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| | [RP] Sombre Étincelle | |
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Amaélis EleicúranChevalier Errant
Date d'inscription : 01/09/2013 Sexe : Présentation : URL Messages : 159 RPs : 81 Race : Neishaane Âme-Soeur : L'Airain Ithildin Affiliation : Apolitique Alignement : Ordre Draconique :
| Sujet: [RP] Sombre Étincelle Mar 7 Mai 2019 - 15:18 | |
| & Chevalier Nagendra Tuncay, Lié au Bronze Llyr, Spectre des Cendres. Sombre Étincelle. Qu’il était impitoyable et solitaire, le froid qui succédait à l’incendie. Rien de plus que poussières et cendres, lourdes et étouffantes. Nagendra était une âme féroce, déterminée ; il était né en luttant, avait grandi en luttant, et luttait encore, chaque jour, côte à côte avec ses frères. Dans cette vie, il savait qu’on ne lui octroierait jamais le droit de baisser les armes. Le jeune Humain ne connaissait pas le goût de l’échec, et le découvrait maintenant, âpre sur ses lèvres. Il ne s’était même jamais préoccupé d’en imaginer les conséquences, ce lourd état de confusion et de désemparement qui le laissait pantois, cette étreinte toxique dont il ne parvenait pas à se défaire. Ni science militaire, ni force physique, ni rien de ce qu’il avait appris ne lui était plus d’aucune utilité maintenant. Seul face à ses adversaires, il avait remporté maints combats. Seul face à lui-même, il avait sans doute connu autant de victoires que de défaites mais, toujours, il avait réussi à en tirer les enseignements qui l’avaient rendu meilleur. Malheureusement, la situation était bien différente aujourd’hui, car Adhâvan n’était nullement un ennemi, plutôt un spectateur, une victime du combat que le Chevalier menait en lui-même. Chaque coup qu’il s’infligeait semblait emporter en même temps un morceau de l’Elfe, et cela, il ne pouvait pas – il ne pouvait plus le supporter. Et puis, soudain, il n’y eut plus de froid. Les bras du Verseur de Sang s’étaient refermés autour de son corps tremblant, l’attirant contre son torse que soulevait une respiration pénible, douloureuse. Le son sourd des battements de son cœur lui parvenait, à travers le tissu, à travers la peine, pour illuminer la nuit et le désert glacé, comme un vieux fanal au bout d’un océan de brumes. Une part de Nagendra, profondément enfouie, cette même part qu’il s’était acharné à mutiler et à étouffer, s’abandonna au soulagement. Et tout céda, en l’espace d’un instant. Tandis que ses mains s’accrochaient inlassablement au dos de l’Elfe, plissant le tissu entre leurs serres avides et incomprises, Nagendra fut secoué de violents sanglots étranglés, dont l’écho dans le couloir vide résonnait comme une étrange prière. La bouche tordue par la souffrance que lui infligeaient leurs assauts répétés, il pressait son front pâle contre la poitrine de l’autre Chevalier. Oh, comme il aurait souhaité pouvoir pleurer… Mais rien ne venait outre ces hoquets déchirants, et ses yeux demeuraient secs. Je suis là… lui soufflait doucement la voix d’Adhâvan au-dessus de sa tête baissée, et comme s’il avait voulu s’en convaincre, il se tassait un peu plus, cherchait à disparaître dans l’étau de son affection. Il n’était qu’un enfant, songeait-il, et seulement ici avait-il le sentiment d’être hors d’atteinte de ses démons. Lentement, cette impression se dissipa, à mesure qu’Adhâvan se reculait enfin et que ses bras retombaient le long de son corps. Le regard fixé sur les dalles qui pavaient le sol du Màr, Nagendra resta muet, tout entier concentré sur la difficile tâche de reprendre ses esprits. Serrant les poings, il finit par se redresser, retrouvant pour un temps seulement son allure de fier soldat ou de loup esseulé, plantant ses iris d’ambre dans ceux de l’Elfe. « Je … Pouvons-nous entrer ? »La question le prit de court. Il fronça imperceptiblement les sourcils, tentant d’apercevoir ce qui se cachait au-delà du fragile sourire qu’affichait son vis-à-vis. Sa première réaction fut de se tendre, méfiant quant aux réelles intentions d’Adhâvan, puis, à nouveau, il se retrouva transpercé de part en part par des pulsions contraires, inconciliables. Loin de la chaleur rassurante, peut-être trompeuse, du Chevalier Blanc, il voulait fuir et retrouver le confort de la nuit. Il voulait atténuer le brasier de son âme en laissant son corps brûler une nouvelle fois contre celui d’Adhâvan. D’un geste hésitant, distraitement, il caressa le sang séché qui recouvrait ses joues, puis se rapprocha de la porte de son weyr, sans tourner le dos à l’Elfe ni le quitter des yeux. « Bien sûr. » céda-t-il, car il échapperait au moins aux regards indiscrets qui peuplaient toujours les couloirs de ce Màr. La porte s’ouvrit et se referma en silence. L’intérieur n’avait pas véritablement changé depuis la dernière visite du Verseur de Sang ; tout était toujours parfaitement ordonné. Une fois le superflu éliminé ne demeurait que l’essentiel, mais cette fois, cela n’avait pas suffi à avoir raison du désordre dans son esprit. L’âtre était vide. Comme un automate, il invita Adhâvan à s’asseoir, promenant son regard dans le vague, et se plaça machinalement à l’autre bout de la pièce. Ses manières de gentilhomme étaient bien trop solidement ancrées en lui pour souffrir des assauts de la tempête, et, lorsque tout semblait n’être qu’un paysage d’arbres déracinés, elles ressortaient alors, d’une manière vaguement risible et qui ne manquait pas d’étonner. Il retira sa cuirasse, la plaça soigneusement sur le dossier d’une chaise. Il délaça les liens de sa tunique sale. Là, la familiarité de la situation, de ses gestes, lents et précis, l’aidait à reprendre possession de ses moyens. Il pensa à son sabre, abandonné sur les sables de la Fosse, et se maudit intérieurement. L’air agacé, il plongea un linge dans un baquet d’eau froide pour nettoyer son visage, son cou, ses bras. Quand il eut fini, il se retourna vers le Chevalier Blanc et désigna la bassine. « Tu voudras faire de même, je suppose. » déclara-t-il, d’un ton neutre, tandis qu’il se dirigeait vers son bureau et s’asseyait, croisant les