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 [Chevalier Brun] Marek d'Ardiénor & Asaleith

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Marek d'Ardiénor
Chevalier Dragon
Chevalier Dragon
Marek d'Ardiénor


Date d'inscription : 25/02/2019
Sexe : Masculin
Présentation : URL
Messages : 45
RPs : 39
Race : Ondin
Âme-Soeur : Le Brun Asaleith
Fonction : Prêtre de Flarmya
Affiliation : Apolitique
Alignement : Loyal Neutre (Kaerl Englouti)
Ordre Draconique : Ordre Draconique Neutre (Kaerl Englouti)

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MessageSujet: [Chevalier Brun] Marek d'Ardiénor & Asaleith   [Chevalier Brun] Marek d'Ardiénor & Asaleith Icon_minitimeLun 25 Fév 2019 - 17:44

Marek d'Ardiénor
***

[Chevalier Brun] Marek d'Ardiénor & Asaleith Vava-marek-dardienor-tolorea 
« Nul ne peut atteindre l'Aube
Sans passer par la Nuit »


***  

Nom : Marek d'Ardiénor. Son nom de famille lui vient de sa mère, une noble déchue de son rang.

Surnom : Se fit appeler "Nezvan" durant toute la durée de son apprentissage pour devenir Prêtre, autrement dit "celui qui n'a pas été appelé", un nom étroitement lié à son histoire. C'est Aoatea, l'Archiprêtresse de Flarmya, qui, lisant dans son esprit son passé, lui "rendit" sa réelle identité, lui permettant d'avancer sur le chemin qu'elle avait choisi pour lui. Au Kaerl, aucun surnom connu.

Âge : Environ 29 ans, né en Néharaku 890. En 919 cela faisait onze ans qu'il avait intégré le Màr Tàralöm, neuf ans depuis son Empreinte avec Asaleith, et presque huit ans qu'il était membre du Concile comme Représentant de Flarmya.
Abandonnant tout ce qu'il avait construit auparavant en choisissant de quitter définitivement le Kaerl Ardent, il a rejoint le Màr Luimë à l'automne de cette année, suite à une rencontre déterminante avec la sage Sraoshaï, gardienne de la Cité des Sables.

Race : Ondin de par sa mère. La race de son géniteur ne lui est pas connue, pas plus que son identité ou son histoire.
(A savoir : son père, Jezrien Revak, demi-sang Ondin/Humain, fut un Chevalier Dragon de Tol Orëa, agent double d'origine Engloutie, infiltré au Màr Tàralöm où il réalisa un second Aspiranat, faisant suite à un rude entrainement préalable au Màr Luimë. Il a été tué par son Kaerl d'origine au cours de la guerre quant il s'est révélé être devenu inutile, considéré comme présentant un trop grand danger à être laissé en liberté. Quant à son âme soeur, né sur les sables du Kaerl Ardent, un Blanc prénommé Keizaal - "Bord de Ciel" - il est présumé abattu durant la Grande Guerre des Ordres et est ainsi mort avant lui.)

Physique, Caractère : Froid et inflexible, fier et torturé seraient les meilleurs adjectifs pour décrire Marek. Effectivement, ses lèvres, charnues et bien dessinées, sont bien rarement animées d'un sourire. Quant à l'entendre rire, n'y comptez pas, à moins d'avoir réussi à l'apprivoiser. A supposer que ce soit le cas, ses iris aux teintes rappelant l'océan qu'il adore, s'éclaireront alors d'une lueur chaleureuse bien qu'un peu mélancolique, comme celle du soleil perçant à travers des nuages d'orage. Ses yeux, si similaires à ceux de sa mère, sont profondément enfoncés dans leurs orbites, sous ses fins sourcils souvent froncés, et tout ceci associé à une mâchoire carrée et ses joues creusées, le fait souvent paraitre plus dur qu'il ne l'est.

Si vous poursuivez votre examen, vous pouvez noter qu'une fine crinière couleur aile de corbeau, autrefois plus courte, vient à présent balayer ses épaules. Sauvage et désordonnée, même si elle se verra le plus souvent nouée en arrière pour dégager son visage, cette chevelure aux sombres reflets bleutés lui vient de son père qu'il n'a jamais connu, là où sa mère arborait une délicate chevelure d'argent, aussi brillante que l'écume au sommet des vagues.
Sa peau quant à elle parait bien pâle, et pas seulement à cause de l'ombre du volcan dans laquelle il a longtemps baigné au Màr Tàralöm. De constitution plutôt mince voire frêle, il n'est pas non plus très grand. Ce n'est donc certes pas un colosse, mais il dispose toute de même d'une musculature sèche bien que peu marquée, et d'une constitution physique plutôt correcte, du fait de ses entrainements réguliers. Et, soigneusement cachées sous ses vêtements amples à la mode Ondine, de fines cicatrices blanchâtres parcourent son corps, rappel des corrections que lui infligea son ancien Maitre en de bien trop nombreuses occasions.

A l'intérieur de son poignet, outre les veines sillonnant sous sa peau pâle, se dévoile également un élégant tatouage, représentant une Fleur des Vents d'origine ondine, un dessin symbolisant beaucoup pour lui, tant un hommage à ses origines et aux navigateurs Ondins qu'il admire, qu'une allégorie de sa recherche de la vérité, du juste chemin, et plus encore, de sa place en ce monde.

Marek se déplace le plus souvent d'une démarche souple, légère, et sans bruit, avançant la tête haute, mais non sans manifester une certaine prudence teintée de méfiance, toujours attentif à ce qui l'entoure. Cette attitude se retrouve également dans son style de combat, suivant avec simplicité les codes d'attaque et de défense de son peuple maternel. Le combat est une danse dont il faut sans cesse réinventer de nouveaux pas. Ses longs doigts fins sont plus habitués à accompagner les mouvements de l'art du combat au corps à corps qu'à manier une lame, et si on le verra rarement porter une épée, il ne dédaignera pas, à l'occasion, l'usage de dagues ou de couteaux équilibrés pour être lancés.

Et n'éprouve-t-il donc aucun sentiment, cet homme si rigide, si impénétrable ? Ne vous y laissez pas prendre, et observez ses cernes qui dénoncent la nervosité omniprésente qui l'assaille. Car il se contrôle en permanence, peu enclin à laisser qui que ce soit percevoir ses faiblesses. Il marche sur une corde raide suspendue au dessus d'un abîme sans fond, c'est ainsi qu'on le qualifia il y a bien longtemps, en Undòmë. Comme si le moindre faux pas pouvait lui être fatal. L'équilibre est si dur à trouver, si délicat à maintenir ...
Marek n'a pas un tempérament violent, loin de là, et ne tuera jamais pour le plaisir, ne mettant à mort que s'il en est réellement obligé, si sa vie se voit être mise en jeu. Pourtant, en dépit de tout cela, une ombre, tapie au fond de sa conscience, hante son esprit depuis ce moment où il tua pour la première fois, et n'attend qu'une seule bonne occasion pour resurgir.

En vérité, c'est avant tout un homme extrêmement loyal, qui tiendra toujours ses engagements - s'il le peut, et souffrira de devoir trahir ses convictions profondes, celles qu'il développa lors de son apprentissage auprès des Prêtres de Flarmya. La Déesse guide chacun de ses protégés sur le chemin qu'elle a choisi pour eux. Le chaos est quelque chose de dangereux selon lui, et les traditions, tout comme les lois, doivent être respectées autant que possible. Enfin, il a une conscience aigüe de son rang, et de sa situation actuelle précaire au Màr Luimë, qui le pousse à faire - pour le moment - profil bas.

De par son vécu difficile, il a développé un caractère réservé, peu prompt à accorder sa confiance. Encore une fois, il faudra développer des trésors de patience pour arriver à ce qu'il vous livre enfin ses pensées profondes, son ressenti et ses émotions, face aux situations qu'il rencontre. Ainsi, et même s'il ne l'admettra que difficilement, il cache une âme hypersensible, écorchée vive par les épreuves traversées. Et si, une fois sa confiance gagnée, vous lui tendiez une main secourable, il se pourrait bien qu'il s'y accroche avec une ardeur désespérée.

Il n'avait aucun ami et guère d'alliés au Màr Tàralöm, et peine encore maintenant à se lier d'amitié sincère au Màr Luimë. Son seul soutien a toujours été son âme soeur, le Brun Asaleith, avec lequel il entretenait et entretient aujourd'hui d'autant plus, des liens étroits, fusionnels. Le dragon représente pour lui son pilier de stabilité, sa force intérieure, l'empêchant de se laisser sombrer ... Le protégeant, à sa façon maladroite, contre tout ce qu'il considèrerait comme une menace pour son bien-être
Très réservé sur sa vie passée, Marek parlera bien plus volontiers de la période qu'il passa en apprentissage auprès des religieux en Ys et Undòmë, que de l'époque douloureuse la précédant. Malgré son statut passé au Màr Tàralöm, en tant qu'ancien Grand Prêtre de Flarmya, ce n'est pas un fanatique, il reste très lucide quant à la puissance des Dieux. Et choisi d'y accorder foi simplement parce qu'il considère en avoir reçu une preuve irréfutable.

Une fois seulement, son coeur s'est ému suite à la rencontre d'une femme, un amour impossible et voué à l'échec, qui lui apporta une souffrance inévitable. Une adoration absolue envers sa supérieure et sa "sauveuse", Aoatea, qu'il refoula bien longtemps, se refusant à l'exprimer par des mots, s'efforçant de la refouler, de la circonscrire à quelque chose de très pur, craignant de la souiller par des actes irréversibles. En effet, le contact physique, amical ou intime, de par l'expérience qu'il a pu en avoir, le met assez mal à l'aise.
Dans son esprit, l'amour en tant que sentiment et les relations sexuelles devaient rester totalement dissociés ; il n'était tout simplement pas digne de porter la main sur l'Avatar de Flarmya. Ceci provoqua une violente dispute entre eux, lors de leurs dramatiques retrouvailles après dix longues années de séparation, et poussa enfin Marek à tout remettre en question : de son attachement aveugle pour elle à sa véritable place en ce monde.

Ce conflit, cette contradiction entre ses principes de vie et les actes qu'il se voyait obligé d'accomplir au Màr Tàralöm, quelle en était la signification profonde ? Son cœur, son âme même étaient-ils réellement voués à l'Ombre ? Ces questions, qui l'avaient pendant si longtemps torturé et auxquelles il n'était jamais arrivé à apporter de réponses, ne pouvaient maintenant plus être occultées. C'est prenant ses problèmes à bras le corps et affrontant ses démons intérieurs que le chemin à suivre lui apparu : il n'était plus possible de prétendre appartenir au Kaerl Ardent. Il lui fallait partir, où que ce soit. Il était temps de se libérer des attentes qu'Aoatea avait placé sur lui, ce jour où elle avait décidé que le destin qu'il devait accomplir résiderait au Màr Tàralöm.
La voie de l'équilibre, si chère à ses yeux, se présentait désormais comme le seul chemin envisageable pour pouvoir enfin trouver la paix de l'âme.

