'aurait pas décidé.

Percevant les pensées tourmentées de sa dragonne, Mora posa une main rassurante sur son cou écailleux, en savourant le contact frais et apaisant, gardant le silence suite à la déclaration de la Neishaane, tandis que la brume continuait de s'enrouler étroitement autour de leurs chevilles. La magie pervertie présente en ces lieux réagissait clairement à sa présence, et l'attitude de la jeune fille semblait indiquer qu'elle n'en était pas à sa première visite des ruines du Kaerl Maudit. Il était absolument hors de question de la laisser vagabonder à son gré ici. Et si elle ne pouvait pas la contrôler ...

*Qu'en penses-tu, Nym' ? Pourrait-elle être une descendante inconnue du Màr Dìnen ? Et si tel est le cas, a-t-elle seulement connaissance de son héritage ?*
**Même si elle le savait, révélerait-elle un tel secret à une inconnue ? Il va falloir que tu la tiennes à l'oeil jusqu'à en savoir plus sur ses motivations. De plus, son Airain ne m'inspire pas confiance.**

Bras étroitement croisés sous sa poitrine, la tête penchée sur le côté, Mora soupira et secoua la tête d'un air faussement navré, avant qu'un nouveau sourire glacé ne vienne jouer sur ses lèvres. Oui, l'Airain l'intriguait fortement. Cependant, il était également de son devoir de protéger le Màr Etoilé, en plus d'empêcher qui que ce soit d'empiéter impunément sur son territoire. A son côté, la Bleue s'allongea calmement, étirant ses ailes avant de les replier soigneusement sur ses flancs, observant le couple de Liées d'un oeil scrutateur, le bout de la queue agité de légers mouvements.

« Je crains hélas de ne pas pouvoir te laisser passer ainsi, Amaélis, toute appelée que tu te prétendes par le Kaerl. Et loin de moi l'idée de me soucier de ton bien être, le fait est que je n'apprécie guère les fouineurs. »

Prenant une courte inspiration pour calmer son irritation, l'Ondine décida de la tester prudemment. Une lueur étrange et dérangeante s'alluma dans ses iris pâles, lorsqu'elle les fixa une nouvelle fois sur celles, cendreuses, et mangées par la folie, de la jeune Neishaane, après un bref regard sur l'Airain au visage fermé. Si cette petite était effectivement ce qu'elle paraissait être, comment réagirait-elle à ses sous-entendus ?

« De par mes origines, sache-le, la conservation de tout ce qui repose ici me revient de droit. Aussi vais-je te reposer une dernière fois ma question, jeune fille. Qui es-tu, et que viens-tu chercher au Kaerl Maudit ? »

Sa voix profonde, chaude et caressante comme du velours, en totale opposition avec son beau visage à la froideur marmoréenne, n'en restait pas moins chargée d'une aura de danger nettement perceptible. La violence inutile n'apportait jamais rien de bon, surtout avec un esprit aussi instable, et la menace latente que représentait l'Airain. Il allait lui falloir la manipuler avec doigté et subtilité jusqu'à ce qu'elle obtienne ce qu'elle voulait savoir.
Et, si nécessaire, bien qu'elle jugerait cela regrettable, le Kaerl Maudit et ses Spectres se chargeraient fort bien de l'aider à faire disparaître à jamais les intruses. Dans le silence de son âme, elle sentit Nymelith acquiescer et se rapprocher de son Ondine dans une attitude protectrice, en attente de ce qui pourrait se produire.


L'on rencontre souvent sa Destinée
Par les chemins que l'on prend
Pour l'éviter
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MessageSujet: Re: [RP] Des Profondeurs, nous crions   [RP] Des Profondeurs, nous crions Icon_minitimeLun 25 Fév 2019 - 15:44

Évidemment, l’étrange Dame avait préféré la retenir, plutôt que de simplement s’écarter et laisser la Neishaane continuer sa route. Les lèvres pincées, Amaélis accueillit la Bleue avec un regard où les cendres commençaient à se muer en braises renaissantes. Derrière elle, Ithildin, qui arborait toujours sa forme humaine, toisa la Dragonne, un air de rancœur déformant ses traits quand l’Ondine passa une main délicate le long des écailles bleu nuit. Si la jeune Maîtresse avait senti la jalousie de son Âme Sœur, elle ne s’en montra pas touchée, et préféra croiser les bras autour de son ventre encore douloureux, ses yeux comme deux lances d’acier plantées dans la chair pâle de sa vis-à-vis. Elle n’appréciait ni son ton, ni le mépris latent dont celle-ci faisait preuve. Elle avait la désagréable impression d’être traitée à la manière d’une enfant, et cela lui rappelait trop l’Airain pour qu’elle y reste indifférente. Quand est-ce que cela s’arrêterait enfin ? La colère montait en elle, oppressant sa poitrine ; une marée noire qui portait son caractère au sommet de l’aigreur. Dans son dos, les iris d’Ithildin creusaient des trous béants tandis que la Dragonne attendait, patiemment, le moment où sa Liée s’abandonnerait aux flammes.

Mue par un féroce sentiment d’invincibilité, probablement dû à l’influence qu’avait la Lande sur ses humeurs, Amaélis fit écho au rire de la Dame, sans une once d’humour dans ses vocalises ciselées comme la glace.

Écoute, je sais pas pour qui tu te prends, mais tu peux laisser tomber. Tu as l’air aussi tarée que moi, ça risque pas de m’impressionner. Ce Kaerl est mort, personne ne veille sur lui, et personne n’a de devoir sacré envers lui. Elle décroisa les bras, fronçant légèrement les sourcils. Je m’appelle Amaélis Yodera, Liée à l’Airain Ithildin, et ce que je suis venue chercher au Kaerl Maudit ne regarde que moi.

Elle scruta le visage étroit de l’Ondine, et plus son regard glissait sur elle, plus la moue d’irritation qui avait éclos sur ses lèvres se faisait distincte. Pourquoi fallait-il toujours que le Destin dresse des obstacles sur sa route, dès lors qu’elle parvenait à rassembler suffisamment de courage pour seulement tenter de se battre ? L’Airain gloussa dans un coin de son esprit, et Amaélis fit volte-face, prête à l’empoigner par le col. Les lueurs crépusculaires dans les yeux de la Dragonne l’empêchèrent d’aller plus loin, et elle s’affaissa, les joues rougies par l’humiliation et un désespoir immense étreignant son cœur. Ithildin se lécha les lèvres, une mimique prédatrice plaquée sur ses traits arrondis.

° Tu m’épates, ma Liée. Je ne sais pas comment une telle chose est possible, mais les faits sont là. À chaque fois que tu essaies de paraître sûre de toi, tu me sembles un peu plus pathétique. Vraiment, tu es une erreur de la nature. Une sorte de tragédie… Et je reconnais qu’il y a un peu de poésie, là-dedans. Tout ce que tu entreprends finit par t’échapper, tout ce…°

Je t’ai demandé de la fermer ! La fermer, tu comprends ça ?

L’Airain afficha un air blessé, même si la Neishaane pouvait voir qu’elle souriait, savourant le spectacle. Amaélis ne faisait même plus la différence entre ses pensées et le reste. Sans avoir le temps de comprendre ce qui était en train de se produire, elle observa Ithildin s’approcher timidement pour étreindre son épaule, dans un geste d’une douceur telle qu’elle la laissa nauséeuse – et la Neishaane, à bout de forces, ne put que s’appuyer contre la silhouette rassurante, larmes et sueur mêlées dégoulinant sur son visage fatigué.

Je vous prie d’excuser l’attitude ma Liée. Même si elle estime avoir sa place dans la Lande, nul doute qu’un séjour prolongé ne lui fait pas le plus grand bien. Elle a toujours eu un esprit fragile.

Les caresses de l’Airain plongeaient la jeune femme blottie contre elle dans un profond désarroi, et son estomac se rebella une nouvelle fois face à tant de perversité. Et, tandis qu’elle murmurait des prières adressées à des Dieux sans nom pour qu’ils la sauvent de ce Lien maudit, la main d’Ithildin venait essuyer son front, ses joues, récoltant entre ses doigts attentionnés le fruit de ses offenses. Amaélis aurait préféré mourir, du moins, c’était ce à quoi elle songeait en même temps qu’elle se pressait avidement contre la paume douce et fraîche. Malheureusement, il n’y avait rien d’autre qui fût capable de la réconforter, rien d’autre pour lui offrir ce sentiment de salvation – et la pensée qu’Ithildin souhaitait juste la préserver d’elle-même et de tout le mal qu’elle s’infligeait était bien plus addictive que l’opium.

La Dragonne, malgré un visage résolument inquiet, pointa fièrement le menton en direction de l’autre couple de Liées, un bras protecteur autour de la Maîtresse déchue, presque sublime dans sa douleur factice.

Nous pensons qu’elle a écopé d’un mauvais sort, à un moment donné. Nous sommes à la recherche d’un moyen de l’en délivrer. Je ne vais pas vous demander votre aide, je veux juste que vous nous laissiez passer.

Il était hors de question que cette femme et sa Bleue découvrent l’héritage d’Amaélis ; Ithildin ne le permettrait pas. Tout ce qui appartenait à la Neishaane lui revenait, de droit, et elle ne laisserait personne s’en mêler. Le corps trop frêle de l’Engloutie fut soudain agité de spasmes, et l’Airain la lâcha sans considération, comme elle ne désirait pas se retrouver maculée de bile. Aucune espèce d’émotion ne traversa son visage quand elle la vit tomber à terre, ni quand elle entendit ses quintes de toux étranglées. Elle tourna deux orbes ensanglantés vers l’Ondine, comme une menace semi-avouée.
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MessageSujet: Re: [RP] Des Profondeurs, nous crions   [RP] Des Profondeurs, nous crions Icon_minitimeLun 25 Fév 2019 - 15:44

[RP] Des Profondeurs, nous crions Mora_del_Caelan_Chignon_Tol_Orea   [RP] Des Profondeurs, nous crions Nymelith_moradelcaelan_tolorea
Mora del Caelan & La Bleue Nymelith
Shaman du Màr Tàralöm

Theme Song :
Makishima Shogo – Psycho Pass OST

Alors que son Ondine faisait face aux deux exilées, la tête haute et la posture en apparence détendue, Nymelith la Bleue les observait d'un regard scrutateur et perçant, avec dans ses prunelles opalescentes, une couleur terne rappelant celle des nuages tempétueux éclatant sur les mers tropicales. Toujours étroitement enroulée autour de l'esprit de son âme-soeur, elle ne manqua pas de percevoir la crispation envieuse qui avait fugitivement parcouru l'Airain, tout comme la marée d'aigreur qui montait lentement au sein de la Neishaane. Ouvrant à demi la gueule, révélant une rangée de crocs d'ivoires acérés, elle darda légèrement sa langue à l'extérieur, à la façon des reptiles, goûtant l'atmosphère étouffante qui entourait les protagonistes, comme pour en mieux percevoir la résonance émotionnelle. Un grondement sourd s'échappa de sa gorge. Le Màr Maudit lui paraissait former un cadre idéal pour une telle confrontation, à ce point chargée de malaise, de déviance et de désirs réprimés.

Puis la Bleue croisa le regard confiant de Mora, étudiant le sourire glacé et franchement amusé qui avait éclos sur ses lèvres lorsque la jeune fille lui avait presque craché au visage que le Kaerl en ruine était bel et bien mort, et lui riant au nez en lui annonçant que elles étaient toutes aussi folles l'une que l'autre.

*Allons, assimiler nos degrés de folie me paraît une conclusion bien hâtive, jeune fille, tu pourrais bien être surprise ...*
**Mora ...**

Nymelith s'ébroua, sentant un frisson la traverser face à la colère sourde et piquante qu'elle sentait naître chez sa Liée. Tout ceci allait, selon toutes probabilités, mal se terminer. Mora … Mora n'était pas de ceux qui toléraient l'opposition à leurs desseins. Quant à sa présumée folie … Ce mot avait une définition des plus ambivalente. Pouvait-on dire que Mora était folle, de s'opposer à l'intrusion de deux Englouties incontrôlables sur ce territoire perverti, d’œuvrer ainsi à la renaissance du quatrième Ordre Draconique, autrefois puni par les Dieux eux-même ? Etait-elle en mesure de juger objectivement l'Ondine, elle qui avait envers et contre tout entremêlé  son destin au sien, elle qui l'avait fait en toute connaissance de cause ?

Ses griffes crissèrent désagréablement sur la pierre tandis qu'elle changeait de position, sans cesser de fixer la Neishaane, qui avait à présent violemment pris à parti l'Airain. Pour quelle raison ? Tout, dans la lueur prédatrice qui brillait dans les yeux de cette dernière, et les mimiques que son visage humanoïde arborait alors qu'elle fixait sa jeune âme-soeur, inspirait un profond dégoût à la Bleue, qui se retint à grand peine d'enrouler une queue, autant protectrice que possessive, autour de son Ondine. Elle ressentait sa Liée également nauséeuse devant une telle … ''perversité'', et le voyait à la façon dont ses lèvres pleines étaient retroussées par l'aversion.
Nymelith percevait les pensées qui fusaient à travers l'espace partagé par leurs deux esprits intimement enchevêtrés. Oui, elles étaient toutes deux choquées par l'apparente corruption de la pureté du lien spirituel entre la Neishaane et l'Airain. La torture pouvait s'avérer nécessaire, par moment, dans un but utilitaire, et Mora n'était pas de ceux qui la mettait en pratique dans le but d'en retirer un quelconque plaisir. Son tempérament dominant s'exprimait autrement. Elle préférait la subversion subtile des âmes à l'asservissement sanglant des corps. Mais être lié aussi étroitement à son tortionnaire comme l'était cette Amaélis avec sa dragonne … Cela confinait à un sadisme mêlé de masochisme, puisque toute douleur infligée à sa moitié d'âme était aussi ressentie par l'autre. L'Ondine réprima durement un frisson.  De tels cas étaient rares, mais méritaient cependant d'être étudiés. Comme tant de choses en ce monde, même une Empreinte pouvait être imparfaite et déséquilibrée.

Alors, lorsque l'Airain se rapprocha d'elles, attirant presque tendrement la Neishaane dans ses bras, essuyant ses larmes et débitant tout un discours sur la prétendue santé mentale vacillante de sa Liée ''victime d'un mauvais sort'', Mora lui jeta un regard neutre, gardant le silence, le visage figé et autrement inexpressif. Il allait lui falloir une nouvelle fois réévaluer sa stratégie.

**Mensonges que tout cela. Espère-t-elle réellement qu'on va la croire ?**

La queue de Nymelith fouetta l'air avec irritation et impatience, tandis que la main de son âme-soeur reprenait ses caresses apaisantes sur son armure d'écailles nocturnes, seul signe de vie extérieur de la statue d'albâtre impassiblement dressée à ses côtés. Éduquée dès son plus jeune âge à ne rien laisser paraître de ses réels sentiments, et rompue à évoluer dans une société où le moindre faux pas pouvait être fatal, Mora était dans son élément dans cette joute verbale. Les lèvres closes, elle se contentait de sourire froidement, laissant parler et se dévoiler les deux intruses, refusant de relever les provocations, et parfaitement consciente du malaise que cela pouvait engendrer chez ses adversaires. Elle étudiait calmement l'expression de l'Airain, son visage hautain sculpté par une peine presque sincère, faisant écho au désespoir et à la douleur déchirante que semblait éprouver la jeune fille dans ses bras, dont les lèvres se mouvaient répétitivement mais sans un son.

*Puisqu'elle cherche à nous prendre pour des imbéciles, pourquoi ne pas entrer dans son jeu ?*

Soudain, la frêle Neishaane fut agitée de spasmes, la dragonne laissant alors chuter à terre et s'affaler dans la poussière sa Liée parcourue de profondes quintes de toux, sans plus manifester la moindre sollicitude. Désapprobatrices, les pâles iris d'améthyste de l'Ondine affrontèrent brièvement les orbes sanglantes de l'Airain, avant que Mora n'entreprenne de se rapprocher paisiblement de la jeune fille allongée sur le sol, sa longue robe traînant sur le sol dans un froufrou soyeux à chacun de ses pas. Dans son dos, Nymelith n'avait pas bougé, se contentant de fixer l'autre dragonne, la défiant de tenter d'arrêter sa Liée dans son avancée.

« Ah là, quelle terrible histoire. »

Enfin, sa voix au timbre riche s'éleva, résonnant étrangement à travers la brume ouatée qui les environnait, alors qu'elle s'agenouillait élégamment devant la Neishaane, sans considération pour l'état dans lequel elle risquait de mettre sa tenue. D'une sacoche pendue à sa ceinture, elle tira d'abord un mouchoir, puis une gourde avec laquelle elle humidifia légèrement le tissu avant de le passer avec une grande douceur dans le visage d'Amaélis.

« Les brumes et brouillards qui hantent la Lande peuvent en effet se révéler toxiques pour les constitutions les plus fragiles comme la sienne, si l'on ne prend pas suffisamment de précautions. Peut-être pouvez-vous m'en dire plus sur ce sortilège qui la frappe ? »

Puis, plus bas, à l'attention de la Neishaane :

« Bois, cela te fera du bien. »

Ecartant délicatement du visage de la jeune fille les mèches blanches rendues poisseuses par la sueur, elle reprit :

« Je suis moi-même versée dans l'étude de la magie et je me targue d'en posséder une vaste connaissance, particulièrement, comme je vous l'ai dit, en ce qui concerne le Kaerl Maudit. Je me nomme Mora. Mora del Caelan. Peut-être ce nom vous est-il familier ? »

Laissant ses paupières voiler à demi ses iris, elle darda un regard interrogateur sur l'Airain, cherchant à percevoir le moindre indice de réaction de sa part ou de celle de sa Liée. Nulle mention de son Kaerl d'origine, comme l'avait fait la Neishaane. Et si elle avait connaissance des lignées ayant régné au Màr Dìnen avant la Malédiction, elle ne pourrait que reconnaître le nom de sa famille. Quant à celui de Nymelith, méfiante, elle laissait à la Bleue le soin de décider ou non de le révéler ultérieurement aux deux intruses. Si la dragonne décidait que cela était sans danger et que cela pouvait servir leurs intérêts. Car la Bleue doutait fortement de pouvoir parvenir à gagner la confiance de l'autre femelle de la même façon que l'Ondine entreprenait sa Liée.