jambes. Distraitement, ses pensées s’égarèrent dans celles de son Lié, entièrement absorbé par le plaisir de la chasse. Il enviait parfois la simplicité de son caractère, tout en le méprisant pour son manque d’esprit. Sur une profonde inspiration, Nagendra ferma doucement les paupières. Il se sentait comme après un effort trop prolongé, et la tête lui tournait encore – mais, à l’abri des murs de ses appartements, il n’avait plus aussi peur qu’avant. Il expira l’air contenu dans ses poumons, et se recula dans sa chaise. « Adhâvan… » Il débuta sa phrase sans savoir ce qu’il allait bien pouvoir dire et laissa le silence s’étirer, orientant son regard en direction de la fenêtre. « Merci. D’être resté. » Celui qui osait présenter à autrui ses faiblesses était le plus brave des hommes, n’est-ce pas ? La fierté de son Lié enfla dans son cœur avec la puissance d’un soleil. « Je… n’allais pas très bien, ces temps-ci. » Sa voix, douce et grave, était perturbée par le plus infime tremblement. « Mon comportement était indigne de mon rang, et injuste envers toi. Je te présente mes excuses. »Disant cela, il reporta son attention sur l’Elfe, cherchant à croiser son regard afin que celui-ci puisse y lire la sincérité de ses paroles. Au-delà des griefs personnels, il avait failli à son devoir et avait mis à mal ses relations avec le plus proche serviteur de son nouveau Maître. Il avait été stupide. Eusse été un autre que le Chevalier Blanc à cette place, Nagendra doutait qu’il s’en serait tiré de la même façon. |
| | | | Oracle Tol OrëanéenMaitre du Jeu
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| Sujet: Re: [RP] Sombre Étincelle Sam 18 Mai 2019 - 14:46 | |
| Méfiance, suspicion. La communion douce-amère de leurs corps avait finalement cédé face aux masques une fois encore relevés, si profondément ancrés dans leurs chairs, fruits d’une vie entière de conditionnements ... Alors même que quelques minutes encore auparavant sa tête reposait, courbée et offerte, contre son torse ; qu’il s’abandonnait, vaincu, entre ses bras ; bien vite Nagendra avait-il repris contenance, lui présentant, au moins en apparence, un visage à nouveau fier et maître de ses émotions. Adhâvan avait pourtant saisi sa soudaine tension, son hésitation, comme un animal face à un danger, comme s’ils ne pouvaient exposer leurs faiblesses sans crainte de l’autre. Il le comprenait, sincèrement, en concevait parfaitement les raisons… Tout en ne pouvant empêcher une cruelle déception de ravager son coeur. Son frère-d’armes ne lui faisait pas confiance, pas encore. C’était ainsi. Pouvait-il décemment lui en vouloir ? Etait-il prêt, lui même, à dévoiler les profondeurs secrètes de son âme ? Mais déjà, quoi qu’il lui sembla que ce fut à contre-coeur, l’Humain s’était détourné, lui concédant le droit de poursuivre leur discussion en des lieux moins exposés. Aussi, dans un silence feutré et prudent, le suivit-il à l’intérieur, tandis que la porte se refermait derrière eux. Son soulagement à se trouver hors de portée des regards inquisiteurs, hors de portée de toute influence extérieure autre qu’eux-même, se révéla bien vite dévoré par le poids des souvenirs. Sa gorge se serra tandis que les contours de son environnement s’imprimaient dans sa rétine, fidèles en tout point à ce que sa mémoire lui soufflait. Comment aurait-il pu oublier, alors même que les conséquences de leur face à face d'origine restaient gravées en lui au fer rouge ? Avec le même effet qu’un coup de fouet sèchement asséné, vint le frapper la crainte, la possibilité équivoque d’avoir fait une erreur en cédant à des désirs inexprimés. Saisi par un malaise insidieux, il secoua vaguement la tête en signe de dénégation lorsque le Chevalier Bronze l’invita à s’asseoir. En dépit de la douleur de ses muscles, de sa fatigue qu’il lui semblait sentir jusque dans ses os, il était bien trop nerveux pour rester en place. Soudain, il voulait en finir, et au plus vite, que ce soit d’une manière ou d’une autre. L’infini des possibilités le torturait, littéralement, viscéralement. Le sentiment d’impuissance, de contrainte et de sujétion face à son destin, était une souffrance qui lui était familière et dont il avait appris, bon gré mal gré, à s’accommoder. Et cependant il y avait là, dans la potentialité de ce qui pourrait exister entre eux, quelque chose d’effrayant, une sensation bien différente qui affolait son corps et qu’il ne parvenait pas à comprendre. Il était plus que nécessaire qu’ils parlent, certes, cette conviction était, elle, toujours intacte, mais sa détermination se faisait à présent vacillante, et, la bouche sèche, il se sentait incapable de prononcer les mots qui se bousculaient en lui. Figé au milieu de la pièce, ses mains enserrant ses avants-bras, Adhâvan se contenta alors de le suivre des yeux, laissant son regard glisser le long de sa silhouette puissante, son coeur accélérant ses battements, propageant la chaleur de son attirance désemparée à travers l'ensemble de son corps. Il cherchait désespérément en lui la force qui lui manquait pour prendre la parole, tentant de se convaincre qu’il attendait simplement le bon moment. Et dans les limites de son esprit, Rakesh, elle, irradiait du plaisir simple de l’accomplissement de ses instincts les plus primaires. Acrobaties aériennes, chasse et séduction, elle savourait la présence de Llyr à ses côtés, se délectant de l’intérêt que le jeune mâle lui portait. Seule une infime partie de son attention appartenait encore à son Lié, la Blanche restant autrement sourde à ses suppliques. Car dans la partie de son être qui lui était étroitement mêlée et indissociable, pulsait toujours cette flamme qui le poussait, impitoyablement, à continuer à conquérir et à se battre, à profiter des avantages et de la supériorité que cette situation présentait, à se saisir enfin de son dû. De quoi avait-il si peur ? Un goût amer sur la langue, il repoussa loin, une fois encore, les braises de l’incendie que sa Liée s’évertuait à propager et s’empara sans un mot du linge que l’Humain avait abandonné, contemplant son reflet mouvant dans