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 [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle

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Rūna Sălv
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Rūna Sălv


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MessageSujet: [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle   [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle Icon_minitimeDim 7 Juin 2020 - 17:38

Clint Mansell "The Fountain" - Stay With Me

[RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle 181118112528238217 . [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle Seqenenre
Sraoshaï Ter Altansarnannûn & la Cendrée Seqenënre  

* Aran'Rhiodku 919

Il était encore tôt, mais déjà une chaude brise soufflait entre les couloirs et les alcôves de pierre finement ouvragée malgré leur apparente usure.
Comme à son habitude, la Terre de Liberté était d'un calme digne et apaisant malgré la différence des vies y subsistant. D'une part, la peuplade de non Doués habitait la partie la plus vaste de la cité, mais une dépendance de celle-ci leur était fermée, étant redevenue en partie l'ombre du Màr qu'elle fut.
S'il s'agissait avant tout d'une simple aire de passage sur les itinéraires des errants ou d'une escale pour trouver des vivres destinés aux bipèdes comme aux dragons qui traversaient le Grand Désert, le Màr Litsë s'élevait là comme un phare au milieu de la tempête. Il n'avait pas pour vocation de diriger qui ou quoi que ce soit, il n'était que terre d'asile pour ceux en quête de réponses, ou havre de paix dénué des intrigues de Tol Orëa.
Il y siégeait pourtant un conseil de têtes sages pour maintenir cet équilibre parfait mais fragile par le secret de l'existence des Dragons voilé aux Non-Doués tout près. Et parmi eux se trouvait Sraoshaï.

Nul ne savait réellement dire d'où elle venait ou qui elle était. Les registres du Màr Litsë renfermaient seulement la date de son Empreinte à l'Impératrice Noire Cendrée Seqenënre, plus de quarante ans auparavant. Sraoshaï avait foulé de ses pieds Tol Orëa, membre à part entière de deux Màr différents coup après coup, incapable de trouver sa place, incapable de se lier.
L'Elfe-Neishaane avait alors découvert cette contrée qui lui correspondait si bien, liant la moitié de son âme à la vie abritée par l'oeuf abandonné d'une Incarnate. La dragonne qui en sortit avait l'air elle aussi indécise par la simple nuance de ses écailles anthracites, mais son caractère plus sévère et juste s'avérait bien être celui d'une Noire.
Depuis, ni l'une ni l'autre n'avait évoqué le désir de partir, et elle prirent part à la fondation de l'actuelle société qui y résidait, sans pour autant déroger à leurs idéaux et clamer une quelconque légitimité de règne. Nombreux l'appelait la Gardienne dans le sens de celle qui veillait, celle qui gardait les clefs de la moindre serrure de fer et d'éther. Car les mots de Sraoshaï avaient le pouvoir de déverrouiller les esprits les plus cloisonnés, libérant de leur prison d'ombres et de questions les âmes trop appesanties par le poids du Doute ou de l'Echec. Elle avait, jusqu'à présent, aiguillé un certain nombre de personnes au cours de son assez longue vie, et il était certain que ce qu'elle voyait comme sa tâche en ce bas monde n'était pas prête de s'achever.

Du haut de la tourelle où elle avait élu domicile, elle observa longuement les enfants qui jouaient en contre-bas, souriante et apaisée. Comme chaque matin, une fois ceci fait, elle descendit rejoindre l'office où arrivait l'éventuel courrier du jour. Sraoshaï croisa et salua quelques de ses pairs, échangeant un ou deux mots d'une rituelle mais nécessaire banalité.
En l'absence de missives pour cette fois, elle gagna la bibliothèque qui était à ses yeux le meilleur des refuges, et surtout un puits de fraicheur dans cet océan de chaleur.
Le bout de ses doigts mûrs parcourut avec assurance une étagère connue avant de sortir un ouvrage au cuir teint mais usé. Elle trouva place sur un sofa au fond de la pièce et commença à s'installer en quête d'une position confortable. Mais, car il y avait toujours un mais, son instinct mêlé à l'approche intéressée de sa Liée ne laissait pas planer de doute sur la suite d'évènements bien trop connus. Avant même qu'une pensée fusse prononcée, elle se releva sans soupirer, et rangea le manuscrit à la place d'où il fut dérobé un instant plus tôt.

Toute de blanc d'étain vêtue, elle s'en alla rejoindre la passerelle qui séparait le monde des Non-Doués à celui des possesseurs du Don et dont le couloir aboutissait sur la Grande Salle des Fondateurs au trône où régnait une statue de pierre.
La demi-sang semblait connaître cette manoeuvre par coeur, se figeant à la même place que d'habitude, les mains jointes devant le ventre, les pieds ancrés au centre exact de la jointure entre le couloir et l'immense salle à laquelle elle faisait dos.
Sans même chercher cet effet, elle apparaissait ainsi pour la première fois au regard de ceux qui cherchaient refuge au Màr Litsë : comme un phare dans la tempête, à l'image de la cité.

Sous ses yeux peints de grège s'avança un trio avec à sa tête sa Liée sous forme humanoïde. Derrière elle se devinait la forme d'un homme au teint pâle et aux cheveux sombres.
Seqenënre l'avait rejoint à l'entrée de la cité pour lui permettre de découvrir le reste du Màr Litsë, appelée par le Don de l'ondin mêlé à l'odeur à la fois Ardente mais pas tout à fait qui suait par tous les pores de sa peau.
Les tatouages du visage de Sraoshaï s'animèrent doucement alors qu'elle lui offrait un sourire mesuré, et sa voix résonna contre la pierre avec une assurance liée par son expérience et l'âge trahi par ses traits aussi marqués que la roche autour d'elle.

- Sois le bienvenu au Màr Litsë, jeune égaré.

Elle inclina sa tête couronnée de cendre et ouvrit les bras, envoyant là une invitation pour l'assurer de son accueil. Malgré la chaleur qui pulsait de son coeur, Sraoshaï s'efforçait de ne pas se montrer trop bienveillante de prime abord, mais la part de neishaane en elle ne pouvait s'empêcher d'être douce.
Seqenënre tendit alors une coupe d'eau fraîche à l'ondin, presque certaine qu'il en avait le plus grand besoin.

- Je suis Sraoshaï Ter Altansarnannûn, l'une des représentantes du Conseil des Fondateurs. Dis moi quel vent t'a amené jusque la Terre de Liberté, et je te conduirai vers celui ou celle qui pourra répondre à tes questions.


.:: Qu'ils nous haïssent pourvu qu'ils nous craignent ::.
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Marek d'Ardiénor
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MessageSujet: Re: [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle   [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle Icon_minitimeMer 17 Juin 2020 - 18:34


Lorsqu’il avait quitté la taverne, ce soir là, nauséeux, lourdement appuyé sur Asaleith, c’est en tenant à peine sur ses jambes qu’il était retourné à leur weyr. Et froissée dans une petite poche intérieure de sa tunique, là, tout contre son cœur, se tenait la note d’un espoir possible. Sraoshaï. Màr Litsë. Ssyl’Shar. L’esprit trop embrouillé pour réfléchir plus avant à la signification sibylline des mots inscrits par la Dame Incarnate, et la tête martelée par une intolérable migraine, Marek s’était écroulé sur son lit, tout habillé, pour s’endormir presque aussitôt. Au matin, l’étau compressant ses tempes s’était à peine atténué, au point que la simple lumière du jour constitue un véritable supplice pour ses yeux. Son estomac se tordant en vagues houleuses, il avait rassemblé juste assez de courage pour se forcer à aller prendre un bain, sous le regard soucieux de son Lié. Sans doute le Brun craignait-il qu’il perde connaissance soudainement et finisse noyé dans son propre bassin ... Asaleith n’avait pas bougé pour autant, se contentant de veiller sur lui depuis sa couche de sable, muet et réprobateur, ses prunelles teintées d’un jaune grisâtre. Tremblant d’effort, se sentant aussi faible qu’un nouveau né, l’Ondin avait rejoint son lit, se roulant en boule sous ses draps moites, paupières étroitement pressées comme si cela pouvait faire disparaître son malaise.

Il avait ensuite rapidement sombré dans un sommeil agité, peuplé de rêves étranges, dérangeants, dont il n’émergeait que pour se rendormir peu après, poursuivi par l’éclat luisant et menaçant des iris de son Brun, invariablement posés sur lui. Sa lourde tête cornue calée contre ses pattes avant, Asaleith n’avait ainsi pas quitté son poste de la journée, pas même pour se nourrir, se refusant à quitter une nouvelle fois Marek du regard. Son pauvre esprit de bipède tourmenté était de toute façon ouvert aux quatre vents, et le dragon ne pouvait que souffrir en silence des ondes de mal-être qui irradiaient de lui. Qui veillerait sur lui, s’il s’absentait ? Personne, absolument personne. Dans cette jungle où la loi du plus fort prévalait, l’Ondin ne pouvait décemment faire confiance à personne d’autre que lui. Et ce quand bien même la Fëalocë Incarnate avait eu pitié de lui, au point de lui offrir ses conseils. Tout ça pour une femelle, fut-elle l’Archiprêtresse et l’Avatar de Flarmya. Quel idiot ! Ne savait-il donc que se faire du mal à lui-même ? Il ne le comprenait pas ...

Ce n’est qu’à la nuit venue, Ioalya s’élevant lentement dans le ciel enténébré, que son Lié n’avait semblé reprendre connaissance de l’état quasi comateux dans lequel il était plongé. Le visage encore pâle et l’expression emprunte d’une irritante fragilité, la première chose qu’il avait faite avait été de venir s’agenouiller à ses côtés pour le serrer entre ses bras, frissonnant et éperdu. Il y avait toujours ce désaccord irrésolu planant comme un fantôme entre eux, mais au moins étaient-ils à présent capables de mettre de côté leur fierté personnelle pour y réfléchir un peu plus rationnellement … Même si le compromis semblait bien difficile à trouver.

Sraoshaï. Màr Litsë. Ssyl’Shar.

Avant toute chose : que signifiait cette inscription ? Que signifiait cette suggestion voilée, de se diriger vers ‘‘une aide plus clémente’’ ? Depuis le banquet mouvementé qui avait suivi l’éclosion de la couvée de l’Incarnate Takhasya, en Flarmyaku de l’année précédente, celle là même d’où était issue la jeune Reine Sărzeghnet, le souvenir du Màr Litsë s’était réveillé dans la mémoire des Ardents. Ancienne cité Valherue cachée en plein cœur des sables brûlants du Ssyl’Shar, elle avait été le refuge de la Dorée Rintrah et sa liée en fuite, Heryn Amlug. De la dragonne Céleste étaient secrètement nés quatre dragonneaux, dont deux aujourd’hui portés disparus, avaient alors rejoint le Màr Tàralöm …
Le Brun, étudiant son Ondin absorber prudemment une gorgée d’infusion brûlante, ne parvenait à cacher son scepticisme. Quelle aide pourraient-ils trouver dans la cité des sables, sur cette Terre de Liberté qui accueillait, selon la rumeur, les exilés et les marginaux, ceux qui ne parvenaient à trouver leur place ailleurs ?  L’Histoire l’avait prouvé, cette organisation pourrait constituer un refuge adéquat s’ils décidaient de quitter le Kaerl, les protégeant de leurs éventuels – et certainement inévitables – poursuivants. Le Màr Tàralöm n’était pas tendre envers ceux qu’il considérait comme traîtres, et il ne comptait pas laisser qui que ce soit faire souffrir son Lié. Avait-on déjà vu un Sang quitter l’Ordre ?

Mais Asaleith en était convaincu, cette solution de repli ne serait que temporaire. Le cœur de Marek était bien trop loyal pour vivre en tant qu’errant, déchu de ses titres et de son rang, sans personne à servir, sans but véritable à poursuivre. Il avait besoin de se sentir utile, et quoi qu’il en dise, d’être intégré à une communauté. Qui plus est, le dragon conservait cette certitude chevillée au cœur : cela n’était pas la voie sur laquelle Aoatea, et Flarmya par delà elle, attendait qu’il s’engage. Celle dans laquelle le Prêtre pourrait s’épanouir pleinement. Celle que … Le Màr Tàralöm ne pouvait désormais plus lui offrir.

Portant un regard profondément attristé sur son Ondin, chargé de lourds regrets, le Brun gronda tout bas. Il avait pris sa décision. Pour le bien de son frère d’âme, il était prêt à abandonner sa demeure ancestrale, même à contre-coeur. Il ne supportait plus de le voir s’étioler à petit feu.

**Allons au Màr Litsë, Marek. Trouvons Sraoshaï et voyons où cela nous mène.**

Ses iris d’outremer s’élargissant de surprise par dessus sa tasse, il ne répondit pas immédiatement. Avait-il bien entendu ? Pourquoi un tel revirement soudain ?

*Leith, je ...*

**Pas de discussion, petit frère. C’est bien ce que tu voulais, non ? Quitter le Màr Tàralöm. Alors allons-y. Faisons-le. Ensemble. A ta charge d’en assumer les conséquences ensuite.**

Sur ces derniers mots, le Brun s’étira, dans un crissement de griffes sur le sol de pierre, avant de se diriger vers l’aire d’envol, ne lui prêtant en apparence plus aucune attention. Il avait faim et il avait sommeil : en résumé, il n’était pas d’humeur à écouter les sempiternelles tergiversations de son Lié, pas plus qu’à chercher à raisonner avec lui.

***

Il ne leur fallut que quelques jours pour mettre leurs affaires en ordre, ou du moins pour recevoir la pleine satisfaction de Marek. Si cela n’avait tenu qu’à lui, Asaleith aurait emmené son Lié de force, dès le lever de soleil du jour suivant … Mais il ne pouvait évidemment pas en être ainsi. Leur départ serait certainement définitif, le Brun le pressentait, que cela soit volontaire de leur part ou non : une fois qu’il serait établi par leurs confrères qu’ils s’étaient désolidarisés du Màr Tàralöm, il serait extrêmement complexe, pour ne pas dire risqué, de revenir. Ils en savaient tout simplement trop. Aussi était-il nécessaire pour eux de bien préparer leur départ, de ne laisser derrière eux aucune piste qui puisse trahir leur but … Ou les doutes croissants qui dévoraient lentement son frère d’âme.
C’était également pour cette raison que le dragon n’avait pas souhaité s’attarder plus que nécessaire : afin d’éviter que Marek ne perde sa détermination et change d’avis, prétextant des excuses plus futiles les unes que les autres. Il le connaissait par cœur, son Ondin.

Sept jours, c’était la limite de temps sur laquelle ils étaient tombés d’accord. Sept jours pour prendre des forces et faire le tri, à la fois matériellement et psychologiquement, entre ce qu’ils abandonneraient ici et ce qu’ils pourraient emmener, à savoir bien peu de choses. Le plus dur pour son Lié avait été de se dire qu’il livrerait le Sanctuaire de Flarmya a un évident chaos : nombreux seraient ceux qui se battraient pour prendre sa place, et récupérer le siège au Concile qui y était associé … Et il ne pourrait rien faire pour l’éviter.

Au terme du délai imparti, alors que la journée battait son plein au Kaerl, un baluchon finalement bien maigre accroché à son harnais, ils s’étaient envolés, planant quelques minutes au dessus des Pics de Cendre comme pour leur dire adieu, avant de bondir dans l’Interstice. Marek et lui avaient pris soin de mémoriser une carte de la région, dessinée d’après les informations recueillies par les deux ex Aspirantes qui avaient été amenées là-bas pour s’y lier, après la chute de Drazahir. La localisation exacte de l’endroit restait passablement imprécise, mais le Brun n’était pas inquiet. Les dragons n’étaient pas surnommés les Seigneurs des Trois Règnes pour rien : depuis le ciel, rien ne leur était impossible. Il trouverait ce fichu Kaerl des Sables, coûte que coûte, parce qu’il constituait la seule piste à laquelle son Lié pouvait actuellement se raccrocher. Asaleith n’avait pas le droit à l’échec et cela seul constituait une motivation impérissable pour le pousser à avancer.

Au sortir du néant glacé de l’Interstice, la chaleur oppressante du désert les frappa de plein fouet, et il sentit son Ondin étouffer un hoquet, rajustant autour de sa tête les voiles protecteurs censés atténuer la morsure de l’astre solaire.