Les révélations qui lui ont été faites sur son passé, suite à sa rencontre mystique avec la gardienne Sraoshaï, au Màr Litsë, ont soufflé en lui une profonde soif de justice, et un besoin de rétablir la vérité sur la corruption régnant dans les Hautes Sphères ... Sur le véritable sort qui avait été réservé à son père par la famille dirigeante d'alors, les Gilraën.

Alignement : Loyal Mauvais Loyal Neutre

Clan choisi : Ombre, le Màr Tàralöm (Clan Introverti) Neutre, le Màr Luimë (Apolitique, pour le moment)

Possessions : Une arbalète légère - alliance de la rapidité et de la puissance -, aux carreaux enduits de son propre sang, qu'il porte lors de ses déplacements à l'extérieur. Une grosse chevalière ouvragée en or rouge, représentant un dragon et une flamme, sur laquelle est montée une agate serpent, symbole de son titre de Sang du Màr Tàralöm, qu'il ne porte que lorsqu'il est appelé à siéger au Concile qu'il a abandonné à son départ du Kaerl.
Du côté sentimental, une écharpe en soie Ondine dans les tons bleus, d'une grande valeur à ses yeux, seul souvenir qui lui reste de sa mère  ; un pendentif en argent, représentant un dragon stylisé, qui est le symbole de son rang de Prêtre de Flarmya et qu'il tient de son ancien mentor, Maksim. Il tient énormément à ces deux derniers objets et ne supporterait pas de les perdre.
Dernièrement il a acquis un ensemble de très belle facture, également en soie Ondine, offert par Sraoshaï : il en prend grand soin et ne le porte que pour les grandes occasions (exemple récent avec le Jour d'Ouranos).

Magie : Il possède le don héréditaire des Ondins, mais est cependant plus entrainé à utiliser la toxine comme un poison que pour guérir, côté qu'il maitrise très peu et qu'il évite d'employer. En plus de cela, des rumeurs courent sur le fait qu'il serait visité par des visions plus ou moins sibyllines du futur, envoyées par la Déesse Flarmya. Elles se manifestent principalement la nuit dans ses rêves, et beaucoup plus rarement le jour (au contact d'un objet, le plus souvent). En plus de lui occasionner de grosses migraines et une certaine fatigue, ces "cauchemars" ainsi qu'il les considère, l'empêchent le plus souvent d'avoir un sommeil réparateur.

Divers : Ancien PNJ (ou plutôt P-PTAF-J, soit Personnage Pas Tout A Fait Joueur ^^), il a reçu une promotion de la part de sa créatrice, et devient désormais un PJ à part entière ! Fiche entièrement reformulée, développée et réécrite en Août 2016, en respectant l'histoire et le concept originel du personnage.


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Dernière édition par Marek d'Ardiénor le Lun 25 Fév 2019 - 18:40, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: [Chevalier Brun] Marek d'Ardiénor & Asaleith   [Chevalier Brun] Marek d'Ardiénor & Asaleith Icon_minitimeLun 25 Fév 2019 - 17:46

    Undòmë : Le Prix du Sang

La vie de Marek commence dans un petit bourg, au nord-ouest d'Undòmë, village de pêcheurs et de marins par excellence. Son existence commença dans la douleur et le sang, suite à un accouchement prématuré de sa mère.

Ayala, héritière Ondine de la noble famille d'Ardiénor, avait eu une liaison amoureuse interdite avec un homme qui ne lui était pas promis. Cette relation dura plusieurs mois, avant qu'un jour, étrangement, il ne disparaisse sans laisser de traces. Les semaines s'écoulèrent sans que ne lui parvienne aucune nouvelle de lui. Et pendant ce temps, son ventre s'arrondissait. Dès lors qu'elle ne fut plus en mesure de cacher sa grossesse, ses proches la pressèrent de prendre des herbes abortives, tant que c'était encore possible sans mettre en danger sa santé. C'était une question d'honneur. A de multiples reprises, elle refusa, se raccrochant à la vie qui grandissait en elle, comme à un souvenir de son amant disparu. Alors, sa famille la menaça de la renier, de lui prendre son nom et de l'enfermer pour le restant de ses jours dans un couvent de Gaïa, ceci afin d'éviter que la rumeur de son "impureté" ne s'ébruite en ville. Poussée au désespoir, Ayala décida de fuguer, de s'enfuir loin du domicile familial, bien inconsciente de la réalité de la vie qui l'attendait à l'extérieur du cocon doré où elle avait toujours vécu.

Ses illusions s'envolèrent bien vite quant à l'image qu'elle s'était faite du "monde extérieur". Et pourtant, entêtée, obstinée, n'ayant qu'une seule idée en tête - sauver son enfant et retrouver son amant - les mois passants, elle poursuivit son chemin, contre vents et marées, sa fortune s'amenuisant et son état se dégradant, jusqu'au jour où elle sentit qu'elle ne pourrait plus avancer. Si sa famille la fit rechercher, comme c'était très certainement le cas, elle n'en sut jamais rien.

Affaiblie par sa longue fuite et sa grossesse difficile, elle dépensa le peu d'argent qui lui restait pour payer une guérisseuse réputée pour s'occuper d'elle et de son enfant, lors de son accouchement. Des heures durant, elle lutta pour mettre au monde son enfant, jusqu'à ce qu'enfin la délivrance survienne. Elle perdit beaucoup de sang ce jour là, mais contre toute attente, elle survécut et se rétablit, lentement mais sûrement. Quant au petit, bien qu'un peu frêle, il était vigoureux.
Ainsi, après de nombreux jours de soins consciencieux et attentifs, mais cependant coûteux, Ayala se retrouva endettée, incapable de payer. Refusant de se séparer de son fils nouveau-né, que pouvait-elle faire pour récupérer un peu d'argent, sinon vendre son corps au plus offrant ? Rendue stérile suite à la naissance de Marek, elle devint, par la force des choses, prostituée, se promettant que ça ne durerait pas. C'était bien différent des clichés habituels sur les courtisanes des Oasis de Ssyl'Shar, où elles étaient traitées comme des princesses et couvertes de bijoux, et où les nobles s'arrachaient leur compagnie distinguée. Non, rien à voir avec ce que racontaient les livres, les hommes d'ici n'étaient ni beaux, ni tendres. Ils étaient surtout impatients, avides et parfois violents.

C'est dans cette ambiance là que grandit Marek. Dure réalité qui le frappa dès qu'il fut en âge de comprendre pourquoi sa mère, si aimante et si douce avec lui, recevait des hommes chez eux, et lui demandait à voix basse de sortir, et d'aller jouer avec ses amis. Dans ces moments là, il prenait ses affaires et allait s'asseoir au bord de la mer, au port, observant les allées et venues des bateaux et les remous des vagues. Le brouhaha qui régnait autour de lui était apaisant, l'empêchant de penser à ce qui se passait chez lui.
Avec les autres enfants de la ville, il ne devait tisser aucun lien, ni de confiance, ni d'amitié. Ceux qui avaient un vrai toit et une famille, fils de marins ou de commerçants, l'évitaient, se moquant de lui, le surnommant Nezvan, l'enfant non désiré, le bâtard. Quant aux autres, miséreux vivants dans la rue, le garçon s'en méfiait, sentant qu'une forme de rivalité existait entre eux. Ils lui apprirent très vite le "chacun pour soi" et que quand on avait réellement faim, toute argent était bonne à prendre, quelle que soit son origine.
Plus âgé, il commença à enchainer les petits contrats, rendant service là où le pouvait, volant parfois quand il ne pouvait pas faire autrement, ignorant la fatigue, la douleur quand sa tâche était au dessus de ses forces. Les quelques pièces qu'il arrivait à gagner, il les glissait fièrement dans petite une bouteille en verre grossier, que sa mère conservait précieusement.

Le garçon ne sut jamais qui était son père. Pour lui, il devait s'agir d'un des nombreux clients de sa mère, qui ne lui avait jamais parlé des circonstances de sa conception. Comment reconnaître son géniteur parmi tous les hommes qui avaient visité sa mère ? Désargentée, reniée par sa famille, abandonnée par son amant, Ayala rêvait de s'embarquer sur un navire, pour s'en aller loin, très loin d'ici, loin de cette terre qui l'avait rejetée, le plus loin possible de cette nouvelle existence miséreuse qui l'avait réduite à faire des choses auxquelles elle n'aurait jamais imaginé devoir s'abaisser. Pour recommencer une nouvelle vie avec son fils, tirer un trait sur son passé ... Se donner tout simplement une deuxième chance. Car l'espoir était tout ce qui lui restait.

Et la ronde des astres étant irrémédiable, les années s'écoulèrent et s'accumulèrent, sans que pourtant rien ne change.

Un jour de son dixième automne, alors que Marek était absent, un client particulièrement irascible, qui s'était "entiché" de sa mère depuis quelques semaines, débarqua chez eux, ivre mort, exigeant de voir Ayala, qui refusa de le recevoir dans cet état. En conséquence de quoi, furieux et plein de mépris, il la frappa en de multiples reprises "pour lui apprendre l'obéissance", sans tenter de maitriser sa force. Puis, se désintéressant d'elle, désireux d'apaiser le feu qui brûlait dans ses veines, il commença à piller le logement familial, à la recherche d'alcool pour son gosier asséché. En vain. Pris d'une intense frustration, l'homme renversa les meubles avec violence, brisant bouteilles et amphores au sol sans état d'âme. Cette satanée Ondine devait le décevoir jusqu'au bout, ainsi songeait-il.

Ce jour là vit l'accomplissement du premier meurtre de Marek, qui perdit toute l'innocence qui pouvait encore exister en lui en découvrant sa mère ensanglantée, battue à mort, dans la petite cabane qu'ils partageaient. Profitant de l'effet de surprise, et se servant par pur instinct des toxines ondines qui couraient dans son sang, il agrippa le meurtrier, suffisamment longtemps pour le faire vaciller, d'un seul contact prolongé. L'homme bascula à terre, et il le regarda avec une sombre satisfaction commencer à étouffer, ses yeux écarquillés et suppliants plongés dans les prunelles bleu-gris du jeune garçon. Il resta de longues minutes ainsi, maintenant l'ivrogne au sol alors qu'il tentait de se débattre, ses petites mains serrées sur son cou, les toxines pulsant sous ses doigts, et les lèvres retroussées en un rictus de rage. Jusqu'à ce que l'ivrogne cesse enfin de bouger. Paralysé. Mort. Marek aurait dû en ressentir du soulagement, mais son esprit était vide, si désespérément vide. Et ses yeux qui le brûlaient d'une intense sécheresse ...