Aidant la Neishaane vacillante à se redresser en position assise, Mora l'attira contre elle, d'une pression imperceptible mais suffisante à la faire basculer dans sa direction, et lui murmura à l'oreille, de sorte de n'être entendue que d'elle :

« Sache, jeune fille, que le Kaerl Maudit recèle bien plus que ce qu'il n'y paraît. N'est pas mort ce qui à jamais dort, et, au long des ères, peut mourir même la mort ... »


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MessageSujet: Re: [RP] Des Profondeurs, nous crions   [RP] Des Profondeurs, nous crions Icon_minitimeLun 25 Fév 2019 - 15:48

Ithildin ne se faisait pas vraiment d’illusions. Elle savait que son mensonge avait peu de chance de passer pour une explication crédible ; mais cela ne la dérangeait pas. Elle espérait même, au fond d’elle, que les deux Liées parviendraient à déceler que la Dragonne leur cachait quelque chose. Le cas contraire aurait impliqué un manque de dangerosité émanant de l’Airain, et celle-ci s’en serait sans doute montrée agacée. Pourtant, l’étrange Dame se tenait immobile, les lèvres closes. À quoi pensait-elle ? À quoi réfléchissait-elle ? Ithildin gratta l’intérieur de ses paumes, la colère affluant à nouveau dans ses veines. L’Airain se targuait de ne plus connaître la peur depuis bien longtemps, mais elle détestait les caractères fuyants et trop posés, ceux qu’on ne pouvait pas lire aussi aisément qu’on le souhaiterait. Elle cherchait l’affrontement en permanence, privilégiait l’action à la raison. Là où certains auraient qualifié d’intelligence cette manière de prendre le temps d’analyser une situation, la Dragonne ne voyait que lâcheté et faiblesse. Il n’y avait que ceux qui craignaient la défaite pour se cacher derrière un supposé apanage de lucidité – et cela voulait bien dire qu’ils craignaient quelque chose. Un sourire tordu dévoila ses dents d’ivoire quand, enfin, la Dame s’avança en direction d’Amaélis.

La Neishaane gisait au sol, quelques pointes de ses mèches rendues grises par les poussières baignant dans un liquide peu plaisant. Elle eut un frisson, ainsi qu’un vague mouvement de recul alors que l’Ondine se penchait pour éponger son visage. L’air hagard, elle leva des yeux vides vers son inespérée bienfaitrice. Pourquoi… ? Passés les premiers sentiments de répulsion, puis passée l’attente d’un mouvement soudain destiné à lui faire du mal, Amaélis dut bien réaliser que l’on s’occupait d’elle. Son ventre se tordait toujours, noyé dans des flammes amères. Son dos la démangeait, quelque part, en un point qu’elle ne pouvait ni définir, ni atteindre. Avec des mains faibles et tremblantes, elle se saisit de la gourde et y but goulûment, sans se soucier de l’eau qui s’écoulait le long de son menton. Ithildin avait férocement planté ses griffes dans l’esprit de sa Liée, comme pour lui rappeler à qui allait son allégeance – comme pour la défier d’éprouver une quelconque reconnaissance envers cette inconnue. Pourtant, à travers le voile qui recouvrait son regard et l’ombre qui rongeait ses pensées, la Maîtresse déchue ne pouvait pas s’empêcher de tendre imperceptiblement vers l’Ondine, une myriade d’appels au secours parsemant ses iris vitreux. Sûrement, elle aurait accueilli la Mort avec ce même visage – et la Dame n’avait-elle pas une certaine ressemblance avec Isashani ?

Les traits durcis par une inimitié accrue envers l’autre couple de Liées, et plus particulièrement envers la bipède qui se montrait si douce avec Amaélis, Ithildin fouilla dans sa mémoire à la recherche de consonnances lui évoquant le nom del Caelan. Elle ne comprenait pas comment ni pourquoi ce patronyme aurait pu lui être familier. Puis, rencontrant le regard de l’Ondine, qui semblait brûler du même feu glacé que celui d’Amaélis, l’idée d’avoir devant elle une descendante de l’Ordre Maudit effleura ses pensées. ° Le Quatrième Kaerl n’a-t-il donc en héritage que des dégénérés ? Enfin, c’est peut-être dans ce sang damné que se trouve la réponse au Lien qui m’unit à toi, Neishaane. Toi et moi n’avons rien à faire ici. ° La Maîtresse ne parut pas entendre les paroles de sa Liée, et cette dernière vrilla l’étrangère de ses pupilles rougeoyantes, haussant la voix après de longues secondes de silence.

Nous vous en sommes reconnaissantes, Dame. Il y a quelques années, Amaélis s’est perdue dans les ruines de ce Màr à la recherche de l’Œil d’Obsidienne, afin de déjouer la Prophétie des Deux Lunes. Elle y fut confrontée au Dévoreur – peut-être connaissez-vous cette créature ? Quoi qu’il en soit, elle n’a plus jamais été la même. Je n’existais pas encore, à ce moment-là, mais j’ai vu et ressenti ce qu’elle a vu et ressenti. Je ne peux pas dire si cette rencontre fut la raison de sa… Elle hésita sur le terme à employer.

Folie ? Était-ce là un véritable aspect de son caractère, ou l’avait-elle choisie – comme elle avait choisi l’Hiver, la résignation et la souffrance ? Ithildin se demandait encore, parfois, malgré le temps, si la Neishaane se complaisait dans cet abandon de soi ou si elle s’était battue jusqu’à la fin. En un sens, l’Airain pensait qu’une réponse à cette question l’aurait aidée à mieux comprendre la créature à laquelle était Liée, loin d’avoir l’âme aussi blanche que son corps – et plus complexe, aussi, qu’on aurait pu le croire au premier abord. Elle n’était plus sûre, cependant, d’y trouver là une quelconque utilité. Il était décidément bien loin, le temps où la Dragonne aurait tout donné pour être l’autre moitié d’Amaélis.

De sa dégradation mentale et physique, finit-elle par lâcher, sans une once d’émotion dans la voix. Son regard brûlant de possessivité planait au-dessus des silhouettes mêlées de l’Ondine et de la Neishaane, et une moue dégoûtée vint éclore sur ses lèvres, trahissant ses pensées. Je ne vois pas d’autre explication, cependant, au mal qui semble la ronger.

L’Airain plongea ses yeux dans ceux d’Amaélis, alors qu’une litanie trop connue commençait à enfler dans leurs esprits confondus, balayant les barrières qu’elles s’acharnaient à ériger l’une envers l’autre. Ta faute. C’est ta faute. Affirmer qu’elle ne ressentait aucune espèce de culpabilité aurait été mentir, mais cela n’était pas suffisant. Chaque fois que la Neishaane murmurait des malédictions à l’égard de sa Liée, Ithildin avait envie de rugir, d’incendier le corps frêle ou de l’attirer contre ses flancs d’écailles, de déchirer ses propres ailes parce que la colère l’avait rendue trop aveugle pour la retenir quand il était encore temps. Elle avait été stupide, s’était laissée happer par la violence de sa rancœur et de ses regrets – parce qu’elle préférait brûler que de s’effacer, parce que la peur était bien trop grande et qu’elle dévorait tout. Elle serra la mâchoire au point d’en avoir mal. Quelque part parmi le brouillard opaque qui se tordait langoureusement dans les iris de la Neishaane, là où auparavant Ithildin aimait imaginer un horizon mêlé de ciel d’orage et d’océan tempétueux, ne devait-il pas y avoir la plus distante et fugace lueur d’espoir ?

° Pourquoi ne m’as-tu pas empêchée de te détruire ? Non, je sais – je sais déjà. Parce que tu es trop lâche pour t’en vouloir à toi-même. Ce n’est qu’une excuse. Tout n’a jamais été qu’une excuse. Tu tords la réalité à ta guise pour te donner une bonne raison de souffrir, tu construis des mensonges pour justifier ton envie de disparaître. Et moi, ne suis-je donc pas le bourreau parfait ? Il faudra bien te l’avouer un jour, Neishaane, j’ai agi exactement selon tes souhaits. ° Tout son être se tendait vers Amaélis, poussé par un élan incontrôlable de sincérité et de peine. ° Dire que ce sont les autres est une affaire complexe, car on peut toujours trouver un moyen de leur échapper – mais être Liée à l’origine de son déclin, c’est là l’opportunité idéale. Nous savons toutes les deux que je ne me trompe pas. °

La Dragonne fouilla une dernière fois le regard de son Âme Sœur, à la recherche d’une étincelle de haine, de l’éclat d’une larme, d’une preuve quelconque qu’elle était bien là – mais Amaélis ne la voyait même pas. Les paroles d’Ithildin demeureraient de vagues échos résonnant dans les tréfonds de son esprit silencieux, indéfinissables et inaudibles, comme le grondement sourd du vent à travers les montagnes. La Neishaane était seule, errant dans un lieu trop éloigné, au milieu des neiges éternelles et d’étoiles centenaires incrustée dans la roche des falaises – mais, au moins, la lumière était revenue. La chaleur de l’Ondine à ses côtés lui semblait maintenant insoutenable, et elle tenta maladroitement de s’en éloigner, ses mains moites venant appuyer au hasard contre un bras, une épaule. Qu’avait-elle dit ? quelqu’un avait parlé, non ? Elle battit des cils, comme pour lacérer le voile qui recouvrait sa vision. Rendue hésitante par l’arrière-goût âcre qu’elle sentait sur ses lèvres, elle leva son visage vers Ithildin, qui plissa les yeux d’un air déçu et détourna résolument le sien, les bras croisés. L’irritation revint aussitôt, afin de faire taire le peu de remords qu’une telle action avait inévitablement éveillé en elle.

° Quoi ? Qu’est-ce que je t’ai fait encore ? °
° Rien. Absolument rien. Tu devrais plutôt t’occuper de la gentille Dame qui a eu pitié de toi. °

Amaélis ne comprenait pas pourquoi les mots de l’Airain étaient ainsi dégoulinant de venin. Si elle s’en indigna, elle préféra ne pas le montrer, et fit ce qu’on lui avait demandé.

Merci, je suppose, marmonna-t-elle à l’attention de l’Ondine – qu’elle n’aurait certainement définie comme gentille. Opportuniste aurait été plus juste, mais la Neishaane n’en était plus à prendre des précautions. Ouais, donc, est-ce que vous pouvez faire quelque chose pour moi ? On pense qu’on devrait retourner là où ça s’est produit, peut-être qu’on trouvera un indice, ou une piste à suivre pour mieux comprendre ce qui m’est arrivé.

Il fallait se remettre en route. Amaélis avait perdu assez de temps, et les souvenirs de ses rêves commençaient à se déliter, entre les vapeurs de l’opium et les éclairs lancinants de douleur. Une partie d’elle, pourtant, était persuadée que Grimhilde saurait la guider si elle venait à s’égarer.
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MessageSujet: Re: [RP] Des Profondeurs, nous crions   [RP] Des Profondeurs, nous crions Icon_minitimeLun 25 Fév 2019 - 15:50

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Mora del Caelan & La Bleue Nymelith
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Theme Song :
The Night of Long Fangs – The Witcher 3 : Blood and Wine OST

Faiblement d'abord, la frêle jeune fille avait tenté de la repousser, agitée de frissons irrépressibles et semblant craindre – à juste titre peut-être – sa soudaine bienfaitrice. Mais, bien vite, le regard mangé par les brumes, elle s'était laissée aller à son contact, s'abreuvant avec une avidité oublieuse à la gourde qu'elle lui avait tendu. Imperceptiblement, Amaélis s'était tendue vers elle, les lèvres entr'ouvertes sur une respiration difficile, ses iris voilés ne reflétant soudain plus aucune lueur de conscience. Avait-elle perdu l'esprit ?

Contenant sa répugnance à ce contact et n'en laissant filtrer aucun indice, Mora la garda pressée contre son épaule, caressant doucement sa chevelure emmêlée, lui murmurant à mi-voix des paroles apaisantes. Quel étrange tableau elles formaient là, l'Ondine et la Neishaane enlacées, la blancheur de l'une formant un éclatant contraste avec l'obscurité de l'autre, avec de part et d'autre de leurs silhouettes entremêlées, les deux dragonnes se jaugeant et se défiant du regard. Qu'il aurait été simple de la subvertir et d'en faire sa marionnette docile, telle qu'elle s'était offerte à son pouvoir … N'eut été la présence vigilante et possessive, pour ne pas dire prédatrice, de l'Airain, en marge de l'esprit de la Neishaane. Sans le savoir, mue peut-être par un instinct ou une intuition primale, elle préservait sa Liée de toute autre forme de domination que la sienne. Une Empreinte des plus malsaines, oui ...

Mais qu'importait ? Un léger sourire fleurit sur ses lèvres purpurines, tandis que son regard allait accrocher, celui, écarlate de colère, d'Ithildin. Et toujours sa main allait, inlassable, effleurant presque avec tendresse les cheveux de la jeune fille éperdue. Devait-elle se servir de sa toxine pour mettre fin à ses jours ? Au vu de son état déplorable, ce serait un acte de compassion que les Célestes ne renieraient pas. Dans ses iris améthystes, une flamme pâle s'alluma, dansante sous l'effet de l'amusement face à l'inimitié et la frustration exprimée par l'Airain. Visiblement, son patronyme n'évoquait aucun écho dans ses souvenirs. Tant pis.

**Son Airain ne nous laissera pas quitter les lieux en vie si tu l'empoisonnes.**

Nymelith, comme toujours. Allongée à quelques pas derrière elles, faussement alanguie, mais prête à bondir à la moindre alerte, la Bleue vrillait du regard sa sœur, enfant du chaos, et à ce titre, imprévisible. Mora reconnu à regret que sa sage Liée était la voix de la raison. De plus, elle pressentait que cette rencontre n'était pas due au hasard. Qu'avait-elle à perdre dans ce duel de volonté, sinon du temps ? Elle pouvait les égarer dans les ruines du Màr Maudit sur un simple caprice de sa part, les livrant, offertes et sans espoir de survie, aux Spectres avides qui hantaient pour l'éternité les salles obscures du Kaerl. Non, il serait beaucoup plus profitable et divertissant pour elle de les accompagner dans leur quête, quelle qu'elle soit. Les connaissances que les deux intruses pourraient lui livrer, les mystères auxquels elles pourraient la conduire … Elle voulait savoir. L'Ondine sentit un frisson de plaisir anticipé la parcourir et son cœur se mit à battre soudain un peu plus vite.

Alors qu'il semblait que le temps s'était une nouvelle fois figé, dans le cadre tourmenté offert par la Lande d'Eru, le lourd silence fut finalement brisé par l'Airain. Bien. Elle avait cédé. Cependant, à la mention des Deux Lunes et de l'Oeil d'Obsidienne, le beau visage de Mora s'assombrit, devenant presque menaçant. Voilà des secrets après lesquels elle courait depuis maintenant bien deux ans. Quant au Dévoreur … Elle ignorait ce qu'il était advenu de cette abomination, ce monstre créé par ses ancêtres. Etait-il encore enfermé dans le Hall des Illusions, au plus profond du Kaerl ? Parcourait-il librement les corridors poussiéreux du Màr Dìnen ? Bénéficiant de la protection d'Aubiade del Cirth, la Gardienne, elle n'y avait jamais été confrontée, en échange de la promesse, difficilement concédée, de ne pas chercher à en savoir plus sur sa nature réelle et ses origines.

Combien de temps avait-elle cherché à lever le voile de la vérité sur les événements qui s'étaient déroulés sous l'influence de la conjonction astronomique ? Bien sûr, Azdraïel – ce traitre, serviteur de l'Ombremage – avait fait son rapport au retour de la mission, mais il était évident qu'il avait passé sous silence un grand nombre de choses. Quant aux Spectres, extrêmement perturbés, tant par l'incursion insoucieuse de la Triade dans le Kaerl que par l'altération de la magie provoquée par les Deux Lunes, il lui avait fallu faire montre d'une grande patience pour rassembler, bribe par bride, des informations cohérentes. Et la naissance des quatre Airains au Manoir d'Ael Alfirin … Meilan-Lavok et ses vilains petits secrets ! Dans la droite lignée de ce qu'on pouvait attendre d'un Valheru.

Pas d'autre explication quant au mal qui la rongeait donc. Bien sûr. Une fois encore, l'Ondine s'interrogea, les prunelles rougeoyantes d'Ithildin vrillant les siennes. Que lui cachaient-elles ? Une vague de colère la parcourut, et sa main se crispa brièvement, telle une serre, sur la chair pâle de la Neishaane. Et une fois encore, Mora garda le silence, son esprit analysant les données dont elle disposait et commençant à établir un plan d'action, soutenu et protégé par la présence enveloppante de Nymelith. La Bleue non plus ne laisserait pas quelqu'un d'autre s'approprier sa Liée, que ce soit dans la vie … Ou dans la mort. Spectres, bipèdes, dragons, elle ne craignait rien tant que son Ondine était auprès d'elle.

Mais déjà, l'attention de l'Airain s'était reportée sur sa Liée, son visage s'adoucissant d'une manière étonnante, là où elle avait énoncé les causes de son état avec la froide précision clinique d'un chirurgien préconisant une amputation. Communiquaient-elles ensemble ? Pourtant, la jeune fille, toujours perdue dans son propre monde intérieur, n'afficha aucune réaction, n'eut aucun mouvement autre que les frissons et hauts-le-cœur qui l'agitaient depuis sa chute au sol. Rien.
Mora pinça les lèvres, envisageant une nouvelle fois que cette petite descendante du Màr Maudit ait réellement eu l'esprit brisé par son premier séjour sur les terres de ses ancêtres. Quelle que soit son ascendance réelle, si elle avait fait face au Dévoreur, il avait du la marquer comme sienne. Parcourir les salles oubliées du Kaerl en sa compagnie serait prendre le risque de l'attirer à elles ...

Ponctuant ses ténébreuses considérations, au dessus de leur tête, les nuages s'étaient fait plus sombres, plus menaçants, et un lointain roulement de tonnerre se fit entendre, apportant un contrepoint sinistre à leur confrontation. Et, comme réveillée par cet avertissement implacable des cieux, la Neishaane battit faiblement des cils, cherchant soudain à se soustraire à son étreinte, croisant son regard sans le voir, puis cherchant à accrocher celui de son Airain, qui détourna vivement la tête. La souffrance, l'amour et la haine étroitement mêlés flottaient décidément autour de ce couple étrange comme une aura empoisonnée.

« Merci, je suppose. » Agenouillée aux côtés de la Neishaane encore vacillante, face à cette gratitude concédée du bout des lèvres, l'Ondine haussa un fin sourcil, l'expression redevenue neutre et attentive, attendant la suite. « Ouais, donc, est-ce que vous pouvez faire quelque chose pour moi ? On pense qu’on devrait retourner là où ça s’est produit, peut-être qu’on trouvera un indice, ou une piste à suivre pour mieux comprendre ce qui m’est arrivé. »

Se redressant alors lentement, époussetant et lissant sa longue robe couleur de nuit avec une application exagérée, elle glissa un coup d'oeil à Amaélis, l'étudiant entre ses cils baissés.

« Comme je vous l'ai dit, mes connaissances concernant le Kaerl Maudit sont notables. Je puis me déplacer et trouver aisément mon chemin à travers ses passages souterrains. »

Une pause. C'était une réponse et ce n'en était pas une. La tentation et le défi qui lui étaient proposés étaient trop grands. Allait-elle y céder ?

*Me laisseras-tu les y mener sans intervenir, Aubiade ? Ou devrai-je en subir les conséquences ?*
**Sois prudente, Mora !**

« Je peux vous mener jusqu'au Hall des Illusions, là où tout s'est déroulé … Si vous vous sentez capables d'affronter les ombres maudites du Màr Agarwaen. »

Un bref sourire, teinté de provocation, et elle se détourna, la tête haute, sans attendre de réponse, pour rejoindre Nymelith, qui fixait un regard grisé par l'inquiétude sur sa Liée. Si l'Airain les accompagnait, hors de question de laisser son Ondine y aller seule. Une vive lumière éclata, presque trop brillante dans la brume environnante, tandis que la Bleue adoptait sa forme humanoïde, une expression de froideur résolue sur son visage. Alors seulement, un bras sur celui de sa dragonne, Mora tourna la tête en direction des deux intruses, vivante image d'Isashani incarnée sur terre, la flamme pâle de ses iris d'améthyste rendue à nouveau dansante par l'exaltation, les invitant à la suivre.