**Tu as vécu plusieurs années à Ys, puis des années encore au cœur d’un volcan, et te voilà gémissant comme une fillette sous la chaleur ?**

Seule une claque affectueuse sur le cuir de son cou répondit à sa pique, et Asaleith eut un grognement satisfait, prenant de la vitesse d’un ample battement d’ailes. Au delà de ses moqueries, il ne serait guère raisonnable d’infliger un tel environnement à son frère d’âme plus que de raison. Il était encore tôt ici, le soleil venant à peine de se lever, et les températures ne tarderaient pas à augmenter. Il ne fallait pas perdre de temps.
Néanmoins, ce n’est qu’une bonne heure plus tard qu’ils finirent par apercevoir une vaste zone rocheuse s’élevant impérialement hors des sables, stérile et abandonnée uniquement en apparence, s’il fallait en croire leurs sources. Incertain du fait qu’ils aient atteint leur but, le Brun ouvrit instinctivement son esprit, se tendant à la recherche de la présence hypothétique d’autres dragons, ou de courants magiques quelconques qui lui indiqueraient qu’ils étaient au bon endroit. C’est alors qu’il le perçut, cet appel … Cette lumière chantante dans l’obscurité, lui souhaitant la bienvenue et l’invitant à se rapprocher sans crainte.

*C’est … Comme un phare dans la tempête, qui nous guiderait vers la sécurité de la terre ferme. Allons-y, Leith !*

L’excitation dans la voix de son Ondin, pour la première fois depuis des jours, le convainquit de pousser leur exploration plus loin. Et s’ils ne trouvaient rien, au pire pourraient-ils s’abriter du soleil pendant les heures les plus chaudes de la journée. Après quelques minutes supplémentaires de vol, ils se posèrent prudemment devant une haute arche de pierre, gravée de bas-relief à moitié effacés par le temps, et de l’ombre de laquelle une haute silhouette se détacha. Dès le premier regard, Asaleith l’identifia pour ce qu’elle était réellement, et se posta en protection devant Marek, les crocs dénudés, méfiant.
Quelles étaient les intentions de cette dragonne inconnue ? Il n’avait aucune désir de foncer tête baissée dans ce qui pouvait encore se révéler être un piège ! Mais déjà, elle se détournait sans un mot, sa chevelure d’un brun argenté battant son dos, les invitant de toute évidence à la suivre. Une main apaisante posée sur les écailles tièdes de son frère d’âme, Marek leva un regard interrogateur vers lui, ses iris marins seuls visibles à travers les tissus qui masquaient son visage.

*Elle ne paraît pas hostile, qu’en penses-tu ?*

**Elle nous a trouvés bien trop facilement à mon goût, je n’aime pas cela.**

Sans rompre le contact avec lui, l’Ondin détacha d’une main ses voiles, soupirant de soulagement de pouvoir à nouveau respirer à l’air libre.

*Nous n’avons pas fait grand cas de masquer notre présence après tout. J’aimerais savoir ce que nous pouvons apprendre d’elle. Elle n’est certainement pas ici pour rien.*


[RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle Asaleith-Marek-d-Ardienor-Tol-Orea
Le Brun Asaleith

C’est ainsi qu’ils se mirent tous deux en route derrière l’étrange dragonne, le Brun sous forme humanoïde sur les talons du frêle Ondin, l’un et l’autre ouvrant de grands yeux curieux sur leur passage, jusqu’à ce que, au bout de l’interminable enfilade de corridors, une lueur lointaine ne se dessine. Et, là, alors qu’ils se rapprochaient, s’encadrant à contre-jour devant ce qui paraissait être une salle à haut plafond, une nouvelle silhouette, féminine, gracieuse et digne.

"Sois le bienvenu au Màr Litsë, jeune égaré."

Un sourire, doux et mesuré accompagna sa déclaration, tintant et se réverbérant harmonieusement contre la pierre autour d’eux. Le Màr Litsë ! Ils avaient réussi ! Marek échangea un regard soulagé avec Asaleith, sentant une partie de sa tension se dénouer.
Puis, la femme inclina respectueusement la tête, ouvrant les bras comme pour appuyer sa formule d’accueil, lui tendant une coupe remplie de ce qui paraissait être une coupe d’eau fraîche … Absolument irrésistible après cette heure passée à voler dans une atmosphère sèche et poussiéreuse. Et tandis qu’il se saisissait délicatement de l’offrande, veillant à ne pas en renverser la moindre goutte, l’Elfe au sang-mêlé se présenta enfin. Sraoshaï Ter Altansarnannûn. Les yeux clos, savourant tant la sensation de l’eau pure coulant dans sa gorge assoiffée, que les sonorités musicales du nom de leur interlocutrice, il soupira, ne pouvant empêcher une vague nuance d’angoisse de saisir son cœur. Les choses ne s’étaient-elles pas déroulées bien trop facilement jusqu’à présent ?

« Je suis Asaleith, né de l’Incarnate Takhasya. Et voici mon frère d’âme. Nous sommes venus ici à la recherche de réponses et du refuge offert à ceux qui se sont perdus. »

Rouvrant les yeux, Marek porta un regard troublé sur son Lié, avant de s’incliner devant la femme et celle qui était sans aucun doute sa Liée.

« J’ai été guidé ici … par la main de Flarmya. » Un bref sourire de dérision amusée flotta sur ses lèvres, avant qu’il ne reprenne son sérieux. « On m’a conseillé de venir à la rencontre de Sraoshaï du Màr Litsë, certain qu’elle pourrait me guider à travers l’obscurité qui assaille mon cœur. Mes hommages, ma dame. Je suis ... Nezvan, serviteur de la Déesse aux Larmes de Feu. »

Car toute autre présentation lui paraissait vaine et obsolète en l’état actuel, il se redressa lentement et accrocha ses iris d’outremer, francs et ouverts en dépit des cernes qui les assombrissaient, à ceux de la Gardienne.


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MessageSujet: Re: [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle   [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle Icon_minitimeDim 28 Juin 2020 - 15:04

[RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle 181118112528238217 . [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle Seqenenre
Sraoshaï Ter Altansarnannûn & la Cendrée Seqenënre  

Armand Amar - The Storm

Sans rien dire, un air à la fois apaisant et solennel enveloppant les traits de son visage mûr, Sraoshaï sonda longuement l'ondin de son regard de grège, de la même façon qu'elle étudiait les tranches de cuir des livres de la bibliothèque, quelques minutes plus tôt.
La sang-mêlé l'examina le temps d'un instant qui put paraître long à son interlocuteur, tâchant de décortiquer avec minutie et non sans respect les pétales de cette fleur pour mieux en humer le parfum et en révéler la quintessence de son arôme vrai mais caché au reste du monde.
Sans pour autant le juger sur sa seule apparence, et sans une seule once de moquerie, elle releva que le jeune homme n'était pas à l'apogée de sa floraison, comme la plupart de ceux qui venaient à sa rencontre. Elle nota la fatigue sur son visage, pendue à ses yeux cernés de peine et de doute comme un bourdon s'accrochait à son brin de lavande pour ne pas être emporté par la pluie d'un orage d'été.
Pourtant, sous l'épuisement de ses traits et sans tenir compte de la chaleur peu coutumière à laquelle il était confronté, un étrange éclat pétillait au fond des abysses d'un bleu marin de l'océan qu'étaient ses iris. Cet homme n'était pas réellement perdu. Tout au plus égaré d'esprit, mais nulle franche défaite ne planait au dessus de son existence. Au fond de lui battait un espoir au rythme de son coeur, un espoir qui avait la capacité de le porter enfin vers le véritable début de sa vie.

Sraoshaï lui offrit un sourire doucereux mais impénétrable, satisfaite de ce qui émanait de lui mais aussi de son Lié qui s'était exprimé le premier. Il y avait d'ailleurs une profonde symbolique dans cette simple interaction : Asaleith le Brun, protecteur et méfiant, avait pris les rênes de cette rencontre, à la manière d'un grand-frère introduisant son cadet à une activité nouvelle mais s'assurant tout de même qu'il n'y avait pas de danger pour lui. Leur lien était fort sous l'atypique symphonie de leur âme unie et malgré les dissonances occasionnelles, il était certain qu'aucune fausse note ne put en gâcher la mélodie.  
Le dragon n'avait pas manqué de rappeler son ascendance et par là même ses origines Ardentes, lignée que Seqenënre avait sentie à l'instant même où son regard se posa sur son frère, elle même née d'une Incarnate. Asaleith vibrait malgré lui de la fierté des Reines du Màr Tàralöm, le sang typique de leurs écailles luisant sous la robe lasurée du bois dont il était couvert. Son fiel détonnait avec le tempérament habituel des Bruns, non sans déplaire à Sraoshaï et sa Liée qui voyaient là une agréable façon de déroger aux stéréotypes. De manière générale, l'une comme l'autre savaient apprécier le caractère des choses et des êtres uniques, et force était d'admettre que le duo Ardent l'était à leur goût.

** Ne crains rien, petit frère. Ici, tout ce que vous risquez c'est de ne pas supporter le baiser trop brûlant de Solyae, bien plus chaud que le volcan où siège ton Màr. Je comprends ta méfiance, mais tu ne crains rien. **

Après les avoir écouté, leur avoir laissé le temps de s'exprimer ou poser leurs questions, le timbre chaud et rassurant de la gardienne s'éleva en écho sous les alcôves de grès fauve.

- Ici, il n'y a plus de Kaerl, de titre ou de patronyme. Vos origines importent peu. Tout ce qui compte c'est de guider vos pas dans le présent pour aller vers un avenir plus clément. Le passé à certes son importance, car c'est de là d'où vous venez. Mais nul n'y réside, il ne s'agit que d'une aire de passage obligé. Le passé ne peut être défait ni effacé, il nous forge et nous modèle, mais il n'est pas une fatalité.

Elle inclina légèrement la tête sur le côté, battant doucement des paupières, les mains venant s'entrelacer par ses doigts devant elle. Puis, en temps voulu, elle poursuivit avec la même pondération.

- Je suis donc enchantée de faire ta connaissance, Nezvan, de même que la tienne, Asaleith.
Que ce soit une déesse ou un mortel qui te mena jusqu'à nous, tout ce que je vois c'est toi et toi seul, accompagné de tes interrogations.
Quelques ombres planent au dessus de toi. Je les vois aisément, aussi clairement que je te distingue à l'instant même. Mais que serait un lac d'eau claire sans ses nuages de pluie ? Sans les libellules qui chassent sur son onde ? Tes ombres te donnent tant de relief, jeune ondin... Je n'ai aucune volonté de les faire disparaître, je peux seulement t'aider à les apprécier.


Sraoshaï ponctua ses derniers mots d'un énième sourire reposant alourdi d'une profonde sincérité, détrônant peut-être le temps d'une seconde sa traditionnelle impartialité. Elle formula la suite de ses propos avec la véracité des prédictions d'un oracle sans pour autant prétendre le moins du monde en être un.

- Avant toute chose, avant d'aller plus loin, j'aimerais que tu parviennes à abandonner le mysticisme des divins pour accepter que seuls tes choix, et peut-être ceux de ton Lié, t'ont amené au Màr Litsë. Ces vautours que sont tes démons, qui te suivent depuis tant d'années, sont indépendants de tes croyances. Tu seras le seul à pouvoir les chasser, aidé de prières si nécessaire. Mais seules tes actions, seules tes décisions t'aideront à trouver le nouveau cap de ta vie.
Je sais que c'est difficile, et je ne te demande absolument pas de renier ta foi, seulement de te mettre à nu pour que je puisse t'aider, du mieux possible.


Un bref silence s'instaura, désireux de laisser le temps au duo Ardent de digérer les paroles de la sang-mêlé. Peut-être furent-elles percutantes ou désagréables à entendre, mais elles avaient le mérite d'être justes.
Il était arrivé plusieurs fois qu'elle mette en colère ses interlocuteurs par ses simples analyses. La vérité, dénuée de soie pour en masquer la potentielle laideur, était souvent bien difficile à accepter. Pour le moment, elle n'avait pas encore assez de recul pour ébranler les fondations de l'ondin et son Lié. Bien que le premier apparaissait fragile par son épuisement à luter contre lui-même, elle avait bien perçu que tout restait à explorer sous la fausse facilité de sa personnalité. Au regard de l'océan niché dans ses iris outremer, il pouvait se montrer lisse et sans vagues de prime abord tout en abritant de féroces requins. Ses vagues tantôt lentes et fluides savaient tout autant s'éveiller de rage sous les étreintes de la tempête, engloutissant en ses flots les plus robustes navires, animant l'onde d'écume comme le faisait les bords de la gueule d'un loup affamé en chasse.
Même si le destin les avait tous deux perdus au Màr Tàralöm, le lien les unissant y était né, non sans la futilité du simple hasard.
Sraoshaï et Seqenënre échangèrent un regard quelque peu malicieux : les Ardents, sous la complexité de leur caractère, étaient les plus simples à guider. Car ils avaient le mérite d'être entiers, ayant rarement honte d'exposer leurs secrets même les plus inavouables. Mais rien n'était encore écrit pour Nezvan et Asaleith...

- Je serai d'une réelle sincérité envers vous, par mes actes et mes mots. Je ne vous demande rien d'autre que l'être en retour, sans quémander de votre part des choses que vous refuseriez de m'offrir. Vous êtes ici en Terre de Liberté. Vous pouvez partir quand vous le souhaitez, rien ne vous retient.
Je ne suis pas l'Oracle, ni une envoyée des Divins. Je n'ai pas leur omniscience, je ne détiens pas les clefs de leurs secrets pouvant vous concerner. Je ne suis d'une femme d'un certain âge qui possède l'expérience liée à mes décennies passées sur Rhaëg. J'espère seulement pouvoir vous donner ce qui vous manque pour poursuivre votre existence, que ce soit simplement un verre d'eau et un peu de nourriture au passage vers un autre lieu, ou la révélation d'un avenir auquel vous n'aviez même pas songé.
Ceci étant dit, si vous le souhaitez toujours, je serai donc celle qui tentera au mieux de vous aider. Je me réserve le secret de vous révéler ma façon de procéder, mais rien ne sera fait en dépit de votre volonté.


Sraoshaï détourna le regard, avisant au loin une large table de bois cernée de chaises. Il y reposait une large théière fumante d'eau aux écorces d'agrumes et des coupes retournées pour éviter que le sable ne s'y déposât. Elle invita ses convives à la suivre en ouvrant le bras vers le lieu éloigné de quelques pas seulement. D'une marche calme et lente, elle s'avança la première et remplit quatre timbales de l'infusion à la bigarade et au cédrat, répandant par sa vapeur des notes fruitées et rafraichissantes.

- Dis moi, Nezvan, ce qui t'a réellement mené jusqu'ici. Tu es libre de garder tes secrets, mais sache qu'ils ne dépasseront jamais l'enceinte de mes lèvres. Ce qui se dit en ces lieux reste ici, et le restera jusqu'à ce que le monde ne soit devenu poussière.
Je te demande seulement de me donner les raisons de ton errance pour savoir quelles réponses t'apporter. Si tu préfères que nous soyons seuls, je ne m'y opposerai nullement.
Tu peux tout me dire. Tu peux chuchoter, hurler, pleurer, rire... Nul ne te jugera.
Si tu souhaites te reposer plus avant, il est évident que tu y auras droit. Ici, nous sommes loin de la course qui fait tourner le Monde, tu auras le temps dont tu as besoin pour t'ouvrir.


Elle prit une coupe juste servie et but calmement quelques gorgées, détachant son regard du duo pour ne pas les oppresser d'une quelconque manière. S'ils étaient méfiants, il était certain qu'ils nécessitaient un temps de réflexion avant de poursuivre.  
Plus tranchée que sa bipède, Seqenënre espérait qu'ils acceptassent la main tendue de Sraoshaï, intriguée par l'ondin et le Brun bien loin de chez eux.
Dans le fond, la gardienne et sa Liée adoraient ce rôle de prime abord imposé puis embrassé, et elles prendraient les jours, les semaines ou les mois indispensables à la naissance d'un nouvel homme et son âme-soeur.


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Marek d'Ardiénor
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MessageSujet: Re: [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle   [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle Icon_minitimeLun 3 Aoû 2020 - 19:21


Laissant volontiers Asaleith prendre les devants pour les présentations, Marek s’était concentré sur le cadeau inestimable de cette eau désaltérant sa bouche asséchée, tant par la nervosité que par l’atmosphère sèche et étouffante qui caractérisait le désert profond. Cet endroit en valait un autre, dans leur quête de vérité et d’absolu. Mais en dépit de sa confiance envers cette voie sur laquelle Flarmya l’avait placé, il ne pouvait s’empêcher de se demander quelles nouvelles épreuves l’attendraient ici. En dépit de son nom de baptême, la Terre de Liberté ne s’ouvrait certainement pas à n’importe qui.

Aussi lorsque le Brun lui fit part des pensées apaisantes de l’étrange dragonne, qui accompagnait visiblement celle qui se présentait sous le nom de Sraoshaï Ter Altansarnannûn, il relâcha un soupir pénible. La Liée dégageait une aura étrange, subtilement teintée des flammes natives du Màr Tàralöm, mais comme pouvait l’être la note de tête d’un thé parfumé : celle que l’on percevait en premier, mais non celle fondatrice de sa véritable personnalité. Qui était-elle et d’où venait-elle ? Quelle était sa relation avec l’Elfe au sang-mêlé qui les accueillait ici ?