Ce n'est qu'en entendant la garde au loin dans la rue qu'il se reconnecta au moment présent, et que la panique s'empara de lui, parcourant son corps comme une décharge électrique. Ils savaient, quelqu'un les avait prévenus ! Que pouvait-il faire ? Les soldats allaient l'emmener et le jeter en prison ! De désespoir, il attrapa des brandons incandescents, et les dispersa un peu partout dans la pièce. Rassemblant rapidement ses quelques économies, roulant en boule sous sa chemise le foulard de soie préféré de sa mère, il s'assura que les flammes commençaient à se développer avant de verrouiller la porte d'entrée et de se glisser par la minuscule fenêtre du logement. Ils ne l'auraient pas, ni lui, ni sa mère. Jamais.

    Undòmë : Un Eternel Recommencement

Désormais orphelin et intérieurement traumatisé, les genoux écorchés et de multiples petites brûlures ornant ses mains, il décida de s'enfuir loin de la bourgade, prenant la direction de l'intérieur des terres. Après des jours d'errance, affamé et à bout de forces, il fut recueillit par un Prêtre Itinérant de la Déesse aux Larmes de Feu, Flarmya. C'est à ce moment là que le garçon, méfiant, se présenta comme Nezvan, "celui qui n'a pas été appelé", comme pour ne jamais oublier le souvenir amer de son enfance. Pourtant le Prêtre, sans rien connaître de son passé trouble, après une simple discussion et un repas plus riche que le garçon n'en avait jamais mangé, décida de l'emmener au Sanctuaire auquel il appartenait. Après tout, ce petit n'avait plus rien à perdre ? Touché par sa situation, il souhaitait lui proposer une possibilité d'accéder à l'éducation, et lui permettre de prétendre à une vie meilleure que celle qu'il avait vécu jusque là.

Les premiers mois au temple furent difficiles. Il n'y avait guère d'enfants là-bas, ce qui convenait très bien à Marek, qui conservait un tempérament réservé, solitaire et peu prompt à accorder sa confiance. Les ténèbres rongeaient insidieusement son âme, mélange de colère et d'injustice, de savoir que sa mère aimante lui avait été arrachée si tôt, et de haine quant au fait qu'on avait ôté à sa mère toute possibilité de réaliser ses rêves, pour lesquels elle avait tant souffert et s'était tant battue. Haine hélas à jamais sans objet, puisqu'il en avait tué le responsable. Pris dans ce tourbillon effréné de noirceur et de douleur qui noyait son coeur, il lui était difficile de se concentrer pleinement sur ses études et d'apprécier cette nouvelle vie qui lui était offerte.

Pourtant, au fil du temps, sa peine s'effaça devant l’intérêt et l'affection désintéressée que son mentor, prénommé Maksim, lui portait. Bien qu'il soit amené à aller et venir sur les chemins d'Undòmë en tant que Prêtre Itinérant, l'Humain revenait régulièrement visiter son protégé au Sanctuaire, lui rapportant les récits de ses voyages et occasionnellement de menus présents. Marek attendit progressivement ses visites avec une impatience grandissante et Maksim prit alors pour lui la place du père qu'il n'avait jamais eu. Il pensait que le garçon était intelligent, et prometteur. Quand il en avait réellement envie, il était capable d'apprendre vite et s'il le décidait, il pourrait accomplir de belles choses.
La vie au Sanctuaire en tant que novice était rythmée par les cérémonies journalières, et ses journées se révélaient bien remplies. Il y avait toujours une multitude de choses à faire et il n'avait pas le temps de s'ennuyer ! S'il devait regretter une chose de sa vie d'avant, c'était la présence de la mer. Le son des vagues lui manquait et la plaine lui paraissait bien fade ...
Petit à petit, les Prêtres de Flarmya lui apprirent à ouvrir les yeux, et à avoir une autre vision du monde que celle qu'il avait jusque là. La Déesse n'était ni bonne, ni mauvaise. Elle menait simplement ses fidèles vers ce qui était le chemin le plus juste pour eux.

Une nouvelle année s'écoula, puis une deuxième. Lorsque Nezvan - Marek ayant pris l'habitude de se faire appeler ainsi - fut jugé apte à devenir disciple, alors âgé de douze ans, le choix lui fut proposé de rester ou de quitter le Sanctuaire. C'est sans l'ombre d'une hésitation et avec une maturité surprenante qu'il énonça qu'il resterait et entrerait officiellement au service de la Déesse. Il fut alors testé, et son Don fut détecté, comme l'avait pressenti Maksim. Le garçon ne fut pas abasourdi d'apprendre l'existence des Dragons. Pour lui, ce fut comme si on levait le voile sur la véritable nature des êtres dont il entendait déjà les murmures depuis près de deux ans.

Cependant, le Chevalier qui le testa, originaire du Màr Luimë, resta hésitant, empli d'un certain malaise indéfinissable, au moment de décider s'il fallait l'emmener sur Tol Orëa. Son âme pouvait répondre aux critères du Kaerl Englouti, mais une ombre instable rampait toujours dans les profondeurs de son esprit. L'enfant lui semblait marcher sur une corde raide, suspendue au dessus d'un abîme sans fond. Et cela l'effrayait plus qu'il n'osait l'avouer. Fallait-il prendre ce risque ?
Incapable de trancher face aux faits qui lui étaient présentés, le Grand Prêtre fut guidé une nouvelle fois par la voix sage de Maksim, qui suggéra qu'on donna un peu de temps à son protégé pour affermir son caractère. Ainsi Marek fut-il jugé encore trop jeune, paradoxalement trop immature, et il fut décidé qu'il serait soumis à un nouveau test dans un an.

Malheureusement, cela ne devait jamais advenir. Quelques mois plus tard, Maksim, bien que pourtant encore vigoureux malgré la cinquantaine d'années qu'il accumulait, développa suite à l'une de ses missions une vilaine toux persistante, dont il ne devait finalement jamais se remettre. Les semaines passant, l'Humain commença à présenter une fièvre importante associée à des douleurs thoraciques, puis à expectorer des crachats sanguinolents. Son état se dégrada rapidement, sous l'oeil inquiet des autres Prêtres, qui firent tout ce qui était en leur pouvoir pour le guérir, mais en vain. Cette convalescence éprouva grandement Marek, bien qu'il essayait de rester positif en se disant qu'au moins il pouvait passer plus de temps avec son mentor. La seule idée de le perdre lui était inconcevable et le terrifiait profondément. Ainsi, tous les soirs il adressait de longues prières à Flarmya pour le rétablissement futur de celui qui était devenu son "père de coeur", espérant avec ferveur qu'elles seraient entendues.

Après 6 mois de lutte acharnée, Maksim s'éteignit paisiblement dans son sommeil. Et les ténèbres si longtemps contenues déferlèrent à nouveau dans le coeur du garçon. Les autres Prêtres tentèrent bien de le consoler, mais ils étaient incapables de comprendre la nature de sa douleur. Il se sentait trahi, abandonné. Son chagrin fut trop vite dévoré par une rage noire qui l'emplit tout entier. Contre le monde entier, contre les Prêtres qui n'avaient selon lui pas tout tenté pour le sauver, contre les Dieux qui venaient à nouveau de lui ôter une personne chère, contre Flarmya qui avait choisi ce destin pour Maksim en dépit de sa grande noblesse d'âme.

Lorsque le bûcher consuma le corps de son mentor, alors que les chants rituels s'élevaient pour saluer son passage dans l'autre monde, les yeux de Marek restèrent désespérément secs et sa gorge serrée. Et lorsqu'une main compatissante se posa sur son épaule, une voix lui suggérant qu'il n'avait peut-être pas besoin de rester "jusqu'au bout", le garçon laissa échapper un bref cri de colère et repoussa d'un geste violent cette étreinte indésirable. Il fit volte face et se mit à courir, trébuchant dans l'obscurité, sans savoir où aller. Après plusieurs minutes de course effrénée, le regard vague, il réalisa avec surprise qu'il venait de s'arrêter devant l'ancienne chambre de Maksim. De petite taille comme toutes les autres cellules du Sanctuaire, le Prêtre l'avait meublée avec une grande sobriété, offrant cependant tout le confort nécessaire et souhaitable. D'instinct, le garçon en poussa vivement la porte pour aller se recroqueviller dans un coin de la pièce, se sentant étouffer.
La respiration saccadée, un nouveau hurlement lui échappa, incapable à contenir, un cri déchirant, profond, un cri à se brûler les poumons. Les bras serrés autour des jambes, tremblant, il sentait son sang courir dans ses veines comme un torrent rugissant, et la toxine poindre au bout de ses doigts, totalement hors de contrôle. Perdu, Marek ne comprenait pas pourquoi soudain son corps réagissait de cette façon. Pourquoi Maksim était-il parti ? Lui au moins aurait su l'aider, le protéger et lui expliquer ... Il resta ainsi cloitré dans la chambre de son maitre défunt pendant plusieurs jours, s'alimentant à peine, repoussant invariablement toute tentative d'approche de peur d'empoisonner involontairement quelqu'un.

Et au sein du temple, les murmures le concernant ne firent que croître ...

C'est pourquoi, se souvenant des paroles du Chevalier du Màr Luimë, méfiant envers cet enfant qu'il considérait comme "anormal" et qui n'écoutait personne, le Grand Prêtre décida que Nezvan serait envoyé à la Maison Mère, sise au coeur de l'Archipel d'Ys, le remettant au sage jugement de l'Archiprêtresse.

    Archipel d'Ys : l'Accalmie du Coeur

Une semaine plus tard, depuis le navire qui devait l'emmener à Ys, le garçon observait d'un air détaché la côte d'Undòmë s'éloigner, lentement et irrévocablement. Refoulant ses émotions, ses mains tremblantes serrées sur le pendentif en forme de dragon stylisé qui avait appartenu à Maksim (symbole de sa charge) et sur le foulard de soie ondine de sa mère, il ne pouvait s'empêcher de penser à cette dernière. N'était-il pas en train d'accomplir son rêve après tout ? Serait-elle fière de lui, du chemin qu'il avait parcouru ? Il aurait dû se sentir déraciné, chamboulé par la vitesse à laquelle les évènements s'étaient enchainés. Pourtant, il sentait la mer exercer à nouveau son ancienne "magie" sur lui, et il trouvait le roulis et le tangage du bateau particulièrement apaisant. Plus rien ne le retenait en Undòmë, finalement.