Un long chemin les attendaient, et elle aurait bien le temps de les interroger, subtilement, sur ce qu'elles savaient.


L'on rencontre souvent sa Destinée
Par les chemins que l'on prend
Pour l'éviter
***

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MessageSujet: Re: [RP] Des Profondeurs, nous crions   [RP] Des Profondeurs, nous crions Icon_minitimeLun 25 Fév 2019 - 15:52


Les deux couples de Liées, enfin, étaient parvenus à un arrangement – qui, s’il n’emplissait pas Ithildin de joie, se révélerait sans doute suffisant. Elle aurait tout le temps de réfléchir à une manière de se débarrasser de Mora et de sa Bleue par la suite. Les laissant prendre les devants, l’Airain permit à Amaélis de prendre appui sur elle. La Neishaane était encore faible, tenant à peine sur ses jambes, et la Dragonne sentait les pulsations douloureuses qui martelaient son crâne, l’inconfort de son corps malmené par l’opium, la confusion de son esprit. Elle en concevait un dégoût profond. Cette douleur… Amaélis se l’infligeait seule, au détriment de sa vie – au détriment de la sienne. Ithildin refusait de l’accepter. Parfois, elle soupçonnait son Âme Sœur de le faire à dessein, dans l’espoir, vain, insensé et égoïste, que son état altéré de conscience finirait par entraîner également la Dragonne dans sa chute, jusqu’à ce que sa raison s’efface à son tour. La jugeait-elle si faible ? C’était inconcevable. Sans doute, sans le Lien et sans l’énergie d’Ithildin dont elle se nourrissait, cette bipède pitoyable serait déjà morte depuis longtemps. Stupide gamine.

Du coin de l’œil, l’Airain pouvait voir les iris troubles de la Neishaane, qui la fixait avec un mélange d’attention et de méfiance. Elle retrouvait ses esprits, doucement, pour une durée impossible à déterminer – mais qui devenait de plus en plus chaotique, de plus en plus restreinte. La Dragonne aurait dû l’empêcher d’ingérer une nouvelle dose si tôt, au beau milieu des Spectres et des vapeurs toxiques de la Lande, là où elle avait déjà failli se perdre par deux fois et où tous ses cauchemars prenaient source. Avec un soupir résigné, Ithildin la laissa partager ses réflexions concernant leurs deux guides. Amaélis craignait plutôt que ses souvenirs s’estompent trop pour leur permettre de retrouver la demeure de son ancêtre. Elle se rappelait du hall et de son puits immense, entouré de colonnes ouvragées ; de la pièce souterraine au sol couvert de tracés mystérieux. Les images, fugitives, des couloirs et des escaliers se succédaient au rythme de ses battements de cils, au rythme désordonné de son cœur. Elle ne s’inquiétait pas de la présence indésirable de Mora, ni de sa Liée. Une croyance inexpliquée lui soufflait que des étrangères ne pourraient pas pénétrer les lieux. Grimhilde était-elle encore là ? Ou bien étaient-ils gardés par quelque Spectre partageant son ascendance ?

La Neishaane ne comprenait pas comment son sang pouvait être relié à ce Màr Déchu. Lam’ ne lui avait-elle pas dit que tous ses membres avaient été maudits par les Dieux ? Jamais elle ne lui aurait menti. Alors, comment était-ce possible ? Comment quiconque aurait pu en réchapper ? Et pourtant, malgré son incrédulité, rien ne lui paraissait plus cohérent. La vulnérabilité de son esprit, la corruption subtile dont il était victime, l’acharnement du Destin à le briser – et l’incapacité à trouver une amarre à la réalité, cette impression de payer le prix d’un outrage qu’elle n’avait pas commis. Ithildin n’était pas de cet avis. À ses yeux, et comme toujours, Amaélis ne faisait que chercher un tortionnaire pour ne pas voir que c’était son propre fatalisme, son absence de volonté et son obsession envers la douleur qui l’avaient détruite, avec une application confinant à la perversion. La Neishaane préféra ignorer les reproches amers de son Âme Sœur, persuadée de ne pas se tromper, et incapable de supporter ses accusations délirantes.

Les pavés poussiéreux et disloqués du Kaerl se ressemblaient tous. Certains corridors étaient bloqués par des éboulements anciens, mais Mora les menait avec assurance, de plus en plus loin dans les profondeurs. La lumière se faisait plus rare, à cause, entre autres, des lourds nuages d’orage qui s’étaient amoncelés dans le ciel morne, étouffant Solyae dans une étreinte sordide. Le grondement lointain du tonnerre résonnait jusque dans les pierres sombres, jusque sous leurs pieds. Assez ténus pour qu’on ait pu les confondre avec le froissement de tissu provoqué par les robes de l’Ondine, des murmures glissaient le long des joues d’Amaélis, comme la caresse de doigts fantomatiques, faussement affectueuse mais emplie d’un désir brûlant. Contre sa nuque, elle percevait le souffle froid de sa mémoire, étroitement entremêlé à celui des Spectres. À chaque nouvelle seconde, la Neishaane s’alarmait d’enfin voir surgir quelque créature issue de ses fantasmes obscurs, de son imagination torturée. Que se passerait-il si elle perdait pied, maintenant ? L’intervalle durant lequel elle clignait des yeux lui paraissait se creuser de manière démesurée, permettant à des formes pâles, imprimées comme en négatif sur la toile noire de ses paupières, de gagner en netteté. Ses doigts vinrent s’accrocher avec ferveur à la manche d’Ithildin, laquelle émit un grognement mécontent, sans réellement parvenir à masquer son anxiété. Elle aussi entendait les échos des chants désincarnés qui enflaient et se retiraient, pareils au soupir des vagues, dans cet espace étrange que la Neishaane semblait partager avec l’âme du Màr – et elle n’y trouvait aucune forme de soulagement.

Ici, l’esprit d’Amaélis lui donnait l’impression de se répandre, de s’infiltrer dans la moindre faille, imprégnant les gravures antiques et les statues tordues, démembrées. Le Kaerl réagissait à sa présence, aussi sûrement que le jizdine au toucher. Ce n’était pas rassurant. Plus la Neishaane s’égarait en elle-même, plus le voile entre illusion et réalité s’amincissait. Et si ses ombres étaient capables de s’infiltrer dans le réel, alors l’inverse était également possible.

° Du calme, Alma. ° intervint la Dragonne, d’un ton doux et autoritaire, lorsqu’elle vit les lèvres d’Amaélis remuer d’elles-mêmes. ° Tu ne peux pas faire ça, je te l’interdis. Reste avec moi. °

° Ils me voient, ils me regardent. Ils me sentent. Ils savent que je suis revenue, Ithildin. Ils vont venir pour moi… Peut-être même lui... T'y peux rien. Je suis désolée. °

Amaélis leva une main, traçant dans l’air l’ébauche d’ondulations invisibles. Son regard, vitreux et trop large, contemplait déjà des plaines distantes, à la frontière du passé, juste en lisière de ses peurs. L’obscurité était consistante, le vide – opaque, dense. Entre les murs, des yeux sans visage, suspendus, suivaient sa progression. Des promesses silencieuses s’enroulaient autour de ses chevilles. Quelque chose craquait juste à côté de ses oreilles. Le propre bruit de son cœur semblait s’être éloigné, comme séparé de son corps – elle l’entendait derrière elle, sourd, oppressant. Pourquoi la suivait-il ? À quel moment était-il devenu si difficile de respirer ? Elle jeta un bref coup d’œil en arrière, aurait juré avoir vu une nappe rampante se retirer dès qu’elle avait tourné la tête. La gorge sèche, la Neishaane voulut avertir Ithildin, mais fut distraite par des démangeaisons désormais coutumières. Elle lâcha la Dragonne, retenant un juron, et releva ses manches. La vue de sa propre chair, rougie par l’irritation, lui donna le vertige, néanmoins, elle frotta ses avant-bras avec force. Sous sa peau, au lieu de veines, des formes noires et sinueuses s’agitaient, et elle redoubla d’ardeur, paniquée.

Je sais ce que tu as fait. Tu es tellement pourrie que tu es sûrement déjà morte. Tu te décomposes. Tu es l’unique responsable, douce enfant… Douce enfant ? Non… Tu ne vaux pas mieux que la vermine qui a élu domicile dans tes entrailles, et tu finiras dévorée par elle. Regarde !

Un hurlement déchira le silence tandis qu’Amaélis tombait à genoux, une migraine intense lacérant les dernières bribes de sa raison. Elle se grattait toujours, secouée par des sanglots effrayés, et la voix tournait autour d’elle, la frappant au visage de ses ailes de corbeau, répétant comme une litanie – Je sais ce que tu as fait. Cette voix… C’était celle de son faux frère, quand elle l’avait trahie. Celle de Darweel, quand elle n’avait pas pu la sauver. Celle de Tachiran, quand elle l’avait manipulé. Celle d’Arkanius, quand elle n’avait pas su le protéger. Celle de Galaad, quand elle l’avait abandonné, encore et encore. Celle d’Ithildin, quand… Non. Qu’ils se taisent ! Des mensonges, ce n’était que des mensonges ! La culpabilité, pourtant, était insoutenable ; la Neishaane se sentait sale, à moitié rongée, impie. Et la haine qu’elle se portait fut retournée, une fois de plus, contre le monde entier.

Nous savons tous ce que tu as fait. Tu n’es même pas capable de te sauver toi-même, comment espérais-tu faire autre chose que nous décevoir ? Crois-tu que nous sommes aveugles ? Que nous ne sommes pas à même de voir ce que tu es… Nous savons ce que tu as fait, et nous allons nous assurer que tu ne l’oublies jamais. Tu ne l’oublieras jamais. Tu te tueras seule, tu as déjà commencé.

Amaélis laissa retomber piteusement ses bras le long de son corps, s’affaissant soudain, vidée de toute force. Les démons valsaient dans ses yeux ternes. Il fallait que cela cesse, mais cela ne cessait pas. Jamais. Ni le jour, ni la nuit. Ni ici, ni ailleurs. Pas même dans l’étau cotonneux et brumeux de l’opium. Pas même dans le brasier de sa colère. Cela ne cessait pas. Qu’avait-elle fait ? La question revenait, lancinante, désespérante – et elle écorchait la réponse, s’écorchait l’âme à force de frénésie.

Quelque chose de dur heurta sa joue, et sa tête heurta le sol. Le visage d’Ithildin, déformé par la rage et l’épouvante, planait au-dessus d’elle. Des doigts sévères empoignèrent ses cheveux, les tirant sans ménagement pour la forcer à se redresser. Son regard fut aspiré par la fournaise, juste avant qu’une deuxième gifle ne vienne s’écraser sur elle.

C’est bon ? T’as fini ? Lève-toi, imbécile, et ne t’avise pas de me quitter à nouveau ou je m’assurerai personnellement que tu regretteras de ne pas être restée en compagnie de tes hallucinations.  

La Dragonne la souleva en l'agrippant par les aisselles, avec toute la brutalité qui la caractérisait, et la maintint fermement contre elle. Amaélis se laissa faire. Elle n’était pas en état de résister. Elle ne comprenait pas. Comme immergée, elle entendit confusément son Âme Sœur demander à Mora de les éloigner d’ici le plus rapidement possible. Quelque part, dans le dédale de vieux couloirs décrépis, faisant fuir même les Spectres, le Dévoreur n’était pas satisfait d’avoir perdu sa proie.
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MessageSujet: Re: [RP] Des Profondeurs, nous crions   [RP] Des Profondeurs, nous crions Icon_minitimeLun 25 Fév 2019 - 15:53

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Theme Song :
Welcome, Imlerith – The Witcher 3 : Wild Hunt OST

Sa longue robe effleurant le marbre poussiéreux dans un froufrou soyeux, et le claquement de ses pieds bottés heurtant le sol glacé au rythme de ses pas furent d'abord les seuls sons troublant le silence pénétrant qui régnait dans les corridors du Kaerl Maudit. Même la respiration des quatre visiteuses se faisait retenue et ouatée, comme de peur d'attirer l'attention indésirable des habitants du Màr Dìnen. Et, de loin en loin, résonnait parfois le roulement sourd et dérangeant de l'orage qui se déchaînait en surface. Ayant pris la tête du petit groupe, Mora avançait, confiante en son savoir, ses longs doigts aux ongles soigneusement laqués, allant effleurer parfois une frise de jizdine encore fonctionnelle, lorsque la lumière projetée par l'orbe lumineuse qu'elle tenait dans sa main ne suffisait pas. De temps en temps, elle jetait un regard amusé par dessus son épaule, juste pour s'assurer que l'Airain et sa Neishaane ne s'étaient pas égarées. Car il n'était pas dans ses intentions de laisser une telle chose se produire avant d'avoir pu apprendre d'elles tout ce qu'elle pouvait tirer de leurs connaissances sur le Kaerl. Et, peu à peu, la lumière du jour se faisait de plus en plus rare, s'effaçant de leurs mémoires comme le souvenir d'un rêve.

La suivant de très près, Nymelith, sous sa forme humanoïde, balayait l'obscurité d'un regard prudent et loin d'être serein. Dotée d'une chevelure aile de corbeau et d'iris d'un gris-bleuté rappelant la couleur d'un ciel d'orage, avec sa gorge pâle ornée d'un lacis resserré de tatouages ondins, son allure rappelait beaucoup celle de sa Liée, en moins fragile, moins évanescent peut-être. Derrière elles, la Neishaane aux yeux caves, une lueur affolée dans ses iris, était lourdement appuyée sur son Airain, s'accrochant à elle avec l'ardeur désespérée d'un noyé envers sa planche de salut, ses lèvres murmurant silencieusement des mots inaudibles. Réprimant un frisson, Nymelith se détourna. Ce couple ne lui inspirait réellement qu'un profond dégoût. Elle avait beau ne pas être à l'aise dans les passages souterrains du Màr, il était néanmoins hors de question pour elle de laisser Mora mener seule cette dangereuse expédition. Les Spectres et les autres créatures maudites qui erraient dans les ruines, elle savait son Ondine capable d'en faire son affaire, mais elle ne faisait aucune confiance aux deux intruses … D'autant plus si cette Amaélis, était porteuse, comme l'avait évoqué l'autre dragonne, de la marque du Dévoreur.

Un coup d'oeil fugitif sur sa Liée lui fit apercevoir le pendentif confié par Aubiade, dont la turquoise, nichée entre ses seins, luisait et palpitait doucement, comme un cœur vivant. L'artefact était un gage de sécurité supplémentaire, dans le cas où le sang de la lignée del Caelan ne suffirait pas, aux yeux des âmes errantes du Kaerl Maudit, à leur autoriser le passage. Car plus elles s'enfonçaient dans les profondeurs, plus leur présence se faisait sentir, par des chuchotis et des murmures, des silhouettes à peine discernables, fugitivement aperçues du coin de l'oeil, et qui s'effaçaient dès que l'on tentait de les voir de face. Et Mora avançait toujours, la tête haute, sa longue chevelure de nuit flottant au bas de ses reins au rythme de ses pas, avec sur son visage une expression impassible, n'était le petit sourire qui ourlait ses lèvres purpurines. Ce que la Bleue savait, pour partager étroitement l'esprit de son Ondine, mais que les deux autres ignoraient, c'était que la Shaman empruntait volontairement la route la plus tortueuse et la moins directe. Elle était parfaitement consciente que pour une personne n'ayant pas en tête la carte du Màr Dìnen, les passages se suivaient et se ressemblaient tous, en apparence, rien ne permettant de les distinguer les uns des autres. Et Mora comptait bien les garder dans cette obscure ignorance : il était hors de question qu'elles puissent quitter le Kaerl sans elle. Elle n'avait pas l'intention de les laisser la doubler, il fallait qu'elles restent dépendante d'elle et de son savoir.

Et plus elles approchaient du Hall des Illusions, cœur oublié du Màr Maudit, plus l'atmosphère se faisait lourde, poisseuse, et menaçante, la frontière entre la réalité et le mensonge devenant des plus indistinctes. Comme si une ténébreuse conscience, plus ancienne, plus mauvaise que toutes les autres avant elle, se rapprochait lentement de leur petit groupe. Les Spectres même semblaient s'effacer devant elle. Le sentiment de leur vulnérabilité se faisant cruellement poignant, Nymelith porta un regard anxieux sur sa Liée, qui effleura son bras avec douceur, d'une caresse rassurante. Tant qu'elles étaient ensembles, rien ne pourrait les faire vaciller. De plus, son pacte avec la Gardienne lui assurait de pouvoir se déplacer dans les ruines souterraines sans devoir craindre rien ni personne.

Alors, lorsque dans un hurlement de douleur et d'horreur, la Neishaane chuta à genoux, la Bleue se plaça automatiquement en position de protection devant son Ondine, le visage ciselé dans le marbre, l'expression menaçante, reflétant sa détermination. Pourtant, c'est une lueur de curiosité prudente qui s'était allumée dans les pâles iris d'améthyste de la magicienne, contemplant la scène avec une mimique de dégoût mêlée de mépris, les yeux baissés sur la jeune fille en pleine hallucination. Que lui arrivait-il exactement ? Son esprit avait-il choisi de l'abandonner soudainement, ou y avait-il une cause plus précise à son mal ? Très doucement, pour ne pas perturber ses réflexions, Nymelith lui souffla un nom, avivant son intérêt. Le Dévoreur. Il venait certainement récupérer son dû. Elle ressentait confusément sa présence, sans parvenir à l'apercevoir. Aubiade avait tenu parole.

Même lorsqu'Amaélis s'affaissa, cessant visiblement de lutter contre ses visions, Mora ne bougea pas, continuant de l'étudier avec le même détachement, ses lèvres pincées révélant le vif sentiment de gâchis la traversant à cet instant. Avaient-elles fait tout ce chemin pour rien ? Son regard se détourna sur l'Airain, furieuse, qui s'acharnait sur sa Liée, la giflant et la redressant d'une prise cruelle sur sa chevelure emmêlés. Toujours le même comportement chaotique et destructeur … C'en devenait répugnant. Refusant d'assister plus encore à la déchéance de l'autre couple de Liées, la Shaman fit volte-face à regret, se fendant d'une incitation sèche à poursuivre leur route alors que la dragonne, hostile, l'interpellait en l'exhortant à les sortir d'ici au plus vite. Il serait toujours temps d'étudier les conséquences de l'action du Dévoreur sur l'esprit fragile de la Neishaane lorsqu'elles seraient en sécurité … Si un tel endroit existait encore au Kaerl Maudit.