**J’ai renoncé à mon Kaerl mais non aux instincts ancrés en moi depuis ma naissance. Face à l’inconnu, quel que soit les ombres qu’il recèle, et quoi qu’il m’en coûte, je protégerai mon frère d’âme. Je ne peux pas le laisser aller seul au devant du danger.**

Puis à haute voix, le menton toujours haussé dans une attitude un rien défiante :

« M’offriras-tu ton nom et ton ascendance, comme je l’ai fait moi, ma sœur ? »

Une caresse soucieuse des doigts de son Ondin, effleurant son bras, suffit à le faire taire, momentanément, sans toutefois souffler au loin sa vigilance. Il l’avait dit et en était persuadé : dans son état actuel, Marek était incapable de vaincre seul ses démons, bien trop égaré pour pouvoir leur résister. Il craignait par dessus tout de le voir s’effondrer, brisé par l’adversité, ou pire, de le voir se faire dévorer lentement par sa propre obscurité. Il devait veiller sur lui et accompagner ses choix, ainsi qu’il l’avait promis à Aoatea.
Et pourtant, il ne put cacher à son Lié sa fierté piquée au vif par la douce réprimande de la gardienne, lorsque de sa voix paisible aux inflexions maternelles, comme faisant écho aux pensées du dragon, elle énonça que leur passé était désormais derrière eux.

« Alors, ainsi que le veut la rumeur, ici tous sont acceptés, sans considération pour leur origine et leur passif, que ce soit sur Rhaëg ou sur la Terre de l’Aube ... »

Levant un regard d’avertissement vers Asaleith, il poursuivit avec un demi-sourire, accentuant les creux dans ses joues pâles, et les cernes d’épuisement sous ses yeux.

« Nous vous remercions de votre accueil, ma dame. »

En vérité, il peinait encore à concevoir comment une telle organisation pouvait exister, rassemblant en son sein tant d’êtres aux convictions forcément … divergentes. Cependant, maintenant une attention curieuse sur l’architecture de la haute salle dans laquelle ils se trouvaient, il réservait prudemment son jugement définitif pour le moment où il en saurait plus. Il pouvait sentir brasiller à bas bruit l’impatience qui émanait de son Brun, comme un vortex d’eau bouillonnante venue des profondeurs, qui viendrait se mêler à l’onde plus tranquille et plus fraîche de l’océan. De Sraoshaï ou de sa dragonne silencieuse, en revanche, que ce soit dans leur posture ou le ton de voix mesuré de la sang-mêlé, il ne lisait que paix et sérénité, comme si, dès l’instant où elle était venue à leur rencontre, le temps s’était arrêté. Ses mots s’égrainaient avec grâce et ses iris, lorsqu’ils n’étaient pas voilés par ses paupières soulignées de grège, semblaient voir au-delà de son corps physique, jusqu’à distinguer son âme mêlée à celle d’un Brun flamboyant.

Avec un frisson, il reçut ses paroles, usant de métaphores habiles mais bien trop évocatrices alors même qu’il ne lui avait encore rien révélé de ses tourments. Une fois encore, avec une curieuse bienveillance sous-jacente pour lui qui n’était qu’un inconnu en quête de réponses, elle le tançait gentiment, écartant le voile impersonnel du Prêtre de Flarmya dans lequel il s’était drapé. Il en conçut une forme de gêne et de culpabilité diffuse, détournant humblement son regard sur les bas-reliefs gravés qui les entouraient. Ne lui avait-il pas menti en se présentant sous un nom qu’il avait pourtant refusé d’entendre prononcé des lèvres de celle qu’il aimait ? Nezvan. Celui qui n’a pas été appelé.

Retenant les paroles à la verve trop piquante qui lui brûlaient la langue, Asaleith se contenta d’un froncement de sourcils à destination de Sraoshaï, bras croisés sur son torse musculeux. La femme n’ignorait pas d’où ils venaient. Comment pouvait-elle lui demander, en toute connaissance de cause, de mettre son âme à nu devant elle ? Quelle preuve avaient-ils de ses bonnes intentions, sinon de creuses paroles et des sourires censés leur apporter un sentiment artificiel de sécurité ? Que Marek se départisse de son mysticisme ? Autant réclamer de lui, dragon, qu’il se défasse de ses écailles. Ses lèvres se pincèrent et ses iris d’un bleu céruléen étincelèrent. Impassible devant sa colère évidente, les mains sagement croisées dans son giron, l’Elfe les contemplait, image vivante – et ô combien irritante – de la patience et de la miséricorde.

*Paix, Leith, ne te laisse pas emporter. Elle cherche vraisemblablement à nous faire réagir, mais ses paroles sont justes. Si elle doit nous aider, alors nous lui devons la sincérité.*
**Je souhaite simplement t’éviter de plonger tête la première dans ce qui pourrait être un piège, petit homme. C’est pour cette raison que je suis là avec toi.**
*Fais-moi confiance, pour cette fois, s’il-te-plait.*

Un sourire affectueux et reconnaissant illumina brièvement l’océan agité des prunelles de son Ondin, et le Brun sentit fondre ses dernières résistances. Depuis combien de temps ne l’avait-il pas vu agir ainsi, abaisser de cette façon toutes ces barrières qui s’étaient douloureusement érigées entre eux ? La chaleur emplissant son esprit, le dragon baissa la tête, curieusement touché. Loin des miasmes poisseux du Màr Tàralöm, l’âme de Marek semblait déjà résonner d’une mélodie nouvelle, et une terrible culpabilité vrilla son cœur. Tant de fois s’était-il juré qu’il l’emmenerait loin, pour quelques jours ou quelques semaines, loin de toutes ces responsabilités et ces doutes qui pesaient sur ses épaules. Depuis combien de temps s’était-il détourné des souffrances de la propre moitié de son âme, leur tournant le dos et refusant de les voir, trop aveuglé par son orgueil ?

**Pardonne-moi, Marek.**

Rien de plus qu’un murmure, un souffle effleurant les pensées de son Lié et il perçut, diffus, son acquiescement, son accord plein et entier, tandis que leurs deux âmes s’entrelaçaient plus étroitement encore, à la façon de deux pièces d’un casse-tête complexe mais parfaitement ajusté.
Comme un curieux miroir des deux anciens Ardents, Sraoshaï et sa dragonne avaient échangé un regard malicieux, visiblement satisfaites de ce qu’elles voyaient, avant que l’Elfe ne reprenne la parole. Peut-être avait-elle perçu leur réluctance initiale à se dévoiler et estimait-elle nécessaire d’en dire plus, ou peut-être cela faisait-il partie de son rituel d’accueil pour ceux venus rechercher sa guidance et ses conseils. L’un dans l’autre, elle ne faisait que tendre vers eux une main secourable mais fermement ancrée dans la réalité, leur présentant son savoir comme la conséquence des années. Une main qu’ils étaient donc libres de saisir ou de refuser, dans sa totalité, ou seulement partiellement. Puisant sa force dans l’aura à la fougue volcanique de son Brun, Marek accrocha ses iris d’outremer à ceux de leur hôte, la détermination s’affichant sur son visage hâve.

« Nous vous sommes reconnaissants pour votre proposition, ma dame. Nous sommes venus à vous sans connaître guère plus qu’un nom et un lieu, guidés par la simple promesse que vous seriez à même de venir à notre aide … Quelle que soit la nature des conseils que vous pourriez effectivement nous prodiguer. »

Il marqua une pause, désignant la gardienne et la dragonne étrangère.

« Il semblerait que la main qui nous a mené ici, mortelle tout autant que divine, ait été finalement bien intentionnée. »

‘‘ … Suivez le chemin, il vous mènera vers une aide plus clémente que la mienne. Une aide pour la nature de votre chagrin, mais aussi pour apaiser les braises qui rongent la relation avec votre Lié. ’’

C’est par ces mots que Rūna Sălv, étrangement, leur avait fait miroiter les prémices d’un avenir différent, d’une réconciliation et d’un espoir derrière la fatalité de son existence au sein du Màr Tàralöm. Un premier pas pour se libérer des chaînes et du carcan qu’il avait lui-même passés autour de son cou et de son cœur, s’interdisant de voir au-delà de cet amour dévorant qu’il éprouvait pour Aoatea. La liberté d’être. La liberté de choisir les causes pour lesquelles s’engager. La liberté de choisir sa voie.

Se détournant sur un geste les invitant à les suivre, quelques dizaines de pas suffirent à les mener à une table ornée avec sobriété d’une théière et de coupes de porcelaine peinte. Le breuvage, lorsqu’elle le versa dans les tasses, dégageait un parfum plaisant d’agrumes acidulés, et malgré la température ambiante, lui paraissait particulièrement tentant. Prenant place sur l’une des chaises, au confort spartiate mais néanmoins tout à fait honorable, il soupira doucement, de contentement cette fois, se saisissant du récipient dont la chaleur irradiait entre ses doigts.

Après un instant d’hésitation, Asaleith imita son Lié, gardant son regard d’un bleu perçant fixé sur l’Elfe et la dragonne, quoi qu’avec bien plus d’aménité qu’il ne l’avait fait au début de cet entretien.
Il suivrait l’intuition de son Ondin, mettant en arrière-plan sa conscience froidement analytique qui lui murmurait qu’une telle aide ne pouvait décemment pas être bien intentionnée. La bienveillance et la compassion, sans rien demander d’autre en retour ... Lui qui n’avait jamais rien connu d’autre que la loi du plus fort, après tout, comment pouvait-il seulement imaginer que cela puisse exister ? Ses paupières se fermèrent, presque malgré lui, relâchant sa garde, tandis qu’il humait les arômes de l’infusion brûlante. Bigarade et cédrat. Avec peut-être, en fond, une délicate touche de miel pour adoucir leur acidité première. Le mélange s’annonçait agréable, rafraîchissant et joyeux, et en même temps réconfortant, à l’image de celle qui se tenait devant eux.

Car enfin, une timbale en main, dans l’ombre de sa dragonne silencieuse, laissant là ses tentatives d’apaisement, Sraoshaï posait la question fatidique, logique et attendue. Pourquoi étaient-ils venus à elle ? Dans quel but ? Quel désir ou espoir animait leur cœur ? Et encore une fois, patiente, temporisant, leur énonçant qu’ils pourraient lui apporter leur réponse plus tard, après avoir soumis au crible de leur réflexion tout ce qu’ils avaient appris jusque là. Craignant de perdre de sa volonté s’il attendait trop, Marek prit une profonde inspiration, absorbant une gorgée de thé parfumé, en savourant le goût sur sa langue, les yeux rivés sur le haut plafond rocheux, loin au dessus d’eux.

« Je suis venu avant tout en quête de ma véritable identité. Je ne supportais plus mon enfermement entre les murs du Màr Tàralöm. »

Il glissa un regard doux, mais peiné à son Brun.

« Asaleith étant issu d’une longue lignée d’Incarnates, il nous a été difficile d’en partir et ... » il s’interrompit et secoua la tête, légèrement étourdi par la chaleur. « En réalité, dans mon entêtement, je pensais y accomplir une mission qui m’avait été confiée par l’Archiprêtresse en personne. Peut-être était-ce une façon pour moi de ne pas faire face à des sentiments trop douloureux. D’étouffer un amour désespéré sous une loyauté factice envers un épouvantail que j’aurais placé sur un piédestal et vêtu des habits de celle que j’aimais. »

A demi-mot, sans en révéler trop, cherchant à se dépêtrer de la honte et l’amertume qui le tenaillaient jour après jour depuis sa confrontation avec Aoatea, il s’était efforcé d’exposer clairement à Sraoshaï le cheminement de ses pensées … Comment il en était arrivé à se retrouver obligé de choisir entre sa survie et son devoir.


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MessageSujet: Re: [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle   [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle Icon_minitimeSam 19 Sep 2020 - 22:54

[RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle 181118112528238217 . [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle Seqenenre
Sraoshaï Ter Altansarnannûn & la Cendrée Seqenënre  

Anilah - Warrior

La Cendrée, sous le couvert de sa silhouette humanoïde, offrit un sourire narquois mais dénué de véhémence à l'égard de son Frère. Levant à peine le menton pour signifier son désir de mimer le dédain, un éclat pourtant traitre faisait pétiller ses iris de fer d'une étincelle plus brûlante qu'auparavant, à l'image d'un morceau de métal rougissant au baiser du feu, prêt à fondre, prêt à devenir une lame sous le bat du marteau d'un forgeron. Le doute ne pouvait plus planer sur son ascendance, malgré toute l'antinomie de son apparente chaleur bienfaitrice et accueillante. Elle se plaisait parfois à rappeler que si sa bipède était d'un profond altruisme, elle, l'Impératrice Noire, n'en restait pas moins une dragonne, d'ascendance Ardente de surcroit.
Peut-être à son tour excitée par la méfiance qui suait de tous les pores de la peau de son Frère, la Cendrée sembla plus sur la défensive, les épaules basses et l'air mêlant la fierté à la défiance. Elle avait vu défiler sous ses prunelles des êtres certes plus cléments, mais d'autres bien plus noirs, assombris par l'ombre planante au dessus d'eux du dieu du Chaos et de la Discorde. Alors, si son ton se fit calme, Asaleith pourrait aisément sentir la coupure que ses mots infligèrent, un peu comme le faisaient les griffes d'un chat jouant avec trop de passion.

** Tout comme toi, je n'ai pas renoncé aux âmes qui forgèrent la mienne à travers les siècles écoulés. Nul ne saurait déroger à sa nature profonde, pas même le plus volontaire des Dieux.
Mais je respecte les lois de cette Terre où j'habite. Je tais, sans en souffrir, les flammes qui peuvent parfois gronder en moi, sans renier que du feu et de la lave je suis née.  
Avant même que tu ne palabres, j'ai senti le parfum soufré du Màr Tàralöm sur tes écailles, j'ai vu l'ombre de son volcan dominer la tienne. En cela, il n'y a rien de mal. Qui pourrait se targuer de savoir changer son passé ? Quel arbre a la capacité de pouvoir choisir ses racines ?
Mon nom est Seqenënre. Je suis née ici, au Ssyl'Shar, mais j'imagine que l'odeur de mon sang ne peut être atténuée par celle du sable. Je suis bien fille d'Incarnate, mais la mémoire ancestrale a effacé son nom, elle a été exclue du Kaerl. Je me moque du reste, la couleur de son cuir m'importe bien peu.
Quand tu me verras sous ma véritable forme, je te rappellerai un autre de nos Frères, dont le bipède siège au Concile. **


Seqenënre se plaisait à semer quelques indices au détour de ses paroles, tout en maintenant le doute. A contrario de sa Liée, elle ne rechignait pas à se jouer quelque peu des convives de passage déjà bien perdus...
Malgré sa petite stature somme toute menue et presque chétive, la fragilité ingénue de l'Impératrice sous forme humanoïde s'était vue balayée d'un revers de la main par la justesse de son verbe. Sur son visage aux traits ronds flottaient les obscurs spectres de ses origines. Elle arborait ceux-ci comme une femme soulignait son regard de charbon, sans volonté ostentatoire de séduire le monde, mais bien pour nourrir l'orbe de mystère qu'elle portait par son seul pouvoir d'exister. Seqenënre embrassait sa part d'ombre à la manière que Sraoshaï tenait à son flanc la lance de lumière innée que les dieux avaient pu lui confier. L'équilibre parfait.

Sraoshaï huma brièvement l'air autour d'eux, y décelant entre les volutes d'encens et le parfum du bois et de la pierre chauds l'amertume de l'ondin et la méfiance de son Lié. Son timbre chaud et mûr eut la vibration rassurante des ronronnements d'un félin, mais son regard de grège n'en demeurait pas moins affuté comme le tranchant d'une pierre, sans pour autant le regarder directement.

« Ici sont acceptés ceux qui consentent à changer, ceux qui se résignent à quitter le confort et la sécurité d'un destin qu'ils se sont désignés par peur de voir ce qui les attend réellement. Tu as déjà fait plus d'un pas sur ce sentier à la destination inconnue, certes non sans des craintes naturelles à y croiser de nouveaux alliés et de nouveaux ennemis. Le plus difficile te reste à accomplir, mais tu es prêt. Alors oui, sois sûr d'être accepté ici. »

La demi-sang marqua une pause brève avant de poursuivre, dardant cette fois sur le jeune homme  fatigué toute l'acuité de ses iris d'ocre argenté.