Après un long voyage, qui s'était effectué sans heurts, il débarqua enfin sur Ys et découvrit l'endroit où il allait vivre désormais. La Maison Mère était vaste, et son architecture magnifique, ses murs aux bas-reliefs ouvragés étaient d'un blanc pur éclatant sous la lumière de Solyae. Passé l'émerveillement des premiers instants, Marek sentit un certain malaise naitre au creux de son ventre. Tout ici lui paraissait trop propre, trop brillant, le soleil trop chaud, et les couleurs du paysage trop vives. Même les gens lui paraissaient bien trop heureux ! Tout cela heurtait sa sensibilité encore à vif après la mort de son mentor.
Pire encore, en traversant l'allée du cloitre principal, il avait croisé un groupe de jeunes disciples qui discutaient avec animation, éblouissants dans leur robe blanche aux coutures brodées. Il lui avait semblé que les filles l'avait désigné en chuchotant derrière leur main, et que les garçons avaient porté un regard fat et hautain sur lui. Il se rappelait l'histoire du vilain petit canard que lui avait raconté sa mère quand il était tout petit, et se sentait comme lui, gris et déplacé au milieu des autres. A ses yeux, Undòmë, avec sa rudesse caractéristique, présentait un cadre qui concordait beaucoup mieux au garçon en deuil qu'il était à cette période. Les poings serrés, il avait alors décidé qu'il n'aimait pas cet endroit. Il venait à peine de fêter ses 13 ans, et même s'il ne le savait pas encore, il resterait à la Maison Mère durant près de cinq longues années, avant que son Destin ne le rattrape.

Sa première rencontre avec Aoatea, qui était alors tout juste âgée de 18 ans, devait marquer son esprit. Cela faisait quelques jours déjà qu'il était arrivé, et les Prêtres ayant jugé qu'il avait eu suffisamment le temps de s'acclimater à son nouvel environnement, on l'avait convoqué pour lui présenter son nouveau tuteur. Au vu des informations fournies par le Sanctuaire à Undòmë, il avait été décidé qu'il serait préférable qu'il poursuive son apprentissage via des cours particuliers. Une nouvelle fois, une flambée de colère accueillit cette annonce. Comment osaient-ils prétendre vouloir remplacer Maksim ? Comment pouvaient-ils seulement oser manquer de respect à la mémoire de son mentor ? Et une nouvelle fois, il s'enfuit, refusant d'affronter la vérité en face, le ventre tordu de douleur. Seulement, cette fois, sa course confuse à travers les couloirs l'entraina dans une partie encore inconnue du Sanctuaire, et le regard braqué sur ses pieds, il ne remarqua la dame qu'après l'avoir heurtée. Sonné par le choc, assis par terre, il secoua la tête pour s'éclaircir les idées, et leva les yeux vers ce visage grave qui l'observait. Et c'est là qu'il la vit pour la première fois, et ses prunelles bleues comme la mer s'agrandirent sous la surprise. Les deux Prêtresses derrière la dame lui jetèrent un regard noir, indignées par son manque de tenue, mais il n'en avait cure.

Ressortant comme des joyaux sur sa peau mate tandis qu'ils s'étudiaient mutuellement, ses iris avaient un éclat d'or liquide, semblant porteurs d'une sagesse très ancienne. La Torhille arborait une expression sévère voire mystique, un peu intimidante, qui la faisait paraitre bien plus âgée qu'elle ne l'était réellement. La magie de l'instant n'en fut que renforcée lorsqu'elle s'accroupit pour s'abaisser à sa hauteur, et lui demanda son nom. Relevant le menton avec défi, Marek avait craché un nom : Nezvan. Réaction qui n'eut d'autre effet que de provoquer un mince sourire chez son interlocutrice, qui avait allumé de petites étincelles de plaisir dans ses yeux. "Ah", avait-elle répondu avec simplicité, "te voilà enfin. Je suis Aoatea et Flarmya m'a beaucoup parlé de toi". Bouche bée d'étonnement, il en était resté sans voix.

A l'époque, il ne savait pas encore ce que cela signifiait, que la Déesse l'avait choisie pour être son Avatar, et qu'à la mort de sa vénérable tutrice, deux ans auparavant, "l'Enfant Etrange", était devenue Archiprêtresse à son tour. A la surprise de tous, elle se proposa pour prendre son éducation en charge. Elle l'amènerait jusqu'à la Prêtrise. Et parce qu'elle était l'Archiprêtresse et crainte pour son statut tant que pour ses pouvoirs, nul n'osa s'y opposer. Pour Marek, elle lui semblait capable de lire à travers son âme, de comprendre l'ombre et le désespoir qui le hantait. Il s'y raccrocha de toutes ses forces.

Elle lui apporta beaucoup, et il s'éprit d'elle, profondément. Un amour bien étrange, dont il ne se sentait pas digne, mélange indistinct d'une affection sincère, d'un désir brûlant de reconnaissance, et d'une vénération sans borne pour tout ce qu'elle représentait. Etait-ce elle qu'il aimait, ou bien la Déesse ? Ne faisaient-elles pas qu'une ? Durant ces années où les adolescents commençaient à éprouver de l'intérêt les uns pour les autres, il n'eut d'yeux que pour elle. Fragilisé par son histoire passée, il craignait de la perdre s'il s'y attachait trop, comme un mirage qui s'effacerait si on s'en approchait. Ainsi, il ne lui avoua jamais l'intensité de ses sentiments. Il ne voulait pas souiller leur relation avec des mots, véhicules par trop maladroits de ce qu'il pouvait ressentir. En aurait-il seulement eu besoin, après tout ? Elle qui connaissait tout de son âme ?

Les années passèrent, s'enchainèrent, et on ne lui reparla pas de Tol Orëa et de ses Dragons. Etait-ce un oubli ou bien un choix conscient de la part d'Aoatea ? Pour lui, ça n'avait que peu d'importance, puisque ça lui permettait de rester aux côtés de l'Archiprêtresse. Il lui vouait une confiance aveugle. Pourtant un sentiment de solitude, de vide et d'incomplétude ne faisait que croître en lui, palpitant lentement dans son coeur, lui donnant l'impression qu'il manquait la moitié de son être. Il n'essaya pas de le combler en se faisant des amis, ou en recherchant la compagnie d'autres femmes, car il pressentait que ce serait inutile. En tant que protégé de l'Archiprêtresse, connaissant les rumeurs à son sujet, les autres le craignaient, ou bien le jalousaient. Pourquoi chercher à se rapprocher d'eux ?

    Archipel d'Ys : De Flamme et de Larmes

Sa vie bascula à nouveau l'année de ses 18 ans, un âge considéré comme des plus importants pour les disciples de Flarmya ... Ce jour là, accoudé à la fenêtre de la bibliothèque, le menton dans la main, Marek observait à travers la vitre la pluie tomber, plongé dans ses pensées. Tous les ans à la même époque, il se souvenait pourquoi il n'aimait pas le climat d'Ys : la saison des pluies, même si elle touchait actuellement à sa fin. Il ne s'y habituait toujours pas, même après cinq ans passés dans l'Archipel. Cinq ans ... Le temps avait filé sans qu'il ne s'en aperçoive. Au cours de ces années, il avait conquis de haute lutte la maitrise de soi, le contrôle, tant de ses émotions que de sa dangereuse toxine. Cela n'avait pas été sans difficulté, mais Aoatea avait été intraitable sur le sujet, le poussant toujours plus loin dans ce travail sur lui-même, ne lui laissant aucun échappatoire. Avec le recul, il lui en était sincèrement reconnaissant, même si, pour ça, il l'avait haïe autant qu'il l'aimait.

Brisant ses réflexions troublées, un novice hésitant, cherchant à attirer son attention, le tira soudain par la manche, porteur d'un message pour le "Disciple Nezvan". Fronçant les sourcils sur la missive soigneusement pliée, il remercia le garçonnet qui s'inclina et se retira en bredouillant, visiblement intimidé par son interlocuteur. Avisant le sceau de l'Archiprêtresse qui cachetait le pli, il grimaça, incertain. Pourquoi Aoatea ne s'était-elle pas déplacée en personne plutôt que de lui envoyer une missive officielle ? Et son coeur s'arrêta de battre un instant lorsqu'il prit connaissance de son contenu. La cérémonie d'automne, pour le sacrement des disciples. Il l'avait complètement oubliée. Lors de cette cérémonie, il serait reconnu par l'ensemble ses pairs, et serait libéré de la tutelle d'Aoatea. Libre d'aller où il le souhaitait. Son poing se serra sur la missive, la froissant entre ses doigts. Il allait être ordonné Prêtre.

La tradition au sein de la Maison Mère voulait que, une fois par saison, tous les disciples ayant obtenu leurs 18 ans révolus ou étant sur le point de les avoir, puissent passer la cérémonie de sacrement. Celle d'automne se tiendrait bientôt ... Et cette année il était le seul disciple qui y assisterait. Le fait d'y penser lui inspirait des sentiments partagés. Impatience. Peur. Il sentait grandir en lui une boule au ventre qu'il n'avait pas ressenti depuis bien longtemps, mêlée à une sensation d'expectative. Que ferait-il ensuite ? Il ne voulait pas y réfléchir.

Les quelques jours le séparant de la cérémonie se déroulèrent lentement, lui laissant tout loisir de se retourner l'esprit sur le sujet. Le moment venu, à l'aube, le jeune homme se présenta à la porte de la chapelle, le coeur battant à tout rompre, pieds nus et vêtu de sa simple tunique de lin, censée représenter l'humilité de celui qui venait requérir la bénédiction de la Déesse. Il s'était préparé à devoir affronter le regard d'Aoatea, qui aurait immédiatement lu en lui le doute qui l'envahissait, mais elle n'était visible nulle part. Il éprouva une pointe de déception mêlée à du soulagement. Le Grand Prêtre et ses assistants vinrent rapidement à sa rencontre lorsqu'ils le remarquèrent, et lui expliquèrent ce qui l'attendait, l'expression solennelle. Marek les écouta d'une oreille distraite, admirant, comme à chaque fois qu'il venait ici, la lumière du jour qui filtrait délicatement à travers les vitraux colorés.
Une fois seul dans la chapelle, il alla s'agenouiller au pied de l'autel, au centre du bâtiment, levant les yeux vers la statue de Flarmya, l'interrogeant du regard, cherchant un signe quelconque sur son visage de marbre. Durant un jour et une nuit entière, il devrait jeûner et méditer sur son futur engagement, pour mettre son âme à nu, avant d'être jugé par la Déesse. Il n'aurait pas le droit à la moindre nourriture, et la seule boisson autorisée était cette décoction de plantes censée l'aider à atteindre cet état de détachement corporel qui lui serait nécessaire.