Plus de détours à présent, elles allaient devoir se lancer dans une course de vitesse contre la créature la plus dangereuse qui hantait ces ruines … Tout en se dirigeant vers la source même de son pouvoir, là où son action serait la plus forte. L'Ondine soupira tout bas. Contrariée, Mora l'était, mais plus à l'idée de devoir disputer sa proie au Dévoreur qu'autre chose. En revanche, elle tenait la peur au plus loin de son esprit, car elle savait pertinemment que le monstre s'en nourrissait et s'en délectait. Effleurant la turquoise du bout des doigts, elle y projeta sa magie pour dresser autour d'elles une fine barrière magique, qui le tiendrait en échec au moins pour un temps, puis se rapprocha d'une statue non loin, s'arrêtant pour l'examiner attentivement. Étendant la main, elle ôta de sa couronne sculptée une petite feuille de lierre, provoquant ainsi le coulissement silencieux d'un pan de mur, l'obscurité leur soufflant au visage l'haleine glacée d'un passage resté scellé pendant des centaines d'années. Si tout allait bien, celui-ci devrait pouvoir les mener directement à l'entrée du Hall des Illusions.

Après de longues et pesantes minutes de marche, d'un pas vif et pressé, elles débouchèrent du passage exigu devant une haute arche, dont les portes pendaient de chaque côté, dégondées et à moitié brisées, s'ouvrant sur une salle rectangulaire au haut plafond. Sans attendre, Nymelith lui emboîtant étroitement le pas, l'Ondine pénétra dans le Hall, s'arrêtant juste à la limite définie par le type de matériau constituant le sol, le marbre cédant le pas à une étrange pierre sombre veinée de cristal. Déposant son orbe lumineuse sur un piédestal visiblement dédié à cet effet, elle claqua sèchement dans ses mains et d'une voix forte, prononça le précieux mot de pouvoir, oublié puis redécouvert dans les archives poussiéreuses du Màr Maudit :

« Glân ! »

Alors, faiblement d'abord, puis de plus en plus vivement, la magie de la salle se réveilla, le cristal du sol commençant à luire doucement, et d’innombrables petits diamants scintillants s'allumèrent dans l'obscurité du plafond, nimbant la salle d'une lumière argentée, froide et diffuse. Une nostalgie étrange naquit alors dans son cœur, rêve obscur d'une époque pourtant révolue depuis bien avant sa naissance, et elle contempla la carte du ciel que dessinaient les étoiles au dessus d'elle. En cet instant, le Kaerl Etoilé portait magnifiquement son nom véritable. Màr Ilmarë. Le nom qui avait été banni des mémoires collectives et qu'il était devenu interdit de prononcer. Et il était regrettable, selon elle, que le terrible Hall des Illusions, cruelle zone d'entraînement des membres du quatrième ordre draconique, soit le seul où la magie intrinsèque aux constructions Valherues perdurait encore dans sa forme originelle. Le long des murs, à une hauteur équivalente à celle d'une Reine Dragon, couraient encore les restes de balcons en ruine, depuis lesquels, elle le savait pour l'avoir lu dans le journal de Vanadiel, son ancêtre Maudit, les Maitres pouvaient observer la progression de leurs Aspirants, et leur lutte contre les illusions du Dévoreur.

A ses côtés, Nymelith observait la voûte au dessus d'elles d'un air mi émerveillé mi effrayé, presque entièrement subjuguée par sa vision, et une vague d'amour envers sa Liée la traversa brièvement, avant que Mora ne se retourne vers les deux intruses, le visage sévère, et ses iris d'améthyste pâle flamboyants.

« Voyez, j'ai tenu parole, et vous voilà arrivées au Hall des Illusions, cœur du Màr Dìnen. Maintenant, si vous le voulez bien, je serais curieuse de connaître le détail de votre histoire. Peu de récits de la quête de la Triade d'Obsidienne nous sont parvenus. Comment est-ce que cette … ''malédiction'' qui vous frappe s'est produite ? »

Résonnant sous le haut plafond, sa voix, chaude et caressante, aux inflexions nobles et cultivées, ne laissait pas moins aucun doute planer sur la possibilité pour elles de refuser de répondre à ses questionnements. Elle était ici en son domaine, et entendait bien obtenir à son tour les connaissances que la fragile Neishaane possédait.


L'on rencontre souvent sa Destinée
Par les chemins que l'on prend
Pour l'éviter
***

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MessageSujet: Re: [RP] Des Profondeurs, nous crions   [RP] Des Profondeurs, nous crions Icon_minitimeLun 25 Fév 2019 - 15:58


Le martèlement féroce des bottes d’Ithildin contre les dalles se réverbérait dans la moindre parcelle de son corps, faisant vibrer ses os d’une manière désagréable. Les ténèbres avaient envahi sa vision, mais elle percevait encore autour d’elle, vaguement, la rumeur distante de leur fuite à travers les couloirs. Amaélis s’y était préparée, avant même de poser le pied en Lande d’Eru ; elle avait su ce qui l’attendait. La quête qu’elle menait possédait une issue indéterminée. Personne, et sûrement pas les Dieux, n’aurait pu déclarer avec certitude qu’elle parviendrait à accomplir le dessein qui l’avait poussée à revenir en ces lieux tourmentés. En vérité, sa vie avait dû s’achever il y a bien longtemps pour qu’elle ait l’arrogance de croire en un dénouement heureux. Ta faute. C’est ta faute. De qui ? Ithildin, parce qu’elle était née dans un monde qui rejetait son existence, et qu’elle avait voulu lutter à la seule force de ses griffes et de sa haine, quitte à désacraliser l’essence même d’un amour qui lui avait été refusé de connaître ? Amaélis, parce qu’elle était trop lâche, ou trop faible, pour affronter la souffrance sempiternelle de devoir toujours reconstruire ce que le temps détruisait – pour accepter que tout ne lui était pas dû, pour accepter de réparer ses propres erreurs ? L’une voulait s’immoler et partir dans un déluge de flammes et de carnage, quand l’autre désirait simplement dormir. Mais, maintenant que le Lien tissé entre elles avait évolué en chaînes délétères, laquelle avait le droit de choisir la façon dont l’autre quitterait ce monde ?

° Venir ici était ton idée, Neishaane. Bats-toi, car, même si nous devions trouver la mort dans ce Kaerl infâme, j’aurais des éternités pour te faire payer le prix de tes offenses. ° sifflait la voix de l’Airain qui, laissant de côté sa répugnance, avait plongé toute entière dans l’esprit de sa Liée, un lac sans fond d’eau noire et épaisse comme de la poix. Là, des mains étrangères tentaient de la saisir, de l’attirer un peu plus, vers la morosité et le désespoir. Pourtant, au loin, sous toute cette étendue peuplée de vide, elle sentait la chaleur d’un brasier bien plus ardent que ne voulait le laisser penser la Neishaane – une morsure douloureuse et rassurante. Ceci était la marque du Chaos, songeait Ithildin, et ceci avait scellé leur Empreinte, bien avant qu’aucune d’elles ait ouvert les yeux pour la première fois. Parce qu’elle était née du Chaos, seule l’Airain pouvait comprendre Amaélis, pouvait la guider dans cet univers inversé, où l’ombre créait la lumière et où la pluie montait vers le ciel, et qu’elle considérait au mieux comme une prison bizarre, au pire comme un Enfer. Oui, elles étaient absurdes et, sans doute, la réalité n’était pas faite pour les accueillir – néanmoins…

Qu’auraient-elles pu accomplir, ensemble, si seulement elles avaient su le voir à temps ?

Il y avait plus que cela. De manière inconsciente, et même si elle ne parvenait pas à en saisir toute l’étendue, Ithildin était sensible aux tourments de sa Liée. La Neishaane n’éprouvait que de l’aversion envers elle-même, parce qu’elle ne supportait pas l’idée d’être rejetée. Elle désirait si férocement un amour sans limite qu’elle percevait le moindre faux pas de sa part comme un désastre, comme un échec, qui lui prouvait alors un peu plus qu’elle ne méritait pas cet amour. Chaque reproche – non, chaque fois qu’elle pensait avoir mal fait – était un coup bien trop dur à encaisser pour sa fierté, et Amaélis se cachait derrière celle-ci, prétextant que l’autre manquait d’indulgence et de compassion, ou, d’autres fois, lorsqu’il fallait justifier l’implacable stratégie de l’évitement dont elle avait fait sa principale caractéristique, se laissant bercer par l’idée soigneusement entretenue qu’elle n’était pas digne d’empathie. Il en résultait un étrange mélange qui faisait apparaître la Neishaane tantôt martyre, victime d’un Destin parsemé de souffrance, tantôt créature froide, orgueilleuse et agressive. Ithildin avait fini par le réaliser : Amaélis avait fait exprès de lui exposer la partie la plus obscure de sa personnalité, de lui jeter au visage l’ampleur de son égoïsme et de son mal-être, parce qu’elle avait voulu que la Dragonne lui pardonne et continue de l’aimer quand n’importe qui l’aurait haïe. Elle n’avait réussi qu’à se détester un peu plus, blessant sa Liée dans le même temps, comme jamais elle n’avait été blessée auparavant.

La colère lui rongeait toujours les entrailles. L’Airain ignorait comment son Âme Sœur réussissait encore à assumer de croiser son reflet dans les miroirs, comment elle résistait encore au poids encombrant de ses mensonges. Un sourire amer ; pourquoi se posait-elle la question alors que la réponse était si évidente ? Amaélis fuyait. Même ici, sur les traces de quelque Ancêtre Maudit, elle devait plus chercher une excuse viable à son malheur qu’un moyen de ramener Lam’ parmi les vivants – et si elle ne mourait pas dans les ruines, ce serait probablement au cours du rituel. Qu’importait, après tout, tant qu’elle n’avait pas à affronter la vérité ? L’étreinte de la Dragonne autour du corps frêle de la Neishaane se fit plus cruelle.

° Tout est de ta faute. °
° Non… ° se défendit piteusement Amaélis, à peine consciente, et Ithildin, avec son esprit si étroitement emmêlé au sien, n’eut pas besoin qu’elle prononce les mots pour deviner la suite. Si tu avais arrêté de ne penser qu’à toi, tu aurais su que j’étais triste. Tu m’aurais aidée. Et aussi : quand me pardonneras-tu ?

Jamais.

~°~
Le Hall des Illusions, éveillé par la voix de Mora et par la magie longuement infusée dans un simple mot, se révéla dans toute sa splendeur sous le regard méfiant et guère impressionné de l’Airain. Si elle avait été émue, plus tôt, par la promesse de savoirs enfouis et bannis par les Dieux, excitant sa nature sacrilège, elle ne concevait plus que de l’horreur envers ce Màr. Et même si ce dégoût confinait à une fascination morbide dont elle se délectait sans honte, la Dragonne ne pouvait pas s’émerveiller du spectacle qu’offraient le plafond étoilé et l’improbable pierre obscure parcourue de veines cristallines, reflétant vaguement le nimbe argenté des constellations minérales. Amaélis, appuyée contre l’épaule de sa Liée, battit lentement des cils, crut un moment s’être égarée. Elle ne pouvait pas vraiment définir le sentiment qui l’enlaçait, à présent, bien plus doux que les bras de l’Airain mais semblable, en un sens, à celui qui la submergeait quand, au milieu des cris et de la haine, l’horreur se parait de longs voiles satinés, effleurant doucement sa peau meurtrie – quand la première fleur, hagarde et innocente, perçait son étau de neige éternelle et qui deviendrait son écrin et son tombeau – quand, dans ses cauchemars, la statue de bronze et d’argent ternis qui régnait sur la douleur s’auréolait du halo des saints.

Elle trouva alors la force de se redresser, passant une main fébrile à la commissure de ses lèvres gercées, découvrant avec un frisson écœuré le dépôt rugueux qu’y avaient laissé ses hurlements et ses larmes. Les yeux encore embués, elle croisa les iris d’améthyste de l’Ondine et se sentit frémir. Mora avait rempli sa part du marché, et désirait maintenant des réponses. Se dégageant doucement d’Ithildin, malgré ses jambes mal assurées, la Neishaane tourna sur elle-même, le visage levé vers la carte du ciel. L’évocation de la Quête des Deux Lunes lui était moins douloureuse qu’avant – les souvenirs, de manière générale, avaient moins de tranchant lorsqu’ils étaient confortablement immergés dans l’opium.

L’un de nous était un Aspirant, je m’en rappelle… L’Ardent aux yeux d’or a essayé de l’étrangler. Ensuite, ils ont tous voulu voler l’Obsidienne. J’ai chassé les Spectres avec ma voix ! Et quelques lunes plus tard, je les ai invoqués… Ah, c’est étrange.

Elle ferma les paupières, inhalant profondément l’air poussiéreux, la lumière diffuse, gonflant sa poitrine fluette, avant de finalement concentrer son regard d’orage sur Mora, un sourire indéchiffrable, ni rêveur ni halluciné, suspendu à ses lèvres. Amaélis ne dirait rien concernant Lam’ ; c’était là un secret qu’elle défendrait farouchement, jusqu’à la mort s’il le fallait.

En fait, on était quatre. Il y avait quelqu’un d’autre avec nous. Un Spectre, aussi. Il nous a aidés à traverser le Màr jusqu’à la pierre. C’est là qu’on s’est fait attaquer par le Dévoreur. Je sais plus très bien… Je voyais mon faux-frère et je me voyais moi. Pas moi. Une… chose. Blanche. Elle s’appelait Blanche. Je l’ai appelée Blanche. Et lui, il… Il voulait qu’on s’entretue.

Une pause, puis elle reprit, relâchant l’air contenu dans ses poumons : J’avais déjà l’impression qu’il m’avait suivie. Les gens de mon Ordre m’évitaient, comme s’ils avaient peur que ce soit contagieux.

La gracile Neishaane, à cette pensée, fut secouée par un rire maussade. Depuis quand quiconque avait-il besoin d’une tel motif pour la fuir ? À elle seule, et en-dehors, peut-être, de son joli minois, elle devait incarner toutes les raisons nécessaires pour qu'on fasse le choix de l'esquive. Elle leva les doigts pour relier les étoiles entre elles, continuant son récit d’une voix détachée.  

Quand je suis revenue ici, après, il ne m’a rien fait. J’étais pas vraiment dans le Kaerl, plutôt dans les ruines autour. J’avais même pas peur qu’il me retrouve, à vrai dire, j’y pensais même plus. Mais les cauchemars n’ont jamais cessé.

Tandis qu’elle virevoltait toujours, son regard glissa soudain sur les tribunes délabrées, où une forme bien trop pâle, presque scintillante, les observait. Amaélis sentit son cœur s’emballer et l’apparition fit mine d’applaudir, avant de disparaître dans un éclat de rire vibrant de gaieté, son écho s’écoulant à ses pieds comme les perles d’un collier, heurtant au compte-gouttes les dalles sombres et éclaboussant la peau fine de ses joues. Qu’était-ce encore que ce phénomène étrange ? Elle se tourna vers Ithildin, la bouche entrouverte par la stupéfaction, mais l’Airain ne fit que froncer les sourcils, comme pour la mettre au défi de retomber dans les griffes de ses illusions.

Nous pensons que le Dévoreur, étant donné l’esprit … délicat de ma Liée, aurait pu la marquer plus durablement que les autres. Que savez-vous de lui, en vérité ? Est-il capable de faire cela ?

Un courant d’air froid rampa contre les jambes de la Neishaane, souffla dans sa nuque pour finalement venir caresser son épaule. Instinctivement, elle regarda derrière elle pour tenter d’en identifier la cause. Grimhilde – était-ce bien elle ? – se tenait là, un doigt devant sa bouche, lui intimant le silence. L’apparition était plus lumineuse que dans ses rêves, plus spectrale. Une cascade de cheveux nacrés dévalait les contours harmonieux de sa silhouette galbée à la manière d’une robe, épousant ses formes indéfinies, changeantes. Son visage, lui, était le même, et ses lèvres trop pleines pour le commun des mortels, si licencieuses, s’étirèrent en un sourire satisfait alors qu’elle levait ses mains luisantes et fines comme pour saisir la tête d’Amaélis.

Tu es venue… Je suis si fière et heureuse de te revoir, ma douce enfant.

La voix ne sortait pas de cette bouche charnue, semblait venir de plus loin, suintant des murs ou résonnant depuis sous la terre, mais ses inflexions correspondaient aux expressions de l’Ancêtre. Amaélis n’osait plus esquisser le moindre geste, le cou tordu dans une position désagréable et le regard rivé sur ce que ses compagnes ne pouvaient pas voir. Ithildin s’était emparée de sa manche et l’interrogeait, résolument inquiète, mais la Neishaane lui avait déjà échappé. Ses yeux ne pouvaient plus se détacher de Grimhilde, pas plus que son esprit ne pouvait se soustraire à la terrible attraction que l’apparition exerçait sur elle.

Suis-nous, maintenant. Il est temps de reprendre ce qui t’appartient.

Et alors, d’un seul mouvement, Amaélis et l’Ancêtre s’élancèrent à travers le Hall. À chaque nouveau pas, il lui semblait que tout le Kaerl sortait de son long sommeil pour accompagner sa course effrénée, des formes vaguement humaines surgissant du sol comme d’immenses vagues brumeuses, mains tendues et visages déformés par des cris silencieux, avant de s’évanouir à nouveau. L’apparition avait disparu, mais la Neishaane entendait toujours son appel. Elle s’engouffra dans une déchirure béante à même le mur, tourna dans maints corridors, s’écorcha les genoux et les paumes en se faufilant dans des failles étroites. Ses poumons étaient brûlants. Ithildin, dans un coin de son esprit, hurlait désespérément, dans un mélange de colère et de peur panique. Elle n’avait plus conscience de tout cela. Elle ne pouvait pas lutter contre la prière troublante qui émergeait des profondeurs, et qu’elle était seule à pouvoir exaucer. Enfin, une arche étrécie se dressa devant elle, des armoiries effacées par le temps et l’oubli ornant le voussoir central. Une fois qu’Amaélis fut passée en-dessous, le passage se referma, la laissant seule dans l’obscurité.

~°~

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Valharin Eleicúran, Prêtre de Flarmya – Eir Eleicúran

Poussant un cri enragé, prête à revêtir sa véritable forme pour exploser la moindre pierre de ce Kaerl damné et retrouver sa Liée, Ithildin se jetait vainement contre le mur, dans une déferlante de fureur impossible à réprimer. Encore et encore, elle clamait le prénom de son Âme Sœur, la voix sur le point de se briser. La colère l’empêchait de se concentrer. Par le Lien, elle percevait toujours sa présence, mais ce n’était pas assez. Maudits parmi les Maudits ! Maudits, encore, eux et leur magie imprévisible ! Elle ne s’arrêta que lorsque le sang commença à perler de ses poings serrés, imbibant, aussi, les lambeaux de tissu qui pendaient lamentablement à son épaule. De l’obscurité jaillirent enfin deux chappes de vapeur irisée, qui, petit à petit, se muèrent en silhouettes vacillantes, puis plus définies. Une femme et un homme. La première était d’apparence fragile, aux traits ronds et enfantins, avec des yeux comme le plus sombre des lapis-lazuli. Le second, drapé des lourds manteaux richement brodés d’or et de cuivre, portait un masque étrange qui ne dissimulait que le haut de son visage. Tous deux possédaient la même chevelure d’albâtre qu’Amaélis. Ils contemplèrent longuement les étrangers.