« Pour cela, tu devras te défaire de tes chaînes. Elles ne sont pas réelles, mais je peux les voir. Leur fer te brûle la peau et te blesse jusqu'à l'esprit , elles te contiennent et te rendent captif d'une part de toi-même, leur rouille manque de peu de te recouvrir tout entier jusqu'à ce que Nezvan disparaisse et ne soit plus qu'une ombre sans âme. Tu rejoindrais alors les Limbes sans avoir été toi-même, sans avoir Vécu un seul jour de ta vie. »

Ses bras se croisèrent lentement, non sans une certaine minutie dans ce geste pourtant banal. Elle releva doucement le menton, laissant planer la silhouette d'un défi au dessus de son visage pourtant doux.

« Es-tu prêt à vivre enfin ? Prêt à te défaire des serres qui te retiennent ? Fuir des ombres pour lesquelles durant trop longtemps tu as courbé l'échine ? »

Sous toute l'évidente rhétorique de son interrogation, la gardienne porta à ses lèvres une tasse fumante aux douces effluves de plantes. Elle y but cérémonieusement une gorgée, sans attendre de réponse, pressentant sans difficulté le « Oui » hurlant mais silencieux qui ballottait dans les flots tumultueux du regard océanique de son convive.
Puis, sagement, elle l'écouta et l'entendit pleinement. Tout dans son attitude montrait son intérêt aux détails qu'il pouvait énumérer, car en dépit des apparences dont se contentait le commun de la plèbe, chaque mot était pesé et avait son importance.
Enfin, ENFIN, il parvenait à formuler ses maux, loin du Màr Tàralöm au peuple trop rude pour être en capacité de véritablement les accepter et les panser.
Sraoshaï accueillit ces révélations avec autant d'attention et de minutie qu'on pouvait en avoir en portant un nourrisson dans ses bras.

« Nul autre que toi ne peux mieux résumer les pages déjà écrites de ton histoire. Mais... »

Elle posa doucement sa tasse d'infusion pour mieux lui faire face, les bras à demi ouverts dans un soucis de ne rien laisser paraître d'hostile dans sa démarche.

« Je connais un autre moyen. Car pour savoir où tu vas tu dois savoir d'où tu viens.
Comme je te l'ai déjà dit, ta vie n'est faite que d'ombres. Certaines ont leur place et je n'ai nullement le droit de les déranger de leur piédestal car elles t'équilibrent. D'autres en revanche... te retiennent. Comme les cordages d'un navire emprisonnent ce dernier au quai alors que des océans plus cléments ne font que l'attendre dans la promesse de découvrir de nouveaux rivages.
Pour cela, j'ai pour coutume de proposer à mes convives une épreuve. »


Sraoshaï échangea un regard entendu avec son âme-soeur avant de s'asseoir à moitié sur la table à laquelle elle faisait dos. Elle poursuivit avec calme, mais l'esquisse d'un sourire étira la commissure de ses lèvres tandis que ses propres yeux se perdirent dans les brumes de ce qu'elle présageait.

« Libre à toi de refuser, comme pour tout le reste. Tu n'encourras aucun danger, je ne le permettrais pas et quoi qu'il en soit je serai évidemment présente. Ton Lié pourra bien entendu t'accompagner. Je me garde pour l'heure de t'en révéler le procédé, sache simplement que cette étape sera pour toi une véritable Révélation, une libération.
Mais ici-bas, l'équilibre fait valeur de Loi : tu devras payer le prix de ta délivrance, un prix qui ne se mesure pas en objets de valeur... Toi seul en connaitra le tribut au moment venu. La Vie n'est pas nécessairement la mort du Devoir, chacun doit mesurer le poids de l'un et l'autre pour ajuster sa propre balance. »


Puis, comme un écart à sa conduite si calme, elle dodelina lentement de la tête et agita furtivement une main en l'air.

« Pardonnez moi, vous êtes tous deux épuisés, affamés et assoiffés. Rien ne presse, vous êtes ici pour retrouver votre souffle et cesser d'haleter. Je vous laisse pour aujourd'hui, ma Liée vous conduira à des appartements de passage. Si vous le souhaitez, nous nous retrouverons ici à l'aube pour l'épreuve. Si vous ne venez pas, je considère que vous n'êtes pas prêts ou que vous serez partis. Cette nuit, dormez jusqu'à l'âme après un bon repas, tout commence demain. »

La demi-sang leur offrit un sourire entier et sincère, un implacable air apaisé niché jusqu'à la moindre courbe de son énigmatique visage. Une lourde tresse grise tomba le long de son buste, puis elle se releva et s'éloigna solennellement.
Seqenënre observa sa bipède disparaître au détour des sinueux couloirs, puis se tourna à son tour vers le duo d'invités.

** Allez, suivez moi. **

Emboitant le pas à vive allure dans la danse de ses atours de lin teints au charbon, la silhouette furtive de l'Impératrice les devança vers un couloir calme, sombre et frais. On y devinait difficilement par l'absence de lumière les bas-reliefs représentant diverses scènes mêlant humains et dragons, tantôt dans la lutte contre les Valherus tantôt dans le quotidien d'une existence partagée par la grâce de Flarmya.
Le couloir menait à divers alcôves et chambres sans portes, arrivant finalement à une aile de plutôt bonne taille à l'entrée seulement dissimulée par un voile légèrement opaque. La voûte était grande, capable d'accueillir un dragon sous sa réelle forme, et celui-ci était capable de quitter les lieux en se faufilant dans un renfoncement qui menait vers l'extérieur de la citadelle, lui donnant tout loisir d'aller voler au dessus du grand désert.
Les appartements étaient simples mais idéaux : un lit de bonne fortune y trônait avec des baldaquins d'où tombaient des voiles de lin ; une table où reposait une corbeille de fruits du cactus et des figues embaumait la pièce d'un parfum sucré, tandis qu'à côté une cloche grillagée y dissimulait du poisson et de la viande séchée sur un lit de sel. Enfin et surtout, du mur émergeait une petite fontaine d'eau fraiche et potable au clapotis apaisant, à son opposé régnait une petite bibliothèque plutôt bien achalandée. Derrière un paravent, on devinait la présence d'une baignoire ancienne mais fonctionnelle, remplie d'une eau tiède et cristalline, prête à recevoir la venue de quelqu'un désireux de se frotter au savon d'argousier qui reposait en son bord.
Les lieux pouvaient rappeler un weyr de fortune, mais tout en possédant ce quelque chose de plus... apaisant.

** Je vous laisse à vos occupations. Prenez soin de vous, détendez vous... Ce repos est plus que mérité après votre périple. Vous pouvez arpenter le Kaerl, mais ne vous perdez pas, je ne viendrai pas vous chercher.
Asaleith, si tu le souhaites, nous pourrons aller chasser l'oryx à la fraicheur du crépuscule. Si non, je vous dis à demain. **


Seqenënre sourit elle aussi, puis s'éloigna à son tour, sans se retourner.


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MessageSujet: Re: [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle   [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle Icon_minitimeLun 19 Oct 2020 - 18:58


C’est au son décroissant des pas de l’étrange dragonne, s’éloignant déjà dans le corridor, que l’Ondin et le Brun se retrouvèrent seuls dans les appartements qui leur avaient été attribués. Sentant la tension se dénouer lentement au creux de son ventre, Marek promena un œil curieux tout autour de lui. Notant les dimensions de la pièce, idéales pour accueillir son Lié sous sa forme originelle, et les bas reliefs qui ornaient les murs autrement laissés nus. Il s’en dégageait quelque chose de familier, de presque ... nostalgique. Effleurant du bout des doigts la pierre brute, fermant les paupières, il inspira profondément les odeurs chaudes et épicées qui flottaient dans l’air, avant que le glouglou apaisant de la fontaine n’attire son attention. Précautionneusement, il s’agenouilla devant elle, laissant courir sa main dans l’eau claire, ses iris d’outremer étincelant d’un plaisir émerveillé. D’où provenait donc toute cette eau, si précieuse dans le désert ?

Tout, dans l’agencement de l’alcôve jusqu’à sa structure même, semblait avoir été étudié pour leur inspirer le sentiment qu’ils étaient de retour chez eux. Chez eux … Son expression s’assombrit subitement, et ses épaules s’affaissèrent. Où que ce soit désormais, ils ne retrouveraient jamais leur weyr au Màr Tàralöm.

« Penses-tu que ces appartements ont été spécifiquement préparé pour nous ? » dans sa voix douce, presque un murmure, se révélait l’ombre d’un doute, d’un pressentiment indéfini et obscur. Sraoshaï et Seqenenrë s’attendaient-elles à leur arrivée ? Les rumeurs disaient-elles donc vrai, le Màr Litsë était-il habitué à recevoir des Doués et leurs Liés ? Derrière lui, un frémissement soudain, un infime fourmillement sur sa peau, lui indiqua qu’Asaleith avait repris sa parure d’écailles. Baillant largement, le Brun s’était affalé sans façon au centre de la pièce, les ailes ouvertes pour mieux évacuer la chaleur.

**Tu sais aussi bien que moi que je ne possède pas la réponse à cette question. Pourquoi ne pas interroger ta Déesse à ce sujet ?**

« C’est ma Déesse tout autant que la tienne, mon frère. »

Un sourire résigné sur les lèvres, il se redressa, prenant le temps de caresser la lourde tête cornue du dragon, et compléta son examen méthodique de leur nouveau refuge d’un lent tour sur lui-même. Le vaste lit à baldaquin, prêt à accueillir un voyageur fatigué, ne lui échappa pas, tout autant que la bibliothèque bien fournie et la baignoire pudiquement masquée par un paravent de bois sculpté. Cette dernière acheva de le décider. Il prendrait un bain bien mérité avant de profiter des provisions qui leur avaient été généreusement fournies … Puis il irait assouvir sa curiosité qui le tenaillait depuis qu’ils avaient pénétré dans la cité des sables.

« Eh bien … pour cette première journée en tant que vagabonds, nous voilà fort bien lotis. »

Entr’ouvrant un œil faussement paresseux, le Brun darda un regard acéré sur son Lié.

**Je ne leur fais toujours pas totalement confiance. Et si tout cela n’était qu’un moyen d’adoucir notre méfiance ?**

« J’ai envie de croire en leurs bonnes intentions. » Il secoua la tête. « Je suis convaincu que Flarmya nous a guidé ici pour une raison très précise. Je pense qu’elles peuvent réellement nous aider … A trouver notre chemin. A définir qui nous sommes. »

‘‘… Pour savoir où tu vas tu dois savoir d'où tu viens.’’, lui avait-elle énoncé, posément, lui signifiant leur pleine et totale acceptation au sein de la Terre de Liberté alors qu’il lui avait livré son cœur, exposé ses tourments. ‘‘Es-tu prêt à vivre enfin ? Prêt à te défaire des serres qui te retiennent ? Fuir des ombres pour lesquelles durant trop longtemps tu as courbé l'échine ?’’. Cela pouvait-il être les paroles d’une personne mal intentionnée ? De quelqu’un prêt à les trahir, ou à les vendre au plus offrant ?

**Ta naïveté pourrait causer ta perte un jour, Marek. En dépit de toute l’excessive bienveillance affichée par cette Sraoshaï, la dragonne, Seqenenrë, porte en elle le souvenir d’une lignée liée au Kaerl Ardent.**

La femelle, fière et mystérieuse, avait piqué son intérêt, pour autant qu’il voulait bien l’admettre, réveillant en lui le désir instinctif de prouver sa valeur et sa force d’âme. Asaleith ne s’attendait pas à croiser une compatriote dans cet avant-poste Valheru poussiéreux et oublié de tous. Il lui tardait que la nuit tombe pour aller la rejoindre dans cette partie de chasse qu’elle lui avait proposé. Ce serait aussi pour le Brun l’occasion de prendre la mesure de cette dragonne inconnue, d’essayer de déchirer les voiles de secrets dans lesquels elle s’enveloppait. Le moment de se révéler pleinement à lui. Peut-être alors, seulement, daignerait-il relâcher un tant soit peu sa vigilance.

« N’est-ce pas également notre cas, pourtant ? N’arbores-tu pas incrusté dans ton cuir même, la fierté de tes ancêtres Ardents, alors même que tu te trouves ici avec moi ? »

L’Ondin leva un regard mélancolique vers la haute voûte qui tenait lieu de plafond.

« Où que soit notre place, Leith, elle ne se trouve pas ici. J’en ai bien conscience. Mais en attendant, ne pouvons-nous pas profiter de ce répit qui s’offre à nous ? Dors en paix, mon frère, tant que tu le peux. Nous ne sommes qu’à l’aube de notre long voyage. »

Un grondement sourd et ironique accompagna un mouvement sec du bout de sa queue. Voilà que son Lié se mettait à le conseiller, comme si c’était lui, dragon, qui avait besoin de protection, de sécurité et de repos. Mais soit. Demain serait un nouveau jour. Demain, il serait toujours temps de découvrir le sort que le Màr Litsë et son désert implacable leur réservait. Quoi qu’il advienne, il ne laisserait plus Marek sombrer dans sa souffrance comme il l’avait fait jusque là. Plus jamais. Il se dresserait face à quiconque chercherait à le manipuler, face à toute personne qui entendrait le traîner plus bas que terre. Et ce, même si cela devait les chasser de ce Kaerl prétendument ouvert à toutes personnes désireuses de commencer une nouvelle vie, loin des codes de sociétés dans lesquelles elles ne se reconnaissaient plus.

**A ta guise. Mais gare à ne pas te perdre, petit homme. Tu as entendu la dragonne. Elle ne sera pas là pour sauver un Prêtre de Flarmya un peu trop curieux.**

D’un rire léger, son Lié se tourna vers lui, l’impatience, le plaisir de la découverte à venir illuminant ses traits habituellement ombragés.

« Elle peut-être, mais qu’en sera-t-il de toi ? »

Le Brun laissa échapper un reniflement audible, affectant de ne pas se sentir concerné et reposant sa tête sur ses pattes avant.

**Je compte bien suivre ton conseil et passer la journée à dormir, jusqu’à ce qu’il fasse moins chaud. Il semblerait que j’ai un rendez-vous important ce soir.**


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Rūna Sălv
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MessageSujet: Re: [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle   [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle Icon_minitimeLun 9 Nov 2020 - 0:34

[RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle 181118112528238217 . [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle Seqenenre
Sraoshaï Ter Altansarnannûn & la Cendrée Seqenënre

Gevorg Dabagian - Sad and Mysterious Armenian duduk
 

Le lendemain matin...


Assise en tailleur sur un large coussin de lin, les poignets reposant respectivement chacun sur un genou et les paumes ouvertes vers le haut plafond de ses appartements, Sraoshaï méditait en silence juste avant l'arrivée de l'aurore.
Ses paupières closes au dessus de ses orbes de grège apaisés inspiraient le reste de son visage à une Paix totale tel le masque d'une statue représentant la Déesse Mère Gaïa elle-même. Ses si longs cheveux de perle dévalaient tout son corps avec l'harmonie de chutes d'une eau pure le long d'un flanc de montagne, deux cascades lisses et soyeuses à l'écoulement seulement interrompu par une respiration incroyablement lente et calme. La Gardienne écoutait les derniers vestiges du silence de la nuit avant l'avènement d'un jour nouveau, laissant la brise fraîche de la sorgue effleurer ses épaules nues et le chant des oiseaux matinaux éveiller tous ses sens, uns à uns.
Ainsi établie au sein de son oriel ouvert, elle laissait Solyae s'éveiller et les Lunes prendre congé, animant peu à peu les pâles et ternes couleurs d'un ciel d'aube par un horizon rougeoyant d'embrasser le soleil. Les premiers rayons de ce dernier insufflèrent le chant de la Vie sur les terres arides du Grand Désert et Sraoshaï accueillit avec bienveillance leur chaleur qui inondait sa peau hâlée, chassant doucement la fraicheur et les ombres du crépuscule.
Un peu plus loin, dans une soucoupe en terre cuite émaillée d'indigo, brûlaient des écorces aux effluves d'agrumes dont les fumerolles légères s'accumulaient au sommet de la vaste arcade au dessus d'elle avant de se dissiper peu à peu, sans un bruit et à pas feutrés, à la manière dont elle quitta sa couche plus tôt ce matin. La demi-sang inspira les multiples fragrances de son univers avec sérénité pour ne relâcher qu'un frêle et long filet d'air entre ses lèvres, désireuse de se nourrir de tous les fruits du Kaerl des Libertés.
Elle inspira puis expira sans être interrompue, dix, quinze, cent fois peut-être. Son oreille attentive repéra le froissement des draps derrière elle et le pas plus lourd que le sien de son époux qui à son tour s'était levé. Il ne l'interrompit que par un baiser déposé sur sa chevelure de soie d'un blanc de cendre, volant à Sraoshaï un sourire placide pour seule manifestation extérieure dans sa méditation. A nouveau, elle inspira puis expira sans être interrompue, dix, quinze, cent fois peut-être, puis se leva, le corps et l'âme en paix.