Il connaissait le déroulement de la cérémonie par coeur. Il soupira doucement, avant d'avaler une première gorgée du breuvage rituel qu'on lui avait préparé. Son goût était doux, et rappelait le miel ...

Les ombres s'allongèrent, petit à petit, tandis que les heures s’égrenaient. Le soleil allait bientôt se coucher, ou peut-être même la nuit était-elle déjà tombée. Il ne savait plus. Seul dans la chapelle, bercé par le seul son de son souffle, il avait perdu la notion du temps. Le regard trouble, il sentait depuis quelques heures des souvenirs de son passé venir s'imposer à lui, tout ce qu'il avait cherché à cacher, à enterrer au plus profond de lui-même. Il avait beau se faire violence pour faire le vide dans son esprit, se concentrer sur sa méditation, il lui semblait que le contrôle lui-même lui échappait de plus en plus.
Sournoisement, des pensées éprouvantes venaient émerger à la surface de sa conscience, pour y éclater soudainement, libérant des images aux bords tranchants. Comment pouvait-il seulement prétendre être digne de servir Flarmya ? N'avait-il pas vécu toutes ces années en mentant sur son identité ? N'était-il pas un meurtrier ? Un bâtard, un enfant non désiré ? Son ventre se tordit. De faim, de dégoût, de peur, peut-être tout cela à la fois. Comment savoir ? Il baissa ses yeux sur ses mains tremblantes serrées l'une contre l'une. Aoatea savait-elle toutes ces choses ? Si non, que ferait-elle quand elle l'apprendrait ? Déployant lentement ses pétales d'encre, une sourde colère l'envahit, luttant avec son angoisse croissante. Il refusait de se laisser à nouveau envahir par l'ombre ... Mais il était si las de se battre constamment. Ne serait-il pas plus simple d'en finir une bonne fois pour toutes, de céder à la tentation et de se laisser engloutir ?

Les mâchoires serrées, ses iris d'océan et de tempête se rivèrent avec défi sur l'oculus, là haut au sommet du dôme. Il ne se laisserait pas dominer par ses faiblesses. Ses paupières papillonnèrent alors avec surprise en percevant la lumière lunaire qui en irradiait, illuminant d'une teinte froide la statue de Flarmya et adoucissant ses contours. Combien de temps avait-il passé perdu dans ses pensées ? Son regard dériva avant de tomber sur la cruche et le gobelet, posés à côté de lui, sur le sol. Vides, l'un comme l'autre. De cela non plus, il n'en avait pas le souvenir. Mal à l'aise, il supposa que la nuit était bien avancée. Sa veille serait bientôt terminée et alors il ne pourrait plus reculer.

Alors qu'il secouait la tête non sans une certaine affliction, un son inhabituel, comme le doux frottement de pieds nus sur le sol de pierre attira son attention. Un frisson parcourant son dos, Marek se retourna vivement, tentant de percer l'obscurité. Rien. Allait-il commencer à avoir des hallucinations à présent ? Il se redressa difficilement, titubant à demi sur ses jambes soudain instables, et avança de quelques pas dans l'allée. Et il se raidit en sentant un courant d'air effleurer sa nuque. Là, dans la pénombre, elle s'avançait vers lui d'un pas lent. Sa silhouette lui paraissait familière et pourtant, elle lui paraissait chargée d'une aura inhumaine, quelque peu effrayante, qui emplissait soudain toute la chapelle de sa présence. Cela ne pouvait pas être ...

Un rayon de lune éclaira son visage lorsqu'elle s'arrêta face à lui, et son coeur manqua un battement. Aoatea ... Non ... Flarmya. Un sourire éclaira le visage de la Déesse, de son Avatar, lorsqu'elle le contempla, la topaze affrontant l'océan, qu'une ombre troublait. Et doucement, délicatement, ses doigts fins effleurèrent sa joue, repoussant quelques mèches noires fugitives qui s'étaient échappées de leur lien de cuir. A son contact, il sentait fondre toutes ses barrières, toutes celles qu'il avait péniblement érigées pour lutter contre les souvenirs, la douleur qui menaçait de le submerger. Il ne pouvait plus les contenir. Dans un froissement de tissus, le lin chuta, et ses lèvres formèrent un murmure inaudible, une prière, une supplique silencieuse, avide, désespérée. Et lorsque que ces mains féminines vinrent encadrer son visage, elle l'embrassa, d'abord un chaste baiser sur le front, tel celui d'une mère envers son enfant, puis leurs lèvres se rencontrèrent, caresse tendre d'une amante. Mère, fille et amante, ainsi était Flarmya. Par ce geste, elle le liait à elle, pour l'éternité, et à travers elle, à la Déesse.

L'aube était proche. Elle se recula légèrement et il lui lança un regard éperdu, tombant à genoux, son expression révélant le désir qui le torturait, tandis que sur ses joues, les larmes bien trop longtemps retenues coulaient enfin. Elle savait.

Et un chuchotement grave, comme empli de regrets, serait tout ce dont il se souviendrait nettement à son réveil, les évènements de la nuit se troublant entre songe éveillé et réalité.

"Il est temps pour toi d'accomplir ton destin, Marek d'Ardiénor."

    Archipel d'Ys : Le Dessein de Flarmya

Quand il reprit conscience, plusieurs heures plus tard, Marek ouvrit les yeux pour découvrir le plafond de sa chambre. Nauséeux et la migraine lui martelant la tête, la vision encore floue, il essaya de déterminer ce qui l'avait tiré du sommeil. Il se sentait vidé de ses forces. Son regard accrocha la robe de prêtre avec ses flammes brodées, soigneusement repliée sur une chaise non loin de son lit, puis, posé par dessus, le ruban de soie cérémoniel, avec ses couleurs moirées mêlant le rouge et le orange. Il était incapable de déterminer pourquoi il se trouvait dans cette pièce, la dernière chose dont il se souvenait étant sa méditation solitaire dans la chapelle. Le reste ... était trop flou, bien trop dérangeant pour qu'il veuille s'y attarder.

Une suite de coup insistants résonnèrent à la porte, et il réalisa que c'était probablement ce qui l'avait éveillé. Il se redressa avant de s'éclaircir la gorge pour inviter son visiteur à entrer, et il fut surpris de constater qu'il s'agissait d'une vieille femme, une Prêtresse, qui lui déposa un plateau avec un repas, non sans lui adresser un regard réprobateur. Le fixant droit dans les yeux, sans la moindre compassion, elle lui annonça que l'Archiprêtresse souhaitait qu'il soit prêt à partir pour Tol Orëa dans une heure, qu'il devait commencer à rassembler ses affaires immédiatement et qu'il était inutile qu'il s'encombre de bagages. Et elle le quitta sur ces mots, tournant le dos à ses yeux écarquillés, incrédules. Tol Orëa ... Aoatea avait décidé de l'envoyer à Tol Orëa ...

Serait-ce ... Définitif ? Quel rôle allait-il devoir y jouer ? Un instant déstabilisé par la soudaineté de la décision de sa tutrice, il resta pendant quelques minutes le regard dans le vide, sonné.  Tellement de questions se succédaient dans son esprit, qu'il n'arrivait pas à faire le tri. Il finit par se secouer en se disant que l'Archiprêtresse viendrait sans doute à sa rencontre pour saluer son départ, à moins qu'il ne s'agisse d'un voyage diplomatique qu'ils effectueraient ensemble. Songer à toutes les possibilités lui donnait le vertige. Quoi qu'il advienne, il lui faisait confiance.

(...)


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Dernière édition par Marek d'Ardiénor le Lun 25 Fév 2019 - 18:40, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: [Chevalier Brun] Marek d'Ardiénor & Asaleith   [Chevalier Brun] Marek d'Ardiénor & Asaleith Icon_minitimeLun 25 Fév 2019 - 17:47

(...)

Moins d'une heure plus tard, il était prêt, les quelques affaires qu'il n'avait pas souhaité abandonner soigneusement rangées dans son maigre baluchon. Il ne comprit pas l'instruction de la vieille Prêtresse vis à vis de ses bagages jusqu'à ce qu'il avise l'impressionnant dragon Bronze qui se tenait dans une petite cour isolée du Sanctuaire. Ses écailles brillaient d'un éclat cuivré sous la lumière de Solyae, et ce bien que le ciel soit nuageux. Marek ne put s'empêcher de l'admirer. Au cours des cinq ans passés à la Maison Mère, il avait eu l'occasion d'observer des envoyés des Kaerls et leurs liés à plusieurs reprises, bien que sans pouvoir interagir avec eux. Il n'en éprouvait pas moins ce petit pincement au coeur qui le saisissait toujours lorsqu'il voyait un dragon. A ses yeux, les enfants de Flarmya dégageaient une puissance et une noblesse inégalée en ce monde.

Auparavant nonchalamment appuyé contre le saurien, un Fëalocë à l'allure élégante mais néanmoins fort ostentatoire se redressa à son arrivée, un petit sourire en coin. Un pressentiment étrange vint l'étreindre quand il réalisa qu'ils étaient seuls dans la cour. Nul ne viendrait assister à son départ. Le Tol Orëanéen resta silencieux quelques secondes, l'étudiant ouvertement des pieds à la tête avant de se présenter comme Gwindor Helevorn, Chevalier Dragon du Màr Tàralöm, et de lui demander s'il était bien le Doué qu'on souhaitait lui confier. Son accent trainant trahissait une origine Yssienne, mais ce n'est pas cela qui attira l'attention du jeune homme. Aspirant. Au Màr Tàralöm. L'Ordre Draconique d'Ombre ! Avait-il échoué d'une quelconque façon aux épreuves de la nuit dernière ? Un vif sentiment d'incompréhension associée à une sourde panique refit lentement surface et il ressentit le besoin impérieux de pouvoir parler à Aoatea avant de partir. Elle lui devait des explications, par Flarmya ! Pas une seule fois en cinq ans elle n'avait évoqué la possibilité qu'il aille sur Tol Orëa, et il s'y était résigné. Alors pourquoi maintenant, si soudainement ?

