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 [RP] Suis-je le gardien de mon frère ?

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Amaélis Eleicúran
Chevalier Errant
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Amaélis Eleicúran


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MessageSujet: [RP] Suis-je le gardien de mon frère ?    [RP] Suis-je le gardien de mon frère ?  Icon_minitimeJeu 5 Déc 2019 - 22:16

Usui Ikeda, neuf ans & Shay Ekatz, dix ans

Emancipator – Anthem

Quand il ouvrit les yeux, ce matin-là, un étrange voile aux couleurs fluctuantes, étrangères était tombé sur la ville. La maison était vide ; n’y demeuraient que de vagues odeurs de lard grillé et de cuir. Comme à son habitude, il avait enfilé ses vêtements à la hâte et s’était précipité directement au-dehors, dans l’espoir de voir son père rentrer de sa garde. Une fois la lourde porte poussée, pourtant, le garçon fut bien incapable de distinguer quoi que ce soit. Il mit un pied sur le perron et le vit disparaître dans la brume. Poussé par la curiosité, le jeune Humain fit un pas de plus, chancelant. C’était une sensation étonnamment familière, cette absence de sol sous ses pieds, même s’il ne pouvait pas se l’expliquer. Il avança dans le silence, les bras levés pour se maintenir en équilibre, les lèvres étirées en un sourire un peu béat, sans aucun autre repère que les battements de son cœur qui cognait contre sa poitrine.

Tout autour de lui, il n’y avait que cet infini nuage aux contours changeants et à la couleur mirobolante, moirée, tantôt bleue veinée d’ocre, tantôt nacrée aux reflets de feuille et de sève. On aurait dit que la neige n’allait pas tarder à tomber, mais il ne faisait pas froid. Au contraire, le brouillard était tiède comme une étreinte maternelle, comme la première gorgée d’un lait chaud après une après-midi passée à ranger le bois.  Doucement, Shay ferma les yeux pour mieux en apprécier le contact contre ses joues et ses avant-bras. Une éternité sans doute, il erra ainsi, dans cet espace éloigné du ciel et de la terre. Il ne pensait pas, alors, à ce qu’étaient devenus la ville et ses maisons, les rues pavées et le fond sonore lourd et répétitif des tailleurs de pierre. Sa mère, son vieil oncle, sa grand-mère, son frère et ses sœurs avaient tous disparu – et tout le reste des habitants avec eux. Il n’était pas encore temps pour lui de s’en émouvoir. Il se contentait de se laisser porter, de courir après la brume.

Et puis, finalement, il se prit les pieds dans ce qui devait être une racine et s’écroula, tête la première. Son front heurta l’étrange chape inconstante et inconsistante sans aucune douleur. Toutefois, tandis qu’il tentait de se redresser, de prendre appui sur ses mains, le brouillard s’écartait sous lui, engloutissant d’abord ses bras jusqu’aux coudes, puis jusqu’aux épaules. Shay ouvrit la bouche pour crier, sentant l’univers basculer et se renverser, et lui être emporté avec. Il ne voulait plus rester seul dehors ; il voulait rentrer chez lui, retrouver le confort et la dureté de ces vieux rochers tristes et froids auxquels Balèpl s’accrochait désespérément. Il en avait assez de la brume. Il se mit à crier plus fort, à appeler à l’aide. Où étaient-ils tous ? Il ne pouvait pas être la seule personne à être sortie aujourd’hui, si ?
Une voix d’enfant, venue de nulle part, trancha soudain le dais qui s’épaississait à n’en plus finir :

« Attrape ma main !
— Où ça ? J’y vois rien ! »

Shay tendit le bras, balayant au hasard à la recherche d’une prise. Dans le lointain, étouffée par les nuages, la voix continuait de l’encourager. Il étendit les doigts aussi loin qu’il pouvait, et effleura enfin quelque chose de tangible. Une main, pas plus grande que la sienne, se referma autour de son poignet et il s’y agrippa avec toute la force dont il était capable.