Son esprit vagabonda vers celui de sa Liée qui en retour put la rassurer sur sa rencontre nocturne avec son Frère Brun et sur la survie de l'ondin malgré ses pérégrinations tardives. Chacun avait pu tranquilliser ses incertitudes à sa manière, car rien n'était dissimulé au Màr Litsë. Le jeune convive aurait pu arpenter les interminables couloirs du Kaerl ou le bourg auquel il était rattaché, animé de conteurs autour de feux de joie aux récits fascinant autant les enfants que les adultes ou de danses débordantes de vie rythmées par les percussions des tambours et les notes joviales des naïs. Loin des autres cruelles cités du Ssyl'Shar, une profonde allégresse régnait en ces lieux.
Mais aujourd'hui, Marek d'Ardiénor devrait affronter une toute autre aventure.

Sans aucune précipitation, Sraoshaï prit le temps de se préparer, revêtant simplement une ample tunique de lin gris et un pantalon ocre. Deux tresses dégagèrent son visage de sa chevelure laissée libre le long de son dos, puis elle s'en alla rejoindre le lieu de rendez-vous donné la veille à son invité. D'un même calme perpétuel, la demi-sang sillonna corridors et alcôves que son coeur connaissait aussi bien que ses propres veines. La pierre taillée et les murs d'argile lui murmuraient des histoires d'un passé lointain, tant par le souffle du vent qui s'y insinuait que par les brisures effritées des bas-reliefs qui tombaient au sol pour se mêler aux grains de sable rapportés de l'extérieur. Elle portait en son sein, en son ventre, les multiples étreintes de ce zéphyr ancestral, y puisant là toutes les vertus qui amenaient inexorablement les égarés à venir trouver chemin dans l'étreinte de ses conseils.
Sans chercher le moins du monde à taire son arrivée, elle approcha néanmoins tout naturellement à pas de chats et s'annonça pour ne pas effrayer l'ondin et son Lié, là en fervent protecteur de son bipède. Seqenënre, elle, veillait depuis son antre secrète.

« Bonjour, Nezvan. J'espère que la vie nocturne de la cité ne t'a pas empêché de trouver le sommeil du juste. Tu as dû découvrir ce matin le solide petit-déjeuner nécessaire à la poursuite de cette journée. Si tu es là ce matin, c'est que tu te sens prêt à recevoir ce qui va t'être dévoilé. »  

Après un regard entendu et sans virulence, elle détourna son attention vers le Brun possessif et défenseur, s'adressant à lui par la pensée du même ton rassurant qu'elle usa pour saluer l'ondin.

** Bonjour, Asaleith. Tu es évidemment le bienvenu et convié à ce qui attend la moitié de ton âme. Il ne s'agit pas seulement de son épreuve, mais aussi de la tienne d'une certaine façon. J'ose penser que vos parties de chasse avec ma Liée ont su apaiser quelques vagues de ta méfiance, bien que je la comprenne. **  

Ils se tenaient tous trois devant une vaste porte en bronze ciselée d'arabesques tantôt patinées tantôt polies et entourant la silhouette primitive d'un dragon de face, les ailes ouvertes. Bien que ne comprenant pas de serrure, elle semblait scellée par un sortilège  et impossible à ouvrir pour qui n'en possédait pas l'immatérielle clef. Mais à l'instant où Sraoshaï posa sa main sur la poignée lissée par un usage étonnamment régulier, les gonds émirent divers claquements et cliquetis secs qui annonçaient l'amorçage d'ouverture d'un verrou caché. La Gardienne poussa la lourde poterne d'un geste sûr, faisant brièvement grincer le métal dans un gémissement sourd, digne d'un lionceau interrompu dans sa sieste.
Là où tout le reste du Kaerl des Liberté baignait de couleurs chaudes, la pièce qu'elle dévoila par son action était peinte d'un bleu marin et de menues étoiles avaient été tracées avec des pigments d'un or safran, recréant avec la poésie propre à l'art Ssyl'Sharien une toile rappelant la nuit. De riches lanternes en laiton habillaient le plafond, toutes reliées par une fine chaînette du même alliage, comme retraçant une constellation oubliée du reste du monde. Peu à peu, une flamme s'alluma au coeur de chacune d'elles pour offrir un brin de lumière au travers du verre teint en jaune pâle, brisant les ténèbres de la pièce qui pourtant n'avait rien d'oppressant. Nul âtre ou fenêtre ne laissait importuner la sorgue imitée sous la haute chambrée, en revanche y trônait un immense miroir recouvert d'un drap plus sombre.
Sraoshaï, fugacement éclairée par la lueur des lanternes, avait des airs de Iolya dans un ciel d'encre alors que ses mains empoignèrent le pan de tissu qui dissimulait l'impressionnant miroir. D'un geste précis, et toujours sans emports, elle le fit glisser le long de sa surface lisse, soulevant quelques volutes de poussière et de sable qui retombèrent bien vite.
L'objet était cerné d'un montant ancien et du même laiton que la porte, hormis que l'usure ne semblait avoir aucune emprise sur la corrosion de son métal contrairement à cette dernière. On y distinguait aisément pareils décors précis qui l'ornementaient et le verre de son onde ne présentait pas la moindre aspérité. En revanche, le miroir ne reflétait rien, pas même la silhouette de la demi-sang qui se tenait face à lui, ne laissant entrevoir sur son étendue sans défaut que le même brillant d'une obsidienne polie. Il absorbait la moindre étincelle de lumière d'un appétit dévorant mais ne menaçait pas les êtres de chair et de sang qui osaient braver son regard de néant. Modelé par une puissante magie Valherue, l'objet avait dépassé le Temps et survécu à la chute de ses maîtres.

« Voici Tindhëlnyûr, le Miroir aux Vérités, un héritage de nos lointains ancêtres. Il n'est pas chargé de malveillance, contrairement à ce qu'il laisse penser, il provient simplement d'une époque empreinte d'incompréhension et de chaos. Tu n'as pas à le craindre. »  

Dans les apaisantes ténèbres des lieux, refuge d'ombre et de fraicheur au palais de Solyae, les iris d'étain tiède de Sraoshaï dansaient en compagnie des étoiles tracées çà et là à la peinture dorée. Son attitude engageante se coupla au calme irradiant de son timbre maternel alors qu'elle se tenait là, debout devant le duo d'Ardents en errance. Etrangement, en dépit de l'obscurité de la vaste chambre, de la demi-sang émanait une douce aura, un fugace halo, lui conférant l'apanage d'un spectre qui hantait les lieux. Pourtant il ne pesait ni lourdeur ni froideur propre aux fantômes, seulement le caractère solennel d'une entité veillant sur une ruine, seulement les nimbes d'une gardienne.
Sraoshaï revint sur ses pas pour fermer derrière eux la porte, repliant sur le trio le couffin protecteur de ce morceau de nuit en plein coeur du jour.

« Lorsque tu te sentiras prêt, tu pourras t'avancer face à lui. Pose la paume de ta main à sa surface, c'est la façon dont il préfère être salué. Ainsi, un lien se créera entre vous et il te montrera ce que tu dois accepter. Tindhëlnyûr ne t'offrira ce que tu désires voir, il ne donne que la Vérité, sans concession, sans influence tierce. »  

Sraoshaï, soucieuse de rassurer l'ondin, inclina le menton dans une forme de révérence, revêtant un sourire ni outrancier ni menteur. Une énigme trônait sur son visage lisse pourtant dénué de toute sournoiserie, une énigme propre à ceux qui s'exprimaient avec mystère et prospections sans détails.
Elle tendit sa main marbrée par les aléas du temps et ouvrit le bras comme pour présenter les quelques pas qu'il avait à faire pour se présenter face au miroir.

« Ton Lié peut bien entendu demeurer à côté de toi, mais tu seras seul pour tout affronter. Tu peux prendre le temps de prier, si tu le souhaites. Pour le reste, je serai là en compagnie d'Asaleith, je veillerai sur toi. Il ne t'arrivera rien. Une seule règle s'impose : tu ne dois en aucun cas détourner le regard de ce que tu verras, car la Vérité est entière et ne saurait être insultée en réfutant quelques unes de ses pages. »  

La demi-sang recula d'un pas, laissant place à Marek d'avancer. Elle patienterait le temps nécessaire.


Lorsque Marek avança, Tindhëlnyûr parut pétiller d'un éclat plus vif. Les flammes à la danse lascive des lanternes suspendues au dessus de lui faisaient ciller les ombres des motifs sculptés dans ses montants en métal d'un vieil or. Le verre en revanche, fidèle à lui même, ne reflétait pas la moindre étincelle, dévorant au contraire tout ce qui lui était présenté. Le noir opaque de ce portail vers le passé, le présent et l'avenir ingurgitait le monde avec appétit comme pour produire l'énergie nécessaire à ses révélations.
Malgré la chaleur grandissante entre les murs du Màr Litsë, la pièce demeurait incroyablement fraiche. Tindhëlnyûr, lui, irradiait d'une tiédeur tout aussi rassurante qu'inquiétante, traîtresse d'une étrange Vie dissimulée entre son verre et le voile d'argent sur lequel il reposait. Malgré son apparence inspirant la fuite, quiconque jetait un regard en son centre s'y sentait happé et nourrissait l'ardent désir de se noyer en ce néant qui n'attendait qu'un simple contact pour s'animer.
Le miroir semblait projeter toute son attention sur l'ondin telle une chouette avisant une souris à la faveur d'une nuit éclairée par les Lunes pleines. Il l'appelait, sans prononcer un mot.

*

Lorsque Marek apposa une main à sa surface lisse, une sensation de chute terrassa son esprit bien que son corps, lui, se figea. La pulpe de ses doigts et sa paume étaient scellées au miroir, inexorablement soudées et retenues quoi qu'il tentât pour se départir de cette entrave, condamné à subir les visions que l'artefact Valheru s'apprêtait à lui asséner. Tindhëlnyûr parut l'engloutir tout entier dans l'abîme, plongeant d'abord son âme dans d'étouffantes abysses dépourvues de tout, puis se saisissant de l'enveloppe charnelle de l'ondin comme une pieuvre attrapant une proie, comme un python s'enroulant autour de sa victime. Le miroir lui laisserait le temps de se débattre, quand bien même il ne pourrait pas bouger. Il lui laisserait le temps de hurler, quand bien même sa gorge ne produirait aucun son.
La Vérité fit alors abattre sa sentence matérialisée par un glaive aux tranchants les plus aiguisés du monde. Une projection de lui-même allait évoluer à sa place dans cet univers où la réalité côtoyait les mirages, mais Marek ressentirait tout de façon exacerbée.

*****Ayala apparut brutalement, transperçant le néant par tout l'éclat de sa lumière pure en dépit de son existence qui ne le fut pas. La mère de Marek flottait sous ses yeux, d'un réalisme époustouflant, tendant les bras vers lui pour l'amener à elle, le visage détruit par toute l'ampleur de sa douleur et de son chagrin. Ses pleurs et ses sanglots se répercutèrent dans l'esprit de l'ondin en un écho rappelant le tonnerre. Elle pouvait presque le toucher, il sentirait l'air qu'elle agitait par ses doigts envieux effleurer son visage, mais une invisible paroi les séparait sans le moindre espoir de les autoriser à s'étreindre.
L'ondine était couronnée d'une chevelure blanche argentée et d'une corolle de fleurs de printemps, pourtant sa peau avait l'apparence d'une statue de marbre oubliée au sein d'une nécropole abandonnée, le grain usé et fissuré à quelque endroit, creusant davantage les traits de son minois torturé. Des larmes roulaient le long de ses joues de pierre alors qu'elle exprimait toute l'affliction d'avoir ainsi abandonné son fils aux ténèbres de Rhaëg. Des mains noires aux griffes acérées agrippèrent et déchirèrent sa robe aux airs de linceul, mettant à nue la pauvre femme à la manière dont les hommes épuisèrent sa vertu alors qu'elle fut contrainte de vendre la sienne au plus offrant, du temps de son vivant.
Et, tout aussi brutalement qu'elle surgit au regard de son fils, les fleurs qui ceignaient son front fanèrent et se délitèrent, et un torrent de sang ruissela depuis le sommet de son front jusque ses pieds, maculant l'albâtre de son teint de morte par une rivière de grenat.
Derrière Ayala, la silhouette d'un homme trempé, des gouttes d'eau perlant tout le long de son corps, s'esquissa dans cet espace sans astres. Jezrien, son père, qu'il ne connut jamais.
Son visage était sec et amaigri, émacié, pétri de traits durs et coupants rappelant les corniches escarpées des Pics de Cendre. Le long de ses joues décharnées et de sa peau humide lézardaient des cicatrices telles des éclairs sur une toundra aride au ciel anthracite, dominé par un orage sans fin et prêt à balayer le Monde. Une chevelure d'un noir profond aux reflets irisés de bleu nuit terminait d'achever ce portrait sans chaleur tandis que l'homme arborait un air infiniment désolé, l'attention pleinement détournée vers l'ondine terrassée par l'affliction qui dépérissait sous son regard borgne.
Au loin, derrière l'inconnu, volait le spectre d'un dragon blanc auréolé de vermeil. La créature émit de longs grondements furieux, errant dans des cieux sans repères, puis fut transpercée de part en part par un tsalion de saphir et d'argent. Il s'évanouit dans les ténèbres en hurlant de douleur et l'homme autour duquel il planait fut contraint de porter ses mains à ses oreilles, ne supportant plus cet assourdissant tourment. Sa bouche s'ouvrit, tordue de supplice, sans prononcer le moindre bruit. Puis à son tour, le tsalion de saphir et d'argent l'empala du dos vers la poitrine, s'extirpant de son buste dans un fracas d'os et de chair meutrie. La pointe trempée de grenat luisait d'un éclat sinistre puis le mirage se fit poussière et s'éclipsa dans le néant.
Ayala émit un hurlement assourdissant avant de s'évanouir à son tour en une chimère de fumée emportée par la bourrasque de Tindhëlnyûr. Les bras de l'ondin parurent se refermer sur le vide alors qu'il tenta de garder près de lui celle qui l'abandonné si jeune. Et l'Ombre avala davantage l'esprit de Marek d'Ardiénor.

*****A l'emplacement où avait disparu le visage d'Ayala se forma celui d'une autre statue au granit inaltéré, cette fois ci : la déité qu'il vénérait depuis l'adolescence, Flarmya. La Mère des Dragons, la Déesse aux Larmes de Feu ne pouvant clairement apparaître à son regard sous celui d'une vulgaire mortelle revêtit les traits d'Aoatea, à la fois remède et plaie éternelle en le coeur de l'ondin. L'Archiprêtresse encadrée de sa somptueuse chevelure brune lui offrait un oeil sévère, inquisiteur, sondant l'âme et conscience de son disciple qui l'aima bien plus que comme une mère de substitution. On pouvait lire en elle une profonde colère nouvelle et de ses yeux d'un or prédateur fusèrent de virulentes flammes qui s'en vinrent laper le corps immobile de Marek alors qu'il se tenait toujours face au miroir. Par pitié qu'il désirait fuir !
Des flammes purificatrices aussi hargneuses qu'une meute de hyènes affamées, prêtes à dévorer le moindre éclat d'os pour subvenir à leur incommensurable appétit. Le violent baiser du feu épurateur noircit la peau de l'ondin pour peu à peu la transformer en charbon, un charbon nervé de braises dont il ressentirait toute l'immensément douloureuse brûlure. Il devint dans son entièreté une créature aux contours déformés par le passage du brasier sur sa chair, les poumons peinant à respirer, mordus par la fumée, la cendre et le soufre. En lui venait de naître un volcan qu'il était incapable de maîtriser. De sa peau noire saignait une lave qui s'en alla consumer Aoatea par vagues enragées. Et l'Ombre avala davantage l'esprit de Marek d'Ardiénor.