l’eau. Une grimace désenchantée difficilement contenue étira ses lèvres. Qu’il avait l’air pâle, si éperdu et fragile ! Il écarta sans douceur les mèches folles qui environnaient son visage anguleux, achevant rapidement ses ablutions pour faire à nouveau face à son ancien amant. Ils ne faisaient que gagner du temps, il le savait. Non sans amertume, l’Elfe songea un instant à ce que sa vie aurait été s’il ne lui avait pas été lié, si ce jour là, sur les sables, son âme avait rencontré celle d’un Bronze à l’image celui de Nagendra, plutôt qu’une dragonne à la personnalité si avide, impériale et dominatrice. Les choses auraient-elles pu été différentes ? Quelles conséquences une telle Empreinte aurait-elle eu sur son devenir au Màr Tàralöm ? Pour toute réponse, un éclat ardent le déchira tout entier, le laissant haletant, tandis que la morsure de la Blanche sur son âme se faisait plus intense encore. Rakesh ne tolérait pas l’idée de ne pas être l’unique à ses yeux, refusait la simple pensée qu’il puisse en être autrement. Et si elle acceptait Nagendra, c’était pour la simple et bonne raison qu’elle l’avait choisi comme un outil nécessaire à ses ambitions. Que lui-même soit la victime des humeurs de sa dragonne, le Chevalier Blanc le considérait comme un fait contre lequel il ne pouvait lutter. Mais qu’elle impose ce carcan à quelqu’un d’autre, à cet autre en particulier, cela, il ne pouvait le supporter. Ce qu’il leur restait d’innocence devait-il être systématiquement et irrémédiablement souillé ? Il avait été naïf de se croire enfin libre lorsque, dans cette arrière-cour sale et poussiéreuse du marché aux esclaves, K’Jenriath, celle qu’il avait alors appelé, ébloui de terreur et d’admiration, ‘‘Maharani’’, était venue à lui. On ne se libérait jamais totalement de cette servitude, on ne faisait que passer d’un asservissement, d’une soumission à une autre … « … Mais au moins, peut-être, pouvons-nous choisir qui possédera la main-mise sur nos chaînes ... »Sa peau le brûlant encore douloureusement au souvenir des fers qu’il avait autrefois porté, ses doigts allant effleurer le creux de sa gorge, il réalisa, confus, qu’il avait parlé à haute voix, quoi que dans un murmure étranglé. Ses iris mordorés élargis par une gêne obscure, il leva les yeux sur Nagendra, qui avait pris place sur son siège, jambes croisées, son bureau une nouvelle fois dressé entre eux comme un bien piètre rempart. L’ironie de la situation le frappa et il vacilla, ne sachant si ce qui enflait si inexorablement en lui était fait de rire ou de pleurs, alors que, d’une voix faible et à peine frémissante, l’Humain réitérait encore ses excuses. La vue du Chevalier Bronze assis là lui faisait soudain horreur, par ce que sa posture avait de trop semblable à ce jour fatidique de leur première rencontre. Allaient-ils finalement s'enliser l'un et l'autre dans une sorte de parodie de dialogue, poli et hypocrite ? La pensée de rejouer cette scène à l’identique avait pour lui quelque chose de purement insupportable, une angoisse honteuse qui planta ses griffes glacées le long de sa colonne vertébrale, lui chuchotant à l’oreille qu’il ne pouvait plus fuir à présent. L’Elfe se sentait comme un moucheron englué dans une toile, chacun de ses mouvements ne faisant que rendre sa fin inéluctable. Et pourtant, au fond de lui, presque insensible et prête à s’éteindre à tout moment, brasillait, oubliée, la sombre étincelle de la rébellion. Pour cette fois, juste pour cette fois, il élevait cette prière, lui était-il possible de devenir autre chose qu’un pantin entre les mains de plus puissant que lui ? Il doutait d'en avoir le courage et la réelle volonté. Que ne pouvaient-ils se dégager du joug de leur vie d’avant … Alors, dressé là, debout face à Nagendra, d’un simple geste de la main, il balaya ses maigres explications. Cela n’avait pas d’importance, cela n’avait plus d’importance. Le regard infiniment triste, il accrocha ses iris ambrés cernés par l’épuisement, et secoua la tête, faisant tinter délicatement le bijou d’or à son oreille. Il avait requis son aide. Quelle forme d'absolution attendait-il de lui ? « Je suppose que je te dois également des excuses, pour … ce qui s’est passé. »*Pour ce que je t’ai pris. C’était lâche de ma part d'y avoir cédé, et pourtant ...*« Au nom de ma Liée, Rakesh, je … je suis désolé. J’aurais préféré que les choses se déroulent dans d’autres circonstances, pour toi. J'aimerais que tu puisses me pardonner. Mais en dépit de tout ... J'apprécie que tu nous laisses cette ... nouvelle opportunité. »Il ferma les yeux et soupira, sans que le poids sur son coeur ne s’allège, abattu par la pénible sensation d'oppression qui enserrait ses tempes. En vérité, ses regrets, si ambigüs qu'ils étaient, comment pouvait-il seulement se croire en droit de les lui exposer ? Lentement, il s’approcha donc, et avec la plus grande douceur, se pencha en avant, appuyant ses paumes bien à plat sur le bois lisse du bureau, là où il aurait eu envie de les y abattre avec violence, pour en ressentir la douleur irradier dans ses bras. Lorsqu’il fut certain d’avoir l’attention pleine et entière de Nagendra, impuissant à détourner son regard du sien, Adhâvan posa enfin la question, provocatrice, qui lui brûlait les lèvres depuis leur combat dans la Fosse. Il était resté, comme il l’en avait prié. Et à présent, qu'allait-il advenir d'eux ? « Quelles sont tes intentions, Nagendra ? Que veux-tu de moi ? »L'on rencontre souvent sa Destinée Par les chemins que l'on prend Pour l'éviter *** |
| | | | Amaélis EleicúranChevalier Errant
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| Sujet: Re: [RP] Sombre Étincelle Dim 23 Juin 2019 - 16:06 | |