« J’te tiens ! »

Le monde fut aspiré dans un écœurant tourbillon grisâtre, et Shay entremêla ses doigts avec ceux de l’autre enfant, le ventre noué par la peur, priant pour qu’il ne lâche pas prise. Tout s’arrêta subitement, avec un fracas retentissant comme un coup de tonnerre. Shay se retrouva allongé au sol, le dos endolori par une chute qu’il n’avait pas eu conscience de faire. De sa main libre, il caressa distraitement l’herbe humide. C’était fini. Il était toujours en vie. Au-dessus de lui s’étendait un ciel sans nuage qui se reflétait dans ses iris ternes, les peignant en nuances d’azur. Lentement, sa main glissa hors de l’étreinte moite dans laquelle elle se trouvait, et Shay tourna la tête vers son compagnon d’infortune.

Il rencontra deux yeux à l’étrange teinte pourpre qui le fixaient avec la même hésitation, la même appréhension, au milieu d’un visage pâle comme la mort couronné d’ombres bouclées. Immédiatement, l’enfant – qui ne devait pas être beaucoup plus jeune que lui – se redressa et se frotta les joues, un large sourire en craquelant l’émail livide. Shay se força à sourire à son tour, plissant ses lèvres fines en un rictus timide. Il prit un temps pour examiner son environnement ; les douces collines qui s’étalaient à perte de vue, l’horizon qui s’effilochait en lambeaux d’un rose délicat. Tout était calme. Il n’y avait pas un bruit, pas un bruissement d’insecte. L’air était limpide, presque sucré.

« Salut ! » finit par lancer le jeune Ondin – car il ne pouvait pas en être autrement, avec son teint d’ivoire et ses cheveux d’encre violine. Son ton était enjoué mais son regard trahissait encore un reste d’inquiétude. Du coin de l’œil, Shay le vit se lever et lui tendre une main secourable pour l’aider à faire de même. Il plissa un peu plus les lèvres, et préféra se mettre debout seul.

« Bonjour. » consentit-il toutefois à répondre, car l’absence de ses parents n’impliquait pas qu’il devait perdre ses bonnes manières. « Toi aussi, tu étais dans la brume ?
— J’étais dans un arbre, j’ai dû m’endormir et quand j’me suis réveillé, c’était comme ça partout. » L’Ondin agita vaguement les bras, incertain. « Enfin, pas comme ça. Comme c’était avant, j’veux dire. »
— Je suis juste sorti de chez moi… J’ai pas le droit de m’éloigner, normalement. Et avec la brume, Père devra faire attention à ne pas glisser. »

Shay plongea les mains dans ses poches, tournant sur lui-même d’un mouvement souple. Ses montagnes étaient bien loin pourtant, peut-être englouties par l’océan d’herbe grasse qui respirait posément, comme endormi. Sans trop vouloir faire face à l’Ondin, qui lui paraissait un peu bizarre, il poussa un soupir et reprit la conversation.

« Comment tu t’appelles ?
— Usui.
— Moi, c’est Shay. » L’autre garçon laissa échapper une espèce de rire étouffé, tournant vivement la tête pour dissimuler l’hilarité qui scintillait dans ses prunelles pourpres. Shay serra les dents.
« Quoi ?
— C’est vraiment débile, comme nom.
— Et toi, c’est ta tête qui est débile ! »

Il croisa les bras d’un air revêche, le menton suffisamment levé pour faire croire qu’il n’avait pas été blessé par la remarque, mais sa répartie, qui n’avait rien d’exceptionnel, n’avait semblé qu’accroître l’euphorie d’Usui. « Tais-toi ! C’est vraiment pas drôle… » finit-il par s’exclamer, le teint de plus en plus blafard à mesure que sa poitrine se serrait, emplie de honte et de peine. C’était injuste ; il n’avait pas le droit de se moquer de lui comme ça, alors qu’ils ne se connaissaient que depuis quelques minutes. L’Ondin croisa son regard et laissa son rire mourir dans sa gorge, écarquillant doucement les yeux.