*****A nouveau, le vide. Un vide sidéral, un vide infini. Le silence du néant, le mutisme de l'abîme.
La cendre et la suie qui avaient maculé le corps de l'ondin se dispersèrent à la manière dont Ayala disparut. Le jeune homme était bien vivant et avait recouvré une enveloppe charnelle sans meurtrissure causée par le feu accusateur de Flarmya.
A nouveau, il tombait dans ce vide. Ce vide sidéral, ce vide infini. Pendant une durée qui parut durer une éternité.
Tindhëlnyûr lui fit alors serrer les mains autour du cou d'un homme. L'homme qui avait tué sa mère, brisé son crâne et son squelette par ses coups dictés de voix d'ivresse. Les phalanges de Marek s'effaçaient dans la chair de sa victime, ses doigts tremblaient et se crispaient en enlevant la vie à celui qui pour lui avait tous les atours d'un monstre. De sa peau suintait les gouttes de son propre venin alors que l'homme sifflait, crachait, mourait. Les yeux d'un bleu pâle de l'ondin ne pouvaient éviter les orbes révulsés et piquetés de sang de celui qu'il assassinait, l'âme entière emportée par la vengeance. Et lorsque la vie quitta enfin le bourreau de sa génitrice, ce furent ses mains qui se peignirent du plus profond des ébènes et un froid suffocant lui coupa le souffle. Une tâche qui remonta du bout de ses doigts jusqu'à ses poignets, puis ses avant-bras, ses épaules, sa gorge, son menton. Un noir glacial, un gouffre béant qui le dévora tout entier. Et l'Ombre avala davantage l'esprit de Marek d'Ardiénor.  

*****En litanie, cette infâme sensation de chute le saisit à nouveau, manquant de rompre sa poitrine.
L'ondin fut violemment plongé dans un océan polaire, atteignant le fond de cette sombre mer avec fracas. Tout en cherchant sa respiration, ses mains tâtèrent alentours et l'une d'elle se heurta à quelque chose qui le fit tressaillir, comme si son âme toute entière lui hurlait le danger. Son regard se reporta alors sur une autre projection de son propre corps allongé à sa gauche. Cet autre lui était mort, mort depuis longtemps. Malgré l'état délétère de son double, il distinguerait un Marek bien plus sombre qu'il ne l'était alors. Un reflet, un parfait opposé... Keram et non Marek.
L'homme avait de longs, de si longs cheveux de jais, une crinière qui encadrait un visage aux traits cent fois plus durs, au regard noirci par la fureur, à la bouche tordue par la haine. Ses membres étaient lardés de cicatrices et de plaies d'où perlaient quelques gouttes d'un sang rappelant l'encre, un sang qui dansait par le vas et viens des rouleaux qui balayaient lentement les fonds de cet océan. Keram était l'Ombre de Marek, à la fois ce qu'il aurait pu devenir s'il avait cédé aux ténèbres et à la fois une partie bien existante de lui, ensevelie par son courage à luter contre ses propres démons.
L'Ombre avait avalé Marek, puis l'Ombre l'avait recraché.
Une vague plus virulente dissipa Keram, une vague presque brûlante dans cette immensité de gel. Sous le corps balloté de l'ondin se forma doucement un courant qui peu à peu le remonta à la surface, sans violence, sans douleur. Plus il approchait de l'onde, plus les flots se firent doux et chaleureux et les ténèbres cédèrent place à l'aurore, un apaisant lever de soleil sur les abysses.
Enfin il put prendre une large bolée d'air. Son regard porta au loin, vers la rive, vers les falaises qui dessinaient la Baie d'Eau Claire. Sous lui s'élevait un vaste dôme de verre abritant le Màr Luimë, la cité engloutie l'appela à son tour, les bras ouverts.

*

Marek, le Marek réel et debout devant le Miroir des Vérités, pouvait désormais détacher sa main de la surface lisse de Tindhëlnyûr. Sa glace avait retrouvé son énigmatique manque de reflet mais, pourtant, le néant ne parut plus dévorer avidement la lueur des lanternes suspendues au dessus de lui.
Dans un coin de la pièce, non loin, Sraoshaï lui offrit le même sourire rassurant qu'avant son départ pour les mystérieux méandres de la Vérité. Elle s'approcha rapidement de lui, prête à amortir sa chute. Marek venait de vivre une épreuve difficile, celle d'affronter les diables tapis en son âme. Marek venait de les vaincre, un à un, le corps et l'esprit irrémédiablement allégés d'un poids immense.  

« Tout va bien. »


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Chevalier Dragon
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Marek d'Ardiénor


Date d'inscription : 25/02/2019
Sexe : Masculin
Présentation : URL
Messages : 45
RPs : 39
Race : Ondin
Âme-Soeur : Le Brun Asaleith
Fonction : Prêtre de Flarmya
Affiliation : Apolitique
Alignement : Loyal Neutre (Kaerl Englouti)
Ordre Draconique : Ordre Draconique Neutre (Kaerl Englouti)

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MessageSujet: Re: [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle   [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle Icon_minitimeDim 13 Déc 2020 - 18:08

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Le Brun Asaleith


Après de longues minutes à examiner les mille et uns détails que lui réservait l’alcôve, déchiffrant, parfois difficilement, les titres des vieux ouvrages de la bibliothèque, se laissant happer par l’histoire que les tapisseries pendues au mur contaient, l’Ondin avait fini par se laisser tomber sur le lit à baldaquin, assez large pour accueillir trois personnes. Enroulé sur lui-même, trônant au centre de la pièce, Asaleith s’était déjà endormi, sa respiration calme soulevant lentement son poitrail musculeux. Si paisible … Dans le curieux silence qui régnait au Màr Litsë, il aurait aisément pu être mépris pour une habile statue de bois peint. Son regard s’adoucit alors qu’il contemplait, non sans douleur, son frère d’âme, et songeait aux sacrifices, passés et à venir, que le Brun avait accomplit en son nom.

Un long frisson le parcourant, Marek se redressa, cédant aux appels insistants de son corps harassé. L’idée de s’immerger complètement dans l’eau fraîche lui paraissait hautement séduisante à cet instant précis : pour une fois, pour la première fois depuis bien longtemps, il n’avait aucun masque à maintenir, aucune autre tâche qui requérait son attention. Étrange sensation. Laissant tomber au sol ses vêtements, qui malgré tout le soin qu’il y avait apporté, avaient subit l’intrusion irritante d’une multitude de minuscules grains de sable, il se laissa précautionneusement glisser dans la baignoire.

Malgré lui, ses paupières ne tardèrent pas à se fermer, et il sombra bien vite dans un profond sommeil, ses traits anguleux se lissant alors que la tension qui le tiraillait en permanence relâchait son emprise. Un sommeil dépourvu de rêves, en périphérie duquel planait, fantômatique, l’ombre protectrice d’ailes brunes.

Lorsqu’il s’éveilla à nouveau, l’esprit embrumé, mais frais et dispos, le Prêtre ne sut dire combien de temps s’était écoulé. Enjambant le bord de la baignoire, il ne prit pas la peine de sécher avant d’enfiler les vêtements qui avaient été déposés là à son intention, s’attablant, pas encore tout à fait réveillé, pour apaiser son estomac qui criait soudain famine. Par dessus une coupe d’eau claire, il observa longuement le Brun, à présent étiré de tout son long, la tête reposant dans le creux de l’une de ses pattes. Un simple frémissement de sa masse écailleuse lui indiqua que son Lié s’était éveillé lui-aussi, mais qu’il ne comptait visiblement pas pour autant rompre son serment d’une totale inactivité jusqu’à la venue du crépuscule. Un sourire amusé étirant imperceptiblement ses lèvres, l’Ondin se détourna de lui pour se consacrer pleinement à son repas, dévorant fruits et viande séchée avec un même appétit.

Ce n’est qu’après s’être soigneusement rincé les mains qu’il s’autorisa à choisir l’un des livres à la couverture craquelée, dont les sujets, aussi variés qu’attirants, semblaient avoir été choisis spécifiquement pour lui. S’installant en tailleur sur le sol, le dos tout contre celui d’Asaleith, Marek se plongea ainsi dans la lecture curieuse de l’Histoire du Màr Litsë, de sa fondation jusqu’à nos jours. Les heures s’étirant pourtant, les unes à la suite des autres, il le remarqua à peine, page après page, jusqu’à ce qu’un mouvement de son frère d’âme ne le sorte de sa concentration.

**Je me demandais combien de temps tu serais capable de tenir sans bouger, le nez penché sur ces pattes de mouches. Ton amour pour les vieilleries ne cessera jamais de m’étonner.**

Haussant un sourcil patient, il referma le précieux ouvrage, en marquant la page d’un doigt.

« La meilleure façon de se fondre dans un nouvel environnement est de le connaître aussi précisément que possible, mon frère. Je pensais que tu serais d’accord avec moi. »

Un grondement bas se répercutant dans son corps au contact de son Lié, ce dernier s’étira, orientant sa lourde tête vers le passage étroit qui le mènerait à l’extérieur, naseaux palpitants. Le soleil se coucherait bientôt, et son rendez-vous avec la mystérieuse dragonne approchait.

**Je te fais confiance là-dessus. Je préfère juger les gens sur leurs actes et sur ce qu’ils cachent, et non sur les jolis contes qu’ils écrivent pour endormir la méfiance des gens. L’Histoire est écrite par les vainqueurs, jamais par les perdants.**

S’ébrouant, la silhouette du dragon se brouilla, laissant apparaître un homme à la stature musculeuse, deux iris d’un bleu perçant se dessinant au cœur d’un visage volontaire. Les mains en coupe, il se pencha par dessus la fontaine d’eau claire, s’abreuvant longuement sans un mot. Sans se retourner, le regard posé sur ses poings serrés devant lui, le Brun soupira finalement :

« Fais attention à toi si tu pars en excursion ce soir, petit homme. Nous ne sommes peut-être plus au Màr Tàralöm, mais ça ne veut pas dire pour autant que nous sommes en sécurité ici. Pas avant d’en savoir plus. »

***

La tête et le cou soigneusement enveloppés dans un foulard destinés à le protéger de la fraîcheur du soir, vêtu de la même façon que les autochtones, Marek avait déambulé pendant près d’une heure dans les rues animées de la cité des sables. Il lui avait paru plus sûr, pour l’heure, de ne pas chercher à s’égarer dans les corridors poussiéreux et oubliés du Kaerl, en dépit des mystères qu’ils recelaient certainement sur les dragons et leur passé en ces lieux. Se laissant porter par son intuition, il avait admiré les lanternes et lampions soigneusement ouvragés qui illuminaient les rues, apportant leur douce lumière sur des scènes du quotidien des citoyens de Terre de Liberté.

La nuit avançant, à la faveur de températures plus clémentes, la vie avait semblé reprendre pour les habitants. Particulièrement accueillants, visiblement habitués aux étrangers, ces derniers l’avaient à de multiples reprises interpellé dans leur langue chuintante, tout sourire en lui proposant, qui quelques poignées de fruits séchés, qui des galettes de blé encore brûlantes, quand il ne s’agissait pas d’une tasse de thé à la menthe, agréablement parfumé.

Curieusement touché par leur apparente sympathie, il n’en avait pas moins gardé pour autant une certaine réserve, les avertissements d’Asaleith résonnant encore dans son esprit. Ainsi, jugeant plus sage de ne pas se faire remarquer plus avant, il avait fini par faire retraite dans ses appartements, s’allongeant sur son lit, yeux grands ouverts à contempler le plafond obscur, accompagnant par la pensée la progression de son frère d’âme.

Une fois suffisamment éloigné de la cité, le Brun avait repris sa forme originelle pour s’envoler rejoindre la cryptique dragonne, liée de la gardienne. Seqenënre. Lorsqu’elle avait révélé sous ses yeux la véritable nature de sa parure d’écailles, couleur de cendre, le sens de ses paroles avait soudain fait jour en eux, en même temps qu’une inévitable suspicion. Si la composition du Concile et encore plus, la couleur du lié d’Alauwyr Iskuvar, Seigneur du Màr Tàralöm, n’était pas un secret, qu’une telle information soit parvenue ici, au plus profond du désert … Cela soulignait à quel point les échanges entre Tol Orëa et le Màr Litsë s’étaient accentués cette dernière année.

Qu’en était-il alors de leur identité, pas tout à fait tenue secrète – car après tout, Asaleith s’était présenté sous son véritable nom – mais pour autant pas pleinement révélée ? Sraoshaï et sa liée savaient-elles qui ils étaient réellement ? Quel risque cela représentait-il pour eux ?

C’est sur ces pensées troublées que le Prêtre de Flarmya s’était endormi, laissant son Brun à sa chasse nocturne en compagnie de l’autre dragonne, lui confiant le soin d’en tirer le plus d’informations possibles.

Et ce n’est qu’une fois l’aube venue qu’il s’éveilla à nouveau, plus reposé qu’il ne l’avait été depuis bien longtemps.

***


Asaleith assis en sphynx à ses côtés, Marek avait patienté, saluant mentalement la course de Solyae et le commencement de ce nouveau jour, rendant grâce au père de Flarmya. Sraoshaï avait parlé d’une épreuve, d’un prix, d’un tribut à payer pour accéder à la vérité et au savoir, sans s’étendre pour autant sur leur nature. ‘‘Savoir d’où l’on vient pour connaître où l’on va’’, avait-elle énoncé. Si l’idée de se soumettre à de nouvelles expériences difficiles ne le réjouissait pas totalement, le fait de se savoir libre de s’y présenter ou non l’avait rassuré. N’était-il pas venu au Màr Litsë pour recevoir une guidance et un éclairage sur le chemin que les Dieux avaient décidé pour lui, après tout ? N’avait-il pas, pour cela, été prêt à en payer le prix légitime, à en assumer les conséquences ? Pour enfin pouvoir comprendre et connaître, quelle était sa place en ce monde … Quel était le destin de son âme ? Aoatea avait-elle eu raison de l’envoyer dans l’enfer du Kaerl Ardent ? Appartenait-il réellement à cet univers de flammes et de sang ? Tant de questions qui restaient sans réponse, en dépit de ses ferventes prières …

Quand enfin, la gardienne paru, aussi sereine et paisible que la veille, il fixa un regard déterminé sur elle, sentant en son fort intérieur le soutien silencieux de son Lié. A ses salutations, l’Ondin s’inclina à demi, respectueusement, une main au niveau du cœur, cachant mal néanmoins un infime sursaut de surprise lorsqu’elle l’appela Nezvan. Un grondement sourd, réprobateur, de son Brun le ramena aussitôt à la réalité, lui rappelant que c’était ainsi qu’il s’était présenté hier lors de leur arrivée.

« J’ignore si je suis prêt à accueillir ces vérités qui me seront révélées, mais je ne suis pas venu ici pour renoncer. Je me confronterai donc à cette épreuve que vous me proposez, si c’est ainsi que vous l’entendez. »

Puis, sans bouger de sa position, la tête haute et les prunelles chatoyantes d’émotions contradictoires, Asaleith souffla à son tour :

**Seqenënre s’est révélée une hôte fascinante, quoi que restant bien difficile à cerner. Je resterai bien évidemment aux côtés de mon Lié durant tout le temps que durera sa mise à l’épreuve, et je vous sais gré de ne pas avoir tenté de me l’interdire, sans quoi nous nous serions retrouvés face à un grave désaccord.**

En dépit de sa politesse tranquille, les paroles du dragon recelaient une subtile nuance d’avertissement, signifiant qu’il ne relâcherait pas un seul instant sa garde. Ainsi se mirent-ils en route, suivant la silhouette gracieuse de Sraoshaï jusqu’à une imposante porte de bronze, abondamment décorée, et en apparence hermétiquement scellée. Nulle serrure, nulle poignée n’apparaissait à la surface du métal, et Marek échangea un bref regard avec Asaleith, sa peau se hérissant comme saisie d’une sombre prémonition. Il y avait là une magie oubliée à l’œuvre, comme le confirma le geste de la gardienne, qui, effleurant délicatement le battant, lui insuffla un mouvement propre qui aurait paru impossible quelques secondes auparavant. Pivotant lentement vers l’intérieur, la porte révéla une salle obscure à la décoration mêlant les profondeurs marines aux richesses du ciel nocturne.

Un pas après l’autre, prudent, il pénétra dans la salle, son frère d’âme sur ses talons, levant les yeux vers les lanternes suspendues qui s’illuminaient une à une, ravivant l’éclat des peintures d’or ornant les murs. Aucune fenêtre, aucune autre porte que celle par laquelle ils avaient pénétré, aucun contact possible avec l’extérieur. Portant une main à son cou, la respiration courte, ses doigts se contractèrent sur le fin tissus de sa chemise, ressentant soudain tout le poids de la roche au dessus de leur tête, sentant courir sur sa peau le pouvoir ancien, encore endormi, qui résidait en ces lieux.
En dépit du calme inébranlable toujours affiché par Sraoshaï, il ne put empêcher ses entrailles de se contracter lorsque son regard rencontra la surface opaque du miroir qui venait tout juste d’être dévoilé. Il semblait avaler toute lumière, et son chant, inaudible et avide, irrésistible là tout juste à la limite de sa conscience, résonnait en échos déformés, l’appelant et l’attirant vers lui.