| & Chevalier Nagendra Tuncay, Lié au Bronze Llyr, Spectre des Cendres. D’un regard qui avait retrouvé ses lueurs fauves et troubles de prédateur, Nagendra suivit le trajet de la main de l’Elfe, tassé sur lui-même à la manière d’un félin prêt à bondir. Presque imperceptiblement, ses sourcils se froncèrent et ses pupilles s’étrécirent ; il n’appréciait pas qu’on refuse ce qu’il offrait, surtout quand le prix à payer pour lui était si lourd. Les doigts entremêlés, à plat sous son menton, figé dans une immobilité statuesque, il accueillit les excuses d’Adhâvan avec autant de plaisir qu’un invité indésirable. Une étrange colère, sourde, nuancée d’amertume et de jalousie, enfla alors au fond de sa poitrine. Cela n’allait pas ; il n’y avait qu’une seule victime ici, et ce n’était certainement pas lui. Et tandis que le Chevalier Blanc continuait de s’épancher, l’Humain se tendait de plus en plus, une marée de sang chaud se répandant dans ses veines. Rien, sur son visage, ne trahissait la véritable nature de ses émotions. Seules quelques flammes obscures dansaient dans ses iris d’ambre, et sa respiration, peut-être, s’était faite plus lourde. Quelle était la signification de tout ceci ? Pourquoi parlait-il au nom de sa Liée ? À nouveau, ce vent glacial de panique étouffa sa raison, et il crut apercevoir, suspendue aux lèvres de l’Elfe, une pitié impudente et provocatrice. L’incendie dans ses yeux s’était fait tempête mais, toujours, il restait impassible, laissant ses pensées affolées s’égailler en tous sens sans parvenir à les contrôler. Un picotement familier remonta le long de ses bras jusqu’à ses mains jointes, un sursaut de violence que seule la peur, couplée à ce qui selon lui ne pouvait être qu’une forme inédite de respect, était encore en mesure d’entraver. Et, soudain, Adhâvan s’était rapproché, envahissant l’espace que Nagendra avait cru bon d’imposer entre eux. Inconsciemment, le Chevalier Bronze s’était reculé dans le fond de sa chaise. Leurs regards ne s’étaient pas quitté une seule seconde – l’Humain n’était plus capable de faire autrement. La question, cependant, ébranla son masque de marbre, et sa bouche se tordit en un sourire bizarre, trop déplacé au milieu des ombres qui noyaient et ses yeux et ses joues émaciées. Il y avait là comme une menace non dite, un amusement bien cynique, mais aussi un désespoir sans nom. Autour d’eux, le silence s’étira en une masse dense, écrasante. Lentement, l’idée que l’Elfe se soit joué de lui le submergea à nouveau – ou pire encore, qu’il n’ait tout simplement pas fait exprès de céder. Cette dernière possibilité lui trouait le cœur. Il la redoutait plus que tout car, alors, comment justifier sa réaction ? Comment venir à bout de la honte ? Et puis, enfin, après de longues minutes d’indécision, d’hésitation suspendue, Nagendra se leva. Il fit le tour du bureau, avec une souplesse nonchalante, pour venir se placer au niveau d’Adhâvan. Alors, profitant qu’il soit encore incliné, il posa ses mains sur les épaules du Chevalier et se pencha vers lui, comme s’il avait voulu l’envelopper sans tout à fait le toucher. D’un geste mesuré, il écarta quelques mèches d’or blanc, et, au passage, le bout de ses doigts frôla distraitement la nuque ainsi offerte, autant un avertissement qu’une caresse. Il se pencha encore un peu plus, jusqu’à ce que son haleine tiède vienne effleurer sa peau, et se mordit doucement la lèvre inférieure, cherchant les meilleurs mots. En vérité, il aurait aimé avoir assez de courage pour mordre et blesser, pour laisser s’exprimer la bête qui sommeillait au fond de ses entrailles. Il était d’usage, ici, de choisir la facilité et de se débarrasser sans scrupule de ses problèmes. Il n’aurait fait que suivre les enseignements de son Clan en acceptant de détruire chaque obstacle se dressant devant lui. Il aurait pu le jurer devant chacun de ces Dieux en qui il ne croyait pas ; il aurait dû jouer le jeu des masques. Il n’y avait pas de vocation plus dangereuse que celle d’un homme honnête. Sa décision était prise, cependant. Il était un soldat, il ne fuyait pas devant le risque. Il était un loup solitaire. Il était destiné à trouver sa propre meute ou à mourir, mais jamais il ne se départirait de sa fierté. « Je veux que tu me dises que tu en avais autant envie que moi. Que c’était ton propre choix. » lâcha-t-il dans un souffle rauque, et l’ordre n’avait rien de dérisoire. C’était une supplique ardente, confuse, prononcée avec le désespoir d’un fidèle que sa propre divinité aurait choisi de damner, et qui ne comprenait pas. Toujours, ses doigts planaient près de son cou, comme prêts à l’empoigner – dans quel but, cependant, lui-même ne le savait plus. Il émanait de l’Humain une telle chaleur, une telle aura de force primaire et animale, que l’air était presque irrespirable. Il reprit, et si ses paroles pouvaient sembler misérables ou ingénues, quelque chose dans son ton les rendait mille fois plus impitoyables que le baiser des flammes : « Je veux que tu me dises que mon souvenir a hanté chacune de tes nuits, comme moi. Que ta peau te brûlait là où j’y ai laissé ma marque. »Le Chevalier Bronze se dégagea à peine, mais cela n’allégea pas le poids de sa présence. « Car je ne donne rien à personne – pas plus que je ne prends. » confessa-t-il du bout des lèvres avant de baisser les yeux. Le cœur de Nagendra battait puissamment ; il le sentait dans la moindre de ses fibres, qui faisait trembler ses mains et ses jambes. Il avait tout essayé. Si Adhâvan ne lui donnait pas la réponse qu’il attendait, alors, il ne lui resterait plus rien. Il lui faudrait enfermer, étouffer les souvenirs et les espoirs. Tenter de révéler sa véritable nature auprès d’un autre, ou souffrir jusqu’à la fin. Seule la glorieuse et furieuse âme de Llyr, mêlée à la sienne, l’empêchait d’envisager l’échec. Il le savait, pourtant. Peu avaient déjà eu la force de résister à l’attraction que l’Humain semblait exercer sur chaque objet de cet univers, peu savaient lui mentir. |
| | | | Oracle Tol OrëanéenMaitre du Jeu
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| Sujet: Re: [RP] Sombre Étincelle Mer 26 Juin 2019 - 19:13 | |