Mais le Chevalier ne se laissa pas émouvoir par le trouble qui se lisait sur son visage, et lui ordonna de prendre place aussitôt sur le large dos du Bronze Kadrys. Il ne pouvait pas s'absenter trop longtemps du Kaerl, lui expliqua-t-il. Réticent à obéir, Marek lui demanda si ce serait lui qui se chargerait de sa ... "formation", mais Gwindor éclata de rire et secoua la tête sans répondre, avant de grimper d'un mouvement souple sur l'épaule du dragon. Puis il fixa un regard soudain grave et impatient sur le jeune Prêtre et lui énonça que les questions attendraient leur arrivée. Irrité par cette attitude, Marek fixa un regard peu amène sur le Fëalocë, qui le lui rendit, avec une impassibilité exaspérante.
L'écho d'un murmure chargé de significations résonna à nouveau dans son esprit. Accomplir son destin ... Il ne savait plus quoi penser. Il avait depuis longtemps la sensation que Tol Orëa l'attendait - Flarmya lui ayant accordé la possibilité de converser avec les dragons - mais il avait au coeur cette sensation d'inachevé, et il se refusait à partir ainsi, à quitter sa place au sein du temple, aux côtés d'Aoatea ... Il n'avait pourtant pas le choix. Il lui fallait respecter la volonté de l'Archiprêtresse. Refuser serait pire qu'accepter. Ses poings se serrèrent.

La menace du dragon de le faire voyager entre ses griffes s'il bougeait pas immédiatement suffit à le décider. De mauvaise grâce, il attrapa la main du Chevalier, qui l'aida à s'installer derrière lui. Aoatea ... Elle avait certainement des raisons qu'il ignorait. Il soupira, le coeur las de ces questionnements sans réponse. Laissant son regard porter une dernière fois sur les bâtiments autour de lui, dans un adieu muet, il fut ramené à des considérations beaucoup plus terre à terre par l'envol du Dragon, qui s'éleva vers le ciel à force d'ailes. La sensation était grisante, vertigineuse, absolument saisissante ... Oui, c'était effrayant, mais cela lui plaisait.

Et à peine leur altitude fut-elle stabilisée, ils disparurent brutalement dans le néant. Sa respiration en fut coupée et il porta une main à sa gorge, sous le choc. Tout autour, le noir absolu, profond, tel qu'on ne peut le connaitre sur Rhaëg. Le froid mordant, glaçant, mortel. Aucune autre sensation que celle de son coeur battant à tout rompre dans sa poitrine. Et la douleur, partout dans son corps. Le vide infini de l'Interstice. Puis, enfin, la résurrection, ses sens se remettant soudain à fonctionner, ses poumons se gonflant d'air pur, et la descente vers la Forteresse Ardente nichée au coeur de ses montagnes cendreuses. Menaçante et sublime à la fois. Un souvenir qui resterait gravé à jamais dans son esprit.

Et cette expérience des plus éprouvantes ne serait que la première d'une longue série à venir.

    Tol Orëa : L'Ombre du Volcan

Il fut décidé qu'il entrerait en apprentissage dans la triade de Salvedaen Arkalin et de son Lié, l'Empereur Noir Astaroth. Au tout début de la Grande Guerre des Ordres, Arkalin avait été introduit au Kaerl Ardent par l'ancien Seigneur, le puissant Celànduil Huriand, qui l'avait amené jusqu'à l'Empreinte. Cette relation complexe, en permanence conflictuelle, avait abouti, peu de temps avant l'arrivée de Marek sur Tol Orëa, à l'assassinat brutal du Seigneur Huriand, tandis que son Second et bras droit, Martel Dehlekna, se retrouvait déchu de ses titres et de son rang, humilié par une défaite cuisante dans la Fosse. C'est donc cherchant à redorer son blason tout autant qu'à renforcer sa position en s'entourant de "fidèles" (par loyauté ou par soumission), que le Démon, ainsi qu'Arkalin était surnommé, avait décidé de prendre son sous aile de nouveaux Aspirants. Marek d'Ardiénor avait été hélas choisi pour être de ceux là.

L'Humain à la peau sombre était des plus mystérieux, portant sur son visage même la marque d'un pacte obscur avec les forces du chaos, à moins que ce ne soit avec Kaziel en personne. Nul n'en connaissait les détails. Et dès les premières minutes de leur rencontre, le Maitre Noir et nouveau Seigneur du Kaerl décida que l'âme de son Aspirant était bien trop tendre pour le Màr Tàralöm, et se mit en tête de le modeler pour qu'il corresponde à ses désirs. Son apprentissage s'annonça ainsi long et difficile, car Arkalin était cruel et ne reculait devant rien pour parvenir à ses fins. Tant et plus, le jeune homme se retrouva poussé dans ses derniers retranchements, tandis qu'Humain et Dragon évaluaient froidement ses limites. Ils tentèrent de l'amener à tuer de sang froid, mais voyant que ni la menace ni les corrections des plus sanglantes qu'ils lui infligeaient ne parvenaient à le briser, ils s'ingénièrent à le placer dans des situations inextricables où il était contraint et forcé de se battre pour sauver sa propre vie. Alors, le dégoût de lui-même et la haine envers son Maitre allant croissant, il tua. Encore, et encore. Par nécessité, dans des combats en face à face, et toujours le plus rapidement possible, proprement et sans souffrance inutile. Des Sans-Dons, principalement, mais parfois aussi des prisonniers Célestes ou Engloutis. Il savait que c'était soit eux, soit lui, et qu'il n'avait aucun autre choix. Cela ne l'empêchait pas de se sentir nauséeux, souillé par les actes qu'il avait été contraint d'accomplir. Contrairement aux attentes de son Maitre, il n'y prit jamais aucun plaisir.

Bien des fois, les premiers mois, il s'interrogea sur ce qui avait pu pousser Aoatea à l'envoyer dans cet enfer, dont elle avait forcément eu conscience. Il songeait péniblement à sa vie d'avant, allant même jusqu'à envisager de s'échapper, et puis ... Et puis quoi ? Il reviendrait à la Maison Mère, tête basse, humilié, tel un paria, avouant son échec ? Comment pourrait-il se regarder en face ? Il était de toute façon tout à fait incapable de quitter Tol Orëa, à moins de soudoyer un dragon, ou d'arriver à s'enfuir du Kaerl pour ensuite prendre un bateau - son Maitre ne lui laissant aucun répit, il ne lui autorisait pas de sortir du Màr Tàralöm sans lui. Il était officieusement prisonnier du Kaerl. Et rien que d'imaginer l'évidente satisfaction qu'Arkalin manifesterait ... Il ne lui offrirait pas ce plaisir, il s'y refusait catégoriquement. Il savait que son Maitre tentait par tous les moyens de le soumettre à sa volonté.
Dans ces moments de faiblesse et d'inattention, l'ombre déroulait ses anneaux, paresseuse, rampante dans les profondeurs de sa conscience, attendant son heure, tout en sifflant doucereusement que Aoatea l'avait trahie, mais que ce n'était qu'une personne de plus dont il pourrait aisément se venger lorsqu'il aurait gagné du pouvoir ... Alors, serrant ses ongles dans ses paumes à s'en blesser, le regard dur, il renfermait impitoyablement ces pensées horribles dans son coeur. Quelle que soit l'épreuve qu'elle ait souhaité lui imposer, il avait bien l'intention d'en sortir vainqueur, en restant fidèle à ses principes.

En parallèle de son Aspiranat, il s'intégra au Sanctuaire de Flarmya du Màr Tàralöm. Le Grand Prêtre ici, était également un Sang, membre du Concile qui dirigeait le Kaerl. Ameqran Al'Jahan était un Fëalocë, originaire d'une noble famille de T’shallah, une Oasis du Désert Profond de Ssyl'Shar, et était au Kaerl depuis près de 30 ans. A la suite d'une vilaine blessure mal cicatrisée obtenue lors d'une bataille contre le Màr Menel, il avait développé un goût immodéré pour l'opium qui apaisait ses douleurs chroniques. L'homme aimait également s'entourer de richesses et de belles femmes, ayant une horde d'esclaves à son service veillant à son confort. Avec son Lié, le Blanc Dhîran, il dirigeait le Sanctuaire, mais semblait profiter bien plus des avantages que leur conférait son rang, qu'avoir à coeur de représenter les intérêts de Flarmya auprès des autres Sangs.
L'un et l'autre ne lui accordèrent jamais plus d'attention qu'il n'en aurait eu envers un serviteur, sauf pour l'accabler de reproches méprisants. "J'attendais beaucoup mieux de la part du protégé de l'Archiprêtresse, Nezvan", était ce qui revenait le plus souvent dans sa bouche. Le Blanc, ayant lu dans son esprit, avait rapidement mis la griffe sur son ancien surnom, auquel il arrivait à donner une tonalité des plus insultantes. "Ils n'avaient pas de temps à perdre avec un moins que rien", après tout.

Marek, désapprouvant l'attitude languide et négligente du Fëalocë, assimila seul le fonctionnement du Sanctuaire, découvrant qu'en laissant trainer l'oreille il pouvait en apprendre beaucoup sur les intrigues qui secouaient le Kaerl. Le temple devint son domaine favori, et ses alcôves un refuge lorsqu'il ne se sentait pas capable de retourner affronter le dortoir des Aspirants. Car les nuits s'étaient rapidement révélées difficiles, en plus de la tension inhérente au fait de risquer sa vie à chaque instant, des cauchemars étranges l'assaillaient maintenant régulièrement. N'osant l'évoquer avec personne de peur d'être ridiculisé, il ne comprit pas immédiatement que les images lui apparaissant durant son sommeil possédaient une signification réelle. Et il mit encore plus de temps à comprendre qu'elles étaient liées à des visions du futur, et parfois au passé.

Parce qu'on était en guerre, il fut également entrainé au combat de manière intensive, Arkalin se chargeant de lui apprendre à manier les lames, tandis que la Maitre d'Arme du Kaerl, Ioana Cyallaïd-Cèlt’har, lui apprit les arts du combat au corps à corps qu'affectionnaient les Ondins. Pour ce dernier, il se découvrit une certaine habilité et une grande affinité, qui fit qu'encore aujourd'hui, il lui arrive de pratiquer cette danse à la Fosse, seul, pour faire le vide dans son esprit. Son corps se renforça, se fit plus résistant, et il développa une musculature sèche et fine, qui vint épaissir son ossature frêle.

Près d'un an après le début de son Aspiranat, une Eclosion imminente fut enfin annoncée. A cause des combats incessants, les pontes s'était faites plus rares, ces dix dernières années, alors le Kaerl était en liesse. Marek sentit son coeur se gonfler d'impatience à mesure que le jour dit se rapprochait. Hélas, il déchanta rapidement quand son Maitre s'en aperçut et lui annonça que bien sûr, il y assisterait à une "place d'honneur" ... Depuis les gradins. Arkalin jugeait son Aspirant entre trop faible et trop immature pour prétendre se Lier. Le jeune homme n'en assista pas moins à la cérémonie, un espoir secret - mais extrêmement vain - chevillé au coeur. Il était toujours possible qu'un nouveau-né se tourne vers lui après tout ... Mais l'Empreinte se termina, et tous les dragonneaux avaient trouvé leur Lié. Il était toujours seul. Son Maitre avait-il donc raison à son sujet, que Flarmya ne l'ait pas jugé digne de rencontrer son âme-soeur en ce jour ? Cette humiliation fut l'une des plus cinglantes qu'il dut subir durant son apprentissage et il devait en garder une profonde amertume pour les mois à venir.