La voix de Sraoshaï brisa le charme, et il cligna des paupières, confondu, tandis que se dressait entre eux le nom de l’artefact. Tindhëlnyûr, le Miroir aux Vérités. Son épreuve. Un rire nerveux enfla en lui, immédiatement refoulé, et il lutta contre l’envie pressante de faire demi-tour. Il était trop tard pour faire marche arrière à présent. Trop tard pour fuir. Il ne l’avait que trop fait durant toute sa vie. Il était temps pour lui d’affronter ses démons en face.

Derrière lui, Asaleith restait silencieux, gardant pour lui les sinistres réflexions que lui inspirait la situation. Le choix appartenait à son frère d’âme. Le dragon ne se jugeait aucun droit de décider à sa place de la voie à suivre, quand bien même n’avait-il qu’une envie, celle de se saisir de lui et de quitter cet endroit qui paraissait lui inspirer tant de crainte.
Sa prescience, erratique, pouvait se révéler don tout autant que malédiction. Et en cet instant, il était difficile pour lui de trancher entre les deux. Sa magie résonnait-elle avec celle du miroir ? Trop tard, trop tard pour reculer.
Dans un chuintement léger, la porte se referma, scellant la pièce sur une obscurité à peine troublée par la flamme tremblotante des lanternes, et la gardienne, un sourire apaisant sur les lèvres, poursuivit ses explications. Ses griffes éraflant le sol, Asaleith la toisa, luttant contre la rage aveugle que lui inspirait ce masque d’apparence si douce et maternelle, pourtant drapé dans un mysticisme énigmatique.

**Marek ...**

Caressante, à peine plus insistante qu’un murmure, sa conscience vint effleurer celle de son Lié, mais déjà, il ne paraissait plus l’entendre, captivé par le miroir, s’avançant vers lui, ses doigts frémissant tendus vers la surface crépusculaire de l’artefact. Bien malgré lui, sa paume vint s’aplatir dessus, tout juste tiède sous sa peau en dépit de la fraîcheur de la salle qui les accueillait. L’espace de quelques battements de cœur, rien ne se produisit, puis, avec la violence d’un ouragan tropical, les visions affluèrent dans son esprit.
Tout son corps s’arqua, ses muscles soudain tendus à se rompre, le tonnerre éclatant à ses oreilles. Il ne contrôlait plus rien, ni son corps ni ses pensées, affolées, éparpillées comme une nuée d’oiseaux effarouchés. Il chutait, encore et encore, dans un gouffre si profond qu’il lui semblait que sa déchéance se poursuivrait pour l’éternité. Il voulut hurler, sa douleur, sa peur, pour appeler à l’aide, qui que ce soit, pour déchirer le néant et revenir à cette réalité qui lui échappait, mais de sa bouche entr’ouverte ne s’échappa aucun son.

Tranchant l’obscurité, sa mère lui apparu, figée dans une perfection sculpturale, couronnée de fleurs de printemps, tendant désespérément ses bras blancs vers lui, les larmes sillonnant ses joues, son visage ravagé par une peine si profonde … Pendant une seconde, il cru qu’il pourrait l’atteindre, que leurs doigts pourraient se joindre. Il avait tant rêvé de ce moment ! Mais quelque barrière invisible, inexpugnable, se dressa entre eux, et il ne put rien faire lorsque des serres d’obsidienne, cruelles et sans pitié, vinrent dénuder son corps, mettant au jour sa peau blâfarde, si pâle, si froide, froide comme la mort, griffant sa chair de marbre, qui sous leurs assauts répétés se fissurait lentement … Dans une brusque déliquescence, les fleurs auparavant vives et colorées se mirent à pourrir et à se déliter, avant que ne vienne se mêler à l’expression de son chagrin des torrents rubis, souillant un peu plus son visage pourtant si doux et innocent.

L’horreur le saisit devant telle vision, mais il ne sut en détourner les yeux, alors que se dessinait, à quelques pas derrière elle, la silhouette d’un homme guerrier, quoi qu’arborant une expression profondément tourmentée, torturée, son affliction gravée à même son visage fier. Terribles cicatrices révélatrices de son vécu … Et dans son ombre, ah, dans son ombre au parfum de cendre et d’iode mêlés, battaient deux ailes d’opales, à la blancheur nuageuse trompeuse, tandis que sur eux s’abattait l’orage, des éclairs tranchants accompagnant un déluge d’une rare violence, chassant au loin la douce brise marine incapable de lutter contre le déchaînement des éléments. Cet homme, il ne le connaissait pas, il en était certain ; mais il le reconnaissait cependant. Il se reconnaissait dans les angles ombrageux de son visage, dans l’éclat bleu nuit de sa chevelure en bataille, dans l’amour éperdu qui brillait, féroce, dans son iris borgne lorsqu’il contemplait Ayala. Son père. Alors, il l’avait aimée ! Puis, brutalement, le dragon blanc furieux qui planait au dessus de lui fut abattu d’un coup sec, un tsalion richement orné le transperçant de part en part. L’homme se tordit de douleur, portant les mains à ses tempes, un hurlement silencieux de terreur s’échappant de ses lèvres, avant que le tsalion ne vienne le frapper lui aussi, sa pointe enduite d'un ichor grenat par trop sinistre. Les uns après les autres, brisées par l’affliction, les silhouettes s’évaporèrent, dragon, homme et femme, réduits à l’état de poussière, dans une volute de fumée paresseuse bien vite avalée par le miroir magique. Trahison ! Morts, tous morts !

Tombant à genoux, la tête baissée mais les yeux toujours aveugles, sourd aux appels angoissés d’Asaleith, Marek priait, priait en son fort intérieur, pour que son supplice prenne fin. Car ses doigts, aux jointures blanchies et tremblantes, ne parvenaient toujours pas à se détacher de Tindhëlnyûr.
Lorsque Flarmya lui apparu, dans toute sa gloire divine, une fragile étincelle d’espoir s’alluma en son cœur, uniquement pour se voir bien vite balayée lorsque la Mère des Dragons revêtit le visage d’Aoatea. De ses iris dorés semblaient émaner le feu du jugement, et il se sentit renvoyé à sa place d’enfant, d’adolescent rebelle mais transi d’un amour impur, possessif, d’un amour qui ne devait ni ne pourrait être assouvi. Les flammes l’engloutirent, juste punition pour qui n’avait su garder sa place, n’avait su détourner son âme des désirs propres à son existence mortelle. Se lançant à l’assaut de son corps, léchant sa peau comme tout autant de serpents affamés, le feu mordit sa chair, et il s’y abandonna, le regard rivé dans celui d’Aoatea, et tout en implorant sa pitié, ses larmes s’évaporait à peine échappées de ses yeux. Le brasier le consuma tout entier, la douleur bien trop absolue pour qu’il puisse s’étonner de la ressentir encore, et la lave jaillissant de ce qui subsistait encore de son corps vint s’enrouler autour de l’Archiprêtresse, jusqu’à la faire disparaître entièrement. Perdue, hors de portée, peut-être à jamais.

Puis le néant, à nouveau. L’obscurité totale. De celle que l’on ne rencontrait qu’au cœur même de l’Interstice. Etait-ce là la nature de son âme ? Privé de ses sens, ce qui était en soi une bénédiction après ce qu’il venait de vivre, il assista, impuissant, à la répétition bien huilée de son tout premier péché. Une mémoire qu’il avait souhaité oublier, de toute force. L’homme, ivre mort, encore penché sur le corps sans vie de sa mère. Le soûlard n’avait rien vu venir, n’avait su prendre au sérieux la menace que représentait ce garçon, s’esclaffant encore de voir ses phalanges venir se serrer autour de son cou. Il n’avait réagit que bien trop tard, au moment où l’air avait commencé à lui manquer, au moment où il s’était senti étouffer, réalisant seulement ce qui était en train de se produire.
Les yeux rivés sur sa victime, lèvres retroussées par la rage vengeresse qu’il avait éprouvé alors, il avait serré, serré encore, savourant la sensation de ses doigts s’enfonçant dans cette chair répugnante, de sa toxine se répandant en lui. L’homme s’était soudain fait aussi inerte et lâche qu’une poupée de chiffon, et le garçon qu’il avait été contempla avec épouvante les taches sombres, qui se propageait de ses mains vers le haut de ses bras, gagnant petit à petit l’ensemble de son corps. Le sol s’ouvrit sous lui, et il bascula à nouveau dans l’abîme, vers ces enfers qui attendaient, selon les récits mythiques, ceux qui s’écartaient du chemin de la lumière. Peut-être était-ce sa place, finalement ?

Au sein de l’ombre se dessina progressivement une forme indistincte, allongée dans un sommeil de pierre, protégeant un catafalque de marbre noir veiné d’un or rouge, sanglant. De la pulpe de ses doigts, il déchiffra le nom qui y était inscrit. Keram. Marek. C’était lui … Sans l’être réellement. Car s’ils se ressemblaient comme des jumeaux, l’homme endormi lui paraissait bien plus usé, plus amer, un pli haineux animant ses lèvres pleines, son corps marqué par les vicissitudes de la vie. Le venin courait librement dans ses veines, il le savait, pleinement maîtrisé, et maintes fois utilisé pour soumettre, soumettre à sa volonté ceux qui n’avaient eu la force de lutter. Son âme appartenait à l’Ombre, car il lui avait pleinement cédé, faisant corps avec ses démons. Était-ce ce qu’il était voué à devenir ?

Il le contempla longuement, résigné, lui qui reposait au fond de cet océan gelé. Il faisait froid à présent, si froid … Le chant lointain d’un dragon, triste lamentation, vint troubler la tranquille fatalité de la scène, et il releva doucement la tête, en cherchant la source. Par dessus les notes fragiles de la complainte, se fit entendre le bruit du ressac, faiblement tout d’abord, puis de plus en plus intense, jusqu’à ce qu’une vague, immense, de plus en plus haute, s’approchant à la vitesse d’un dragon en vol, ne s’abatte sur lui, l’emportant au loin.
Lorsque la mer se retira enfin, le soleil brillait sur les falaises de la Baie d’Eau Claire, un air vif et agréable emplissant agréablement ses poumons. Il flottait au dessus de ce paysage, âme désincarnée, et il lui suffit d’une simple pensée pour piquer vers les flots cristallins, vers la cité sous-marine protégée par son dôme, accueillante, paisible, loin de l’atmosphère délétère de sa sœur ardente. Il y avait là une saveur de conclusion, de gratitude et de reconnaissance, comme une promesse d’un futur plus clément … S’il se décidait à emprunter ce chemin.

Le charme rompu, l’Ondin bascula en arrière, livide et inconscient, et fut immédiatement entouré par l’étreinte protectrice des bras d’Asaleith, qui, replié sur la frêle carcasse de son Lié, fit face au sourire rassurant de Sraoshaï. Ses iris céruléens brûlaient de colère dans son visage orgueilleux, et il était clair qu’il devait produire un effort conséquent pour se retenir de se jeter à sa gorge. ‘‘Tout va bien’’ ? Comment osait-elle lui jeter ce mensonge en pleine face, après les souffrances atroces que Marek venait d’endurer ? Les dents serrées, le Brun gronda tout bas :

« Est-ce votre façon d’accueillir ceux qui viennent quérir vos conseils ? Vous saviez ce qui allait se produire. Est-ce là votre conception d’une aide plus clémente ? Quelle magie maudite avez-vous osé utiliser sur lui ? Je jure que s’il en garde de quelconques séquelles, nous n’en resterons pas là, gardienne. »

Au fond de lui lui tourbillonnait une véritable panique, désagréablement aiguillée par l’acide culpabilité de ne pas avoir pu, une fois encore, protéger son frère d’âme. La respiration de ce dernier avait beau être calme et apaisée, il ne serait pas rassuré tant qu’il ne serait pas debout et fermement dressé sur ses pieds.


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Rūna Sălv
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MessageSujet: Re: [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle   [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle Icon_minitimeDim 31 Jan 2021 - 21:35

[RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle 181118112528238217 . [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle Seqenenre
Sraoshaï Ter Altansarnannûn & la Cendrée Seqenënre

Un murmure désincarné, un ricanement qui n'émanait d'aucune gorge... Le miroir d'obsidienne paraissait pourtant bien se moquer de sa proie dont il venait tout juste d'aspirer l'âme le temps de quelques respirations. Il la lui rendit après s'être gargarisé de ses ténèbres et sa noirceur, concédant à en prélever quelques bouchées en révélant ces dernières à son regard qui avait trop longtemps été privé de voir.
L'artefact valheru était plus qu'un simple objet, en lui résidait un esprit. Celui-ci avait, à la fois hélas et heureusement, le vice et la fatalité que son créateur lui insuffla jadis. Par ces préceptes, le Miroir aux Vérités était d'une incommensurable et terrible Justice : en offrant aux regards aveugles des visions par trop souvent muselées de l'esprit de ses visiteurs, il se repaissait de la bile, du fléau et des malédictions charriés par ces coeurs présentés face à lui. Il purifiait, avec violence certes, mais l'assainissement était son but, son art, sa raison d'exister. Un tel objet se devait d'être nourri, il valait mieux qu'il se contentât d'ombres douloureuses que de chair et de sang... Ainsi toutefois, le Miroir blessait du premier revers de la main mais s'en venait ensuite effleurer la joue meurtrie pour en ôter la rougeur. La brûlure, elle, demeurait, pour le meilleur comme pour le pire.
Alors, tel un alligator repu, Tindhëlnyûr s'en retourna dans le lit de sa rivière mystique, sous l'onde un peu plus lisse à chaque seconde que représentait le voile entre le monde des Vivants et celui des Morts. Dans l'éclatante lourdeur de la petite pièce, il était presque possible de l'entendre gargouiller et tourner en rond dans son nid le temps pour lui de trouver une position confortable afin de s'assoupir après pareil repas. Une fois qu'il eut fermé les paupières, toute la chambre s'imprégna d'une lumière recouvrée, comme avant son "arrivée."
Là où le métal de son montant avait vibré à l'instant où l'ondin pénétra les lieux, là où sa surface sans aspérité rappelant le verre avait vrombi, il ne restait plus qu'un miroir.

Les flammes logées au coeur des lanternes suspendues au dessus d'eux se ragaillardirent pour mieux illuminer la chambre, victorieuse d'avoir une nouvelle fois gagné face aux appétits du miroir. Elles reconquirent les lieux avec véhémence, comme des biches regagnant les champs après la saison de la chasse, comme des moineaux revenant en chantant après avoir vu s'éloigner le chat.
A l'image de sa gardienne, le Kaerl des Libertés était un perpétuel cycle entre l'Ombre et la Lumière, entre le Bien et le Mal, l'un comme l'autre nécessaire à l'instauration d'une certaine harmonie. Cette dualité était perceptible le long du visage de la demi-sang qui demeura de marbre face aux invectives justifiées du Brun paniqué, lui offrant tout le lisse d'une mine rassurante bien que l'étain de ses iris s'assombrit. Et, comme souvent, ce fut sa Liée qui porta par un verbe mordant les pensées de sa bipède.

« - Et je te jure que si tu profères encore quelque menace à son égard, mes crocs n'auront aucune clémence à ouvrir ta gorge. La jeune fille d'apparence frêle agrippa Asaleith par le col et le plaqua au mur derrière lui sans la moindre difficulté, les yeux rougeoyants de fureur. Tu es bien sot de penser qu'en ce bas monde quoi que ce soit soit offert sans coût. C'est en ayant trop donné à ton Lié, en l'ayant trop conforté dans ses choix, en l'ayant depuis tant d'années protégé dans un berceau d'illusions qu'aujourd'hui la leçon a été si douloureuse. Ne crois pas qu'il est le seul responsable de sa souffrance, tu en es tout autant responsable que lui.
- Seqenënre. Le ton de Sraoshaï se fit ferme, sans appel. »

L'Impératrice Noire peinte de cendres lâcha doucement la tunique de son frère, les mâchoires crispées, l'oeil fiévreux. Ses doigts s'ouvrirent lentement pour mieux en dérouler les phalanges, et après une profonde inspiration dont elle s'aida pour chasser sa fureur, son ton se fit plus calme. Son âme se renfrogna contre celle de sa bipède, qui n'avait pas cillé, comme cherchant un refuge sempiternel pour ne pas céder à ce qu'elle qualifiait de ses "bas instincts" de fille de Reine Incarnate.

« Pardonne moi, mon Frère. Ceci devait malgré tout être dit. »

La main hâlée de la demi-sang vint se reposer sur l'épaule de Seqenënre de la même manière que son âme s'étendit sur la sienne dans cet élan, tel un baume appliqué sur une brûlure. Presque immédiatement, les rugissements qui rongeaient le for intérieur de l'Impératrice sous forme humanoïde se turent, à l'image de créatures nocturnes chassées par la clarté du petit matin.
La fermeté précédente céda dès lors à tout le caractère irrévocable et sans jugement de ses propos.