| Tout en même temps qu’il parlait, libérant enfin ce qui pesait si lourdement sur sa conscience depuis ce jour de Zakerielku, ses yeux n’avaient cessé de scruter Nagendra, attentifs et vigilants mais néanmoins révélateurs de son trouble intérieur persistant. Ses excuses offertes, ses fautes avouées, il avait attendu. Rien, il n’y avait rien. Tout aussi cruellement figé qu’une statue de marbre, aussi muet qu’une tombe, mains jointes sous son menton, son compagnon n’avait rien laissé paraître de ses pensées. Il n’y avait eu qu’un brasillement, quoi que de plus en plus marqué, dans ses iris ambrés, un incendie rampant étroitement contenu, mais semblant enfler inexorablement, tandis qu’il le toisait, juge silencieux de la culpabilité qui les tenaillaient tous deux. Faisant le choix d’ignorer ce que son instinct lui criait, Adhâvan s’était pourtant approché, s’immisçant délibérément à travers l’espace vacant qu’avait laissé le Chevalier Bronze entre eux, accentuant encore le déséquilibre entre leurs positions respectives. Et comme pour lui échapper plus encore, ce dernier s’était reculé dans sa chaise, sans que la moindre expression ne vienne troubler la surface impassible de son visage. Ses paumes reposant devant lui, la question fatidique avait finalement fusé, cherchant à savoir, à crever le voile d’impassibilité dont s’était entouré Nagendra. Alors, pour toute réponse, un sourire, grimaçant, presque dérangeant, avait étiré ses lèvres, et l’Elfe, en ressentant le poids de ce tout ce qu’il semblait recouvrir, avait frémit, profondément ébranlé. Il y avait soudain bien trop de menace, de danger contenu dans ce simple sourire, détonnant par rapport à l’aura d’écoute polie dont son compagnon s’était paré. Tant de sentiments contradictoires le torturaient … Était-il véritablement allé trop loin ? Avait-il délibérément provoqué sa colère ? Là où résidait la part de lui-même qui résonnait en écho aux appétits de sa Liée, une douloureuse satisfaction se heurtait à une crainte vive, faite d’éclats tranchants, issue de son passé, le poussant à lutter contre l’impulsion de se recroqueviller face à l’ire de ce fascinant prédateur. Dans un renversement imperceptible de situation, Adhâvan se tendit donc, dans l’expectative, son sang battant à tout rompre à ses oreilles, le silence se faisant littéralement assourdissant. Sans même ouvrir la bouche, en une fraction de seconde, Nagendra avait réussi à exprimer bien plus de ses intentions qu’une centaine de mots auraient pu en dire. La respiration oppressée au creux de sa poitrine, le Chevalier Blanc affrontait néanmoins le regard de l’Humain, l’ombre d’un défi obscurcissant ses iris d’or brun. Il ne fuirait pas, pas sans avoir eu sa réponse, quelle qu’elle fut. Parce qu’il désirait la lire sur ses lèvres tout autant qu’il en ressentait le besoin pressant, qu’importait cette lâcheté qui le paralysait depuis tant de lunes. Ainsi, lorsque son ancien amant se redressa, quittant sa place pour se rapprocher de lui, il n’esquissa pas le moindre mouvement, figé par une surprise qui n’en était finalement pas une. Déchiré entre sa raison et ce qui pourrait advenir, il étouffa un hoquet en un sursaut insaisissable, ses lèvres s’entrouvrant pour laisser passer un souffle bien trop longtemps retenu, lorsque ses mains se posèrent sur ses épaules. Ce simple contact recelait à lui seul, bien trop de promesses intangibles, avivées par la chaleur dévorante qui irradiait de sa présence magnétique, dont il percevait très nettement les contours sur sa peau. Et là où le bureau se dressait auparavant comme un mur à abattre, il se révélait à présent obstacle, piège entravant ses mouvements. Bien sûr, il aurait pu se dégager, solution la plus sage de toutes celles qui se présentaient à eux, mais il n'était pas certain de le souhaiter réellement. Aussi se contenta-t-il de garder le silence, les yeux baissés sur les circonvolutions du bois devant lui, bras maintenant fiévreusement serrés contre son torse, ressentant un picotement persistant là où les doigts de Nagendra l’avaient touché, là où le rythme de sa respiration inégale venait effleurer sa nuque. Il n’était plus en capacité de se mentir, ni à lui, ni à l’autre. Le brasier que leur étreinte passée avait initié, lors de cette toute première rencontre, était toujours là, à peine endormi. Il était alimenté par l’attente intolérable de ce qu’il savait – ou espérait, peut-être ? - qu’il répondrait, répandant sans pitié ses flammes avides à travers ses veines, embrasant ses sens, brouillant son jugement. Pourtant, lorsque le Chevalier Bronze prit enfin la parole, ses iris s’écarquillèrent largement, et il ne put empêcher une rougeur coupable et impatiente d’envahir ses hautes pommettes, tout autant que le feu tentateur de rugir férocement en lui. Pouvait-il seulement lui avouer ? Il y avait là une évidente stupéfaction, une certaine humiliation devant la franchise brutale dont l’autre homme faisait preuve, mais aussi une nuance de colère, presque de dépit, grandissante, éblouissante, alimentée par la reine vengeresse qui partageait son esprit. Peut-être s'était-il trompé dans son jugement, Nagendra se révélant maintenant comme tous les autres avant lui ... Une bête fauve uniquement motivée par la satisfaction de ses désirs de domination et la soumission de sa proie. Ses épaules curieusement affaiblies par le poids des mains qui reposaient sur elles, son coeur prêt à exploser dans sa poitrine, il lui fit enfin face, l’esprit brouillé par les pensées, chaotiques et innombrables, qui se bousculaient à sa porte. Pouvait-il encore renoncer ? Ils étaient seuls face à eux-même, ainsi que l’avait souhaité Rakesh, débarrassés, en apparence, de toute influence indésirable. Les décisions qu’ils prenaient, les mots qu’ils prononçaient … Toute possibilité de prétendre de ne plus en être au contrôle leur était désormais impossible. Et c’est prenant une faible inspiration, sans pouvoir réprimer le frisson qui le parcourut à ce moment, dans une vaine tentative pour masquer son appréhension à se laisser aller à ce que son corps aspirait, qu’il réalisa seulement l’expression misérable qu’arborait Nagendra. Là où son ton avait suggéré une ardeur sauvage, nuancée d’une convoitise impitoyable, la posture même de son corps criait un évident désespoir, bien proche de l’abandon. Une fois encore troublé par cette apparente contradiction, perdu quant à ce qu’il devait en