Seul le sang de notre vénérée Ancêtre peut pénétrer ces lieux. C’est ainsi qu’il en fut décidé, bien avant votre naissance, et bien avant la notre également …

… N’y voyez là aucune forme d’offense, mes Dames.
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MessageSujet: Re: [RP] Des Profondeurs, nous crions   [RP] Des Profondeurs, nous crions Icon_minitimeLun 25 Fév 2019 - 15:58

[RP] Des Profondeurs, nous crions Mora_del_Caelan_Chignon_Tol_Orea [RP] Des Profondeurs, nous crions Nymelith_forme_humaine_moradelcaelan_tolorea
Mora del Caelan & La Bleue Nymelith
Shaman du Màr Tàralöm

Theme Song :
An Uncertain World – Vikings OST

Lentement, alors que les derniers échos de la voix de Mora s'éteignaient sous la haute voûte étoilée, la Neishaane frissonna, battant des cils comme au sortir d'un long sommeil, son expression hagarde se faisant plus franche tandis qu'elle portait une main fébrile à son visage et que son regard embrumé croisait, celui, imperturbable, de la Maîtresse Bleue. Les bras étroitement croisés sous sa poitrine, dans une attitude d'attente résolue, elle l'observa se redresser, puis se détacher de l'étreinte amère de son Airain pour faire quelques pas mal assurés vers l'intérieur de la salle.

Une infime crispation parut sur le visage hautain de l'Ondine lorsque la jeune fille pénétra insoucieusement sur la zone délimitée par le marbre sombre veiné de cristal. N'allait-elle pas déclencher quelque mécanisme magique oublié et raviver involontairement la magie sanglante du Hall des Illusions ? Dans l'état dans lequel la Neishaane se trouvait, elle n'était pas du tout de taille à subir une telle mise à l'épreuve … Et il n'était pas dans ses intentions de laisser le savoir qu'elle détenait sans doute, lui échapper pour des raisons aussi futiles. Elle ne fit cependant aucun mouvement en sa direction, se contentant de l'étudier du regard, Nymelith silencieusement dressée dans son dos comme une vigilante sentinelle d'albâtre et de nuit. Elle ne se mettrait pas en danger pour une vulgaire intruse, fut-elle descendante, elle aussi, du Màr Maudit.

Quelques secondes s'écoulèrent douloureusement, le temps de quelques battements de cœur, dans une ambiance lourde de tension, et nul sortilège ne se déclencha pourtant. En elle se disputèrent alors un soulagement ambigu et une sourde déception, tandis qu'obscurément, et bien que plusieurs pieds d'un épais plafond de pierre les en séparent, il lui semblait toujours percevoir le déchaînement sauvage de la tempête au dessus du Kaerl. Alors, au grand agacement de l'Ondine, tournant son visage vers la carte du ciel et ses étoiles scintillantes, toujours sans répondre, la frêle Neishaane tournoya doucement sur elle-même, comme pour s'imprégner de l'atmosphère particulière des lieux. Quand enfin la jeune fille prit la parole, inspirant profondément avant de fixer un regard à la lueur étrange sur Mora, ce fut pour lui livrer un récit décousu et incohérent sur la Quête des Deux Lunes. L'Ardent aux yeux d'or faisait de toute évidence référence à ce traître d'Azdraiël, quant au reste … Il était difficile de tirer quoi que ce soit de concret de son histoire, et en particulier de sa rencontre avec le Dévoreur. Où était-il d'ailleurs, à présent ? Allait-il les suivre jusqu'au Hall des Illusions, sa demeure et prison initiale, attiré par l'esprit de la Neishaane comme un papillon par la flamme d'une bougie ? Laquelle bougie semblait se consumer encore et toujours plus, à chaque minute supplémentaire passée au sein du Màr Dìnen ...

Une nouvelle fois, la frustration flamba en elle, et les ongles de la magicienne s'enfoncèrent légèrement dans la propre chair de son bras, seule manifestation extérieure de cette soif inextinguible qui la tourmentait. Le savoir allait-il indéfiniment se dérober à elle ? N'avait-elle pas suffisamment prouvé sa valeur ? Sa quête, ancrée en elle par son héritage familial dès son plus jeune âge, était-elle vouée à rester vaine ? Percevant sa douleur, la Bleue se rapprocha doucement de son âme-soeur, vrillant un regard acéré sur l'Airain et sa Liée qui virevoltait toujours imprudemment, tout en allant enlacer de ses bras la taille mince de son Ondine, dans un mouvement protecteur et possessif. Folie que tout cela. Les risques auxquels Mora avait accepté de s'exposer ne valaient visiblement pas le prix qui lui avait été promis. Devaient-elles en finir dès maintenant avec leurs adversaires, et abreuver de leur sang bouillonnant les brillants cristaux sis au cœur du marbre ? Cette question aux mortelles conséquences flottant en bordure de son esprit, elle reporta son attention sur sa Liée, laquelle secoua lentement la tête, les lèvres pincées. Très bien. Sans le savoir, les deux intruses venaient de gagner un précieux sursis dans la prolongation de leur misérable existence.

Et comme pour leur donner raison, comme mue par une intuition inconsciente, l'Airain se tourna vers elles pour les questionner, sur un froncement de sourcils réprobateur en direction de la Neishaane qui la fixait à présent, une expression de pur étonnement altérant son visage maculé de souillure. Etait-elle de nouveau la proie aux mêmes hallucinations que précédemment ? Mora espérait que non, car qui pouvait savoir la puissance et la réalité qu'elles pourraient prendre, en plein centre du bien nommé Hall des Illusions ? Un soupir contenu au bord des lèvres, l'Ondine reporta son attention sur l'autre dragonne dans son enveloppe de chair et de sang, secouant la tête et accompagnant son mouvement d'un haussement d'épaules négligent. Elle comptait bien lui livrer uniquement le minimum requis pour paraître crédible à ses yeux.

« Je n'en sais guère plus que ce que vous semblez déjà savoir. Le Dévoreur s'attaque à l'esprit de ses victimes en jouant tant avec leurs souvenirs que leurs peurs les plus profondes. C'était ainsi que les membres du Kaerl étaient mis à l'épreuve et sommés de prouver leur valeur. Ceux qui ne survivaient pas, ou perdaient la raison, étaient considérés comme des faibles indignes de faire partie du quatrième Ordre Draconique.
La nature exacte de ce monstre s'est perdue à travers le temps. Est-ce une création des Valherus, ou une créature démoniaque asservie à l'aide de leur puissante magie ? A moins qu'elle ne soit le fruit des recherches occultes des Maîtres Dragons qui prirent leur suite à la tête du Kaerl … Sans savoir ce qu'il en est précisément, et ce dont il est capable réellement, il m’apparaît complexe de lutter contre son pouvoir. »


Laissant sa voix mourir sur ses derniers mots, Mora s'interrogea, l'expression sombre, et les iris rivés sur le plafond obscur et ses étoiles de diamant. Etait-il en effet possible que le Dévoreur ait apposé sa marque sur l'esprit fragile de la Neishaane ? L'avait-il reconnue pour ce qu'elle était et décidé de l'épargner pour jouer un peu plus longtemps avec son âme ? Dans une attitude faussement languissante, elle se laissa aller dans l'étreinte protectrice des bras de Nymelith, laissant reposer sa tête avec légèreté contre son épaule. Elle songea alors qu'Aubiade était probablement la seule à même de pouvoir répondre à cette question, et se promit d'aller l'interroger une fois encore, dans le cas où les voiles de la vérité resteraient opaques à ses yeux. Car qui, après tout, était mieux placé que la Gardienne pour détenir les clés de cette énigme que constituait le Dévoreur ? Seuls les Spectres étaient peut-être, également, en capacité d'apporter leurs connaissances sur le sujet, ayant affronté la créature et survécu à son épreuve. Mais l'Ondine le savait pertinemment, ils resteraient muets, leurs lèvres étroitement closes par le sceau du secret imposé par Aubiade del Cirth.

Puis son regard d'améthyste pâle dériva lentement vers la jeune fille, qui s'était immobilisée, tordue et paralysée dans une position étrange, la tête tournée par dessus son épaule, hypnotisée par quelque invisible illusion, tandis que l'Airain, accrochée à sa manche, tentait de la ramener à la réalité. A la voir ainsi, l'hypothèse d'une malédiction du Dévoreur comme raison de sa folie lui paraissait plausible. Rien de plus qu'une marionnette soumise entre les mains de sa Liée … Et s'il était possible de lui en arracher le contrôle ?

Cependant, l'arrachant à ses réflexions, comme une sculpture de cire s'animant soudain, échappant à l'étreinte de sa dragonne, la Neishaane s'élança brusquement à travers le Hall, dans une course effrénée qui l'amena bientôt à une trouée créée par un ancien éboulement, dans laquelle elle s'engouffra avant de disparaître. Aussitôt, alors que l'Airain s'élançait vivement à sa poursuite, Mora se retourna vers Nymelith, croisant son regard furieux, et posant une main ferme sur son bras, l'enjoignit à suivre sans attendre la trace des deux intruses.

**Mora ...**
*Va, Nymelith. Je serai juste derrière toi.*
**Je refuse de te laisser seule ici ! Qui sait ce qu'il pourrait advenir ?**
*Nous ne pouvons pas nous permettre de les laisser s'échapper.*

Le ton employé ne laissant place à aucune discussion, la Bleue se détourna à contre-coeur, avant d’emboîter le pas à l'autre dragonne, qui avait déjà atteint l'autre bout de la salle. Alors l'Ondine se dirigea vers l'orbe reposant toujours sur son piédestal, et passa une main caressante sur sa surface, murmurant les mots de pouvoir adéquats. La lumière issue des veines de cristal décrut lentement avant de s'éteindre complètement, tandis que l'orbe se mettait à briller d'une lueur plus franche. Autant ne pas s'aventurer dans les profondeurs du Màr Dìnen dans l'obscurité complète, car nul ne pouvait prévoir les dangers qui rôdaient encore dans les corridors en ruine de cette partie du Kaerl.

***

Sa poitrine soulevée par une respiration saccadée, Mora pénétra dans le cul-de-sac quelques minutes seulement après Nymelith, qui tourna un visage à l'expression fermée vers elle. Là, tout contre l'arche de pierre, l'Airain hurlait en vain le prénom de sa Liée, heurtant de ses poings le mur comme si cela pouvait suffire à lui autoriser le passage. Une vision partagée en provenance de la Bleue lui montra la jeune fille pénétrant sous l'arche aux gravures à demi effacées, puis le mur se reconstituant, comme par magie, juste après son passage. Etait-ce un piège prêt à se refermer sur le premier innocent venu, ou bien quelque chose de plus subtil et calculé ? La magicienne pinça les lèvres de dépit, et porta une main à la turquoise nichée entre ses seins, prête à concentrer sa magie pour rechercher une autre entrée pour rejoindre ce qui pouvait bien se cacher derrière cette inexpugnable façade.

**Sais-tu où nous sommes ?**
*Je ne saurais le dire avec certitude, après tous ces tours et ces détours …*

Prise à son propre jeu, hein ? Elle qui avait songé profiter de sa connaissance des lieux pour égarer les deux intruses se trouvait à présent dans l'incapacité de déterminer avec précision leur position … Cela lui déplaisait fortement, et ce d'autant plus qu'elle le devait à un soudain coup de tête d'une demi-folle dégénérée.

**C'était comme si … La Neishaane savait où elle allait. Penses-tu qu'elle nous aurait menti ?**
*Si c'est le cas, sa Liée n'en savait rien non plus.*

Et cette pensée n'avait rien de satisfaisant. A quel point la folie rongeait-elle l'esprit de cette frêle jeune fille ? Alors que le désespoir évident de l'Airain était petit à petit noyé par une apparente colère dévastatrice, sa tenue réduite à de misérables lambeaux de tissu ensanglanté, l'attention de Mora fut attirée par un phénomène étrange. Deux petites volutes de vapeur, luisant sourdement à la maigre lumière de son orbe magique, qui lui semblaient maintenant grandir et prendre de l'ampleur au fur et à mesure qu'elle les détaillait du regard. Un coup d'oeil vers l'autre dragonne lui confirma qu'elle n'était pas la seule à l'avoir remarqué. Puis, petit à petit, apparurent, tout d'abord indistinctes, deux formes vaguement humanoïdes, qui ne tardèrent pas à se métamorphoser en la silhouette d'un homme et d'une femme, richement vêtus et couronnés d'albâtre. Quel rôle ces Spectres avaient-il à jouer dans la disparition de la Neishane ?

Le silence s'étira longuement, tandis que les différents protagonistes de l'étrange scène se jaugeaient, non sans une certaine défiance. Derrière elle, en dépit de l'étroitesse du couloir, Nymelith avait nerveusement repris sa forme originelle, prête à emporter son Ondine à travers l'Interstice vers l'extérieur du Kaerl. Cependant, quand les voix des deux Spectres résonnèrent dans l'esprit de la Shaman, ses yeux s'écarquillèrent et une lueur de convoitise alluma une flamme pâle dans ses iris d'améthyste. ''Le sang de leur vénéré(e) Ancêtre'' ... Faisaient-ils référence à leur ancêtre Valheru ? Qui était-il, ou elle ? Cela signifiait-il que la jeune fille était de leur sang, qu'elle était bien issue d'une lignée originaire du Màr Ilmarë, descendante de l'un des Neuf ?

Jetant un bref regard d'avertissement à la Bleue qui s'était ramassée sur elle-même, attentive et protectrice, Mora s'inclina à demi devant les deux apparitions, dans un froufrou soyeux, vivante image de la noblesse, réprimant son impatience. Les Spectres s'étaient montrés fermes mais courtois, et cela déterminait pour elle le registre de leurs échanges à venir.

« Messire, ma Dame. Permettez-moi de me présenter. Mon nom est Mora, descendante en droite ligne de Vanadiel del Caelan, membre du Màr Ilmarë, qui fut le dernier fils de la Lignée del Caelan, elle-même forte du sang de la puissante Valherue Atsìla-Êdna, dernière Dame Améthyste à l'époque des Guerres du Chaos. J'oeuvre en ces lieux avec la bénédiction de la Gardienne Aubiade del Cirth. »

Elle s'interrompit brièvement pour reprendre sa respiration. Peu lui importait que l'Airain soit là à l'écouter à présent. Son importance pâlissait, et de loin, devant la présence des deux Spectres.

« Puis-je vous demander à quelle Lignée appartient votre descendante, et quel est le but qu'elle poursuit ? »


(HRP : "quel est le but qu'elle poursuit", le "elle" fait référence aux buts de la Lignée / de la famille Eleicúran, mais tu peux choisir de l'interpréter comme elle = Amaélis ^^)


L'on rencontre souvent sa Destinée
Par les chemins que l'on prend
Pour l'éviter
***

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MessageSujet: Re: [RP] Des Profondeurs, nous crions   [RP] Des Profondeurs, nous crions Icon_minitimeLun 25 Fév 2019 - 16:02

Dans un doux crissement, la Dame Ondine s’était inclinée, auréolées de ses jupes comme de maints pétales de nuit, et Ithildin aurait voulu lacérer son visage si parfait. Son regard brûlant se porta sur les deux Spectres. Comment arracher la vérité à de simples apparitions, tout à fait dépourvues de consistance ? Elle sentit le bout de ses ongles racler contre la peau fine de ses paumes. Et Mora, perle nacrée dans un écrin de velours sombre, en était désormais à vanter son lignage comme la dernière des parvenues. N’y avait-il rien, dans les propos que tenaient ses lèvres charnues, qui n’ait la saveur acide et entêtante de la belladone ? La Dragonne réprima un grondement d’impatience, et son poing, où le sang avait déjà commencé à sécher, alla trouver une nouvelle fois le mur qui avait englouti sa précieuse Liée.

La femme avait esquissé une révérence, mais son compagnon était resté immobile, les mains jointes comme en une prière au niveau de sa poitrine, aussi expressif que les statues alentours. Il s’agissait sûrement là d’autres Ancêtres de la Neishaane, et l’Airain aurait été curieuse de pouvoir les sentir autrement qu’à travers le voile de la Malédiction. Comment étaient-ils, de leur vivant ? Avaient-ils cette même odeur de neige sauvage, de poussière et d’acier ? Leur peau avait-elle le goût de la cendre ? Elle croisa les iris aux profondeurs insondables de la Spectre et des frissons la secouèrent violemment. Pourtant, celle-ci lui accorda un léger sourire, presque tendre, et il flottait à la surface de ses yeux une brume qui lui rappela la folie d’Amaélis – une douleur à faire s’effondrer les fondations même de Rhaëg.

Je me nomme Valharin, Prêtre de Flarmya, et voici ma jeune sœur, Eir. Nous sommes les descendants de la très honorée Grimhilde Eleicúran, unique héritière des savoirs de la Valherue Laimë-Ninquë, l’Ombre-Pâle.

À la mention de Grimhilde, Ithildin tourna la tête en direction de l’homme éthéré, babines retroussées. Elle avait vu l’Ancêtre, dans les rêves d’Amaélis ; avait perçu son souffle millénaire et senti la pression de ses lèvres sacrilèges. La Dragonne craignait ses véritables intentions. La barrière qui séparait ce monde de celui d’Isashani n’était pas de celle que l’on pouvait traverser à son gré. Même si les entrevues fantasmées avaient paru vraies, l’esprit d’Amaélis n’était-il pas capable de créer les illusions les plus parfaites ? Autour de la Neishaane, l’univers matériel perdait de sa consistance, et le réel ne devenait rien de plus qu’un terrain de jeu malléable, complètement perméable à ses rêveries les plus tordues.

Cette jeune femme que vous accompagnez vient reprendre possession de la mémoire qui lui fut jadis dérobée, reprit Valharin d’une voix sentencieuse, quoiqu’une étrange moquerie semblait s’en écouler. Nous vous sommes reconnaissants, fille des Del Caelan, de l’avoir guidée jusqu’ici.

Quant à toi, Dragonne, apaise-toi. Ta Liée saura retrouver son chemin – ou alors, elle n’était pas digne de son héritage.

Sans exprimer la moindre joie, les lèvres de la Dragonne s’étirèrent en un fin croissant de lune. Elle n’ignorait pas que son Âme Sœur finirait par perdre la vie, à force d’arpenter les corridors moribonds du Kaerl Oublié de la même manière qu’elle s’égarait, en pensées, dans les méandres de son esprit. Elle avait espéré, cependant, être là pour contempler sa chute – arracher, peut-être, un peu de sa chair pâle, ainsi qu’elle l’avait rêvé chaque nuit depuis leur retour de la Lande. Il était hors de question de la laisser lui échapper maintenant.

Il faudra plus qu’un mur pour m’empêcher d’aller la chercher, et plus que vos vulgaires sortilèges pour me dompter. Je saccagerai vos os maudits si vous choisissez de vous dresser contre moi ; il n’a pas été dit que les Spectres ne sauraient souffrir.

Les menaces de l’Airain, étrangement calmes, résonnèrent contre les vieilles pierres et leur souffle chaud vint en chasser quelques grains de poussière – comme la promesse d’un embrasement à venir.