« Ma Soeur a raison, Asaleith. Il n'est jamais de plaisante vérité qui se laisse écouter et entendre, seuls les mensonges le font. Ton bipède a été trompé par la Destiné, il s'est fourvoyé en s'en remettant aux paroles d'autrui à défaut d'écouter son propre esprit. Il a seulement dévié de sa route pour éviter des dangers trop effrayants ou trop difficiles à affronter, se perdant ainsi dans une forêt qui l'est d'autant plus. »

Sraoshaï lova sur l'ondin évanoui un regard baigné d'un mélange d'empathie et de fatalité, de ceux qu'on sculptait sur les visages des statues représentant Flarmya ou le symbole de la Mère Nourricière. Son air ne changea pas lorsqu'elle s'en retourna à contempler le Brun, pas le moins du monde décontenancée par sa rage et son fiel.  

« Je comprends évidemment ta colère, elle est légitime, et n'est que le reflet de ta peur. Sache seulement que ton Lié à souffert par nécessité, comme on emploie du fer chauffé à blanc pour cautériser une plaie. Tindhëlnyûr a aspiré une partie de ce Mal comme on aspire le poison d'une morsure de serpent. A compter d'aujourd'hui, il ne saignera plus de son passé, il ne lui restera qu'à cicatriser. Et tu devras être à ses côtés. Ton Lié va enfin commencer à vivre, accueille l'air de ce nouveau souffle et chasse le soufre des miasmes délétères de ce qui n'est plus. »  

De nature prudente, Seqenënre s'était interposée entre son âme-soeur et son Frère, adoptant une position plus arquée qu'à l'accoutumée, la tête légèrement rentrée dans les épaules. Bénie d'un âge plus mûr que son cadet, l'Impératrice Noire avait la sagesse de ne pas oublier que le Brun était issu du Kaerl Ardent et pouvait par conséquent se montrer impulsif, voire revanchard contre l'état dans lequel se trouvait son Lié. Seqenënre sonda brièvement l'esprit de Nezvan pour s'assurer qu'il n'était qu'assoupi, terrassé par l'épuisement de son épreuve.

« Ton Lié a besoin de repos. Il se peut qu'il dorme toute une journée ou toute une semaine. Nous viendrons vous saluer à son réveil, quand ton coeur sera moins lourd de la peur de le croire perdu. »

***


Une aube, puis une autre, peut-être même une troisième ou une énième... Au loin à la cime des dunes modelées de grains d'or, sur le Grand Désert s'élevait timidement le rouge baiser de Solyae déposé aux joues de sa mère, Gaïa.
Ce matin là, les températures étaient particulièrement clémentes, annonçant presque un semblant d'hiver dans ces contrées d'un perpétuel été. Et, assise en tailleur sur un large coussin de lin, les poignets reposant respectivement chacun sur un genou et les paumes ouvertes vers le haut plafond de ses appartements, Sraoshaï méditait en silence juste avant l'arrivée de l'aurore. Il en était ainsi depuis des décennies, depuis des siècles semblait-il.
Dans un cycle paisible d'inspirations et d'expirations lentes, la demi-sang fut doucement rappelée à la réalité par les caresses spirituelles de sa dragonne.

** Il est réveillé. **

Sans hâte, sans empressement, Sraoshaï se lava puis se vêtit, et parcourut encore les dédales de couloirs qu'elle connaissait si bien. Seqenënre l'attendait aux abords des appartements où l'ondin et le Brun furent installés, quelques jours auparavant. Une fois ayant échangé quelques habituelles tendresses par la danse de leur âme jointe, les Soeurs pénétrèrent l'entrée en en soulevant l'épaisse tenture qui servait de cloison. La dragonne émit quelques pensées à l'encontre de son Frère pour le prévenir de leur venue, sans articuler de mots à proprement parler, seulement d'un dialecte seulement connu de leur race.
Côte à côté - quoique l'Impératrice se tenant légèrement en avant, au cas où -, elles s'avancèrent jusqu'à la chambre du jeune homme, puis Sraoshaï rompit le silence en s'annonçant par un nom qu'elle n'appris ni de la bouche de l'un ou de l'autre.

« Bonjour Marek d'Ardiénor. Accueille ce premier jour qui démarre ta nouvelle vie. »


.:: Qu'ils nous haïssent pourvu qu'ils nous craignent ::.
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Marek d'Ardiénor
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MessageSujet: Re: [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle   [RP] Au son du carillon tinte une vie nouvelle Icon_minitimeDim 28 Fév 2021 - 15:30

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Le Brun Asaleith


Murmures d’outre-tombe. Un froid mordant, comme si une porte avait été ouverte sur les Limbes. La surface crépusculaire du miroir, avide et insatiable, semblait absorber toute lumière, toute vie. Comment pouvait-il seulement lutter contre la présence ancienne et puissante qui habitait l’artefact ? Puis alors même qu’il s’apprêtait à céder, à laisser le monstre pénétrer plus profondément dans les recoins les plus obscurs de son âme, sa domination sur son esprit se relâcha. Brusquement, comme une bougie que l’on souffle, la conscience que l’Ondin avait de Tindhëlnyûr s’évapora. Ses doigts quittèrent la surface du miroir, et il s’effondra, rattrapé in extremis par Asaleith.

Il n’eut que le temps de souffler le nom de son Lié, confus, avant de sombrer dans les ténèbres d’un oubli réparateur. Voyant son frère d’âme plonger dans les eaux troubles d’un lourd sommeil, il était difficile pour le Brun de juger s’il s’agissait réellement d’un juste repos ou bien d’un coma vertigineux, résultant de sa confrontation avec une magie maudite et oubliée. Ses iris se teintant lentement d’un rouge rubis, ses pupilles s’étrécirent, rappelant sa véritable nature. Seule la pensée du danger qu’il ferait courir à Marek en agissant ainsi le retenait d’aller engager physiquement la gardienne et sa dragonne.

A la place, mâchoires contractées pour contenir sa rage, il se contenta de les apostropher crûment, l’intonation cinglante et le regard brûlant. Était-ce là l’hospitalité que le Màr Litsë fournissait à ceux qui, égarés et en quête de libération, venaient rechercher sa guidance ? Son étreinte se resserra convulsivement sur le corps frêle de son Lié, et il jugula difficilement la panique qui menaçait de le submerger. Combien de fois encore devrait-il se faire le spectateur impuissant de sa souffrance ? Combien de fois devrait-il se soumettre à la piqûre cruelle du regret et de la honte, celle de n’avoir su protéger et guider la moitié de son âme ? Combien de fois avant que Flarmya, pourtant si chère aux yeux de Marek, ne juge que la leçon était définitivement acquise, pour l’un comme pour l’autre ?

Impassible face à sa détresse, son visage serein illuminé d’or par la flamme hypnotique des lanternes dansant au bout de leur chaîne, Sraoshaï le fixait avec toujours la même compassion, la même équanimité, au point que le Brun se prit soudain à la haïr, elle tout autant que la Déesse Mère au nom de laquelle son Lié avait enduré tellement au cours de sa vie. L’Elfe et la divinité se fondirent en une seule et même figure détachée, froidement stoïque, et un grondement sourd, menaçant, vint prendre naissance au creux de sa gorge.

Ainsi ramassé sur lui-même, protégeant le corps inanimé de son frère d’âme entre ses bras, Asaleith n’eut que le temps d’une trop brève réflexion avant que la Noire Seqenenrë ne vienne l’empoigner par le col. Aussi délicatement que possible étant donné les circonstances, il laissa son Ondin reposer contre le sol, et se redressa à demi pour mieux accueillir le contact agressif de la femelle. La pièce était trop étroite pour qu’ils puissent s'affronter sous leur forme originelle, et il souhaitait plus que tout éviter d’impliquer Marek dans sa querelle avec l’autre dragonne. Car sous sa fallacieuse apparence de jeune fille fluette, résidait dans son bras toute la force furieuse d’un enfant de Flarmya. Violemment, l’arrière de son crâne heurta le mur de pierre, et il grimaça, un instant avant que ses lèvres ne s’étirent, provocatrices, devant les certitudes que Seqenenrë se plaisait soudain à lui asséner, usant des mots comme tout autant de gifles qu’elle aurait pu lui infliger.

Imperceptiblement, sa respiration s’accéléra, et le feu dévora ses entrailles ; son corps, son véritable corps et non cette marionnette de chair imparfaite, se préparait instinctivement au combat. Mais il était dans l’impossibilité de s’y laisser aller, il le savait. Ravalant alors sa fierté – il ne pouvait se permettre de s’engager dans une bataille à l’issue par trop incertaine alors que son Lié gisait là, à leurs pieds, sans protection – le dragon ne répondit rien, se forçant à garder son calme. Elle condamnait sans savoir, sans connaître, ni lui, ni les épreuves que Marek avait traversé. Ils n’étaient pas venus ici pour se soumettre à une parodie de procès, et lui-même n’avait pas besoin d’une dragonne sans attache pour juger de sa propre culpabilité dans l’affaire. Fille d’Incarnate était-elle en effet ... Il pouvait humer autour d’elle les effluves entêtantes et familières mêlant le soufre et la cendre de ses aïeules.

Les lèvres obstinément closes, il ne détourna pas le regard mais cessa néanmoins de combattre l’emprise de la Noire. S’il lui prenait l’envie de le frapper, il ne résisterait pas non plus. Qu’elle passe sa rage sur lui si elle le souhaitait. Plus vite il pourrait éloigner son frère d’âme de la sphère d’influence du miroir Valheru, mieux ce serait.

Il suffit finalement d’un mot, d'un nom prononcé fermement mais calmement pour que la dragonne ne se détourne pour rejoindre Sraoshaï, au prix toutefois d’un visible effort. Sans attendre, Asaleith leur tourna le dos, venant se saisir du corps de son Lié, un soulagement démesuré irradiant en lui en faisant le constat de sa poitrine qui se soulevait et s’abaissait lentement. Les pauvres explications – pour ne pas dire justifications – de l’Elfe glissèrent sur lui sans le toucher, et il haussa vaguement les épaules. Rien de ce qu’elle pourrait dire n’avait d’importance. Il serait prématuré pour lui de pour crier victoire et il n’avait aucune envie d’en débattre de tout ceci avec elles. Pas tant que Marek ne se serait pas rétablit, et à nouveau en pleine possession de ses moyens.

Raffermissant sa prise pour laisser reposer la tête de l’Ondin tout contre lui, il fit face aux deux femelles, les dévisageant un bref instant avant de prendre la parole d’un ton où résonnait une politesse contrainte.

« Cette épreuve étant de toute évidence terminée, me permettez-vous de ramener mon frère aux appartements qui lui ont été alloués ? A moins que vous ne souhaitiez que nous quittions le Màr Litsë immédiatement. »

La mélodie de son âme chantant en sourdine son angoisse en contrepoint de ses mots, il ne parvenait pas à trancher pour savoir ce qui serait préférable pour eux. Le Brun avait encore néanmoins la sagesse nécessaire pour reconnaître qu’il ne valait mieux pas refuser l’invitation de Seqenenrë et de sa Liée : aussi se contenta-t-il d’incliner la tête en signe d’acquiescement lorsqu’elle lui énonça qu’ils parleraient à son réveil. Soit. En attendant que ce moment soit venu, il ne quitterait pas d’un pouce son chevet.

***

Protégés de la morsure impitoyable du soleil par les épais murs de pierre, au sein de l’alcôve, les heures, puis les jours se succédèrent lentement, sans que rien ne vienne troubler leur tranquillité. Fidèles à leur parole, ni Sraoshaï ni Seqenenrë ne tentèrent la moindre approche, laissant Asaleith seul pour veiller sur son Lié endormi. Alternant entre sa forme draconique et sa forme bipède, sans jamais s’éloigner de lui plus de quelques minutes d’affilée, le Brun s’efforçait régulièrement de faire absorber à Marek de maigres cuillères de bouillon. Son état était stable, mais pour autant rien ne semblait venir indiquer qu’il se réveillerait un jour. L’Ondin restait désespérément plongé dans un sommeil de plomb, aussi impassible qu’une statue de pierre, sans qu’aucun rêve ne vienne jamais l’agiter.

A l’aube du troisième jour, le dragon se sentit sombrer lentement dans le désespoir. Son impatience s’était transformée en un douloureux sentiment d’injustice. Marek était bel et bien vivant, certes, mais aucune réaction, aucun frémissement, ne parcourait tant son corps que son esprit lorsqu’il le touchait. Alors, résigné, une fois n'est pas coutume, Asaleith se mit à prier, élevant ses pensées à l’attention de la Mère des Dragons, Flarmya, pour qu’elle daigne se pencher sur le sort de son humble serviteur. C’était une demande égoïste, il en avait bien conscience, mais son Ondin ne l’avait-il pas mérité, n’avait-il pas suffisamment payé de son sang et de sa vie pour cela ? Pour une fois dans cette existence, au moins, la justice divine ne pouvait-elle pas s’exercer ?

Aurait-il été l’un de ces fragiles bipèdes qu’il en aurait certainement pleuré. Son frère d’âme lui apparaissait si proche, et pourtant si inaccessible, comme si un monde entier les séparait. Jamais encore n’avait-il ressentit ce vide, cette sensation de manque viscéral. Que pouvait-il faire contre les blessures de l’esprit ? Rien, absolument rien. Jamais encore n’avait-il craint ainsi pour la vie de son Lié, se sachant là pour le protéger envers et contre tout. Quitter le Màr Tàralöm avait-il été bel et bien une grave erreur pour eux, pour lui ? Aurait-il du tenter de le dissuader une fois de plus ?

Pris dans les rets étouffants de son auto-apitoiement, le Brun ne remarqua pas immédiatement le faible mouvement, à peine plus qu’un frisson, qui agitait les paupières de Marek. Son âme effleura la sienne, cherchant faiblement à s’y agripper, et le dragon se redressa brusquement, tous ses sens en éveil. C’était … Comme si son Ondin devait lutter, de toutes ses forces, pour s’extraire des profondes abysses dans lesquelles il avait sombré.
D’un même mouvement, Asaleith se transforma et réduisit la distance qui les séparait en quelques grandes enjambées. S’ouvrant tout entier à leur Lien pour le tirer vers lui, il le saisit par les épaules, répétant, encore et encore, inlassablement son nom. Sans se presser, une à une, les secondes s’écoulèrent, paresseuses, jusqu’à ce qu’enfin, deux iris à l’océan encore trouble, ne finissent par se poser sur lui.

« Leith … J’ai l’impression de sortir d’un cauchemar interminable. » Le son de sa voix, encore faible, s’éteignit doucement lorsque son regard s’accommoda sur l’environnement inhabituel qui les entouraient. « Où sommes-nous ? »

Les sourcils toujours froncés, le Brun poussa un profond soupir, ne réalisant que difficilement que ses prières avaient miraculeusement été exaucées.

« Au Màr Litsë. Tu ne te souviens pas ? Tindhëlnyûr, les visions … Ce maudit miroir. J’ai bien cru t’avoir perdu. »

Un sourire fatigué lui répondit, tandis que Marek tentait de se redresser, les paupières papillonnant non sans un certain égarement autour de lui. Il y avait … Quelque chose d’étrange en lui, quelque chose de différent, comme à la suite d’une longue maladie. Un poids, dont il n’avait jamais réalisé l’importance, qui avait disparu … Qui lui avait été comme … ôté.

« Ah ... Oui. Enfin, non. Je ne suis pas sûr. »

Au fond de lui un souvenir s’agitait, nauséeux. Il ne se sentait pas la force de l’affronter, pas maintenant. Pour le moment, il voulait juste se réjouir d’avoir traversé cette épreuve qui lui avait été imposée, d’avoir pu affronter ses démons en les regardant droit dans les yeux.

« Mais c’est une bonne chose que je sois encore en vie, dans le cas contraire j’aurais été le triste responsable de la destruction de trésors inestimables. »

Roulant des yeux, sans toutefois pouvoir réprimer l’étincelle de joie qui y pétillait, le dragon ajusta les coussins dans le dos de son Ondin, et fit volte-face juste à temps pour voir s’avancer dans la chambre, la gardienne accompagnée de sa Liée. L’énoncé de son nom véritable poussa Asaleith à se tendre, sur le qui-vive et prêt à se battre une fois encore s’il le fallait, mais Marek leva une main apaisante à son égard et le Brun se contenta de croiser les bras sur sa poitrine musculeuse, lèvres pincées.

« Paix. Écoutons ce qu’elles ont à nous dire. »

Puis, à l’adresse de Sraoshaï :

« Bonjour à vous également, gardienne. Dois-je supposer avoir réussi à prouver ma valeur ? »


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