conclure, il ne chercha pas à combler la maigre distance qui les séparait. ‘‘... comme moi.’’Là, il avait avoué, subtilement, peut-être même sans s’en rendre compte. L’Elfe lui devait-il la vérité à son tour, quant l'autre semblait déjà si certain de l’obtenir ? Devait-il prendre le risque de mettre son âme à nue, sans possibilité aucune de retour en arrière, devait-il déposer gracieusement ce pouvoir sur lui-même entre les mains du Chevalier Bronze ? Ses bras retombèrent, sans force, à ses côtés, là où il aurait voulu les étendre pour rétablir un contact, quel qu’il soit, avec celui qui avait été son amant. Là où il aurait voulu sentir à nouveau le soulagement étourdissant de sa peau contre la sienne, il était incapable de faire le moindre pas en avant. Sa voix enfin s’éleva, dans un murmure contenu, comme s’il craignait que ce que ses paroles recelait de viscéral soit entendu par d’autres, comme si elles étaient bien trop équivoques, inavouées, pour être perçues par quiconque d’autre que lui. « Ici au Màr Tàralöm, comme ailleurs, beaucoup pensent pouvoir prendre … Sans se soucier de donner. »La banale cruauté de cette évidence lui arracha un sourire ironique qui s’effaça tout aussi vite qu’il était apparu, entraînant avec lui une imperceptible ombre d’auto-dérision, mais allumant une flamboyance farouche dans ses iris mordorés. « Pourtant ... toute relation est toujours un échange. Alors, pour cette fois, pour une fois, oui, j’ai fait le choix d’offrir librement. Pourquoi continuer à chercher à se voiler la face ? Les dragons n’ont été qu’un … incontrôlable catalyseur, l’étincelle permettant à l’incendie de se propager soudain au-delà de toutes barrières. Les regrets, eux … sont stériles. »Il savait pertinemment que ses paroles pouvaient être interprétées différemment de leur sens réel, mais sa volonté de s’en soucier se révélait bien trop faible face à la colère et la confusion qui le tourmentaient. Que le Spectre des Cendres l’interprète comme il le désirait. Son expression s’adoucit néanmoins petit à petit tandis qu’il poursuivait maladroitement, sa voix se réduisant alors à un simple filet chancelant. Son élan de rébellion, si fugace, s'était en fin de compte éteint, abandonnant l'Elfe seul face à ses ressentis obscurs et incompréhensibles. « J’ai essayé. D’oublier. De me convaincre que tout n’avait été qu’une illusion. Qu’il n’y avait rien à conclure dans ce que nous avions partagé. Que rester loin de toute tentation était pour le mieux. Mais je n’ai pas pu, je n’ai simplement pas réussi. »Son regard levé vers le plafond de pierre comme pour y chercher la solution à ses doutes, son visage céda enfin pour exprimer toute la fragilité qu’il avait appris, dans la douleur, à ne plus jamais afficher. Il la sentait grandir, au fond de lui, impossible à réprimer, cette envie déchirante de pouvoir faire confiance, de pouvoir lui faire confiance, son coeur battant au rythme affolé de ce qu'il s'apprêtait à révéler. « Il y a quelque chose en moi … Qui ne parvient pas à renoncer. Qui aspire à plus, qui désire … Ah ... » Il lâcha un soupir tremblant, ne sachant comment formuler tout ce qui se jouait en lui, sa détresse se faisant à présent évidente. « Je ... Je veux ... être avec toi. »Alors, abandonnant enfin la lutte, doucement, il se laissa aller contre lui, et, ses paupières closes, son front rejoignit le sien, délivrant cet ultime aveu dans un chuchotement sourd, étouffé par ce feu qu’il ne parvenait plus à contenir : « Je suis las d’avoir peur. »L'on rencontre souvent sa Destinée Par les chemins que l'on prend Pour l'éviter *** |
| | | | Amaélis EleicúranChevalier Errant
Date d'inscription : 01/09/2013 Sexe : Présentation : URL Messages : 159 RPs : 81 Race : Neishaane Âme-Soeur : L'Airain Ithildin Affiliation : Apolitique Alignement : Ordre Draconique :
| Sujet: Re: [RP] Sombre Étincelle Sam 31 Aoû 2019 - 16:30 | |
| & Chevalier Nagendra Tuncay, Lié au Bronze Llyr, Spectre des Cendres. Dans l’attente des mots qui viendraient, Nagendra s’était tenu raide, toujours submergé par une vague de chaleur qui le laissait comme étourdi, tant parce qu’il redoutait la réponse d’Adhâvan que parce que leur proximité éveillait en lui des pulsions encore trop peu familières. Et lorsque le Chevalier Blanc s’était enfin tourné pour lui faire face, il avait lentement cligné des paupières, à la manière d’un félin alangui, peut-être dans le but non avoué de dissimuler l’incendie qui brûlait dans son regard pourtant si désespéré. L’espace d’un instant bien vite oublié, l’Humain s’était cru capable d’effleurer le relief tortueux de son visage, d’en adoucir les angles du bout des doigts – mais, face à face avec l’objet de ses tourments, il n’avait même pas osé maintenir le contact visuel plus que nécessaire. Et, enfin, tandis que les bras de l’Elfe retombaient à ses côtés, comme vaincus ou las de lutter, il prit enfin la parole et Nagendra se tendit un peu plus, instinctivement, contre les coups à venir. Il ne bougea pas, ne flancha pas. La voix d’Adhâvan n’était qu’un frêle murmure, mais au-delà d’y voir un signe de retenue, le Chevalier l'accueillit comme un présent qui n’était destiné qu’à lui seul. Pour autant, les paroles prononcées par le Verseur de Sang ne lui inspirèrent qu’un opaque sentiment d’incompréhension. Était-ce parce que son esprit baignait trop dans le feu et dans l’exaltation du Bronze qui partageait son âme ? Il ne parvenait plus tout à fait à raisonner convenablement. Que lui avait offert Adhâvan ? Que lui avait-il offert que Nagendra n’ait pas pris de force, profitant de la tourmente et de la confusion semées par les fantaisies de leurs Dragons ? Il ouvrit à peine la bouche, comme sur le point d’objecter, ses sourcils froncés exprimant l’ampleur de son trouble, autant devant ces mots étranges que face à l’aigreur violente et révoltée dont ils étaient teintés, avant de se raviser et de laisser son confrère continuer. Il était inutile de tirer des conclusions sans avoir entendu tout ce que l’Elfe avait à lui dire. Doucement, les traits d’Adhâvan semblèrent s’apaiser à mesure que