~°~

L’obscurité était opaque. Le propre bruit de ses pas était étouffé par les siècles, à l’image d’un linceul intangible déposé là pour dissimuler l’existence de ces lieux au regard du monde. Ses doigts, fébriles, glissaient le long de ses bras, grattaient sa peau pâle. La Neishaane se raccrochait à elle-même pour ne pas perdre la certitude de sa présence. La voix de l’Ancêtre avait disparu – il ne restait plus que la pulsation lointaine de cœurs trop anciens sous sa chair. Les bandes de jizdine restaient insensibles au contact de sa paume tandis qu’elle avançait, chancelante, dans les ténèbres. Pourtant, il lui semblait avoir trouvé un espace où ses démons ne pouvaient plus l’atteindre. Amaélis se sentait différente, à chaque nouvelle inspiration. Elle était lourde, puis légère ; jeune, puis vieille. Tout son corps réagissait à la proximité de ces souvenirs perdus et qui l’avaient tant appelée. Une vibration sourde émanait de sous ses pieds, un rugissement oublié évoquant le vacarme si particulier d’un incendie.

Tout ce que nous avons perdu dans les flammes…

Elle avançait plus vite, à présent. Son regard, à mesure que le noir s’épaississait, percevait plus facilement l’éclat discret de l’orichalque et du métal incrusté sur les bas-reliefs. Pour la première fois de sa vie, Amaélis songea qu’elle n’avait plus peur. Peu importait ce qui se tenait au bout du chemin – peu importait où la mènerait sa folie. Peu importait qu’il s’agisse là, peut-être, de son dernier voyage. Elle s’était abandonnée il y a trop longtemps pour craindre encore de se perdre. Il n’y avait pas de regrets ; il n’y avait qu’une envie féroce de voir cette vie arriver à un terme. Tant pis pour ceux qu’elle laissait derrière elle, car elle préférait les oublier. Tant pis pour ceux qui étaient morts, car elle ne voulait pas qu’ils souffrent encore de ses choix dans l’au-delà. Tant pis pour Ithildin, car son existence ne pouvait se résoudre que par sa disparition. Tout espoir de paix leur était défendu, ici, maintenant, sous ces formes absurdes et brisées. Les rêves de l’Airain étaient imprimés dans son âme, et la Neishaane savait. Elles devaient briser le ciel, tout comme la Dragonne avait percé sa coquille, pour renaître ailleurs.

Un murmure s’éleva alors, très doux, sans doute venu du cœur de ce labyrinthe désert, et avec lui une lumière tendre et pâle, dont l’haleine tiède vint caresser ses joues et jouer avec quelques mèches couvertes de sueur. Face à la jeune Maîtresse déchue se dressait désormais un puits à moitié effondré, sur lequel se tenait la silhouette évanescente, souriante, de Grimhilde. L’Ancêtre était simplement assise là, un genou remonté contre sa poitrine, et le bout de ses doigts trempaient délicatement dans une eau que la Neishaane ne pouvait pas voir.

Tu es tout près, maintenant… Je peux te sentir, ah ! Comme je peux sentir la clameur insensée de mon sang dans tes veines !

Son visage nébuleux n’offrait rien d’autre que la plus pure expression d’extase, et Amaélis sentit un frisson la traverser. L’apparition s’était levée, drapée dans sa chevelure nacrée, et tournait autour de la Neishaane d’un pas léger.  

Viens, viens. Si tu savais à quel point je te désire… Je t’aime déjà, mon enfant.

Son cœur se serra à ces paroles. Elle ne souhaitait rien plus que de faire confiance à Grimhilde, à ses traits aimants. Elle se laissa bercer et entraîner par les serments chuchotés à son oreille, comme elle l’aurait fait pour une amante fervente, une sœur ou une mère. Alors, elle prit la main de l’Ancêtre sans la toucher, et toutes deux s’enfoncèrent un peu plus dans les profondeurs de la terre.

Après maints corridors, la forme translucide de Grimhilde était devenue plus lumineuse, plus définie – révélant le rose pastel de ses lèvres, le blanc laiteux de son front. Elles avaient fini par s’arrêter dans une large pièce au toit, comme celui du Hall des Illusions, percé d’étoiles frémissantes. Des statues anonymes, qu’on avait polies pour ne rien montrer de leur visage, étaient disposées régulièrement le long des murs sombres, et leurs mains jointes avaient dû autrefois tenir des bougies. Elles veillaient sur un simple autel de marbre noir, solitaire, trônant au milieu de la salle. Un puissant sentiment, mélange d’avidité, de douleur et de crainte terrible, frappa la Neishaane, la faisant tomber à genoux. Elle pouvait sentir le poids de tous ces yeux qui la regardaient, même s’ils avaient été effacés. Le halo irisé de l’Ancêtre peuplait tout l’espace autour d’elles, et celle-ci vint se pencher sur Amaélis. La voix tremblante d’anticipation, elle déclara doucement :

Il est temps, ma fille. Des profondeurs nous crions, et rien n’est sourd à nos chants. Joins ta voix à la nôtre. Empare-toi de ton héritage. Chante notre chanson.

Sans tout à fait savoir comment elle en avait trouvé la force, la Neishaane parvint à se redresser et avança d’une démarche chancelante vers l’autel. Ses iris noyés de larmes étrangères se posèrent sur la pierre qui se trouvait là, et au fond de laquelle tout un univers semblait se mouvoir langoureusement.

° Ithildin, pardonne-moi. °

La Maîtresse Dragon prit une dernière inspiration, et ses doigts se refermèrent autour de l’Ambre-Âme. Derrière elle, Grimhilde s’était évaporée.

~°~

Un visage aussi doux que le halo de la Lune, et des yeux où se reflètent une myriade de nébuleuses. Un goût métallique, persistant, sur le bout de la langue … Un doigt posé sur des lèvres froides … Dans la pénombre, une silhouette entrevue, les bras levés. Une rivière de soie, d’améthyste et de jade. Le crépitement des flammes sur une peau laiteuse … Une Déesse cruelle, dont les courbes aimantes dissimulent des paroles ancestrales … Des frères et des sœurs qui ne riront plus. Ils ne sont plus que trois : la fille et son frère, cheveux emmêlés, et l’autre, avec sa parure de nuit, toile parfaite pour qu’y soient brodés des fils d’étoiles …

La peur, constante.

Des œufs opalescents qui se fissurent. Une voix, un nom. Aisling. D’autres voix, intransigeantes, sacrilèges. Leur œuf est brisé. Une main tremblante effleurant son front baigné de nacre … Mère, ô mère détestée et merveilleuse, je ne laisserai pas votre héritage vous rejoindre dans l’Oubli … Deux silhouettes opposées qui s’effacent, et elle qui se tourne dans l’autre direction, pour toujours.
Des murs sertis d’or et d’argent. Un flanc d’écailles où repose sa tête, fatiguée, couronnée d’épines et de perles noires … Quelques talismans qu’elle fait rouler entre ses doigts habiles. Des symboles gravés dans sa chair ; un langage honni des Dieux. La lumière, brûlante … Des bras forts qui l’étreignent et qui la soulèvent. Le poids de la honte et de l’amour entre ses cuisses. Dans le miroir, son ventre qui s’arrondit en même temps que les Lunes …

Des ailes qui se déchirent.

Un hurlement, lointain, qui enfle. Le voile est lacéré … rendez-la moi. Des lambeaux opalescents s’en détachent, s’étiolent. Sa poitrine emplie de plomb en fusion. Des braises qui éclaboussent ses joues pâles … Un vide insondable. La pluie tombe vers le ciel. Son âme n’est plus … Une ombre qui grandit, éclipsant les dernières lueurs de sa raison. Une ombre qui grandit, et sa gueule qui vomit des trésors cruels.

Rendez-la moi. Rendez-la moi.

Des caresses purpurines dégoulinent le long de ses bras cassés. Rendez-la moi. Des yeux qui aspirent l’univers et qui éteignent une à une les étoiles … Des murmures mercuriels qui l’enlacent et des mains qui agrippent ses chevilles. Son sang, damné, traçant le sceau – rendez – d’une malédiction sur le sol fertile.                     Rendez-la moi

Il n’y a plus rien.

Quelques cris d’enfants au milieu de la nuit. Une prière ébauchée par des lèvres sèches et qui s’envole au-dessus des flammes.

La chair fondra en silence.


~°~

De l’autre côté du mur, l’Airain s’était effondrée, retenant à grand peine ses cris de douleur. Eir s’était agenouillée auprès d’elle, une main spectrale comme posée sur son dos tremblant, tandis que Valharin penchait la tête d’un air solennel.

La jeune Neishaane a accompli ce pour quoi elle est venue. Je ne peux cependant vous garantir qu’elle se réveillera – ni quand.

Trouvez un endroit où vous reposer. Puis, Eir ajouta à l’attention d’Ithildin : Nous veillerons sur ta Liée, Dragonne, je t’en fais le serment.
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MessageSujet: Re: [RP] Des Profondeurs, nous crions   [RP] Des Profondeurs, nous crions Icon_minitimeLun 25 Fév 2019 - 16:02

[RP] Des Profondeurs, nous crions Mora_del_Caelan_Chignon_Tol_Orea [RP] Des Profondeurs, nous crions Nymelith_moradelcaelan_tolorea
Mora del Caelan & La Bleue Nymelith
Shaman du Màr Tàralöm

Theme Song :
Jericho – City of the Fallen

L'animosité palpable de l'Airain lui vrillant les sens, Mora s'était contentée de laisser fleurir sur ses lèvres purpurines un léger sourire hautain, vaguement méprisant. Une main reposant dans le creux de sa hanche, elle détaillait avidement les silhouettes évanescentes des deux Spectres, son attention entièrement focalisée sur eux, laissant à Nymelith le soin de prévenir toute attaque en provenance de l'autre Dragonne.

L'air lui semblait saturé d'une lourde tension, d'un pouvoir quasi palpable, chargé d'une saveur particulière, comme un relent de magie oubliée et de secrets d'outre-tombe, qui ne manquait pas de provoquer en elle une sourde excitation, accélérant les battements de son cœur et rougissant ses joues. Même l'intérêt qu'avait éveillé l'Airain et son sang maudit de Neishaane pâlissait maintenant peu à peu devant la possibilité d'obtenir des réponses depuis si longtemps convoitées. Car les deux Spectres lui paraissaient d'une nature plus ''réelle'' que ceux qu'elle avait pu rencontrer jusque là, plus affirmés, plus maîtres d'eux-même et de leur incarnation physique. Cette possibilité de dialogue avec le passé … Sa sourde colère, provoquée par le fait que la Liée de l'Airain lui ait filé entre les doigts, se dissolvait lentement, remplacé par une intense concentration.

Les lèvres entr'ouvertes sur un sourire soigneusement élaboré, l'allure altière même au cœur de la pénombre poussiéreuse du couloir, l'Ondine était parfaitement à son aise, en dépit de la singularité de la scène dans laquelle ils se trouvaient acteurs. A peine permit-elle un frémissement de ses paupières, frangées de longs cils d'un noir d'encre, lorsque l'Airain alla une nouvelle fois abattre son poing ensanglanté sur le mur de pierre, persistant dans la démonstration de son comportement frustre et autodestructeur. Elle s'occuperait d'elle en temps voulu. Pour l'heure, seules l'intéressaient les réponses des deux Maudits.
Cependant, lorsqu'ils se présentèrent comme membres de la Lignée des Eleicúran, se réclamant descendants de la Valherue Laimë-Ninquë, Mora ne put retenir une réaction de surprise et d'intérêt étroitement mêlés, ses pupilles s'étrécissant, alors que son ventre se tordait sous les affres délicieuses de la convoitise. De tout ce qu'elle aurait attendu, ceci … Dépassait toutes ses espérances. S'il était une Lignée reconnue, du temps de l'âge d'or du Màr Ilmarë, pour les savoirs qu'elle détenait, et une Valherue célèbre pour les expériences extrêmes qu'elle avait conduite – n'avait-elle pas tenté de fusionner avec sa propre dragonne, provoquant ainsi sa perte ? – c'était bien les Eleicúran, et la redoutée Laimë-Ninquë. Rien d'aussi haute extraction que sa propre ancêtre, la Dame Améthyste Atsìla-Êdna, quoi que cette dernière ait surtout poursuivi, durant sa courte vie, une recherche permanente du plaisir et de la jouissance sous toutes ses formes … Mais néanmoins, cette rencontre avec les deux Spectres prenait soudain une valeur d'autant plus inestimable.

Avec une lenteur consciencieuse, celui qui avait été autrefois Prêtre de Flarmya reprit la parole, évoquant une mystérieuse ''mémoire dérobée'' et lui assurant leur reconnaissance quant à sa guidance de la petite Neishaane. Bien que recelant quelque nuance voilée de sarcasme, ses paroles ne manquèrent pas d'arracher à la magicienne un sourire à peine incrédule, ses lèvres se retroussant, une nouvelle fois, sur un sourire chargé d'une certaine dérision. Croyait-il sincèrement qu'elle avait guidé jusqu'ici cette enfant Maudite et sa Liée folle furieuse juste par bonté de cœur, ou loyauté envers une lointaine affiliation commune ? Elle ne désirait rien tant que lui arracher tous ses vilains petits secrets, et de la voir ravaler son insoucieuse attitude provocatrice pour se soumettre à son pouvoir. Quant à son Airain, elle ferait un sujet d'étude tout à fait convenable.
Soudain frémissante, elle fut traversée d'une pensée qu'elle ne put considérer que comme teintée d'un profond hérétisme. Les Améthystes étant définitivement perdues … Ne serait-il pas possible de les remplacer par d'autres femelles, marquées par le Chaos et les Cieux, qui serait dignes d'être considérées comme des Reines ? Serait-il possible de … reproduire l'anomalie constituée par la naissance des Airains ?

Serrant ses bras contre son corps mince pour contenir le trouble soudain que provoquait en elle cette idée, elle se mordit légèrement la lèvre inférieure, détournant son regard vers Nymelith, tandis que le Spectre s'adressait à l'autre dragonne. Calmes et attentives, les prunelles opalescentes de la Bleue rencontrèrent les iris d'améthyste de son Ondine, lui insufflant silencieusement toute la confiance qu'elle éprouvait envers elle. L'idée de mener des expériences sur l'une de ses sœurs la laissait de marbre. Si c'était ce qu'avait décidé sa Liée et que cela servait ses projets de renaissance du Kaerl Maudit … Alors elle la suivrait. Mais, en attendant, mieux valait se reconcentrer sur des savoirs plus à portée immédiate. Dans un élan féroce, elle alla enlacer étroitement l'esprit de Mora, absorbant en elle la flamme de l'impatience qui couvait sous le masque impassible de sa parfaite enveloppe de chair, s'abreuvant à ce fleuve ardent pour apaiser les tourments de son âme, qui résonnait encore trop peu avec l'obscurité souterraine du Màr Agarwaen. Un jour viendrait, se promit-elle à nouveau, où, en compagnie de sa Liée, elle admirerait ses splendeurs étoilées dans toute leur gloire renouvelée.

**N'a-t-il pas admis qu'ils t'étaient ''reconnaissants'' ?**

Aussitôt, les implications subliminales de cette question lui apparurent instinctivement. Pourrait-elle jouer là-dessus ? Fronçant des sourcils méfiant devant les menaces de l'Airain, Mora se contenta pourtant de rester en retrait malgré son irritation, silhouette silencieuse et scrutatrice. Elle ne comptait pas se mettre en travers de son chemin, pas au vu de l'ardeur meurtrière qui émanait d'elle comme une aura étouffante … Mais elle ne comptait pour autant pas tirer un trait complaisant sur cette rencontre du destin, cet instant vers lequel, soudain, sa vie entière semblait avoir été vouée à la conduire. Pas pour satisfaite les caprices d'une dragonne colérique, quand bien même sa Liée lui aurait-elle été dérobée par les Spectres comme elle le pensait visiblement.

Ils lui devaient une réponse, échange de bon procédé en récompense de sa complicité – même involontaire – dans l'achèvement de leur dessein vis à vis de leur descendante. Avant toute chose, de quelle mémoire parlaient-ils exactement ? Quelles étaient leurs intentions vis à vis de la Neishaane ? Comment l'avaient-ils attirée ici ? Tant de questionnements sans réponse la taraudaient, qu'il lui était difficile de faire le tri parmi la multitude bouillonnante de ses pensées.
Aussi, lorsque l'Airain s'effondra brutalement au sol, manifestant une douleur d'origine inconnue, Mora porta un regard extérieurement froid sur elle, peu émue devant sa détresse. Elle ne faisait aucune confiance aux Spectres, mais quelle que soit leur implication dans le mal soudain qui frappait la dragonne, ils ne la tueraient pas, s'ils tenaient à conserver en vie leur précieux petit pion. Et si la Neishaane avait réellement accompli sa ''destinée'', alors le temps pressait.

Reprenant donc son rôle sophistiqué, brossant avec détachement le velours de ses jupons, l'Ondine s'avança en direction du Prêtre de Flarmya au visage masqué, après un bref coup d'oeil à la jeune femme qui s'était agenouillée auprès de l'Airain. Des deux membres de la fratrie, il était celui qui lui paraissait le meilleur choix comme potentiel détenteur d'un des savoirs les plus précieux auxquels elle aspirait. Et puisqu'elle était toujours incluse dans leurs instructions …

« Maître Valharin Eleicúran, avant de nous séparer, je souhaiterais me permettre de mettre à l'épreuve votre reconnaissance envers moi vis à vis de la réalisation de vos nobles ambitions. Il est un savoir que même la Gardienne Aubiade del Cirth, sous la protection de laquelle je vais et je viens à mon gré dans les salles du Màr Ilmarë, se refuse à partager avec moi, pourtant fidèle descendante de ceux qui furent auparavant les Seigneurs de ces lieux. Un mystère que malgré mon application et mes connaissances, je ne parviens pas à éclaircir, quelque chose qui aurait été impliqué, de près ou de loin, dans les événements ayant conduit à la chute du Kaerl. »

Ses iris améthystes effleurèrent du regard la dragonne prostrée, évaluant la menace que le partage de ce secret pourrait faire courir sur ses projets futurs. La magicienne battit brièvement des paupières, prenant le temps de choisir soigneusement ses mots pour formuler sa demande. Il serait préférable que l'Airain en sache le moins possible.

« Pour faire bref, en gage de remerciement et de par mon héritage, je revendique le droit de connaître ce qui se trouve derrière le sceau que je viens de vous évoquer. »

Si le Prêtre savait, Mora supposait qu'il devinerait aisément ce qu'elle sous-entendait par là.


L'on rencontre souvent sa Destinée
Par les chemins que l'on prend
Pour l'éviter
***

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Amaélis Eleicúran
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MessageSujet: Re: [RP] Des Profondeurs, nous crions   [RP] Des Profondeurs, nous crions Icon_minitimeLun 25 Fév 2019 - 16:06


Amaélis fit des rêves étranges. Ce n’était pas qu’elle n’en avait pas l’habitude, mais ceux-là dépassaient, et de loin, ce qu’était d’ordinaire capable de produire son esprit malade. Elle avait conscience, intimement, qu’il s’agissait moins là de songes que de réels souvenirs, quand bien même le décor de ce Màr ne pouvait être qualifié autrement que d’ésotérique – et tout ce que percevaient ses sens se teintaient de nuances trop oniriques pour être évoquées par les mots. Amaélis fit des rêves étranges, et ceux-là durèrent toute une vie. Une vie courte, mais cela faisait déjà beaucoup.