Peu de temps après, un nouvel Aspirant rejoignit leur triade, un Elfe arrogant et séducteur du nom de Quilaïn de Lazarel. Hélas pour Arkalin, ce deuxième apprenti se révéla tout autant doté d'un caractère têtu et obstiné que le premier, refusant d'obéir aussitôt qu'on lui en laissait l'occasion. C'est lors d'une violente dispute entre Quilaïn et leur Maitre que l'Elfe écopa d'une correction magistrale, et récolta cette profonde griffure barrant son oeil droit, infligée par le Noir Astaroth. En vérité, ce n'était que la lésion plus préoccupante, car elle mettait en jeu le globe oculaire, le Démon lui ayant infligé bien d'autres blessures graves. Et il l'abandonna là, inconscient, aux pieds de Marek, sur cette injonction effroyable : il devait le soigner en utilisant sa toxine, ou l'Elfe mourrait ... Et le jeune Prêtre serait alors responsable du probable décès d'un dragon dans son oeuf. Il ne souhaitait pas cela, assurément ? Pris de vertige, il avait regardé le Maitre Noir s'éloigner d'un pas vif, se demandant comment il allait bien pouvoir s'y prendre. Il n'avait jamais appris à utiliser sa magie pour soigner, et risquait plus d'empoisonner son patient plutôt que de le sauver. Il était certain qu'Arkalin en avait bien conscience.
Fermant les yeux pour garder la tête froide, il décida de mettre à profit ses connaissances sur les plantes pour mener à bien sa mission. Usant de ruses qu'il n'avait plus mises en pratique depuis son enfance en Undòmë, il vola secrètement le matériel dont il avait besoin au Maitre Guérisseur, Esthen Frâlan, et pansa soigneusement chacune des plaies. Ce n'est que lorsqu'il devint clair que s'il ne faisait rien, en dépit de ses soins attentifs, il était probable que Quilaïn perde son oeil, que Marek se décida à tenter le tout pour le tout et à utiliser sa toxine. Il en résulta la cicatrice que l'Elfe arbore encore aujourd'hui, et la convalescence fut longue, mais au moins fut-il définitivement hors de danger.

Les mois se succédèrent, et la triade continua son apprentissage. Leurs caractères et habitudes étant peu compatibles, le jeune homme ne tarda pas à trouver son co-aspirant particulièrement exaspérant, pour ne pas dire consternant. Pour autant, il devint pour lui ce qui se rapprocha le plus, non pas d'un ami, loin de là, mais d'un allié. Chacun avait connaissance des secrets de l'autre, et avait conscience surtout du pouvoir que cela pouvait représenter entre de mauvaises mains. Alors, plutôt que de chercher individuellement à attirer les faveurs de leur Maitre ô combien méprisé, ils unirent leurs forces pour leur survie mutuelle.

    Tol Orëa : Le Carcan de la Liberté

Avec lenteur, une nouvelle année s'écoula bientôt, et une nouvelle Eclosion se profila, tandis que des rumeurs concernant un possible arrêt des combats sur Tol Orëa commençaient à courir dans les alcôves du Sanctuaire. La Reine Incarnate Takhasya avait convolé avec l'imprévisible Bronze Kadrys, et ses oeufs mûrissaient à présent sur les sables noirs des Cavernes Flamboyantes, veillés par leur puissante Mère. Marek et Quilaïn ne surent jamais ce qui poussa réellement Salvedaen Arkalin à les autoriser à se présenter comme Candidats à l'Empreinte. Peut-être n'était-ce qu'un calcul de plus de sa part, car, si la Guerre Interkaerl se terminait, les Ardents se recentreraient aussitôt sur les activités politiques du Màr Tàralöm ... Et les vieilles rancoeurs referaient surface. A moins qu'il ait estimé qu'il perdait son temps avec eux, et qu'il valait mieux, pour sa sécurité, les éloigner de lui. En effet, ses prochains Aspirants devraient se révéler beaucoup plus satisfaisants, en tout point de vue.

En soi, cette Empreinte n'eut rien d'exceptionnel ou d'extraordinaire, si ce n'est qu'elle permit à Marek de lier son âme à Asaleith. Le Brun fut le premier dragonneau d'entre ses frères et soeurs à briser sa coquille, avant de se diriger droit sur le jeune homme, avec une impatience et une assurance qui devrait encore le caractériser aujourd'hui. Aucun temps d'hésitation, aucun retard. Il savait précisément que c'était lui. Il l'avait attendu si longtemps après tout, qu'il avait fini par croire qu'il ne viendrait plus. Heureusement, le jour de leur réunion était enfin arrivé, et il ne comptait pas le quitter de si tôt. Cet Ondin lui appartenait, tout entier, et il serait désormais à ses côtés pour traverser les épreuves que la Mère des Dragons et le Destin mettraient sur son chemin. Le Brun était bien bâti, dans la moyenne haute de ceux de sa couleur, et lorsqu'il avait bondit sur celui qu'il réclamait comme Lié, le jeune homme s'était écroulé dans le sable, abasourdi. En vérité, encore blessé dans sa fierté et sa confiance par la précédente Empreinte à laquelle il avait assisté, il s'était à moitié convaincu qu'il ne rencontrerait jamais son âme-soeur ... Ou du moins peut-être pas au Màr Tàralöm.

Son Empreinte avec Asaleith balaya un instant ses doutes, et il se sentit, ce jour là, bien plus assuré qu'il ne l'avait été depuis son arrivée au Kaerl. A tout juste 20 ans, il venait de rencontrer son âme-soeur et se sentait enfin complet. Se redressant, le dragonneau dans ses bras, il avait fixé un regard de défi sur son ancien Maitre, puis, faisant face aux gradins, avait clamé le nom de son Lié d'une voix claire et forte. Quelques secondes après retentissait la voix de Quilaïn, annonçant son Empreinte avec un Bronze prénommé Zadayel. Prunelles d'océan et d'améthyste se croisèrent un instant, et ils surent que l'un et l'autre garderaient le silence sur leurs faiblesses respectives, même si leurs chemins allaient désormais se séparer définitivement. Ce qui n'empêcherait pas Quilaïn, durant les années futures, de continuer régulièrement à asticoter le bien trop sérieux Prêtre de Flarmya, au grand désespoir de celui-ci.

La cérémonie achevée, les spectateurs comme les nouveaux Chevaliers commençaient à se rendre vers le Mahalma pour participer au banquet, et l'adrénaline étant redescendue à des niveaux moins excessifs, Marek ressentit une forte lassitude. Il n'avait pas envie de se mêler à la foule hypocrite. Il était libre à présent, il avait vaincu l'épreuve à laquelle l'avait soumis Aoatea ... Mais il ne pouvait s'empêcher de songer avec ironie à la dernière fois qu'il avait fait cette constatation, même si près de deux ans s'étaient écoulés depuis. Rien ne s'était déroulé comme il l'avait imaginé. Qu'allait-il faire à présent ? Où aller ? Il avait tellement de fois rêvé d'abandonner le Kaerl ... En avait-il encore envie ? Aurait-il le courage de se confronter en face à face avec l'Archiprêtresse, d'entendre ce qu'elle aurait à lui dire, de connaitre la vérité sur sa décision ? Sa bouche se tordit de mépris envers lui-même. Non, sans doute pas.

Et son regard glissant tout autour de lui sur la beauté vénéneuse du Màr Tàralöm qui l'entourait de toute part, il serra un peu plus Asaleith dans ses bras, l'expression farouche. Son Lié était jeune et resterait extrêmement vulnérable durant plusieurs mois. Le Kaerl Ardent étant ce qu'il était, il doutait que les machinations politiques ne respectent ce fait, bien au contraire. De par son Aspiranat auprès de Salvedaen Arkalin, il se pouvait que certains cherchent à se débarrasser de lui, d'une manière ou d'une autre, dans une tentative d'affaiblir le Seigneur du Kaerl. Une telle idée le répugnait. Il n'aimait pas l'idée d'être associé à Arkalin. Mais ... même s'il n'avait aucune affinité envers le Démon et qu'il le haïssait profondément, pouvait-il laisser le Màr Tàralöm sombrer une nouvelle fois dans le chaos à cause de ces luttes de pouvoir ? Pouvait-on être certain que celui qui prendrait sa place règnerait de façon plus juste pour le Kaerl ? Et depuis quand se faisait-il du soucis pour ce qui pouvait advenir à la Forteresse Ardente ?

Mal à l'aise face à ces questionnements et incertain quant à son avenir, il décida alors de consacrer les mois qui suivraient à la protection et au soin d'Asaleith jusqu'à ce qu'il soit assez grand pour pouvoir se défendre contre toute attaque. C'était certainement la décision la plus sage à prendre dans un premier temps. Durant cette période, les deux âmes-soeurs ne quittèrent guère le Sanctuaire de Flarmya, où il les savait en sécurité, et les gens s'habituèrent vite à voir l'Ondin et le Brun cheminer de conserve dans ses allées. Et parfois, il lui semblait détecter une présence qui l'observait, l'oeil inquisiteur du Gardien du Kaerl, Seregon, qui l'évaluait, froidement.

Peu de temps après, comme l'avaient annoncé les rumeurs, une grande trêve fut conclue entre les trois Seigneurs, bien qu'Arkalin n'accepta de la signer qu'à contre-coeur, son accord arraché par un Concile unanime. La Grande Guerre des Ordres était enfin terminée, après dix ans de combats incessants et des centaines de vies fauchées, humanoïdes et draconiques. Les Kaerls étaient exsangues, leur élite fauchée sur les champs de bataille, et ce répit était devenu plus que nécessaire : vital. Et comme l'avait pressenti Marek, le Seigneur du Kaerl s'entoura bientôt de deux nouveaux Aspirants fort prometteurs. Une femme, Anksousamone, qu'on soupçonna bientôt d'être devenue l'amante d'Arkalin, et un homme, Alzaroth Draconigena, aux idéaux bien proches de ceux de son Maitre, qui accèderait plus tard au titre hautement privilégié de Second du Màr Tàralöm.