sa voix se faisait de plus en plus faible, et, par une espèce de mimétisme qu’il ne s’expliquait pas, Nagendra relâcha également sa garde, libérant dans un soupir la pression qui comprimait auparavant sa poitrine. Là, enfin, malgré l’hésitation qui saccadait son ton, le Chevalier Bronze comprenait mieux le sens de ce discours nébuleux. Son cœur s’était remis à battre avec la puissance de mille tambours, pulsant contre ses tempes, menaçant d’engloutir la voix de l’Elfe. Il sentait des picotements au bout de ses doigts. Sous ses yeux, l’image d’Adhâvan se brouillait, balayée comme par la fièvre, en même temps que l’évidence s’incrustait lentement dans son esprit. Bien tapi dans l’hypogée de sa conscience, ce monstre sans visage contre lequel il avait passé sa vie à lutter hurlait sa victoire, lacérant sans peine les derniers lambeaux de peur, de honte et de déni qui scellaient encore ses entrailles, affirmant maintenant sa place dans la lumière. Et, au milieu de la tourmente, lui parvinrent enfin quelques mots. Je veux être avec toi. Quelques mots qui repoussèrent finalement l’ombre, et il lui semblait que son âme s’embrasait, propulsée vers les nues où, sous la forme d’un colosse de Bronze, elle rugissait sa véritable nature face au silence infini du ciel. Adhâvan pressa son front contre le sien, et l’Humain laissa ses mains se perdre dans son dos pour l’attirer à lui, dans une étreinte réconfortante, protectrice, douce et féroce à la fois. « Alors, reste avec moi. » déclara Nagendra d’une voix claire, peut-être trop forte considérant la maigre distance qui les séparait, mais il avait besoin d’être entendu, de manifester qu’il n’attendait – ne désirait rien de plus. « Je te défendrai, jusqu’à ce que tu n’aies plus peur. »Comme un soldat, et parce qu’il ne connaissait que cela, il prêtait serment d’allégeance. Depuis toujours, il ne savait que protéger et servir, et il lui semblait maintenant presque évident que même un sentiment comme l’amour, aussi déroutant et incertain soit-il, se traduise chez lui par cette volonté de se battre pour l’autre. Qu’avait-il de plus à promettre, à offrir ? Malgré la douceur de ses gestes, ses mains étaient dures et sèches d’avoir trop pris les armes. Malgré le feu qui couvait dans ses iris, son esprit avait la froideur d’un linceul. Qui aurait pu lui jurer qu’à s’abandonner finalement aux flammes, il ne finirait pas changé en statue de sel ? Il repensa aux paroles prononcées bien plus tôt par le Chevalier Blanc, dont le sens lui avait alors paru si obscur, et il ajouta doucement, saisissant le visage de l’Elfe entre ses paumes pour le forcer à redresser la tête, fouillant son regard avec toute l’intensité dont le sien s’était paré : « Tu n’as rien à craindre de moi, Adhâvan. Jamais je ne te passerai les chaînes. » Puis, avec une espèce de grondement sourd qui sonnait comme une menace dissimulée, ou comme la promesse d’un orage, encore plus sinistre au regard des vœux qu’ils savaient tous deux les lier à plus puissant : « Je tuerai tous ceux qui tenteront encore d’user de toi. » |
| | | | Oracle Tol OrëanéenMaitre du Jeu
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| Sujet: Re: [RP] Sombre Étincelle Dim 1 Sep 2019 - 20:44 | |
| En dehors du vide incertain qui s’étendait encore entre eux, les séparant à peine de la largeur d’une main, mais tout aussi implacable que s’ils s’étaient trouvés dans une pièce différente, brouillant ses sens, tout paraissait avoir disparu. Le weyr, si austère et pourtant nimbé de leur mémoire partagée, s’était effacé, ne laissant, emplissant la totalité de son champ de vision, que la présence insatiable, irradiante de chaleur, de Nagendra. Dans une ronde dont il lui semblait qu’ils créaient les pas tour à tour, accomplissant ce dont leurs corps étaient incapables, leurs regards s’étaient cherchés, se rencontrant, se heurtant frontalement, avant de se séparer tout aussi fébrilement qu’ils avaient aspiré à se trouver. Encore, et encore, et encore, dansant, à l’unisson de leurs souffles affolés et des crispations fugitives de leurs doigts, reposant, contraints, à leurs côtés, là où ils auraient voulu avidement se tendre vers l’autre pour le saisir. Les uns après les autres, péniblement, les mots s’étaient écoulés hors de ses lèvres, en réponse à la question du Chevalier Bronze, plus dans une vaine tentative d’apaiser ses doutes et cette colère incompréhensible qui lui enserrait le coeur, que dans le véritable espoir qu’il le comprenne. L’Elfe avait scruté son vis à vis, tout à la fois étourdi par leur proximité et attentif à ses moindres mouvements. Ses iris mordorés voltigeant sans cesse, ça et là, caressant le profil hiératique de Nagendra, désirant accrocher son regard, presque malgré lui, cherchant à appréhender ce que son ancien amant voudrait bien lui exposer de ses sentiments. Mais face à la violence amère contenue dans ses propos, ce dernier s’était tout d’abord tendu, sourcils froncés, comme s’il avait voulu intervenir, comme pour rétablir ce soudain déséquilibre. Sans doute le Chevalier Bronze n’avait-il pas réalisé sur l’instant de quoi il en retournait, n’ayant pas pu replacer les pièces du puzzle torturé de son âme. Cela n’avait pas arrêté Adhâvan. Et que ce soit parce qu’il avait poursuivi son explication ou parce que l’Humain avait finalement jugé bon de ne pas intervenir, il était resté silencieux face à lui. Plus que toute autre chose, cette absence de réaction, de jugement à son encontre, avait lentement craquelé ses barrières, oblitérant cette hargne âcre et provocatrice, en réalité toute entière dirigée contre lui-même, pour libérer cette fragilité qui avait été enfouie, si longtemps muselée. Il était dangereux pour lui de poursuivre dans cette voie, qui, il en avait conscience, n’aboutirait qu’à les blesser tous deux plus qu’ils ne l’étaient déjà. L’Elfe était là à présent, comme il l’avait souhaité, face à Nagendra, hésitant, balbutiant, peinant à mettre de l’ordre dans l’écheveau de ses pensées, mais par dessus tout, refusant de renoncer à lui, avec une opiniâtreté, proche de l’aveuglement et