~°~

[RP] Des Profondeurs, nous crions Ancetreama---grimhilde-4c3d0ac
Grimhilde Eleicúran

Le visage de leur Mère se dessinait en clair-obscur. Sa silhouette enveloppée de jade, de mauve et d’argent dansait contre une toile de flammes et de nuit. Elle en aimait les formes complexes, tracées par une mémoire que se disputaient l’amour, la crainte et la haine. Elle-même voyait son propre corps se dérouler doucement, à mesure que les astres apparaissaient et disparaissaient au-dessus de l’horizon. Et les scènes se succédaient, de plus en plus nettes, émergeant du marasme flou et scintillant de l’enfance – car ce temps-là était révolu, désormais, et son intelligence se heurtait à deux voix également chargées d’ombre.

Il nous faut renier son héritage, ou bien nous faire, à notre tour, les victimes de l'ire divine, disaient-elles, en chœur, et elle riait doucement de leur bêtise.

Doux frères, pourquoi craindre un savoir que vous n’êtes pas en mesure de concevoir ? Rejoignez le rang des brebis, si vous êtes heureux ainsi. En souvenir de l’amour que nous nous portions un jour, je vous pardonnerai cette offense comme vous saurez, je l’espère, me pardonner en retour de n’avoir pas suivi votre voie.

Ils tentèrent de l’en empêcher. Celui qui ne partageait qu’à moitié son sang fut le plus difficile à fuir. C’était aussi celui qu’elle laissait derrière elle avec le moins de regret. Sa chevelure nocturne lui avait toujours paru un outrage à l’albâtre dont était faite leur Mère. Quant à l’autre, avec ses yeux plus vieux, semblait-il, que la plaine de Daranis même, il lui faudrait s’en détacher et apprendre à vivre sans la pâleur réconfortante de ses bras. Des ailes d’une blancheur aveuglante firent s’effacer le souvenir de ces deux visages. Il n’y avait plus qu’elle, maintenant.

Ses mains lui apparaissaient comme baignées de mercure, et laissaient dans l’air des sillons opalins alors qu’elle esquissait le tracé de lignes ancestrales. Une mélopée s’élevait des flancs purs d’Aisling, et elle en lisait les paroles incomplètes dans le reflet de ses écailles. Le cœur de la Dragonne était pareil à un flot de nacre, qui venait rincer sa peau translucide de ces éclats de ténèbres où son âme, pourtant, demeurait alanguie. Des connaissances interdites s’enroulaient autour de son esprit, y créant un enchevêtrement de nœuds vénéneux. Vêtue de soieries aux couleurs discrètes et couronnée de topaze et de perles noires, elle parcourait les vestiges des temples souterrains où, jadis, sa Mère avait invoqué les plus vieux esprits de ce monde. Elle comprenait. Elle s’y rendait toujours seule.

Depuis peu, un homme partageait sa vie, mais il n’était que rudesse et violence. Il n’avait pas sa force mentale. Quand ses mains, agiles et douces, s’accrochaient à ses larges épaules lacérées à maintes reprises par les griffes des Dragons ou des anciens Esclaves, pourtant, leur symbiose était idéale. Elle sentait croître en son sein le fruit de leur union, et cela l'incommodait. Elle songeait qu'une partie de sa liberté lui avait été ôtée, et, dans le même temps, elle était heureuse d'offrir à sa lignée une descendance. Oh, oui, les enfants de Grimhilde Eleicúran et de Dævran Gorge-Sombre seraient craints et révérés de par le Rhaëg ! Ils accompliraient le dessein de leur illustre Ancêtre. La fille fut la première à voir le jour, suivie par son frère. De faux jumeaux ; l'incarnation parfaite d'un sang ambivalent. Silki et Flóki.

Ses enfants n'étaient pas encore en âge de marcher quand les nuages amassés au-dessus de la Plaine furent troués par une lance d'émeraude. Elle n'y était pas. Elle n'y était pas, mais la lame avait transpercé l'emplacement secret de son cœur. Elle n'y était pas, et ce sang qui effaçait doucement les reflets d'ivoire et de nacre n'existait que dans son imagination. La vieille chanson qui la berçait chaque jour et chaque nuit s'était achevée dans des gargouillis inaudibles et vides de sens.

Et ensuite, ensuite...

~°~

[RP] Des Profondeurs, nous crions Valharin_firekeeper-531195e [RP] Des Profondeurs, nous crions Avatar_ancetre_eir-531195f
Valharin Eleicúran, Prêtre de Flarmya – Eir Eleicúran

Valharin, drapé dans ses atours sacrés, et sous le couvert de son masque, considérait les vivantes d'un œil peu amiable. Il était ici chez lui. Ce Màr, même emporté dans l’oubli, était sa demeure – il en serait toujours ainsi. Il en était le défenseur, le veilleur solennel et désincarné, et il ne souffrait pas que la Gardienne laisse aller et venir les profanes de la sorte. Certains secrets dormaient en ces lieux, qui méritaient de ne jamais plus être exhumés, car ils étaient trop noirs, trop dangereux. Si ses glorieux semblables n’avaient pas su s’en protéger, alors qu’espéraient donc les pauvres hères, avides de savoirs, dont les esprits peu affûtés s’agitaient aujourd’hui dans les couloirs déserts comme des phalènes débiles autour d’une flamme ? Le cœur glacé du Neishaan ne lui permettait pas de s’émouvoir de ces tragédies répétées, mais sa raison, elle, lui soufflait que c’était là un manque de discernement naturellement condamnable.

Il y avait une autre cause à sa réticence, et celle-là était un orgueil démesuré. Alors, face à la demande de la descendante des del Caelan, il se contenta d’esquisser un sourire incrédule, chargé de mépris. Près d’eux, délaissant la Dragonne encore recroquevillée, Eir s’était redressée, les mains fermement croisées contre son ventre. Son doux visage s’était drapé d’un voile soucieux tandis qu’elle reprenait place au côté de son frère. Il était évident qu’elle aurait souhaité éviter toute confrontation, eût-elle été en mesure de faire valoir son opinion. Valharin, du temps où il était véritablement en vie, ne s’était pas fait connaître pour son tempérament calme et posé. Il n’était pas non plus réputé pour ses explosions de colère. Il était le mélange le plus cruel qui pouvait en résulter. L’âme d’Eir en frissonnait parfois, quand elle flottait dans le vide, se raccrochant aux lambeaux de souvenirs épars et aux flux d’énergie irradiant de la salle souterraine où se trouvait la Pierre à Souvenirs. Elle aurait préféré mourir pour enfin abandonner ses cauchemars, mais elle aimait Sanjarr, sa Liée, et elle craignait de retrouver son père dans le Royaume d’Isashani.

D’une voix sans timbre, le Prêtre de Flarmya déclara finalement :

Ces ancêtres dont tu te vantes d’être l’héritière ont abandonné ce Màr que tu crois servir. De fidélité, je n’en vois guère – tout au plus une certaine ironie. Tu es revenue trop tard. Ici, rien n’est mort mais rien ne vit. Il passa une main aux doigts décharnés dans quelques mèches prises dans la doublure de sa capuche, afin de les dégager. Le geste avait une nonchalance étudiée. Dis-moi, quel bien te fait de promener au milieu des Spectres un nom que tous ont sûrement oublié ? Te sens-tu supérieure parce que ton sang charrie le legs d’une Malédiction ?

Ils sont nombreux, ceux qui sont venus chercher la Connaissance au milieu des ruines ; une flamme pour rallumer des braises enfouies. Veux-tu goûter à la mienne, Ondine ?


Valharin, mon tendre frère, je t’en prie …

Je ne suis pas un avare. Viens, je t’en fais cadeau !

Des murmures enflaient autour des Spectres et des Vivantes. Ils se traînaient sournoisement à leurs pieds, comme une fumée aux couleurs de la cendre et de la nuit. La silhouette de Valharin se dispersait doucement, et l’écho dangereux de sa voix ricochait contre les pierres. Par un étrange jeu de lumières, des larmes semblaient avoir perlé aux cils d’Eir. Instinctivement, Ithildin s’était reculée en rampant, le poing crispé et le visage déformé par l’effort. Valharin n’avait pas l’intention de révéler à Mora ce qui s’était passé, ni de lui montrer le précieux trésor que renfermait le Saint des saints des Maudits – pas plus aujourd’hui que des siècles auparavant, lorsque les chiens de Maldara Sciethe étaient venus le chercher.

Si Mora n’était pas parvenue à lui fermer son esprit à temps, alors elle verrait se déchaîner sous son crâne une tempête de hurlements. Le sang qui jaillissait de toute part, maculant les joues des statues. Les flammes rageuses qui occultaient la lumière même du soleil, vomissant une lourde fumée par-dessus les tours altières. Les corps qui tombaient dans un bruit sourd, résonnant jusqu’au fond de la terre stérile, battant le rythme de l’horreur. Les traits aimants, si délicats, d’une mère aux yeux de cobalt sombre et qui chantait des paysages lointains, baignés de nuances pastel. Une chair offerte à l’étreinte vicieuse de ses doigts. Des prières – des suppliques – qui montaient à ses oreilles dans un souffle désespéré. Une poigne noire, promesse de puissance, autour de son cœur planté d’épines. Une procession de visages éplorés, les bras levés vers un salut inaccessible. L’épicentre de l’Univers, auréolé de nébuleuses languides où se perdaient les reflets du temps, et un œil d’aspect liquide qui absorbait tout.

Mora verrait tout ça, et plus encore, jusqu’à ce qu’un cri déchire l’illusion – un rugissement de Dragon.

Eir, qui était restée tout ce temps prostrée, serrée contre un mur, s’était redressée soudain. À ses côtés se trouvait sa Liée fantomatique, dont les écailles, autrefois, avaient dû arborer une teinte céruléenne. Ithildin songea à Eryfen. Son apparition subite avait suffi à dissuader Valharin de poursuivre son entreprise, et le Prêtre de Flarmya reprit une forme humaine. Avec noblesse, il s’inclina devant la Bleue – comme si rien ne s’était passé, comme s’il ne s’était rendu coupable d’aucune forme de perversité. La scène dégageait une certaine étrangeté, sans doute incompréhensible pour un regard extérieur. Qui savait que Valharin avait été le tortionnaire attentionné de sa sœur, et que celle-ci portait en elle, au soir de la Malédiction, un enfant conçu sans le consentement des Dieux, pour servir ses sombres desseins ? Qui savait que depuis des siècles, ils se trouvaient tous deux prisonniers de la demeure des Eleicúran, forcés de se raccrocher l’un à l’autre pour ne pas perdre leur précieuse mémoire ? Le temps était long, au Màr, et l’imagination de Valharin – sans limite.

Vous devriez partir, fit Eir d’une voix fluette, la tête légèrement penchée.

~°~

Elle se réveilla, son dos trempé appuyé contre le sol de dalles froides. L’air, brûlant, s’engouffrait violemment dans sa poitrine comprimée. Elle roula sur le côté, crachant et toussant. Que s’était-il passé ? Pourquoi était-elle de retour ici ? Les vertiges menaçaient de la faire vomir à nouveau. Non, son corps… Son corps était faible, fragile, rongé par les poisons. Ce n’était pas…

° Amaélis. ° Sans qu’elle en connût la raison, cette voix la fit frémir jusqu’au plus profond de son être. ° Amaélis, où es-tu ? °

Aisling… ? songea-t-elle furtivement, dans un élan d’espoir déraisonné, mais la pensée fut retenue à temps. Elle ne comprenait pas encore. Elle prit un moment pour respirer, tenter de faire cesser la sensation de brûlure et calmer les battements erratiques de son cœur. Passé et présent se mêlaient en une mixture nocive, qui faisait bouillir son sang et torturait son esprit. Son regard tomba sur l’autel, à sa gauche, et remonta jusqu’à apercevoir la lueur diffuse de la Pierre à Souvenirs. Elle l’observa longuement, sans se résoudre à se lever. Elle était terriblement fatiguée.

° Amaélis ! ° Cette fois-ci, il y avait une certaine insistance. ° Où es-tu ? °
° J’ai rêvé de tempêtes ; et d’un œil si noir que la lumière s’y reflétait captive. °

Seul le silence lui répondit.

Plus loin, Ithildin s’était tournée vers les Spectres, ses iris luisant comme des rubis : Amaélis s’est réveillée. Menez-moi à elle.

~°~

Des voix millénaires tempêtaient tout autour, éraflant son front pâle. Pourquoi le monde était-il troué ? Aisling ne revenait pas. Elle était toujours seule. Si les Dieux ne pouvaient pas la lui rendre, alors, alors… Elle devrait la ramener, seule. Mère lui enseigna tant et plus, sur des astres dont on ne connaissait plus le nom. Sur des forces endormies au fond de la terre. Elle tissa autour d’elle une toile de symboles chaotiques. Elle fit un trou dans son ventre.

Pas dans son ventre.

Dans son ventre, à elle.

Non, cela ne fonctionnait pas. Aisling ne revenait pas. Elle ne reviendrait plus. La réalité fondait dans un vacarme assourdissant. Il y avait un trou à la place du ciel. Elle rêva de tempêtes ; et d’un œil si noir que la lumière s’y reflétait captive. Une par une, elle éteignit les étoiles et laissa les braises s’envoler, pour consteller de ses propres songes la toile muette de la nuit.
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MessageSujet: Re: [RP] Des Profondeurs, nous crions   [RP] Des Profondeurs, nous crions Icon_minitimeLun 25 Fév 2019 - 16:07

[RP] Des Profondeurs, nous crions Mora_del_Caelan_Chignon_Tol_Orea _ [RP] Des Profondeurs, nous crions Nymelith_moradelcaelan_tolorea [RP] Des Profondeurs, nous crions Nymelith_forme_humaine_moradelcaelan_tolorea
Mora del Caelan & La Bleue Nymelith
Shaman du Màr Tàralöm

Theme Song :
Ground Zero (Warhammer : Vermintide 2 OST) – Jesper Kyd

Pendant un instant fugace, ils s'affrontèrent du regard, acteurs figés d'une bien sombre pièce de théâtre, elle avec l'emphase et l'assurance apportée par son sang, et lui avec une certaine lueur d'antipathie voilée brillant dans ses yeux. Le masque ouvragé que le Spectre arborait jouait bien son rôle, dissimulant à sa présente interlocutrice ses expressions et intentions véritables. Et cependant Mora ne s'en formalisait pas. Elle savait qu'elle prenait un risque en se mettant en avant de cette manière, mais la récompense encourue en valait la peine. Cet anathème, ce tabou, pesant sur les événements funestes ayant conduit à la chute du Màr Ilmarë, et plus particulièrement sur le réel contenu de la chambre secrète, tout ceci ne faisait qu'exciter son insatiable curiosité. Elle pressentait très nettement qu'il y avait là quelque chose de la plus haute importance, quelque chose qui pourrait impacter durablement ses plans. Allait-elle encourir un nouveau refus ?

Alors, même lorsque le délicat équilibre des forces en présence commença à basculer, l'Ondine ne bougea pas, se contentant de fixer l'Eleicúran en silence, tête haute, imperturbable tandis qu'elle recevait le sourire méprisant du Prêtre de Flarmya. Ainsi sa demande avait visiblement été jugée arrogante. La sœur, quant à elle, s'était lentement redressée, comme une expression d'anxiété grandissante sur son visage aux rondeurs enfantines, délaissant l'Airain auprès de laquelle elle s'était auparavant agenouillée. Mais à cela, Mora ne fit pas attention, accaparée qu'elle était par l'aura dangereuse qui émanait de Valharin. Car d'une voix étrangement atone, dans une attitude exprimant un désintérêt détaché, en totale opposition avec le discours véhément qui se déversait de sa bouche, le Spectre avait rendu son verdict.

Aux côtés de son Ondine, Nymelith frissonna nerveusement, parcourue soudain par une bien désagréable et obscure prémonition, ses écailles rendues hypersensibles au simple contact de l'atmosphère surchargée de tension qui régnait dans ce corridor oublié. Car, au fur et à mesure que la signification de ses mots dédaigneux s'imprimaient en elle, l'expression du visage d'albâtre de Mora s'était durcie, ses sourcils se fronçant et sa mâchoire se contractant imperceptiblement. Dans ses pâles iris d'améthyste s'était allumée une flamme menaçante, rivée sur le Neishaan. Comment osait-il seulement … ? Ignorant le ton de faible supplication de Eir, adressé à son frère, la Shaman s'avança d'un pas, nullement intimidée, prenant pied au milieu des brumes menaçantes qui avaient commencé à ramper tout autour d'elles, prête à défendre ses intérêts, quoi qu'il lui en coûte.

Et brusquement, le monde implosa. Une magie, ancienne, puissante, inattendue, était à l'oeuvre. Les murmures enflèrent jusqu'à emplir tout son esprit, et avant même qu'elle n'ait le temps de dresser ses barrières, elle bascula. Elle sombrait, et sombrait encore, de plus en plus profond, la douleur irradiant, toujours plus puissante, courant et se répandant dans ses veines, mettant au supplice chacun de ses membres, chacun de ses organes. Et ces visions … Il lui semblait que ses yeux brûlaient littéralement, des rivières de sang carmin s'en écoulant lentement. Des visions d'une violence inouïe, des visions de torture la plus cruelle. Décadence, folie, sang et cendres, destruction la plus totale, la mort était partout, et nulle part à la fois. Aucun répit pour les pécheurs.

Etait-ce là ce qu'ils avaient ressenti lors de la Malédiction ? Etait-ce un rêve ? Peut-être était-ce, en vérité, la réalité. Descendante de la noble famille del Caelan. Qui était-elle, déjà ? Cette pensée, difficilement formulée, lui échappa bien trop vite, car, petit à petit, son identité même semblait se déliter.
Même le son lointain, dérangeant, d'un hurlement de souffrance, aigu et déchirant, n'était en capacité de la ramener de ce songe illusoire et cauchemardesque dans lequel elle s'était perdue. Elle n'avait d'ailleurs qu'un seul désir, c'était de s'éloigner le plus possible de la source de cette douleur mortifère, qui l'embrasait toute entière. C'était plus qu'elle ne pouvait supporter. Il n'y avait nulle part où se cacher du regard des Dieux. Fuir, elle devait fuir. Pourtant, quelque chose l'empêchait de s'échapper, implacable ombre vêtue de nuit, chimère écailleuse dont l'essence était par trop mêlée à la sienne. Pourquoi s'acharnait-elle ainsi sur elle ? Un nom, il y avait un nom. Fébrilement, elle lutta pour s'en souvenir, sa conscience s'y raccrochant avec une ardeur désespérée.

Nymelith. Nymelith ! Son esprit se referma autour du sien, doux cocon protecteur la coupant du monde extérieur, et Mora reprit alors partiellement conscience, clignant plusieurs fois des paupières pour chasser le brouillard rougeoyant qui obscurcissait son champ de vision. L'illusion avait cessé. Autour de son corps tremblant, allongé sur le sol de pierre glacée, l'étreinte possessive des bras de sa Liée, qui fixait un regard haineux sur le Prêtre de Flarmya. Seule son angoisse concernant l'état de son Ondine la retenait d'aller assouvir sa juste vengeance sur le Spectre Eleicúran. Cela … Et la dragonne aux écailles céruléenes, silhouette aux contours indistincts, qui se dressait entre elles et Valharin. Imprudentes, elles s'étaient montrées imprudentes. Elle était passée si près de perdre sa Liée … Sans l'intervention de l'Azurée … Non, elle refusait d'y penser.
Et voilà que le Prêtre, ce chien misérable, s'inclinait noblement devant la dragonne spectrale – celle de Eir, selon toute évidence – comme si rien ne s'était passé.