« Oh, désolé ! J’voulais pas être méchant... Désolé ! J’rigolais juste… » bredouilla Usui, étendant le bras pour agripper l’épaule de Shay ; un geste de réconfort dont la familiarité fit instinctivement reculer ce dernier. Usui se mordit la lèvre inférieure, fit un pas en arrière et laissa le silence s’étendre un moment avant de grogner : « Chez moi, les adultes rient tout le temps. T’as pas l’air du genre à rire beaucoup, si ?
— Mon Oncle dit que seuls les idiots rient pour rien, or je suis trop jeune pour comprendre les plaisanteries de mes aînés.
— Il doit être chiant à mourir, ton oncle. »

Les sourcils de Shay se haussèrent jusqu’à disparaître sous sa frange, et sa bouche s’ouvrit en un o choqué en même temps qu’il jetait vers l’Ondin une œillade à la fois apeurée et réprobatrice. « Hey ! Ça se fait pas ! T’as pas le droit de parler comme ça !
— Sinon quoi ? » pouffa l’enfant pâle, levant les bras pour englober le paysage désert. « Tu vas l’dire ? »

Durant un très court instant, les deux enfants s’affrontèrent du regard, puis Shay serra les poings. Usui bondit et détala dans les hautes herbes, un éclat de rire dans son sillage, tandis que le petit Humain s’élançait à sa poursuite en poussant des cris vindicatifs. Sous eux, les collines se mirent en mouvement alors qu’un vent vieux et fatigué se levait, courbant les herbes dans un sens puis dans l’autre à chacune de ses lentes respirations. Trop accaparés par leur course folle, ils ne réalisèrent pas tout de suite que le sol bougeait, s’animait à l’image d’un véritable océan, et que les vagues tentaient de les envoyer à terre. Au-dessus d’eux, des traînées de cendres s’entortillaient comme la coquille d’un nautile, chassant l’éclat du jour. Ils couraient, et le vent giflait leurs joues, et les herbes griffaient leurs chevilles.

Usui avait la vivacité d’un singe, mais Shay avait l’endurance. Il finit par le rattraper, assez près pour tirer le bas de sa chemise, les faisant tous deux perdre l’équilibre et rouler dans l’herbe. Shay prit une poignée de terre friable et l’étala sur le visage de l’autre enfant, tentant d’en fourrer dans sa bouche, arguant qu’il fallait la nettoyer car il ne disait que des saletés. Éreinté mais amusé, essoufflé mais riant à s’en étouffer, de la terre plein la bouche, Usui leva finalement les mains en signe de reddition.

« T’as gagné, j’me rends, j’me rends ! » hurlait-il, agitant les jambes pour tenter de renverser la situation – en vain. Shay se dégagea de lui-même, non sans lui coller quelques derniers brins d’herbe dans les cheveux. À bout de souffle, les deux enfants s’allongèrent pour calmer les battements de leur cœur, les yeux levés vers le ciel où les dernières nuées sombres se dissipaient. L’orage avait été évité de justesse.

« Où tu crois qu’ils sont, tous ? Ça ressemble pas du tout à chez moi, ici.
— J’sais pas. On dirait qu’on est tout seuls. » Shay réprima un frisson. Malgré la tiédeur ambiante et sa récente suée, il avait froid.
« Si je suis en retard pour ma leçon, mon oncle devra me corriger.
— Te corriger ? Mince, ça a vraiment pas l’air drôle… Faut qu’on essaie de te ramener avant, alors ! »

Aucun d’eux n’esquissa un mouvement, pourtant, hormis Usui qui continuait de s’essuyer le visage sur le bout de sa manche. Clignant lentement des paupières, Shay remarqua soudain qu’il n’y avait pas de soleil – son sentiment de malaise s’amplifia, et il déglutit avec difficulté. Rien autour de lui n’était suffisant pour lui assurer qu’il n’était pas mort. Comme s’il avait perçu sa gêne, Usui tourna vers lui un regard curieux, luisant sous ses longs cils de fille : « T’as peur ?
— Quoi ? Non ! » s’indigna le jeune Humain, fronçant les sourcils en une expression peu amène. Pour appuyer ses paroles, il prit appui sur ses coudes et se releva. Résolument, il se mit à marcher dans une direction hasardeuse. Derrière lui, il entendit Usui pousser une sorte de râle ennuyé et il craignit que l’Ondin ne le laisse seul, préférant continuer à se prélasser dans l’herbe douce. Quelques secondes plus tard, heureusement, celui-ci l’avait rejoint et marchait à ses côtés d’un pas peu enthousiaste, soupirant à intervalles réguliers.

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