Il assista à tout cela de loin, sans s'y impliquer plus que nécessaire, depuis une position volontairement en retrait, tandis que Asaleith gagnait tranquillement en taille et en prestance. Il préféra se consacrer à redonner son influence et son prestige au Sanctuaire délaissé par son administrateur en titre, et bientôt les Non-Doués et les Prêtres officiant au temple commencèrent à se tourner de plus en plus vers lui pour les décisions à prendre. Ce qui ne manqua pas de provoquer la jalousie d'Ameqran Al'Jahan, qui voyait d'un mauvais oeil ce jeune Chevalier gagner jour après jour une importance grandissante. Alors, lui et le Blanc Dhîran entreprirent de saboter les projets de leur subalterne, s'en attribuant le mérite quand ils le pouvaient, le rabaissant et l'humiliant en public aussitôt qu'ils en avaient l'occasion, ne manquant aucun prétexte pour rappeler qui était réellement le maitre au Sanctuaire, ainsi que la supériorité écrasante de leur rang. Préférant garder profil bas pour protéger Asaleith, Marek choisissait le plus souvent ne pas réagir aux provocations, ne laissant percevoir aucun indice de la colère qui le saisissait dans ces moments là. Ce qui n'empêchait pas les murmures et les rumeurs d'aller bon train, concernant la relation conflictuelle entre ces deux là, spéculant sur le moment où le point de rupture serait atteint.

Aussi, lorsque le Grand Prêtre Al'Jahan fut retrouvé mort, sans aucune trace de blessure visible, Marek fut inévitablement considéré comme un suspect parfait, bien que Maitre Frâlan ait examiné le corps et conclut que l'homme avait périt d'une crise cardiaque. Son coeur avait tout simplement cessé de battre. Sa consommation de drogues n'était un secret pour personne, après tout. Rien n'indiquait qu'il ait été empoisonné. Et pourtant ... Le regard des gens envers le jeune Chevalier changea. Ils avaient cet air entendu lorsqu'ils le fixaient. Certains avec plus de crainte ou de respect, d'autres encore avec suspicion. Et tout ceci ne fut que renforcé par la folie furieuse du Blanc Dhîran, qui cracha à qui voulait l'entendre que l'Ondin était l'assassin d'Ameqran. Ceci aboutit au tout premier combat d'Asaleith : s'il n'avait pu s'interposer à temps entre son Lié et l'autre Dragon, Marek aurait certainement été tranché en deux d'un coup de mâchoire. Refusant de se soumettre, impossible à raisonner, le petit Blanc se battit avec l'énergie du désespoir, emplissant le Sanctuaire de ses rugissements, jusqu'à ce que le Brun ne soit contraint de mettre un terme à ses souffrances.
Ces évènements sanglants, si peu de temps après la disparition étrange de Salvedaen Arkalin, furent difficiles pour le jeune Chevalier, bien qu'il en ait éprouvé d'abord un sentiment mitigé et honteux, proche du soulagement. Asaleith approchait de sa taille adulte, et il ne tarderait pas à achever sa première année au Màr Tàralöm. Le temps viendrait bientôt où il devrait prendre une décision sur leur avenir ...

Mais il semblait qu'encore une fois, Flarmya avait d'autres desseins pour lui.

Lorsqu'il fut convoqué pour une audience au Concile, Marek s'était préparé à devoir se défendre contre les accusations de meurtre qui pesaient sur lui. Il savait pertinemment ce qu'il en coûtait de causer la mort d'un Doué, plus encore d'un Maitre et de son Dragon. Une mise sous tutelle, voire l'exil, au mieux. La peine capitale, dans le pire des cas. Passant le pas de la porte de la salle, Asaleith sur ses talons, il avait croisé le Maitre Guérisseur arborant un regard confiant, ce qui n'avait pas manqué d'arracher une grimace de surprise au jeune Prêtre. Frâlan avait certainement été appelé comme témoin dans cette affaire, cela paraissait logique. Il espérait que cela jouerait en sa faveur.

Alors, la tête haute, le visage de marbre et l'expression en apparence assurée, ne laissant rien paraitre de ses tourments, il fit face aux Sangs et soutint leur regard, le pendentif d'argent au dragon stylisé brillant sur sa poitrine. Asaleith était quant à lui fièrement dressé dans son dos, les iris rougeoyantes, prêt à défendre son Lié. Un long silence plana, dix paires d'yeux inquisiteurs le scrutant avec une intensité variable, avant qu'Alzaroth Draconigena, Second du Kaerl et Maitre Noir, ne prenne la parole, rappelant brièvement les faits et son implication supposée ... Et concluant qu'après examen, les Sangs estimaient en majorité qu'il était innocent des charges qui pesaient contre lui.
Son soulagement fut de courte durée, car le Second enchaina aussitôt sur le fait que le siège du Représentant de Flarmya était à présent vacant, et qu'il souhaitait lui offrir, en tant que seul membre du clergé à être également porteur du Don. A ce moment, pris de vertige, un sombre pressentiment éclata en lui. L'un d'entre eux était certainement responsable du meurtre de Al'Jahan. L'un d'entre eux avait manigancé pour l'amener très précisément dans la situation dans laquelle il se trouvait. Dans quelle intention ? Etait-ce Draconigena ? Il laissa son regard glisser sur les Sangs, notant tour à tour l'expression ouvertement méprisante de Martel Delehkna et le sourire rusé et calculateur de Gwindor Helevorn, habilement camouflé par ses doigts joints devant son visage. Lequel d'entre eux ? Les autres ne semblaient dégager que divers degrés d'intérêt, voire de désintérêt marqué.

Le jeune Chevalier se fendit donc d'une profonde et respectueuse révérence, ainsi qu'on l'attendait de lui face à un tel honneur - ce qui avait également l'avantage de lui donner quelques secondes de plus pour prendre sa décision. Il ouvrit la bouche pour refuser prudemment mais une pensée d'Asaleith, qui était resté silencieux jusque là, l'arrêta net. "Accepte", lui disait-il. "Tu n'es pas en mesure de refuser". Ses iris d'océan voilés par l'orage vinrent accrocher le reflet de la lourde chevalière reposant sur la table devant Draconigena ... Et soudainement, son don erratique se réveilla, le temps d'un battement de coeur, envoyant une multitude d'images frapper aux portes de son esprit, lui offrant une vision surréaliste de l'ensemble des avenirs possibles, et le laissant le souffle coupé. Il pouvait le faire. Il devait le faire. Asaleith avait raison, il ne pouvait pas reculer. Sur une profonde inspiration, il se redressa, tandis que le Brun émettait un grondement de défi, les crocs dénudés. Il savait ce qu'il pouvait apporter à cet Ordre à la dérive, ce pour quoi il avait été formé dès sa toute première rencontre avec Maksim, en Undòmë, ce vers quoi Aoatea l'avait consciemment envoyé.

"J'accepte humblement la charge qui m'est offerte, et m'engage à représenter les intérêts de la Déesse Mère en tant que Sang et membre de ce Concile".
Sa voix n'avait pas tremblé lors de l'énoncé de ce serment qui l'enchainait à présent au Màr Tàralöm. Ignorant les autres Sangs, il inclina la tête en direction du Second du Kaerl, et glissa la chevalière d'or rouge à son annulaire, avant de rejoindre le siège qui l'attendait. Il venait de passer librement la tête dans un un carcan qui pèserait bientôt très lourd sur ses épaules.


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[Chevalier Brun] Marek d'Ardiénor & Asaleith Asaleith-Named-Tol-Orea

Code:
https://i.postimg.cc/rmyFdCyT/Asaleith-Avatar-Tol-Orea.png

Nom : Asaleith

Couleur : Brun

Ascendance : La Reine Incarnate Tahkasya et le Bronze Kadrys. C'est le frère de couvée du Bronze Zadayel, lié à Quilaïn de Lazarel.

Age : 8 ans (naissance en 910).

Description physique : Son cou est long et musculeux, et sa tête ornée de deux impressionnantes cornes recourbées, que complète une petite collerette d'épine de chaque côté de la tête. Dôté d'une musculature bien dessinée, c'est un dragon qui brille par une énergie qui approche celle de certains Bronzes, étant dans la moyenne haute des autres dragons de sa couleur. Ses écailles brunes semblent hésiter entre la couleur du bois, pour les plus sombres, et celle, plus douce, du chocolat, pour les plus claire. Endurant et impatient, c'est un Dragon qui a besoin d'agir et de se bouger, vidant son trop plein de tension par des entrainements réguliers avec son Lié, que ce soit en vol ou à terre. Tous deux forment donc un duo bien accordé. Tout en lui est taillé pour la puissance et la vitesse plutôt que pour l'agilité et la souplesse. Pour autant, ce n'est pas une force brute, car Asaleith n'est pas dénué d'une certaine forme d'harmonie dans l'ensemble de sa silhouette.

Description caractérielle : Souvent suffisant dans son attitude envers les autres et assez imbu de lui même, Asaleith est également un rien méprisant envers ceux qui se laissent dominer par leurs faiblesses. A contrario, il se montre cependant attentif, et d'une douceur trompeuse quant il s'agit de son Lié, envers lequel il est extrêmement protecteur, voire possessif. Pour lui, il serait capable de tout, même du pire, car son âme lui est étroitement mêlée. C'est un dragon de caractère franc et direct, qui aime avant tout l'action. C'est pourquoi il hésite rarement à venir secouer Marek d'une petite pensée bien sentie quand il sent qu'il se perd dans ses réflexions, s'attirant alors dans la seconde une riposte sévère de la part de son Lié. Imposant dans son attitude, Asaleith apprécie beaucoup de ne laisser à ses pairs aucun doute sur sa force et ses capacités, et face aux jeunes Aspirants inexpérimentés, il s'amuse de voir naitre une certaine peur - totalement infondée, en vérité, car ce n'est pas un dragon fondamentalement violent - dans leurs yeux. Tout comme Marek, il n'ira jamais tuer de sang froid, mais montrera en revanche bien moins de répulsion à le faire, et de regrets à l'avoir fait. Et tout comme lui, il joue énormément sur "l'être et le paraitre". Il ne manque alors pas de se délecter avec humour des rumeurs - le plus souvent fausses - qui en découlent, malgré les craintes de son Lié.

Forme humanoïde choisie :
[Chevalier Brun] Marek d'Ardiénor & Asaleith Asaleith-Marek-d-Ardienor-Tol-Orea

Dans son allure générale, la ressemblance est troublante avec sa forme draconique. C'est un jeune homme d'une vingtaine d'année, au nez aquilin, aux yeux bleus en amande, et à la chevelure désordonnée, d'une teinte brun chocolat rappelant la couleur de ses écailles. Son expression est volontaire, un sourire en coin en permanence accroché aux lèvres, et frappante de par le défi qui en transparait. De haute stature, et possédant une musculature plutôt bien développé, il donne l'image d'un guerrier accompli. Au contraire de son Lié, c'est un charmeur taquin qui adore se servir de son minois de jeune premier pour faire pâmer d'admiration jeunes femmes comme dragonnes ... Simplement pour le plaisir de sentir contemplé et idolâtré.

Regard de Flarmya : A définir !


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