Un sifflement bas et rageur s'échappa de ses lèvres à l'entente du conseil de la Neishaane, mais fut bien vite stoppé par un imperceptiblement mouvement de tête de sa Liée. Lentement, Mora s'était redressée en position assise, et une expression de fureur mêlée d'incrédulité peinte sur son visage maculé de sang, elle contemplait à présent sa main souillée d'ichor vermillon. Son propre sang ...
Son regard d'améthyste pâle dériva sur Valharin, le détaillant sans vergogne, une forme de curiosité avide y brillant. Etait-il possible pour elle d'asservir un Spectre ? Sa magie était-elle assez puissante pour cela ? Comme il serait doux pour elle de le savoir devenir sa marionnette, de lui arracher tous ses secrets, et de lui faire cracher sa morgue. Il était à l'image de sa précieuse petite descendante et de son Airain obscène, pétri d'arrogance et de certitudes … Et totalement, complètement, dépassé par les événements, piégé qu'il était au cœur de ce Kaerl Maudit, depuis des siècles et pour le restant de l'éternité.

Soudain, le visage de l'Ondine se contracta étrangement, et se mordant vainement la lèvre pour se contenir, elle éclata d'un rire profond, le son de sa voix chaude se répercutant sur les murs en ruine du corridor. Folie que tout cela. Ne lui avait-il pas fait un merveilleux présent en lui faisant partager ses derniers instants ? Elle savait à présent la souffrance et la terreur qu'il avait du endurer. Un sourire chargé de dérision étira ses lèvres purpurines, qui s'entr'ouvrirent légèrement. Il n'y avait pas de place pour la faiblesse dans son esprit.

Nymelith lui lança un regard aigu, attentive à sa décision. Oui, elles allaient suivre la sage mise en garde de la sœur Eleicúran. Plusieurs jours lui seraient nécessaires avant qu'elle ne recouvre sa force pleine et entière. Il était donc plus sûr pour l'heure de retourner au Màr Tàralöm, quand bien même le retard occasionné dans ses projets ne manquerait pas de l'irriter. Le Màr Ilmarë avait patienté pendant plusieurs centaines d'années, il pourrait souffrir une attente supplémentaire. Quant à la chambre secrète et à son mystérieux contenu, elle doutait que qui que ce soit en dehors d'elle ne parvienne à en résoudre l'énigme. Enfin, il lui était absolument nécessaire de continuer de tenir à l'oeil ce traître à son sang d'Aodren, pour l'empêcher de mettre le nez dans ses affaires personnelles. L'étendue de son ignorance quant aux réalités de ce monde était des plus affligeante, lui qui prétendait se délecter des vaines joutes politiques qui gangrenaient le Kaerl Ardent.

Mais avant cela … Aidée par une Nymelith aux aguets, Mora se leva, l'ensemble de ses muscles hurlant leur peine, et le sang gouttant lentement de sa main. Elle se rapprocha doucement de l'Airain, qui, toujours allongée et peinant à se redresser, se rejeta en arrière avec colère pour tenter d'échapper à son contact. Mais d'une pression légère, presque affectueuse, effleurant son front du bout de son index, elle y dessina une rune complexe, usant pour ce faire d'un mélange de son propre sang et de sa toxine. Tout dans son attitude semblait curieusement exprimer l'absence de velléité d'agression, dans un contraste dérangeant avec son visage souillé. Puis, sa tête toute proche de la sienne, elle lui chuchota alors tout bas, tandis que l'étrange dessin s'effaçait petit à petit, graduellement absorbé à travers les pores de sa peau :

« Toi et moi n'en avons pas fini, dragonne. »

Sa tâche accomplie, elle tira de la courte besace attachée à sa ceinture un délicat mouchoir de soie, avec lequel elle s'essuya consciencieusement les mains, puis le visage. Le sang coagulait vite, et elle ne comptait pas paraître au Màr Tàralöm comme la dernière des souillons, criant à tout vent l'humiliante défaite qu'elle venait de connaître.
Enfin, sans se départir de sa calme prestance, l'Ondine s'éloigna de quelques pas dans la direction dans laquelle elles étaient arrivées, sa Bleue, ayant ré-endossé sa forme draconique, toujours furieusement interposée entre elle et les Spectres. Tournant la tête, son sourire s'élargissant, elle darda un regard froid sur Valharin.

Terminées les nobles et belles paroles, sa voix à présent se révélait porteuse d'inflexions menaçantes, offrant un aperçu bien rare de son véritable visage et intentions. Elle était en bien trop mauvais état pour continuer à jouer à ce jeu là.

« Peut-être mes ancêtres ont-ils abandonné le Màr Ilmarë. Peut-être jugez-vous cela preuve de lâcheté. Mais je préfère estimer qu'ils ont fait preuve d'un remarquable instinct de survie. Ils auront vécu une vie longue, sans jamais pourtant que leur loyauté envers le Kaerl ne faiblisse, et leur sang, le sang du Màr et de ses ancêtres, coule à présent dans les veines de leurs descendants, tandis que leur nom se perpétue encore aujourd'hui … Contrairement à vous, Maudit, enchaîné à jamais dans toute la gloire de votre décadence et de votre débauche. Nous nous servirons de l'échec de nos ancêtres – de votre échec – comme d'une leçon précieuse sur les erreurs à ne pas faire. Nous apprendrons. Et avec ou sans votre coopération, un jour, le Kaerl Etoilé renaîtra de ses cendres. »

Elle marqua une pause, une lueur d'ironie brillant dans ses iris d'améthyste.

« Pour finir, il me paraît bien malavisé de critiquer les descendants de la Lignée del Caelan, de mépriser leur existence propre, quand la votre laisse aussi clairement à désirer. La folie se propageant d'une génération à une autre comme une tare … Après tout, cela ne la rend-elle pas ainsi bien plus malléable pour vos plans ? »

Sur ces derniers mots, Mora se détourna, et, puisant dans ses dernières réserves, une main reposant sur le médaillon de turquoise niché entre ses seins, elle en activa le sortilège de protection intrinsèque confié par Aubiade, disparaissant ainsi aux yeux des deux Spectres.
Devenues indétectables, Nymelith et elle s'éloignèrent à pas prudents. Si elle avait de la chance, la rune resterait activée quelques semaines, peut-être quelques mois, avant de perdre son pouvoir … Ce qui lui permettrait, du moins l'entendait-elle ainsi, de retrouver le moment venu la trace de l'Airain et de sa Neishaane, à supposer qu'elles ne quittent pas la Terre de l'Aube entre temps. Qu'elle aille rejoindre sa Liée si elle le pouvait. La joute entre elles était loin d'être terminée.


L'on rencontre souvent sa Destinée
Par les chemins que l'on prend
Pour l'éviter
***

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Amaélis Eleicúran
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MessageSujet: Re: [RP] Des Profondeurs, nous crions   [RP] Des Profondeurs, nous crions Icon_minitimeLun 25 Fév 2019 - 16:09

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Julien Hauspie – Death Stranding (Theme)

Ce fut dans un silence poisseux que les Spectres escortèrent Ithildin jusqu’à l’antichambre où devait se trouver Amaélis. La Dragonne, affaiblie par les phénomènes dont sa Liée avait été victime, fulminait de n’avoir pas pu échapper à Mora lorsque celle-ci s’était baissée pour la marquer de sa damnée magie. Le son de sa voix, veloutée et menaçante, résonnait encore dans son esprit. Non, l’Airain n’en avait pas fini avec elle non plus… Mais Amaélis était si faible, si faillible ; jamais elle n’aurait pu imaginer compter sur son soutien. Faudrait-il encore qu’elle la protège ? Ses poings se serrèrent. Elle sentait le Lien qui pulsait en son âme comme un cœur éthéré, pourtant, elle ne parvenait pas tout à fait à reconnaître la présence de la Neishaane. Celle-ci semblait terriblement distante, froide et brûlante, emplie d’une lumière glacée. Son âme lui évoquait soudain une étoile mourante. Que s’était-il passé, là-bas ? Ithildin ne voulait pas s’abaisser à éprouver quelconque forme d’inquiétude pour son Âme Sœur. Peu lui importait, tandis qu’elle s’enfonçait à la suite des Spectres dans les ténèbres du Màr sans nom, que sa Liée ait une nouvelle fois plongé avec insouciance dans des cauchemars trop vieux pour elle.

À ses côtés marchait la Bleue Sanjarr, ses écailles ternies luisant doucement, suivant le mouvement de ses muscles fins. Ithildin avait gardé sa forme humaine, qui lui permettait de mieux se mouvoir dans les couloirs étriqués du Kaerl. D’un œil peu amiable, elle considérait les silhouettes floues des deux Eleicúran. L’aîné, s’il n’avait pas non plus apprécié les paroles de Mora à son égard et à l’égard de sa famille, avait fait preuve de retenue – craignait-il donc à ce point la Liée de sa sœur ? Ou bien n’avait-il simplement pas jugé bon de répondre à celle qu’il considérait maintenant comme une énième âme perdue, aveuglée par l’éclat d’un passé érigé en idéal quand il ne recelait que désolation et mort – et une obscurité telle que nul mortel n’aurait su y trouver un chemin ? Il ne comprenait pas cette quête futile. Contrairement à ce qu’avait avancé Mora, il aurait préféré que Siobhán –  sœur Renégate, traître à son sang, ombre pâle et sauvage – ne quitte jamais leur maison, qu’elle sombre avec les siens dans l’Oubli des Dieux. Il ne voulait pas voir le Kaerl Étoilé renaître de ses cendres ; parce qu’il avait trop d’orgueil pour accepter d’être effacé, et, aussi, parce que des siècles de semi-existence ne l’avaient pas éloigné de l’idée que les humains n’apprenaient jamais des erreurs du passé.

Après maints détours, l’étrange quatuor rejoignit enfin une vaste salle au plafond voûté, parcouru de faibles étoiles et de veines argentées. Au milieu trônait l’autel de marbre sombre, et la Pierre à Souvenirs, sise en son centre, baignait les alentours d’une clarté spectrale. Amaélis gisait à même le sol, ses vêtements et sa chevelure nacrée comme une corolle froissée autour de son corps brisé, si chétif. Du bout des doigts, elle effleurait les dalles. Quelque chose évoquant vaguement une berceuse s’échappait d’entre ses lèvres, venait d’un souffle chasser la poussière et l’élever en un ballet de nuées sinueuses. Sans un regard pour les Ancêtres, Ithildin s’avança vers sa Liée, le pas solennel, ténu, et la respiration lente. La Neishaane n’avait pas vraiment changé, mais si son apparence était la même, la Dragonne pouvait sentir, à travers le filtre de ses sens les plus subtils, que ses vibrations n’étaient plus en harmonie avec ce qu’elles avaient été autrefois. Elle se baissa pour venir chasser de la main quelques mèches blanches, puis empoigna le menton d’Amaélis afin de croiser son regard. Ces iris, tout un horizon de mer orageuse et de brouillard, ne lui avaient jamais parus aussi infinis. Au milieu des limbes, à travers les nuages, perçait parfois l’éclat furtif d’étoiles du Nord.

° Alma… Pauvre, pauvre enfant. Qu’as-tu encore fait… ? °

La Neishaane battit des cils, paresseusement. Elle connaissait cette voix ; c’était celle qui régnait en maître sur ses songes. Celle qui régulait les battements de son cœur et contrôlait les marées de son sang vaporeux. Celle dont la morsure, impie et tendre, avait formé les nouveaux paysages de son avenir. Alors, tandis qu’elle laissait éclore une peur familière en un sourire sincère, Amaélis lui ouvrit son âme, l’entraînant avec elle dans les abysses. Prise de vertiges, Ithildin posa son front sur celui de sa Liée, et celle-ci vint agripper l’arrière de sa nuque pour l’attirer au plus près, réunissant leurs souffles.

° Ithildin… J’ai vu. J’ai compris, maintenant. Je te raconterai, quand tu dormiras. Tu verras, j’aurai plus jamais peur – on aura les mêmes cauchemars. °

Le ton, pourtant enjoué, fit frémir la Dragonne. Sous elle s’ouvrait tout un vide, toute une vie, et les fantômes de la mémoire jouaient leur théâtre de pantomime juste dans le coin de son œil. Elle prit ce que la Neishaane avait à lui offrir, chutant toujours plus loin, un sentiment de terreur enflant dans sa poitrine. Elle y puisait pourtant une espèce de réconfort ambigu : plus sa Liée effrayait sa nature profonde, plus elle se sentait proche d’elle. Pensait-elle être enfin capable de concevoir, ainsi, ce qu’Amaélis pouvait ressentir envers elle ? Ses poumons s’emplissaient de ce qu’exhalaient les pores de son Âme Sœur – sueur froide, violence sauvage, abandon et mystères occultes. Un goût salé, amer, persistait sur ses lèvres. Son étreinte se fit plus féroce, ses ongles venant gratter la chair fine des joues d’albâtre.

° Nous allons être invincibles, n’est-ce pas ? Oh ! rends-moi grâce, ma Liée, ma délicate fleur de givre… car si je ne t’avais pas fait goûter au Chaos, jamais tu n’aurais pu prétendre à cet héritage ! Tout ce que tu es m’appartiens. °

Un éclat de rire secoua la frêle Neishaane. Les paroles d’Ithildin la réjouissaient, car elle était sûre, maintenant, qu’elles seraient deux à sombrer. La Dragonne, en dépit de toute sa morgue, était bien trop faible, et bien trop insolente, pour résister à l’appel de savoirs proscrits. Combien de temps leur restait-il, avant que les Dieux ne daignent abattre leur courroux sur elles – l’Airain qui ne devait pas naître, et sa Liée qui avait ramené de l’Oubli des choses interdites aux mortels ?

Dans leur dos, les deux Spectres attendaient patiemment la fin des retrouvailles. Au bout d’un temps incertain, Amaélis se redressa enfin, repoussant d’un geste fébrile son Âme Sœur. Encore vacillante, elle fit face aux Ancêtres, et Ithildin la vit alors entourée d’un halo lunaire. L’anticipation rendait sa respiration difficile ; qu’était-elle devenue ? Il lui tardait de le découvrir et de conquérir, encore, l’étendue escarpée de son être. Cette fois, ce fut Eir qui s’approcha, ses immenses yeux de lapis-lazuli aspirant toute la lumière alentour et laissant son frère dans l’ombre.

Amaélis Eleicúran. Te voilà de retour parmi les tiens. Prends soin de ce que t’a légué ton sang. Il te faudra veiller à ce que ton Héritage ne tombe pas entre des mains non méritantes.

J’ai un frère… admit la Neishaane, à la fois songeuse et prudente. Elle avait rencontré Veyre quelques lunes plus tôt, mais ne se serait pas targuée de le connaître pour autant. Le Chevalier Ardent lui avait révélé une partie de son passé ; devait-elle lui rendre la pareille ? Valharin lui coupa la parole avant qu’elle puisse en dire davantage.

S’il n’est pas ici, c’est qu’il n’y sera jamais. C’était toi que nous attendions. Nous n’en avons plus pour longtemps ; aussi, laisse-nous te conter notre histoire.

Dans le clair-obscur, les ombres projetées par les statues parurent s’animer, se métamorphoser sous le souffle de la voix du Neishaan tandis qu’il chantait la chute de leur Clan – le maillon manquant de la chaîne. Eir se joignit à lui, et le monde bascula dans un espace aux limites indéfinies, hors du temps. De mur en mur, Amaélis suivait du regard des silhouettes changeantes. Quatre d’entre elles attirèrent son attention – une femme, deux enfants et un Dragon dont les ailes immenses balayaient les flammes. Toutes les autres finissaient par partir en cendres. Le vent que l’Empereur Noir provoqua en prenant son envol porta jusqu’à elle l’écho d’un nom, perdu entre les hurlements des Maudits et le vacarme de l’incendie. Siobhán. Comme si elle avait entendu qu’on l’appelait, l’illusion se retourna pour observer Amaélis, mais son visage demeura invisible. Elle disparut derrière son Lié, un enfant dans les bras et l’autre qu’elle tenait par la main, puis la scène changea. Les fumées s’étiolèrent pour finalement révéler un homme seul, accroché à une croix, et le rugissement d’un Dragon dans le lointain. Un battement de cils plus tard, il n’était plus seul. Une femme, enceinte, secouée de sanglots, tenait son corps immobile dans ses bras trop maigres.  

Tout cessa alors. Eir et Valharin avaient disparu en même temps que leur chant s’était éteint. Un profond soupir vint rompre le nouveau silence, et Amaélis se retourna vers sa Liée, dont les traits fatigués indiquaient qu’elle ne tiendrait plus sa forme humaine très longtemps. Elles devaient partir. Sans un mot et sans cérémonie, la Neishaane s’empara de la Pierre pour la fourrer dans son sac. Alors qu’elle s’apprêtait à rebrousser chemin, un étau de froid enserra ses poignets, assez insistant pour la retenir, et un murmure aux accents désespérés se déposa dans le creux de son oreille :

L’un des deux enfants n’était pas celui de Siobhán… C’était le mien ! Il portait le sang de la lignée de Loyë-Hefur... Tu dois me dire ce qu’il est advenu de lui ! Tu m’entends ? Tu le dois ! … Autrement, je saurai comment te faire payer chaque jour !

Et avec ça, l’apparition s’évapora. Un frisson parcourut la Maîtresse déchue, qui attribua la voix, sans trop de peine, à la plus jeune des Spectres. Comment pouvait-elle retrouver la trace de cet enfant ? Elle ne savait même pas où avait fui cette sœur Renégate dont ils n’avaient pas su prononcer le nom. Qu’en avait-elle à faire ? Il y avait des choses plus urgentes qui réclamaient son attention. Son esprit flottait, libre, sans contrainte, au-dessus d’un océan houleux au fond duquel se trouvait sans doute la réponse à toutes les questions. Et qu’il lui tardait d’en explorer les confins, de laisser l’eau trouble envahir sa poitrine et l’abreuver de récits plus vieux que les étoiles ! Une ébauche de sourire imprimée sur ses lèvres gercées, elle tendit la main à Ithildin :

Allons-y, Étoile-Lune.  

Il leur fallut quelques heures avant d’émerger enfin à la surface. Les Lunes avaient mêlé leur éclat, argent et bronze, pour nimber la Lande et ses brumes d’une lueur irréelle. Avec un soulagement non dissimulé, Ithildin put à nouveau étendre ses ailes, sur lesquelles quelques poussières tombées de la chevelure de la flamboyante Eurilya avaient tracé des sillons de braises stellaires. Humant l’air délétère, Amaélis sentait une force nouvelle l’envahir et il lui sembla un instant que les vapeurs spectrales s’inclinaient devant elle, formaient comme un cortège impossible pour accompagner ses pas alors qu’elle foulait le sol proscrit. Elle se tint alors immobile, les bras à peine écartés pour mieux accueillir la brise nocturne. D’un regard aux distants brasillements ambrés, l’Airain observa sa Liée fermer les paupières et les traits de son visage apaisé s’auréoler d’une tendre lumière.

À suivre...
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