née du désespoir. Les enjeux de cette discussion dépassaient de loin ce qu’il était en capacité de comprendre, mais il pressentait au moins une chose : la vérité était la seule libération qu’ils pouvaient encore espérer. La vérité, ou bien leur annihilation mutuelle. Le choix, quoi qu’évident, n’avait pas été aisé à surmonter, par ce qu’il impliquait fatalement pour eux. Dépendance et pouvoir, comme les deux faces d'une même pièce. Alors, finalement, le front reposant confusément contre le sien, les yeux clos, l’écho de ses difficiles aveux résonnant encore dans leurs esprits, le Chevalier Blanc avait laissé ses mains venir, lentement, puis plus fermement, se glisser dans son dos, pour l’attirer dans une étreinte à laquelle il s’était abandonné, petit à petit. Contenu dans le cercle possessif de ses bras, l’Elfe aurait pu vouloir dire que toute tension l’avait quitté. Pourtant, au-delà du brasier affamé qui hurlait tant et toujours plus en lui, hérissant sa peau, le poussant à réclamer enfin ce qu’il désirait, persistait encore une nuance de crainte et de méfiance indéfinie, qu’il ne parvenait pas à repousser. Son coeur se serra douloureusement, et il sentit son désarroi prêt à le déborder, à l’image d’une vague immense déferlant sur les terres. Il se sentait désespérément faible et vulnérable, et les jointures blanchies, ses doigts s’accrochèrent silencieusement à la chemise de Nagendra, se serrant plus près encore de lui, en une supplication muette, oppressé par l’angoisse. Qu’allait-il advenir de lui maintenant ? Et quoi que la sensation de ses mains solides, apaisantes, pressées dans son dos constituait une réponse en soi, Adhâvan ne voulait à présent rien tant qu’oublier son passé, s’oublier lui-même dans la satisfaction de cette incendiaire convoitise, pour ne pas avoir à faire face aux conséquences de ce qu’il était, une fois de plus. Aussi ne put-il réprimer un frisson soudain lorsque la voix de son amant retentit à son oreille, en une affirmation sans équivoque de sa volonté, claire et forte. Il avait émis le désir d’être avec lui, et l’Humain en retour lui jurait de le protéger. Il y avait tant d’assurance, tant de férocité et de confiance transparaissant dans ses paroles, chez lui qui auparavant paraissait si dangereusement près de l’abîme, si dévoré par ses tourments, que le Chevalier Blanc se sentit presque honteux de cette infériorité avouée, de cette pusillanimité dont lui-même faisait preuve depuis le début. Pourrait-il le protéger en retour ? En avait-il la capacité, de préserver cette flamboyance solaire, magnétique, dont Nagendra ne semblait pas pouvoir se défaire, même en étant au plus bas ? Celui qui a l’éclat du soleil. ‘‘Adhâvan’’. Ainsi K’Jenriath, celle qu'il avait appelé "Maharani", l’avait-elle baptisé en retour, non sans un certain amusement, ce jour où elle était apparue à lui. La main de Solyae s’était-elle réellement posée sur lui ? Se comparant à Nagendra, il se voyait en réalité plutôt à l’image des lunes, emplissant le silence de la nuit, brillant non pas de leur lumière propre, mais indirectement illuminées par le rayonnement violent de l’astre du jour. Sa place se trouvait dans l'ombre. Alors, lorsque les mains de l’autre homme se saisirent de son visage, cherchant à l’inciter à croiser ce regard confiant auquel il ne souhaitait pas se confronter, ses iris d’or brun arborèrent une insaisissable lueur, aux tonalités farouches. Pourtant, cela ne dura qu’un bref instant, avant qu'il ne soit balayé par une indicible surprise, le brasier en lui ne se relâchant que pour mieux laisser naître, au creux de son plexus, une petite boule de chaleur emplie d’une étonnante douceur. Les yeux écarquillés, encore trop déstabilisé par ce qu’il avait entendu, ses mains vinrent rejoindre les siennes, indécises, tremblantes, éperdues, glissant ses doigts entre les siens. Devant l’absence première de réaction du Chevalier Bronze, l’Elfe avait pensé que les réflexions résignées qu’il avait laissé échappé plus tôt n’avaient pas été entendues, et s’en était sentit obscurément soulagé. Il ne savait plus à présent que penser. Une vague volute d’amertume le traversa fugitivement, et il songea qu’il ne lui restait, même avant ça, plus grand-chose à cacher à son amant sur la nature de son passé. Sans doute valait-il mieux qu’il le sache. Il avait été, et était encore par bien des façons un esclave. Et néanmoins, même en dépit de ce savoir, son attitude envers lui n’avait pas changé. Cela, Adhâvan ne le comprenait pas. Si Nagendra prétendait se battre et, au-delà de ça, prendre la vie de tout ceux qui prétendraient l’utiliser, son plus grand ennemi pourrait tout aussi bien se révéler autre que celui à qui il pensait ... Se mordant les lèvres pour contenir la fulgurance d’émotions contradictoires, par trop étrangères, qui l’assaillaient, il acquiesça sans mot dire, accusant réception de son serment. Au loin, dans cet espace intangible qu’il partageait avec sa reine de diamant, il se tendit, cherchant à déterminer si Rakesh se montrerait satisfaite du dénouement de cette confrontation. Puis décida, peut-être à tort, peut-être au risque de le regretter plus tard, que cela n’avait aucune importance. La Blanche l’avait certes poussé dans cette direction, mais il avait fini par faire ses propres choix, indépendamment de son influence. Ainsi, puisque toute parole lui paraissait à présent superflue – qu’aurait-il pu trouver à répondre à pareille déclaration ? – Adhâvan soupira, refoulant au fond de sa conscience, au moins pour quelques heures, le monde extérieur et ses doutes encore bien trop prégnants sur leur avenir et leur relation … Et s’inclina pour embrasser Nagendra, apposant ses lèvres sur les siennes, scellant une nouvelle fois ce pacte insensé qui les liait, se laissant aller contre lui en un baiser qui lui promettait à lui seul, la douceur du miel tout autant que la passion ardente qui les tenaillait depuis trop longtemps. - FIN - L'on rencontre souvent sa Destinée Par les chemins que l'on prend Pour l'éviter *** |
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